Ondes cérébrales & Transhumanisme
On sait transplanter les reins, le cœur, les poumons, le foie, le pancréas, l'intestin, les os, la peau, les valves cardiaques, les veines, les tendons, les ligaments, la cornée. Au-delà des choses mécaniques, peut-on changer les pensées ?
Le cerveau émet des ondes cérébrales que l’on détecte généralement par électroencéphalographie (EEG) en déposant des électrodes placées sur le cuir chevelu et en mesurant l'activité électrique correspondante. Le cerveau, comme tout tissu animal, ne se prête pas à la conduction des électrons (électricité) mais utilise plutôt les mouvements d’ions (sodium, potassium…) ou de molécules chargées (sérotonine, adrénaline…). Une différence de potentiel (voltage) se crée si des ions sont en concentrations différentes de part et d’autre d’une membrane, par exemple phospholipidique, qu’ils ne peuvent pas traverser formant une sorte de condensateur. La différence de potentiel peut se déplacer à la surface de la membrane en favorisant le transport d’ions à travers celle-ci.
Une information est captée par un ou plusieurs des cinq sens (vue, toucher, ouïe, odorat, goût) et est conduit après transformation en un signal ionique jusqu’aux entrées d’une série de neurones. Si la somme des entrées est supérieure à une certaine valeur seuil, un potentiel d’action est engendré qui se propage le long de la fibre nerveuse, ou axone, dont la longueur peut atteindre un mètre. La vitesse de propagation est au maximum de 100m/s. Tous les potentiels d'action ont la même amplitude (+100mV), mais l'influx nerveux est codé en fonction du signal d’entrée en modulant le nombre de signaux par seconde (codage en fréquence). À l’extrémité du neurone, l’influx conduit à la libération d’ions et de molécules contenus dans des vésicules (de 1 000 à 2 000 espèces environ) dans l'espace synaptique qui le sépare du neurone suivant. Les neurotransmetteurs libérés atteignent la membrane de celui-ci par simple diffusion. La concentration en acétylcholine, à titre d’exemple, dans la fente synaptique atteint une concentration de 100 mmol/l en à peu près 10 µs et subsistera 100 µs.
L'électroencéphalographie (EEG) mesure l'activité du cerveau par des électrodes placées sur le cuir chevelu. Le signal électrique induit par l’activité ionique du cerveau est la résultante de la sommation des potentiels post-synaptiques synchrones issus d'un grand nombre de neurones. On distingue divers types d’onde (Delta, Thêta, Alpha, Bêta et Gamma), en fonction du nombre d’oscillations par seconde de ces ondes en hertz (cycle par seconde). Le cerveau humain émet des ondes correspondant à 4 à 45 oscillations par seconde. Les stimuli externes sont transformés en ondes cérébrales. Lorsqu'on voit un chapeau rouge, par exemple, la forme ‘chapeau’ et la couleur ‘rouge’ sont traitées par des aires différentes du cerveau, cependant, il n’y a aucune difficulté à affirmer que le chapeau est rouge. Cette capacité serait dû au fait que les neurones qui traitent d’un même sujet sont synchrones.
À l’aide d’une micropipette, il est possible de mesurer les courants électriques internes à une seule cellule. Des électrodes peuvent également être implantées en profondeur sous la boîte crânienne lors d’une intervention chirurgicale. Comme l'électroencéphalographie de surface, la technique permet de mesurer les variations de potentiel électrique dues à l'activité des neurones mais très localement. Cette technique permet aussi de stimuler électriquement le tissu neuronal.
Depuis une dizaine d'années environ, les neuroscientifiques ont découvert comment reconnaître des mots à partir des signaux cérébraux. Bradley Greger en 2010, est parvenu à isoler les signaux cérébraux correspondant à certains mots du langage tels que ‘oui’, ‘non’ et ‘bonjour’. Une équipe du Karlsruhe Institute of Technology est allée plus loin en parvenant à décoder et restituer des phrases complètes pensées en langage naturel. Ces expériences imposent toutefois l’utilisation d’électrodes intracrâniennes.
Dans le même registre, les ondes cérébrales ont été enregistrées lorsque plusieurs centaines d’images différentes ont été projetées. Un algorithme fut alors éduqué à reconnaître les images (maison, chien, montagne…) en n’ayant à disposition que l’enregistrement cérébral.
Dans une autre expérience, les participants sont invités à lire un texte à voix haute tandis que les signaux correspondants aux ondes cérébrales sont enregistrés. Concomitamment, la forme des ondes acoustiques émises par les locuteurs sont enregistrées, ce qui pourrait permettre à terme de communiquer par la parole à l’aide de la seule pensée. Mais déjà en 2012 des singes chez lesquels on avait implanté des électrodes intracrâniennes, purent par la seule pensée mouvoir un bras robotisé. En 2021, une même interface cerveau-ordinateur fut capable de reconnaître les mouvements effectués lors d’une écriture manuelle par l’examen de l’activité neuronale puis de transcrire l’information sous forme d’un texte en temps réel.
La communication entre le monde mécanique et les pensées est dès maintenant possible grâce à une mesure précise de l’activité cérébrale par des électrodes implantées.
Dès 1954, deux chercheurs J. Olds et P. Milner surent mettre en évidence une méthode d’auto-gratification grâce à l’électricité. On implante des électrodes dans le cerveau d'un rat. En appuyant sur un levier, le rat peut stimuler lui-même la région implantée de son cerveau lui procurant ainsi une sensation de plaisir. Une fois que le rat a découvert comment s'administrer ce ‘bonheur artificiel’, il s'auto-stimule frénétiquement, ne prenant même plus le temps de manger. Un bonheur électriquement commandé qui dispense même de nourrir ses esclaves… Toutefois personne n’a encore décrit cette même expérience chez des Hommes, pourtant il y a tout lieu de croire qu’elle fonctionnerait de la même façon, une même région cervicale ayant été déterminée chez l’Homme. On devra encore se contenter des méthodes de conditionnement plus traditionnelles. Ou alors baser tous ses espoirs sur les manipulations génétiques.
Qu’on ne s’y trompe pas, le transhumanisme, qui prétend améliorer les capacités physiques et mentales de l’Homme, est scientifiquement et techniquement accessible… même s’il est la plupart du temps présenté par des bouffons. Mais le transhumanisme servira plus à domestiquer la multitude qu’à la libérer.
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