« Merde ! »
Depuis le déclenchement de la crise des subprimes et son exacerbation sous la forme d’une crise de la dette publique en Europe, les responsables politiques n’ont plus qu’une idée en tête : faire des « économies » en coupant dans les « dépenses » publiques.
On nous explique doctement que la France serait comme un ménage qui « dépense » davantage que ce qu’il gagne et qui, pour rééquilibrer son budget, devrait naturellement réduire ses « dépenses ».
Cette vulgate libérale d’inspiration anglo-saxonne sert aujourd’hui de socle à tous les débats sur le sujet et n’est remise en cause par personne, à part quelques originaux de l’ultra-gauche dont la crédibilité en matière d’économie reste à démontrer.
Nous sommes donc soumis matin et soir à un concert ininterrompu d’informations venant renforcer ce socle en béton armé, depuis les déclarations des responsables des plus hautes instances internationales, jusqu’aux courbes d’évolution des taux d’intérêts sur les marchés financiers.
Il faut d’ailleurs saluer la cohérence des Anglais qui ont montré l’exemple en s’infligeant à eux-mêmes un plan d’économies à la limite du masochisme.
Et pourtant… N’est-il pas étrange de constater que ce ne sont pas toujours les pays dont la « dépense » publique est la plus élevée qui se sont le plus endettés ? Le Japon (200% du PIB) et les Etats-Unis (100%), qui ont un secteur public famélique et des systèmes sociaux assez frustes sont bien plus endettés que la France (80%). En Europe, c’est également le cas de l’Italie (120% du PIB) et de la Grande Bretagne (90%).
La corrélation entre un secteur public et un système social développés et le niveau de la dette publique est donc rien moins qu’évidente…
Peu importe qu'un chat soit blanc ou noir, s'il attrape la souris, c'est un bon chat (Mao Tsé Toung)
N’est-il donc jamais venu à l’esprit de tous ces brillants économistes que les « dépenses » publiques pouvaient également générer de la croissance et donc du PIB ? Et parfois même de façon excédentaire ? Bien sûr que oui, évidemment… dogmatiques – sans doute, incompétents – sûrement pas.
Or il se trouve que la France par son histoire économique, par sa culture, a une tradition de secteur public fort. Un secteur public qui a souvent été le fer de lance de son développement : le TGV, Ariane, La filière nucléaire, les CHRU (Hôpitaux universitaires), le génie civil … sont des domaines bien connus de l’excellence française.
Pourtant, le secteur public français est mal aimé. Il est mal aimé du secteur privé d’abord, auquel il a longtemps fait de l’ombre. Il est mal aimé des anglo-saxons et de leurs élites économiques ensuite. La France exerce sur eux une sorte de fascination – répulsion qui s’explique par leur difficulté à comprendre un pays qui ; « malgré » les grèves, les 35 heures, les cinq semaines de congés payés et la Sécu, arrive à faire aussi bien - si ce n’est mieux - qu’eux-mêmes qui triment comme des damnés avec des conditions de vie et de travail souvent inférieures.
Mais aujourd’hui les contempteurs du modèle français tiennent enfin leur revanche. La crise a fait poser un genou un terre à la France. Elle qui, « malgré » son modèle social, avait toujours réussi à tenir la dragée haute à ses concurrents, a plié en raison d’une gestion calamiteuse des finances publiques depuis le déclenchement de la crise.
Les allègements fiscaux en faveur des entreprises et des contribuables aisés, consentis durant la période critique qui vient de s’écouler, ont coûté cher aux finances publiques et n’ont pas permis de relancer en proportion la croissance pour compenser ces pertes de revenu. En Europe, la France n’a désormais plus les moyens d’infléchir le cap tracé par l’Allemagne.
Mais, bien pire, la France a perdu son étoile. Elle se met à écouter les « spin doctors » qui lui jurent que son salut réside dans l’abandon de son génie, et la pressent d’accepter le joug libéral de conception anglo-saxonne qui s’apprête à être placé sur sa nuque.
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