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Les messages chinois à travers l’accord saoudo-iranien

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Musaed bin Mohammed Al Aiban, ministre d’État, membre du Conseil des ministres et conseiller à la sécurité nationale en Arabie saoudite, et l’amiral Ali Shamkhani, secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale en Iran, pendant quatre jours, du 6 au 10 mars 2023.

L’objectif était d’établir des relations amicales entre les deux nations et, à la surprise générale, il a été annoncé qu’un accord saoudo-iranien avait été conclu pour reprendre les relations diplomatiques dans les deux mois.

Ce qui est encore plus surprenant, c’est que l’accord a été négocié par la Chine. Une déclaration officielle tripartite a été publiée, réunissant les trois parties - l’Arabie saoudite, l’Iran et la Chine. Cette déclaration reflète la volonté de la Chine de faire sentir sa présence dans les relations internationales après la crise ukrainienne. En outre, la Chine vise à consolider les règles, les principes et les fondements de sa politique étrangère, notamment en ce qui concerne la non-ingérence dans les affaires des autres pays et le respect de leur souveraineté.

La diplomatie saoudienne a gagné un avantage stratégique important en ayant la Chine comme médiateur dans cet accord tripartite. La Chine n’est pas un simple médiateur, mais une grande puissance internationale et un membre du Conseil de sécurité des Nations unies. Elle entretient également des relations stratégiques étroites avec l’autre partie, l’Iran, ce qui lui confère une influence considérable.

L’Iran a manifesté son soutien à l’accord par l’annonce du guide suprême Ali Khamenei. Un éminent responsable de la sécurité, cité par Reuters, a expliqué que M. Shamkhani s’était rendu en Chine en tant que représentant du guide suprême, déclarant que «  l’establishment voulait montrer que la plus haute autorité en Iran soutenait cette décision ».

Outre son rôle de médiateur, la Chine a un intérêt stratégique confirmé à réduire les tensions sur les côtes du Golfe. Il ne s’agit pas seulement pour la Chine de montrer ses muscles stratégiques ou de combler le vide laissé par l’influence déclinante des États-Unis. Il s’agit plutôt de la capacité de la Chine à créer de nouvelles alliances stratégiques qui servent ses intérêts actuels et futurs.

L’empreinte chinoise sur l’accord ne s’est pas limitée à accueillir la réunion entre l’Arabie saoudite et l’Iran à Pékin, une décision qui en a surpris plus d’un. Après tout, l’Arabie saoudite est traditionnellement un proche allié des États-Unis et la région est sous l’influence stratégique américaine.

La Chine a joué un rôle central dans l’élaboration de la déclaration tripartite, qui reflète la finesse diplomatique du pays pour faciliter le dialogue entre les parties concernées. La déclaration est conforme aux exigences de sécurité et de stabilité régionales défendues par l’Arabie saoudite et reprises par l’Iran. Cependant, le fait qu’elle émane de Pékin a plus de poids et constitue une plus grande garantie de force. La Chine est confiante dans l’engagement de l’Iran à respecter les principes énoncés dans la déclaration et dans sa capacité à agir en tant que partenaire et garant dans de telles situations.

La déclaration établit un calendrier pour la mise en œuvre des conditions convenues, y compris un engagement à respecter la souveraineté des États et à s’abstenir d’interférer dans leurs affaires intérieures. Elle appelle également à une réunion entre les ministres des affaires étrangères de l’Arabie saoudite et de l’Iran afin de mettre en œuvre les mesures convenues, d’organiser l’échange d’ambassadeurs et d’étudier les moyens de renforcer les relations bilatérales.

La déclaration commune publiée par l’Arabie saoudite et l’Iran à l’issue de leurs récents entretiens comprenait un accord visant à mettre en œuvre l’accord général de coopération signé en 1998. Cet accord couvre divers domaines tels que l’économie, le commerce, l’investissement, la technologie, la science, la culture, les sports et la jeunesse. En outre, la déclaration exprime sa gratitude à l’Irak et à Oman pour avoir accueilli les pourparlers entre les deux parties en 2021-2022.

La formule de la triple déclaration utilisée dans l’accord est différente des contextes occidentaux habituels. Elle a un ton nettement «  chinois », soulignant l’importance du dialogue pour résoudre les problèmes et les crises, et s’engageant à respecter les principes de l’ONU, les lois et les normes internationales. Il s’agit là de caractéristiques et d’expressions fondamentales que l’on retrouve dans la littérature politique chinoise.

Le ministre chinois des affaires étrangères, Wang Yi, a salué l’accord comme «  une victoire pour le dialogue, une victoire pour la paix, une bonne nouvelle majeure à un moment où le monde est en proie à de nombreuses turbulences ». Il a laissé entendre que la Chine cherchait à instaurer la paix et la stabilité alors que d’autres parties internationales contribuaient à déclencher des guerres et des conflits. La Chine souhaite capitaliser sur ce succès en annonçant son désir de jouer un rôle constructif dans le traitement des questions mondiales brûlantes.

Wang Yi a également souligné que «  en tant que médiateur de bonne foi et fiable, la Chine a fidèlement rempli ses devoirs d’hôte ». Il a également souligné que «  le monde ne se limite pas à la question de l’Ukraine ».

Afin de protéger ses intérêts croissants dans les pays du Conseil de coopération du Golfe et en Iran, la Chine a négocié un accord visant à atténuer les tensions chroniques entre les deux parties. Cette initiative de la Chine a été accueillie avec spéculation et doute par les observateurs qui ont suivi les relations de partenariat stratégique entre la Chine et la région du Golfe.

Toutefois, l’accord a désamorcé la crise sous-jacente entre les deux parties et a créé un meilleur environnement pour les projets chinois tels que l’initiative «  la Ceinture et la Route », ainsi que pour l’ambition stratégique de la Chine de s’assurer des ressources énergétiques, étant donné qu’elle obtient 40 % de ses besoins en pétrole auprès de fournisseurs du Moyen-Orient. L’accord souligne également l’influence mondiale croissante de la Chine, en particulier à la suite de la solution qu’elle a proposée à la crise ukrainienne.

Le rôle actif de la Chine dans la gouvernance mondiale et la restructuration des institutions internationales pour les aligner sur ses intérêts stratégiques sont de plus en plus reconnus. La Chine a également démontré sa capacité à trouver des solutions aux crises et aux problèmes internationaux, un domaine dans lequel les efforts occidentaux ont été absents, notamment en ce qui concerne la crise ukrainienne. De plus en plus confiante dans sa capacité à établir l’équilibre nécessaire dans les relations internationales, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, la Chine est en passe de devenir une force d’équilibrage des États-Unis dans la gestion des crises internationales.

Les responsables américains qui prétendent que le récent accord entre Pékin et Riyad ne signifie pas un déclin de l’influence américaine se trompent. La réalité est claire  : l’accord reflète un déclin du rôle américain, non seulement en raison du partenariat croissant entre la Chine et l’Arabie saoudite, mais aussi parce que chaque gain réalisé par ce partenariat se fait au détriment de l’alliance solide entre Riyad et Washington. Bien que cette alliance existe toujours, elle n’est plus aussi solide qu’auparavant et, compte tenu des circonstances actuelles, on ne s’attend pas à ce qu’elle retrouve sa force d’antan dans un avenir prévisible.


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2 réactions à cet article    


  • Com une outre 27 mars 2023 12:34

    Les USA sont en déclin à tout point de vue. Le wokisme qui s’y développe me semble peu compatible avec la religion musulmane et la pensée asiatique. Il n’y a que une minorité d’européens que cela ne dérange pas, mais la majorité subit ce mouvement sans l’approuver. Il n’y a plus de « rêve américain », et c’est l’occasion inespérée de les remettre à leur place, c’est-à-dire un pays parmi d’autres, sans plus.


    • armand 28 mars 2023 11:58

      Cela va surement plaire à Israel

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