Le pavé y’en a marre
On se demandait depuis longtemps à quoi bien pouvaient servir les pavés parisiens.
Je ne parle pas de cette délicieuse préparation boulangère à base de farine, de levain et d'eau que l'on apprécie sous un paté (d'immeubles) ou avec un trou du cru (petit fromage affiné au Marc de Bourgogne).
Mais il est bien question ici du pavé de granit, bien connu des Bonnets Rouges et des armoricains (qui contrairement à leurs cousins d'outre-Atlantique, n'ont que le bonnet et plus la peau, de rouge, ni les os d'ailleurs).
Ce pavé, qui pourrit la vie des motards l'hiver (ça glisse), des cyclistes l'été (ça tremble) et des automobilistes toute l'année (ça fait du bruit et ça couvre France Culture) se voit reprendre vie quand tout le monde fait grise mine.
Il est même accusé de détériorer le compte d'exploitation de la Ville de Paris, à tel point que l'Hidalgo (non, pas Valls, mais sa cousine) laisse les trous béants sur la chaussée dépavée, ne les répare plus, le budget allant en priorité vers les projets indispensables comme les Autolibs (ah non, c'est fini ça, 300M€), les Vélibs (c'est fini aussi, pardon, 30M€) et les Célibs (qui peuvent batifoler sur les quais devenus piétons, par beau temps).
Et bien ce pavé tant décrié, est l'oeuvre d'un génie visionnaire, le roi Philippe Auguste (ne confondez pas avec Edouard Philippe), qui songeait déjà au divertissement du tiers Etat, avec près de 10 siècles d'avance.
En 1185, il décide, aux frais des bourgeois parisiens ulcérés, de paver les axes principaux de la Capitale.
Ils serviront longtemps après, en 1789, lors d'émeutes à Paris, où il fût question de Bastille, de Versailles et de brioches (tient encore une référence boulangère !).
Puis ils reviennent sur le devant de la "Seine" en 1968, où ils servent aux jeunes pour viser les vieux.
Et enfin en 2018, où les jeunes de 68, devenus jaunes, ont réalisé que sous les pavés, n'était pas la plage mais les sables mouvants de la dictature économique et financière mondiale.
Mais revenons à notre héro, notre pavé parisien, qui résume à lui seul toute la République et ses valeurs.
Liberté
Tout un chacun à la possibilité et le loisir de se baisser et de ramasser un petit bloc de granit
Egalité
Vous remarquerez que toutes les artères parisiennes en sont pourvues, de la riche avenue de Friedland, à la populaire rue de Menilmontant. Et le pavé y est gratuit, partout.
Fraternité
Il n'est rien de plus beau que de se retrouver entre amis et de pouvoir lancer des pavés, tous unis dans un même élan d'amitié fraternelle, vers un avenir plus radieux.
Techniquement, c'est l'aboutissement du bio design. Il ressemble à un objet scandinave.
100% minéral, imputrescible, recyclable.
Sa forme est idéale permettant de le ranger, de l'empiler, de le stocker facilement.
Il tient dans une seule main, multipliant par 2 le pouvoir de nuisance
Mais il pèse quand même 2kg, c'est assez pour briser facilement une vitrine ou un pare-brise (c'est là que l'esprit visionnaire de P.A. se mesure, car tout cela n'existait pas encore à l'epoque).
Au 19e siècle, des pavés de bois fûrent testés, mais vous comprendrez qu'ils ne possédaient aucune des caractéristiques et des qualités du pavé minéral sus-mentionnées, donc l'idée fut rapidement abandonnée pour revenir à des solutions épouvées et mieux adaptées.
Qu'il soit sous nos pieds ou sur nos têtes, le pavé occupera toujours une place de choix dans le coeur (de pierre) des parisiens.
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