Le dilemme de la rigidité stratégique à Washington
Ces derniers temps, j’ai suivi une série d’analyses et d’études consacrées à l’évolution des relations entre les pays du Conseil de coopération du Golfe et les États-Unis, ainsi qu’à l’avenir de la présence américaine dans la région du Golfe en particulier et au Moyen-Orient en général.
Le plus frappant est peut-être qu’en dépit des identités différentes des analystes et des auteurs, il existe un consensus pour souligner les erreurs stratégiques des administrations américaines successives, qui ont toutes conduit à une détérioration des relations entre Washington et ses alliés du Conseil de coopération du Golfe.
Cela signifie en premier lieu que les erreurs commises à plusieurs reprises par les administrations américaines, qu’elles soient démocrates ou républicaines, n’ont pas été revues et réévaluées à la lumière des changements intervenus dans l’environnement sécuritaire et stratégique régional et international.
Selon moi, les erreurs des États-Unis dans leurs relations avec leurs alliés du Golfe n’ont pas commencé en 2015, lorsque l’administration du président de l’époque, Barack Obama, a ignoré leurs préoccupations concernant la menace posée par l’Iran et a signé un accord nucléaire qui a aidé l’Iran à s’étendre stratégiquement et, plus tard, à menacer les intérêts des États-Unis eux-mêmes.
Les preuves de ce fait abondent, notamment les tirs de missiles iraniens sur les bases américaines en Irak. Mais ces erreurs ont commencé bien plus tôt. A savoir lorsque Washington a reconnu que des organisations terroristes étaient liées à certains pays du CCG en particulier et à la région du Golfe en général.
Les politiciens américains étaient confiants dans le fait que leurs alliés n’avaient joué aucun rôle dans les attentats terroristes du 11 septembre 2001. Par conséquent, Washington aurait dû tendre la main à ses alliés pour lutter contre la menace commune du terrorisme.
Au lieu de cela, il a utilisé ce crime pour faire pression sur ses alliés, qui se sont retrouvés en position d’autodéfense contre quelque chose contre lequel ils avaient eux-mêmes d’abord mis en garde et qu’ils avaient rejeté.
N’oublions pas non plus que les discussions et les controverses sur la participation des États-Unis à des guerres étrangères ne sont apparues qu’après la guerre d’Irak de 2003, où une série d’erreurs américaines ont été commises dans l’après-guerre, au profit de l’influence croissante de l’Iran en Irak.
Il s’en est suivi une série d’événements qui ont signalé une baisse d’intérêt des États-Unis pour la région MENA. À partir de 2011, Washington a alors encouragé les organisations et groupes religieux qui briguaient le pouvoir sous couvert de démocratie et de changement, sans aucune indication réaliste qu’ils défendraient les intérêts des sociétés arabes.
La position des États-Unis s’est ainsi retrouvée dans le collimateur des peuples arabes, qui ont chassé ces organisations plus rapidement que prévu par les milieux politiques et universitaires américains qui s’étaient bercés des illusions du soi-disant « printemps arabe. » Ceux-ci n’ont pas cherché à corriger leurs erreurs ou à reconsidérer leurs positions.
Au lieu de cela, ils ont continué à faire pression sur plusieurs capitales arabes en s’appuyant sur des thèmes tels que les « droits de l’homme » et autres cartes dont chacun sait qu’elles sont des instruments de mise en œuvre de la politique étrangère américaine et non l’expression des valeurs qui la définissent.
Depuis lors, les États-Unis ont réduit leur vision stratégique du Moyen-Orient et de la région du Golfe à deux facteurs : la sécurité d’Israël et la sécurité énergétique et, dans une moindre mesure, les exportations d’armes pures. Le problème ne résidait pas dans ces objectifs, pris individuellement ou dans leur ensemble. C’était la manière dont ils étaient atteints.
La sécurité d’Israël, par exemple, exigeait plus que de prendre et de réaffirmer des engagements pour protéger la sécurité d’un allié plus proche au Moyen-Orient. En d’autres termes, l’instauration de la paix et la stabilisation sont certainement plus utiles à Israël que la simple promesse de le protéger.
Ce n’est pas le rôle que les États-Unis ont joué comme prévu, du moins pas dans la tentative de briser le cycle des solutions traditionnelles et de rechercher des alternatives innovantes pour instaurer la paix et la stabilité.
Washington a ignoré les demandes et les points de vue de ses alliés sur les accords de sécurité régionale et le sentiment croissant de ces alliés que l’Iran représente une menace. Il était donc naturel que les relations de Washington avec ses alliés, y compris Israël lui-même, s’érodent peu à peu, créant un vide stratégique que d’autres puissances internationales ont tenté d’exploiter.
Dans l’organisation de leurs relations internationales en général, ces puissances misent sur la coopération mutuelle et la création de réseaux d’intérêts et d’avantages communs, tout en respectant les spécificités de chaque État et en n’interférant en aucune manière dans ses affaires intérieures et sa souveraineté nationale.
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