Le chenil et les aboiements : n’ayez pas peur
La comparaison canine pourrait passer pour infamante. La paternité en revient à S. S. le Pape François qui évoquait « une OTAN qui aboie au portail de la Russie1 ». Les chiens regretteront sans doute d’être stipendiés par cette comparaison, eux qui ne sont qu’amour, loyauté et dévotion pour leurs maîtres. Tout confus, discordant et désordonné qu´il soit, le discours de la meute de dirigeants européens relève trop souvent de l´aboiement agressif et belliciste. Ne nous laissons pas leurrer par ces incitations martiales.
Le poids du passé
Les réflexes hérités de la guerre froide ont la vie dure. Oui, l’URSS a été un empire. Oui, l’idéologie qui a servi de moteur à la constitution de cet empire est intrinsèquement criminelle, génocidaire, nocive, immorale. Oui, l’unique héritière de l’énorme arsenal nucléaire de cet empire est la Russie. Mais établir une égalité Russie = URSS est faux et inepte. Regardons la liste des dirigeants de fait de l’URSS via le Parti Communiste : Lénine, Russe, 1917-1924, sept ans ; Staline, Géorgien, 1924-1953, 29 ans ; Kroutchev, Russe, 1953-1964, 11 ans ; Brejnev, Ukrainien, 1964-1982, 18 ans, Andropov, Grec, Finlandais, Juif ou Russe ? Sans doute indécidable, 1 an ; Tchernenko, Russe (Sibérien), 1984-1985, 1 an ; Gorbatchev, Russe, 1985-1991, 6 ans. Soit 26 ans par des Russes, avec le bénéfice du doute, et 47 ans par des non-Russes. Bien sûr, il y a eu aussi, avant l’URSS, un impérialisme de l’empire russe. La Pologne s’en souvient douloureusement, la Finlande aussi, liste non exhaustive. Un antagonisme doit-il persister sans fin de génération en génération, comme s’il n’existait aucun droit d’inventaire sur un héritage constitué de haines ? Il faut programmer l’obsolescence de ces haines sur une période courte !
Qui est l'Empire ?
D’abord, qu’est-ce qu’un empire ? Un groupe de nations dirigées par l’une d’entre elles, de force plus souvent que de gré, nonobstant l’aspiration des peuples à disposer d’eux-mêmes. Les empires existent depuis que l’homme a usé de la force pour asservir la tribu d’à-côté. Il convient aussi de dire que les empires ont dans leur ADN de croître, et que cette croissance n’étant pas infinie, ils en meurent d’obésité. Ce fut le cas du Pacte de Varsovie.
Regardons les modifications de la liste des États qui constituent l’Union Européenne depuis 1990. Autriche, Finlande, Suède en 1995, trois membres de plus ; Slovaquie, Chypre, Malte, Pologne, Lituanie, Tchéquie, Lettonie, Hongrie, Estonie, Slovénie en 2004, 10 membres de plus ; Bulgarie, Roumanie en 2007, deux membres de plus ; Croatie en 2013, un membre de plus ; retrait du Royaume-Uni en 2020, un membre de moins. Soit 15 États souverains nets phagocytés par ce machin.
Faisons le même exercice avec l’OTAN : En 1999, trois nouveaux signataires : la Tchéquie, la Hongrie et la Pologne ; En 2004, sept nouveaux membres : Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Roumanie, Slovaquie et Slovénie ; En 2009, deux nouveaux membres, l’Albanie et la Croatie ; en 2017, un de plus avec le Monténégro ; en 2020, encore un avec la Macédoine du Nord ; en 2023, la Finlande ; et en 2024, la Suède. Soit 16 nouveaux membres, en plus de la réunification de l’Allemagne.
Prétendre que ce ne sont pas des annexions, qu’il ne s’agit que d’alliances, outrage la vérité. La solidarité prévue par l’OTAN interdit toute autonomie diplomatique, stratégique et militaire quant à la désignation de l’ennemi. C’est une considérable perte de souveraineté. L’existence au sein de l’UE d’une monnaie commune (pas unique, il y a des récalcitrants), l’imposition de traités comme celui du Mercosur ou de directives menaçant la liberté d’expression montrent sa nature autoritaire et que la souveraineté des États membres est une variable d’ajustement.
Où est l’empire qui s’étend sinon chez nous, en Occident ?
Tension du droit international
Deux principes de droit international s'opposent. Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et l'intangibilité des frontières. Bien sûr, des frontières stables sont souhaitables et c'est encore mieux quand elles sont reconnues de tous. De ce point de vue, il est des frontières plus contestables que d'autres. Une chaîne de montagnes, un fleuve, c'est concret, ça parle et finalement, ça clos assez rapidement la discussion.
L'histoire ne s'y trompe pas : l'existence de l'Ukraine est très récente. Lorsque l’URSS a dessiné ses frontières d'avant le conflit, il est peu probable qu'elle ait procédé à des référendums d’autodétermination pour demander à la population présente sur un territoire quelle identité nationale elle souhaitait se reconnaitre. Est-il trop tard pour bien faire ?
L’intérêt et la morale
Si les États n’ont que des intérêts, il faut aussi souligner qu’ils devraient s’astreindre à un minimum de morale. Quand des vies humaines sont en jeu, négocier est un préalable, mais un degré minimal de confiance est nécessaire pour qu’une négociation soit fructueuse. C’est aussi simple que de dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit.
En 1990 et 1991, les USA et leurs alliés britanniques, germaniques et français s’étaient engagés à ne pas étendre l’OTAN vers l’est au-delà de l’Allemagne2, lors de la réunification et comme contrepartie à l’autorisation donnée et au retrait des troupes soviétiques qui y étaient stationnées. Disons le tout net, 16 nouveaux membres en violation de cet engagement, c’est une félonie.
L’Euromaïdan est un coup d’état fomenté et financé par les Américains (les basses œuvres de Victoria Nuland) avec des minoritaires ukrainiens hostiles à toute coopération avec la Russie et qui ont été portés au pouvoir3. Encore une félonie. S’en est suivie une persécution des russophones/russophiles qui a bien évidemment dégénéré en guerre civile dans le Donbass, puis en lutte séparatiste. Le non-respect des accords de Minsk et les aveux d’Angela Merkel4 et de François Hollande5 comme quoi ces accords étaient une façon de gagner du temps et de permettre à l’Ukraine de s’armer sont eux aussi constitutifs d’une félonie.
Enfin, le travail de sape de Boris Johnson et de tous ses mandants pour éviter qu’une paix rapide soit conclue après le déclenchement de l’opération spéciale/l’invasion par la Russie, avec la promesse faite à l’Ukraine (non tenue) que les moyens nécessaires pour battre la Russie lui seraient fournis, est une autre félonie. Cette paix aurait permis d’économiser de nombreuses vies humaines.
Certes, la Russie a dès 2014 annexé la Crimée, historiquement et ethniquement Russe et Tatare. Certes, elle est entrée en 2022 dans une province séparatiste de l’Ukraine à l’appel d’un gouvernement qui lui avait demandé son soutien et elle a envahi de facto le territoire ukrainien. Mais après 8 ans d’attente et un ultimatum rejeté.
Ces quelques félonies sont constitutives d’un casus belli pour la Russie. Faut-il l’en blâmer après tant de félonies ?
La consistance de la menace
Que l’Occident l’admette ou non, nous sommes déjà des cobelligérants avec le soutien fourni à l’Ukraine. La Russie, à ce jour, n’en tire pas toutes les conséquences et fait tout pour éviter l’escalade que serait un affrontement direct entre des pays dotés. L’Occident nie, mais le narratif qui alimente les médias corrompus est contredit par les faits : l’Ukraine a tenu grâce au soutien actif de l’OTAN. Mais elle a perdu, et l’Occident avec. Pire : l’Occident amputé des USA n’a pas plus les moyens d’entrer dans ce conflit directement que l’Ukraine n’en dispose de le poursuivre seule avec la moindre chance de succès. C‘est l’effet Orechnik. Faute d’une industrie conventionnelle correctement dimensionnée, une guerre classique serait perdue. Toutes les guerres nucléaires sont perdues par tous. Vae victis.
L’intérêt de la Russie est-il d’envahir l’Europe ? Cette idée ne résiste pas à l’analyse objective. La démographie russe est très insuffisante, et les dirigeants en sont conscients : les combats en Ukraine sont menés surtout par l’artillerie pour économiser autant que possible la vie des fantassins. Son économie a été réorientée vers les BRICS et ne souffre guère des sanctions dont les Européens seuls paient le prix. (C’est en outre une curieuse façon de faire la guerre que de se priver de la prospérité indispensable pour la financer !). La Russie de demain sera confrontée en interne à un défi d’hétérogénéité ethnique, religieuse et culturelle avec des territoires et populations slaves et orthodoxes à la démographie déclinante d’une part, et asiatiques et musulmanes d’autre part, pour simplifier très grossièrement. Une fuite en avant pour constituer un « empire » encore plus grand serait une option dont les risques probables dépasseraient très largement les bénéfices putatifs. Qui peut imaginer un instant que les dirigeants russes l’ignorent ?
La Realpolitik
Une Realpolitik commencerait par chercher à répondre honnêtement et sans a priori à la question suivante : qui menace la nation française ? Pas l’Europe ou l’Occident, la France. En temps de crise, il faut consacrer ses efforts à d’abord sauver sa famille, puis ses voisins, après sa cité et son pays avant de regarder le reste du monde, c’est le principe de subsidiarité si souvent et si stupidement passé à la trappe. En regardant autour de nous, il est possible de distinguer une espèce de coalition avec trois ennemis distincts.
Il y a d’abord l’Oumma hégémonique. L’Oumma, c’est la communauté des musulmans qui transcende toutes ethnies, les schismes et sectes, les nationalités et autres discriminants. Même si – Dieu merci – tous les musulmans ne sont pas enclins à convertir ou soumettre tous les dhimmis de gré ou à défaut de force, c’est tout de même dans l’ADN de l’Islam générique. Un constat doit s’imposer : une large partie de la communauté musulmane exogène n’est pas fongible dans le peuple de France. Ces musulmans doivent être considérés ici comme des ennemis de l’intérieur et traités comme tel, et pour ceux qui vivent ailleurs, être très strictement confinés dans leurs pays qui sont libres d’instaurer la Charia comme loi suffisante. Et tant pis si nos relations avec ces pays sont réduites au minimum.
Il y a aussi, moins perceptible, l’oligarchie libérale mondialiste, relativiste et transhumaniste et ses avatars locaux, ainsi que toutes les structures de pouvoir qu’elle a bâties. Il s’agit plus d’une nébuleuse d’intérêts significativement convergents où se retrouvent de très grandes entreprises, les véhicules financiers qui les détiennent ou les gèrent, les institutions généralement dévoyées et corrompues, nationales ou non, et les dirigeants politiques, médiatiques et économiques qui y règnent en maîtres. Ce n’est pas un complot organisé, les objectifs des acteurs divergent parfois, mais le World Economic Forum incarne assez bien qui ils sont et ce qu’ils veulent. C’est un ennemi pour qui les frontières ont déjà été abolies.
Enfin, d’autres adversaires sont l’hédonisme et l’ethno-masochisme occidental. Un peuple drogué à la dette pour assouvir ses pulsions matérialistes et à la repentance vis à vis de son passé est son propre ennemi.
Bien sûr, ces identifications sont subjectives, mais un autre ennemi serait-il oublié ? Y voyez-vous la Russie ?
L’agenda caché ?
Alors quid de cette agitation de nos dirigeants politiques si prompts à désigner un ennemi en la Russie ? Ils se savent menacés, parce que les mensonges qu’ils ont promus apparaissent évidents à une part de plus en plus significative de la population. Ils voulaient faire peur, parce que Machiavel a mis en évidence que « Celui qui contrôle la peur des gens devient le maître de leurs âmes ». Mais c’est eux qui ont peur maintenant. Ils ont trop menti, sans parvenir à cette anesthésie totale des peuples à grand coup de pathos, de jeux, de pain, d’état-nounou qui les sauvera quand ils accepteront de perdre un peu plus de liberté. Même s’il existe encore des accros au booster Covid ARN-m, même si des ignares chevelus sont persuadés que le CO2 est un poison, même si la minute de la haine de Vladimir Poutine fonctionne encore pour de trop nombreux esprits trop perméables à la propagande, la vérité progresse.
Certes, elle a encore du chemin à faire, la vérité. Brandolini a sans doute raison : le coût énergétique de la réfutation d’une information fausse mais communément admise est bien supérieur à l’effort initial pour la faire admettre. Continuons donc sans nous lasser à faire circuler la vérité, ou ce que nous tenons pour tel, en assumant que parfois nous nous tromperons. Et que les anathèmes de « complotiste » que nous recevrons nous laissent indifférents. Les chiens aboient ...
Le contrôle social auquel ils souhaitaient nous soumettre risque de faire long feu. L’élection de Donald Trump, si elle porte ses fruits, dynamitera l’oligarchie incriminée plus haut et révélera ses mensonges. Mais la tentation totalitaire des élites reste constante, et parmi les fruits vénéneux du progrès, il y a cette facilité que les outils numériques procurent à qui veut l’instaurer. La vigilance reste indispensable.
Laissons à Julian Assange la tâche de conclure : « Une des choses que j’ai découvert est que presque chaque guerre qui a débuté au cours des 50 dernières années a été le résultat de mensonges médiatisés. » Ne les laissons pas nous mentir plus longtemps pour une guerre qui ne servirait qu’à leur donner un peu de répit, au prix du sang des peuples.
Illustration : Grok
12 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON