La science politique
Les gouvernements ont aujourd'hui à prendre des décisions importantes dans de nombreux domaines économiques, stratégiques, sociétaux. Les dossiers doivent être correctement instruits et les propositions de lois argumentées, défendues en fonction d'informations fiables émanant de sources indépendantes et non pas en provenance de groupes de pression occultes (lobbyistes). L'exécutif a-t-il les moyens intellectuels de prendre la mesure des problèmes ?
Prenons quelques exemples :
Domaine de l'énergie :
Faut-il continuer d'investir dans le nucléaire ou abandonner la filière ? Dans l'affirmative faut-il privilégier les centrales de nouvelle génération, les EPR ou les usines classiques ? Doit-on favoriser le développement et la multiplication des petites unités au dépend des grandes centrales ? Comment évaluer les coûts, et les risques ? Quels sont les risques réels pour l'environnement ? Bref toutes ces questions sont importantes et pour y répondre il faut des connaissances, principalement en physique nucléaire qu'aucun dirigeant n'a. Alors les politiciens s'entourent de 'conseillers'. Mais qui sont ces 'conseillers' ? En général seulement des lobbyistes des hommes de paille des grandes sociétés (AREVA, etc.). ils conseillent donc les politiciens dans le sens de leur intérêt propre qui se confond avec l'intérêt des groupes qu'ils représentent. En aucun cas l'intérêt du pays, de la nation, voire de l'humanité n'est pris en compte.
Domaine de l'informatique :
Le développement foudroyant de la micro-informatique et des réseaux, induit des changements sociétaux. On assiste à l'émergence de nouveaux comportements, de nouveaux modes de communication et d’information, d'étude et de travail. Toute l'économie en est affectée. Le e-business est florissant et cela a des incidences fiscales (taxation des profits du e-business), mais aussi dans le domaine de l'emploi (télétravail). Il y a également de nombreux problèmes de sécurité dans le domaine bancaire ou même militaire, les hackers, craquent tous les systèmes. Comment se protéger ? Faut-il favoriser les solutions open-source ? Quel est l'intérêt d'un OS national ? Faut-il limiter, filtrer les accès internet ? Comment lutter contre la propagation des idées subversives ? Faut-il contrôler les réseaux sociaux et comment le faire en pratique ? Quelle attitude avoir pour défendre la propriété artistique ou intellectuelle ? Comment lutter contre les téléchargements illicites ? Les questions sont nombreuses, mais dans tous les cas les aspects technologiques sont à prendre en compte car une loi doit-être applicable. On voit dans ce domaine des textes absurdes ne pouvant être mis en application car rédigés par des amateurs n'ayant aucune conscience des difficultés techniques.
Domaine de la biologie :
Nous avons tous en tête les débats sur l'utilisation des OGM dans l'alimentation humaine et animale. Cela pose de nombreuses questions. Le danger existe-t-il vraiment ? Quel est le risque de pollution de l'environnement par les cultures OGM ? Peut-on pratiquement confiner ces cultures ? A-t-on le droit de 'breveter' des semences ? Peut-on s'approprier le vivant ? On constate que les gens réagissent en fonction de préjugés. Les écolos sont a priori contre tout ce qui est modification génétique sans pouvoir justifier scientifiquement leur position. Il y a parfois des contradictions. On peut développer des espèces génétiquement résistantes à certaines maladies, leur abandon nécessitant l'emploi de pesticides. Quel choix faut-il faire ? On voit qu'il s'agit de choix difficiles, techniques, ne pouvant être faits que par des spécialistes. Comme dans le cas de l'énergie nous voyons que les conseillers des politiciens sont des lobbyistes et qu'ils ne font que servir les intérêts de grands groupes industriels (Monsanto, Bayer, Sanofi-Aventis).
Domaine de la bio-éthique et de la médecine :
La science médicale a fait des progrès importants dans la procréation médicalement assistée. Les pays légifèrent dans ce domaine au coup par coup au cas par cas, et sans réelle unité ni cohérence, ce qui fait que les lois peuvent être tournées facilement, comme elles l'étaient par le passé pour l'avortement. Là encore il faut pour pouvoir prendre des décisions, avoir des connaissances techniques sur les procédures, car la dimension morale n'est pas la seule à prendre en compte. Nos élus, nos représentants ont-ils les informations qui leur permettront de décider dans l'intérêt des populations ?
Conquête spatiale :
Faut-il développer les vols habités ou au contraire privilégier l'envoi de robots. Doit on poursuivre l'exploration lunaire, doit-on coloniser notre satellite ? Quel est l'intérêt des stations orbitales ? Comment former les cosmonautes ? Le voyage sur Mars présente-t-il un intérêt quelconque ? Quel est le risque de la pollution spatiale ?
Domaine militaire :
Faut-il poursuivre le développement de la force de dissuasion ? Faut-il privilégier les armes stratégiques au dépend des armes tactiques ? Faut-il multiplier les sous-marins ? Cette forme a-t-elle un intérêt quelconque dans le cas de la lutte contre le terrorisme ? Quel danger nous font courir les alliances ?
Cette liste des exemples n'est nullement exhaustive. La recherche théorique avance et sa mise en application par l'industrie est souvent un choix politique. Encore faut-il que les décideurs aient les éléments pour prendre les décisions, donc qu'on trouve dans leurs rangs des spécialistes, des personnes éclairées.
Nous examinons maintenant quelles sont les compétences de l'exécutif sur les bases des informations fournies par Wikipédia concernant la composition du dernier cabinet ministériel :
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Manuel Valls , premier ministre : Licence d'histoire Panthéon Sorbonne
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Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères : Licence Allemand Capes
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Ségolène Royal, ministre de écologie : licence Science économique-Diplôme Sciences Po – ENA
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Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation : Licence droit université Picardie – Echec ENA
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Michel Sapin ministre des finances : Licence d'histoire-DEA Géographie Sciences Po – ENA
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Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales : ENS Agrégée Sciences Economiques et Sociales – Sciences Po
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Jean-Yves Le Drian , ministre de la défense : Agrégé Histoire
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Myriam El Khomry, ministre du travail : DESS droit public
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Jean-Michel Baylet , ministre de l'aménagement du territoire : Etudes de droit à l'Université de Toulouse (diplôme non précisé)
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Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur : Etudes à l'Institut d'Etudes Politiques de Bordeaux, diplôme non précisé
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Jean-Jacques Urvoas , garde des sceaux : Droit public (niveau non précisé)-Sciences Po-DESS communication politique et sociale.
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Emmanuel Macron , ministre de l'économie : DEA philosophie Institut d'Etudes politiques Paris,ENA
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Emmanuelle Cosse, ministre du logement : DEA droit public en économie.
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Annick Girardin, ministre de la fonction publique : Aucun niveau ni diplôme précisé ?
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Audrey Azoulay , ministre de la culture : Maîtrise de science de gestion (Dauphine)-Maîtrise en administration des Affaires (Lancaster)
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Patrick Kanner , ministre de la ville : Études en droit public – niveau non précisé
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George Pau-Langevin, ministre de l'outre-mer : Maîtrise de Lettres modernes-DES droit privé
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Stéphane Le Foll , ministre de l'agriculture : Maîtrise et DEA d'économie – Diplômé du CNAM
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Laurence Rossignol , ministre de la famille : DEA de droit
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M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement : Docteur en médecine, DESS économie de la santé
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Mme Ericka Bareigts, secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité réelle : Maîtrise droit des affaires, DESS droit des affaires.
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M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’Etat et de la simplification ;Maîtrise économie et droit bancaire.
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Mme Juliette Méadel, secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargée de l’aide aux victimes : Institut Etudes Politiques de paris, DEA philosophie
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M. Harlem Désir, secrétaire d’Etat auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes : Licence de Philosophie
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M. Matthias Fekl, secrétaire d’Etat auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger : IEP Paris, ENA maîtrise allemand, maîtrise de philosophie.
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M. André Vallini, secrétaire d’Etat auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du développement et de la francophonie : IEP Grenoble droit (diplôme non précisé)
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M. Alain Vidalies, secrétaire d’Etat auprès de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche : Études de droit (niveau non précisé).
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Mme Barbara Pompili, secrétaire d’Etat auprès de la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité : IEP Lille
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M. Thierry Mandon, secrétaire d’Etat auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche : Licence droit et sociologie IEP Paris
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M. Christian Eckert, secrétaire d’Etat auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget : ENS Saint-Cloud agrégation de mathématiques
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Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion : Docteur en médecine.
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Mme Pascale Boistard, secrétaire d’Etat auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l’autonomie : DEA Sciences politiques.
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M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire : Instituteur
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Mme Clotilde Valter, secrétaire d’Etat auprès de la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage : Sciences Po ENA
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Mme Estelle Grelier, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales : IEP Grenoble, DESS relations franco-allemandes et institutions européennes.
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Mme Martine Pinville, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire : Capacité en droit
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Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique : Diplôme de Sciences Po.
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Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d’Etat auprès du ministre de ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la ville : Maîtrise de mécanique, Doctorat de mécanique à Polytechnique.
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M. Thierry Braillard, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports : Maîtrise de droit, IEP de Lyon.
Récapitulons :
- Formation en droit : 14/39 soit : 36 %
- Formation Études Politiques : 15/39 soit : 38 %
- Formation administration ENA : 5/39 soit : 13 %
- Formation histoire-géographie : 3/39 soit : 08 %
- Formation philosophie : 4/39 soit : 10 %
- Formation économique : 4/39 soit : 10 %
- Formation gestion affaires, business : 1/39 soit : 03 %
- Formation médicale :2/39 soit : 05 %
- Formation scientifique (maths, méca) : 2/39 soit : 05 %
- Formation sciences (physique) :0/39 soit : 00 %
- Formation sciences (chimie) : 0/39 soit : 00 %
- Formation sciences (biologie) : 0/39 soit : 00 %
- Formation sciences (informatique) :0/39 soit : 00 %
Aujourd'hui on désigne par 'science' à peu près tout ce qui s'enseigne à l'université. Mais il y a des distinctions, si vous préférez une sorte de hiérarchie.
Les sciences fondamentales (maths, physique, chimie, biologie, géologie, médecine, etc.), et les sciences humaines (histoire-géographie, science sociale, science économique, science politique).
A côté des sciences il y a les techniques qui sont en quelque sorte les applications des résultats théoriques des disciplines scientifiques. La frontière est parfois floue ; l'informatique est-elle une science à part entière ou une simple technique application des mathématiques et de la branche électronique de la physique ?
Pour ce qui me concerne (c'est donc là un point de vue personnel) je refuse la qualité de véritable science à des domaines comme l'économie ou la politique. Certes l'un et l'autre de ces domaines développent des jargons spécialisés et décrivent des phénomènes, mais quant à leurs prétendues lois je n'en ai jamais vu une seule qui ait un domaine d'application défini et une véritable valeur prédictive. Certes, on peut établir une relation entre la croissance et le chômage, entre les taux directeurs et le niveau de l'épargne, mais ne s'agit-il pas d'évidences qu'un enfant pourrait comprendre ? Cela n'a rien à voir avec la relativité restreinte ou le nombre d'Avogadro ou la table de Mendeleev. Ces disciplines ne pourront jamais être des sciences à part entière car il faut intégrer la psychologie humaine des individus et des groupes qui n'est pas quantifiable. Les phénomènes trouvent donc des explications presque toujours après-coup. Or gouverner c'est prévoir, ce n'est pas constater.
Revenons donc à l'étude des compétences de l'exécutif actuel. On constate que la grande majorité des nommés (environ 40%) possède une qualification dans les domaines du droit et de la politique (capacités, licences, maîtrises, DEA, DESS de droit et IEP). Ces compétences sont-elles utiles pour traiter des problèmes exposés ici ? A l'évidence, non !
Les sciences humaines, histoire, géographie, philosophie sont assez bien représentées avec 28 % de l'effectif, mais la même remarque vaut.
Qu'en est-il maintenant des sciences 'dures' (maths, physique, chimie, médecine, etc.) ? Elles rassemblent tout au plus 10 % des effectifs sans aucun physicien, aucun chimiste, aucun biologiste, aucun informaticien….
Qu'est-ce que cela signifie en pratique ? Que ces gens prennent des décisions, élaborent des textes de lois sur des sujets qu'ils ne comprennent même pas. Au lieu d'instaurer des quotas stupides pour la représentation des femmes ou des minorités ethniques ne conviendrait-il pas mieux que ces quotas concernent les compétences ?
Si on se penche sur la composition de l'Assemblée (Chambre des députés + sénat + CESE) on verra qu'on peut faire la même constatation. Bref à une époque où la science progresse à pas de géant nous sommes gouvernés par des ignorants.
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