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Accueil du site > Tribune Libre > Que cachent les détournements de la vérité historique ?

Que cachent les détournements de la vérité historique ?

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Procès d’une écriture biaisée à partir de deux moments fondateurs : La partie occidentale de Saint-Domingue (1793–1804) et Haïti (1804–1806)

CHAPEAU

Haïti est l’un des rares pays nés d’une révolution radicale contre l’ordre esclavagiste et colonial. Pourtant, l’écriture de son histoire a souvent été capturée, manipulée, ou rendue invisible. Cette dissimulation n’est pas accidentelle. Elle est la manifestation d’un rapport de forces où la vérité historique devient elle-même un champ de bataille. Analyser les années 1793-1806, c’est plonger au cœur de ce conflit entre mémoire insurgée et hégémonie narrative.

La bataille pour le sens n’a jamais cessé. Ce texte s’inscrit dans cette lutte pour rétablir une parole effacée, redonner aux faits leur densité et aux figures de la liberté leur grandeur. Face à l’histoire dominante, il est urgent de réhabiliter l’intelligence des peuples dominés et de leur restituer leur récit.

Revenir sur la période fondatrice d’Haïti, c’est aussi interroger nos propres outils d’analyse, nos manuels, nos traditions intellectuelles. Loin d’un exercice mémoriel, il s’agit d’une démarche politique, critique, et éthique.

RÉSUMÉ EXÉCUTIF

Ce texte analyse les mécanismes de falsification historique à partir du cas haïtien entre 1793 et 1806. Il démontre que l’effacement des figures noires de la révolution, la délégitimation de Toussaint Louverture, et la diabolisation de Dessalines ne sont pas de simples oublis, mais les symptômes d’un projet idéologique profond.

Les outils du mensonge historique incluent la sélection des sources, l’interprétation biaisée des événements, et l’imposition d’un canon intellectuel eurocentré. L’historiographie coloniale a effacé la victoire de Vertières, rabaissé Louverture à un simple stratège, et transformé Dessalines en tyran sanguinaire.

En analysant les deux moments-clés – la révolution de Saint-Domingue et la première souveraineté haïtienne – ce texte réhabilite une mémoire occultée. Il invite à réécrire l’histoire à partir des vaincus, à partir des peuples, et à réarmer la pensée critique haïtienne.

MOTS-CLÉS

Histoire décoloniale, Dessalines, Toussaint Louverture, Vertières, manipulation historique, souveraineté noire, Saint-Domingue, falsification, mémoire, épistémologie du Sud.

INTRODUCTION

L’histoire n’est pas une discipline neutre. Elle est un dispositif de pouvoir, une construction sociale et politique chargée de produire du sens, de fixer des hiérarchies, de légitimer des dominations. Dans ce cadre, l’écriture historique sur Haïti a été soumise à une violente entreprise de déformation et de minoration.

La révolution haïtienne, pourtant l’une des plus importantes de l’histoire mondiale, est reléguée aux marges des récits canoniques. L’indépendance haïtienne n’est pas célébrée comme une conquête humaine universelle, mais stigmatisée comme une anomalie violente. Ce traitement n’est pas anodin : il vise à nier aux peuples noirs leur aptitude à produire de l’histoire.

La présente analyse s’attèle à déplier ces mécanismes. Elle questionne les silences, les détournements, les absences. Elle ouvre une brèche dans le discours dominant pour faire émerger une contre-histoire fondée sur la justice mémorielle, la reconnaissance de l’insoumission, et la puissance d’une parole restituée.

CADRAGE

Deux moments précis cristallisent cette dynamique de détournement historique : la période révolutionnaire (1793–1804) et les premières années de l’indépendance haïtienne (1804–1806). Ces deux séquences condensent à la fois la grandeur d’une utopie noire et les efforts immenses pour l’effacer.

La première, celle de Saint-Domingue en révolte, montre comment une lutte pour la liberté est dépolitisée et décontextualisée dans les récits ultérieurs. L’autonomie des insurgés est niée, leurs stratégies rabaissées à de simples réactions, leurs théorisations ignorées. Une telle amnésie n’est pas fortuite, elle sert une narration coloniale rassurante.

La seconde, celle de l’État néo-haïtien sous Dessalines, constitue une tentative brûlante de décoloniser le pouvoir, la terre, et la mémoire. Or, elle est rapidement étouffée, à la fois par les ennemis de l’extérieur et par les trahisons internes. C’est cette double trahison — externe et interne — que ce texte décortique avec rigueur.

I. 1793–1804 : UNE RÉVOLUTION VOLÉE PAR L’HISTOIRE

  1. La République française et le mensonge universel La Déclaration des droits de l’homme ne franchit jamais vraiment les océans. Lorsque l’abolition de l’esclavage est décrétée en 1794, c’est une ruse tactique, un faux-semblant stratégique pour affaiblir les Espagnols et Britanniques en guerre contre la France. Les Noirs insurgés sont utiles mais jamais légitimes.

L’historiographie française moderne continue d’élever Robespierre au rang de héros tout en ignorant que c’est l’armée noire de Saint-Domingue qui a mis en œuvre, dans le sang et la dignité, les idéaux républicains dont la métropole ne voulait pas. Le paradoxe est cruel : ceux qui ont le plus concrètement appliqué l’idéal révolutionnaire sont ceux que l’on a le plus effacés des livres.

La France a construit son roman national sur une base d’exclusion et de hiérarchisation raciale. Le silence sur Haïti dans les curricula scolaires, dans les musées, dans les débats publics, est l’un des marqueurs les plus forts de cette exclusion volontaire. L’égalité proclamée reste une fiction, un masque narratif utile au maintien de l’ordre ancien.

  1. Louverture, un souverain sans droit à l’histoire Toussaint Louverture, ancien esclave devenu stratège, diplomate et dirigeant, devient la figure centrale de la transition post-esclavagiste. Mais que retient-on de lui ? Un « Bonaparte noir », un général rusé, jamais un théoricien politique. Sa Constitution de 1801 — un acte souverain de rupture — est systématiquement interprétée comme une trahison ou un abus.

Ce traitement s’inscrit dans une stratégie de délégitimation : un Noir ne peut être porteur d’un projet étatique rationnel. Il est esclave ou tyran, jamais fondateur. En cela, l’image de Louverture est toujours emprisonnée dans un cadre mental raciste, même lorsqu’il est loué pour son « génie ».

Cette lecture méconnaît aussi l’ampleur du projet politique louverturien : une société d’hommes libres, une économie régulée par l’État, une diplomatie autonome. L’homme politique est réduit à un pion militaire. Ce rétrécissement est une mutilation intellectuelle volontaire.

  1. Vertières* : l’épopée effacée L’histoire militaire mondiale devrait s’incliner devant la victoire de Vertières. Mais non. Cette bataille de 1803, qui consacre la défaite définitive de l’armée française et marque la fin de l’empire napoléonien dans les Amériques, est ignorée, euphémisée, occultée.

Le colonialisme n’a pas seulement été vaincu sur le terrain : il a survécu dans les récits. Les figures telles que Capois-la-Mort, Maurepas, Marie-Jeanne, ou Sanité Bélair sont gommées, car elles dérangent l’ordre racial narratif établi. Elles sont le rappel trop puissant d’une insubordination victorieuse.

La bataille de Vertières, si elle était pleinement enseignée, remettrait en question la chronologie héroïque européenne. Elle placerait les anciens esclaves comme précurseurs d’une liberté universelle. C’est précisément ce que l’Occident ne veut pas reconnaître.

II. 1804–1806 : DESSALINES, OU LA SOUVERAINETÉ CRUCIFIÉE

  1. Une indépendance tenue pour un crime Le 1er janvier 1804, Jean-Jacques Dessalines proclame l’indépendance d’Haïti. Ce geste est radical, définitif, absolu. Mais dans l’histoire occidentale, il est immédiatement suivi d’un procès moral : Dessalines est le bourreau, le sanguinaire, l’assassin. Le massacre des colons français est sorti de son contexte : celui de la guerre génocidaire menée par la France entre 1802 et 1803.

Robespierre peut organiser la Terreur, mais Dessalines, lui, n’a pas le droit à la violence fondatrice. L’historiographie coloniale a condamné le libérateur, car il n’a pas quémandé sa liberté — il l’a prise. La justice des vaincus est toujours illégitime aux yeux des vainqueurs.

La diabolisation de Dessalines repose aussi sur une peur ancestrale : celle d’une souveraineté noire radicale, intransigeante, indocile. Son image est pervertie pour servir d’épouvantail idéologique, dissuader toute radicalité noire contemporaine.

  1. État noir, projet brisé** La période 1804–1806 est une tentative unique de créer un État post-esclavagiste basé sur la souveraineté, la redistribution agraire et la dignité nationale. Le Code rural, la centralisation administrative, l’interdiction de retour des colons blancs : tout cela faisait de Dessalines un chef d’État visionnaire.

Mais sa rigueur, son refus de compromis avec les élites mulâtres et les puissances étrangères l’ont condamné. Il est assassiné le 17 octobre 1806. Un acte de trahison dont l’histoire haïtienne elle-même a longtemps refusé de porter la honte.

Le rejet du projet dessalinien est moins une fatalité qu’un sabotage orchestré. L’élite haïtienne post-indépendance a préféré la reconnaissance blanche à l’émancipation noire. Ce choix idéologique a structuré toute l’histoire politique haïtienne jusqu’à aujourd’hui.

  1. L’écriture de l’histoire : une arme contre les peuples Dessalines est mort une première fois sous les balles. Il est mort une seconde fois dans les livres. Ceux qui ont survécu à la révolution ont réécrit l’histoire : l’élite mulâtre a imposé ses récits, les intellectuels coloniaux ont fourni les archives, et les manuels scolaires ont effacé la radicalité de la souveraineté noire.

Ce n’est pas une négligence : c’est un projet. La vérité historique est dangereuse quand elle donne aux opprimés les armes du souvenir, la conscience de leur grandeur, la légitimité de leur révolte. C’est pourquoi les manuels scolaires sont devenus les nouvelles prisons de la mémoire.

Aujourd’hui encore, la mémoire de Dessalines dérange***. Il est commémoré, mais rarement étudié. Il est célébré, mais rarement compris. L’histoire officielle préfère les figures dociles aux figures insurgées. Il nous revient de briser cette logique.

CONCLUSION : L’HISTOIRE COMME GUERRE, LA MÉMOIRE COMME ARME Ce qui se joue dans l’écriture de l’histoire d’Haïti entre 1793 et 1806, c’est la possibilité pour un peuple noir d’être sujet de son destin. Le détournement historique n’est pas un simple oubli : c’est une entreprise de domestication mentale.

Reprendre la parole, ressusciter Dessalines, nommer les massacres, honorer Vertières, réhabiliter la Constitution de Louverture, c’est rendre à Haïti son épaisseur politique, sa mémoire insurgée, sa place dans l’histoire universelle — non pas comme exception exotique, mais comme préfiguration d’un monde post-colonial encore à venir.

Il ne s’agit pas seulement de produire une nouvelle histoire. Il s’agit de fonder un nouvel imaginaire. Un imaginaire où les peuples vaincus ne sont plus les spectateurs silencieux du passé, mais les acteurs d’un présent en devenir, porteurs d’une mémoire combattante, radicale et féconde.

 

Notes

* Vertières, dont l'inscription dans le dictionnaire français fut longtemps absente, malgré sa portée historique inégalée, a fini par y entrer notamment grâce à un combat symbolique mené par l'académicien haïtiano-canadien Dany Laferrière. Ce dernier, par son insistance à défendre la place de cette bataille fondatrice dans le récit universel de la liberté, a contribué à son officialisation lexicale. Ainsi, Vertières devient non seulement un nom de lieu, mais un mot chargé de mémoire et de reconnaissance, désormais inscrit dans l’histoire des mots autant que dans celle des peuples.

** Résumé de la Constitution de 1805 d’Haïti

La Constitution de 1805, adoptée le 20 mai de la même année sous l’autorité de l’Empereur Jacques Ier (Jean-Jacques Dessalines), constitue le premier texte fondamental de l’Haïti indépendante. Elle marque une rupture radicale avec l’ordre colonial et esclavagiste et inaugure un projet politique fondé sur la souveraineté noire, la sécurité nationale, et la dignité humaine.

Principaux points du texte :

1-Indépendance absolue et irréversible :-L’article 1 proclame que le territoire d’Haïti est libre, indépendant, et ne pourra jamais être colonie ni dépendance d’aucune puissance étrangère. -Toute tentative de rétablissement du colonialisme est considérée comme acte de guerre.

2-Refus de la domination blanche : -Interdiction formelle aux Blancs (sauf certains naturalisés ou anciens alliés, comme les Polonais) de posséder des biens fonciers ou d’avoir des droits civiques en Haïti. -Objectif : empêcher tout retour d’un ordre racial et esclavagiste.

3-Unité raciale proclamée : -Tous les citoyens haïtiens sont déclarés Noirs, quelles que soient leur couleur de peau ou origine : une manière symbolique d’inverser les logiques de hiérarchisation raciale. -Cet article efface juridiquement les distinctions coloniales entre Noirs, Mulâtres, Métis, etc.

4-Régime impérial : -Haïti devient un Empire, avec Dessalines comme Empereur à vie sous le nom de Jacques Ier, ayant le pouvoir de désigner son successeur. -Le gouvernement repose sur des institutions centralisées.

5-Droits fondamentaux : -Garantie de la liberté individuelle, de la propriété privée, et de la sûreté des citoyens. - Égalité devant la loi, mais sans inclusion du suffrage universel.

6-Organisation militaire et territoriale : -Création d’un appareil militaire puissant pour défendre l’indépendance. - Le territoire est divisé en départements, dirigés par des chefs militaires loyaux à l’Empereur.

Portées symbolique et historique :

La Constitution de 1805 est une réponse radicale aux crimes du colonialisme et de l’esclavage. Elle établit Haïti comme refuge universel pour tous les opprimés, et affirme une rupture irréversible avec l’ordre colonial. Plus qu’un texte juridique, c’est une proclamation politique et philosophique de la dignité des peuples noirs.

***Après l’assassinat de l’Empereur Jacques 1er, l’État Pétion s'installe au sommet du pouvoir en utilisant symboliquement les restes et l'exil mémoriel du Père de la patrie, révélant ainsi une entreprise complexe d'instrumentalisation du bien-être du peuple. Malgré ses déclarations démocratiques, il demeure en harmonie avec une vision d'un monde réservé aux vainqueurs et modelé sur leur quête de contrôle. En adoptant un discours contradictoire avec les pratiques effectives, ils dissimulent difficilement une attitude négationniste en refusant de reconnaître les diversités d'opinions et identitaires nationales. Un dispositif dédié à maintenir la population haïtienne sous son joug. Cf. Rapport du Comité de Constitution introduit lors de la séance du 27 décembre 1806 à l'Assemblée Nationale, Imprimerie du Gouvernement, Port-au-Prince, 1816. Lire aussi : Jason, Muscadin Jean-Yves– Comprendre pour sortir du chaos : Manuel d’histoire critique. Tome 1. New York Publishers, New York, 2024. P 324

Bibliographie commentée

-Bellegarde-Smith, Patrick – Haitian History : New Perspectives. Routledge, New York, 2004.
Perspectives critiques et transversales pour recontextualiser l’histoire d’Haïti, en déconstruisant les mythes établis et en intégrant les voix longtemps marginalisées.

-Bonilla, Hernán – Histoire de l’indépendance d’Haïti. Cidihca, Montréal, 2004.
Outil pédagogique essentiel pour réintroduire les faits méconnus dans les espaces scolaires, en mettant l’accent sur les étapes souvent négligées de la libération haïtienne.

-Casimir, Jean – La Culture opprimée. Université d’État d’Haïti (UEH), Port-au-Prince, 2011.
Une relecture depuis la paysannerie haïtienne, qui redonne aux masses leur centralité historique, loin des récits élitistes ou étrangers.

-Dash, Michael – Haiti and the United States : National Stereotypes and the Literary Imagination. Palgrave Macmillan, New York, 1997.
Analyse de l’imaginaire occidental face à Haïti, entre répulsion coloniale et fascination post-révolutionnaire.

-Daut, Marlene – Tropicália Noir : Essays in Black Atlantic and Haitian Literary Histories. Duke University Press, Durham, 2021.
Dénonce les représentations déformées d’Haïti dans la littérature mondiale, en croisant histoire, imaginaire diasporique et critique postcoloniale.

-Dubois, Laurent – Avengers of the New World : The Story of the Haitian Revolution. Harvard University Press, Cambridge (MA), 2004.
Lecture nuancée mais puissante du processus révolutionnaire haïtien, soulignant les tensions internes et la portée universelle de la révolution.

-Fick, Carolyn – The Making of Haiti : The Saint Domingue Revolution from Below. University of Tennessee Press, Knoxville, 1990.
Remet les subalternes au centre de la révolution, contre les récits centrés uniquement sur les chefs ou les héros classiques.

-Geggus, David – Haitian Revolutionary Studies. Indiana University Press, Bloomington, 2002.
Corpus analytique incontournable pour évaluer les sources primaires et les interprétations multiples de la Révolution haïtienne.

-Hobsbawm, Eric – Nations and Nationalism since 1780 : Programme, Myth, Reality. Cambridge University Press, Cambridge, 1990.
Analyse utile pour comprendre comment les récits nationaux sont construits et instrumentalisés politiquement, avec des implications directes pour le cas haïtien.

-James, C.L.R. – The Black Jacobins : Toussaint L’Ouverture and the San Domingo Revolution. Vintage, New York, 1963.
Ouvrage fondateur qui restitue toute la radicalité révolutionnaire de Louverture et du peuple noir insurgé, dans une perspective marxiste anticoloniale.

-Jason, Muscadin Jean-Yves– Comprendre pour sortir du chaos : Manuel d’histoire critique. Tome 1. New York Publishers, New York, 2024.
Exploration des racines historiques occultées du chaos haïtien contemporain, avec une grille d’analyse critique et décoloniale.

-Jason, Muscadin Jean-Yves – Séisme du 12 janvier 2010 en Haïti. Entre l’incertain, le probable et…. Edilivre, Paris, 2016.
Réflexion historique et symbolique sur la catastrophe comme métaphore d’un effondrement mémoriel, social et politique.

-Laurent, Garry – Dessalines et l’indépendance d’Haïti. Imprimerie de l’État, Port-au-Prince, 2000.
Mise en lumière des politiques dessaliniennes comme projet de souveraineté intégrale, souvent minimisé dans les récits officiels.

-Marcelin, Frédéric – La République d’Haïti et ses visiteurs. Imprimerie Chéraquit, Paris, 1903.
Témoignage critique des regards biaisés portés sur Haïti par les voyageurs et observateurs étrangers à la fin du XIXe siècle.

-Mérisier, Jean – Dessalines : Aperçu critique. Fardin, Port-au-Prince, 1982.
Défense rigoureuse de Dessalines comme chef d’État injustement diabolisé, contre les lectures idéologiquement biaisées.

-Mills, Charles – The Racial Contract. Cornell University Press, Ithaca, 1997.
Théorisation essentielle des fondements raciaux des structures de pouvoir et de savoir, particulièrement pertinente pour analyser la condition postcoloniale haïtienne.

-Pierre-Charles, Gérard – Capitalisme et sous-développement en Haïti. Éditions Maspero, Paris, 1973.
Analyse des racines structurelles du sous-développement post-révolutionnaire, dans une lecture marxiste rigoureuse.

-Price-Mars, Jean – Ainsi parla l’oncle. Imprimerie de l'État, Port-au-Prince, 1928.
Texte pionnier qui interroge l’aliénation historique et culturelle haïtienne, en appelant à la réhabilitation de l’"authenticité" populaire et vodou.

-Trouillot, Henock – Historiens et journalistes d’Haïti. Éditions Deschamps, Port-au-Prince, 1981.
Dénonce l’instrumentalisation de l’histoire par les élites post-indépendance, et les dérives journalistiques dans la fabrique du récit national.

-Trouillot, Michel-Rolph – Silencing the Past : Power and the Production of History. Beacon Press, Boston, 1995.
Déconstruction magistrale des stratégies de silence et d’effacement dans la fabrication de l’histoire officielle, devenue un classique dans les études postcoloniales.

 


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7 réactions à cet article    


  • Com une outre 21 juin 08:50

    Pour répondre à la question en titre, demandez à Guiseppe di Bella Blabla. C’est un spécialiste.


    • Christophe 21 juin 23:37

      @Com une outre
      Guiseppe di Bella fait de la falsification historique ! Peut-être pourra-t-il exprimer quelle est la motivation de la falsification historique qu’il étale sans cesse.


    • JPCiron JPCiron 21 juin 09:09

      Fort intéressant, cet Article.

      Et utile

      Merci


      • Étirév 21 juin 11:47

        « Que cachent les détournements de la vérité historique ? »
        Supprimer la mémoire collective dissout la nation, laquelle fait alors place au troupeau.
        Peut-être est-ce cela que cherchent les meneurs occultes du jeu, aux fins d’assurer plus facilement leur domination sur les ilotes modernes dont ils rêvent ?
        Dans son ouvrage « Présence de la Tradition Primordiale : E. A. Poe, G. Meyrink, H. P. Lovecraft, J. R. R. Tolkien, Stanley Kubrick et d’autres... », Paul-Georges Sansonetti écrit ceci :
        « Malgré les efforts déployés par l’antitradition pour occulter ses manœuvres de politique internationale, une partie du public se montre de moins en moins dupe. C’est en déchirant progressivement un rideau de leurres que des individus déterminés parviendront à entrevoir ce qui a été dissimulé aux peuples de la planète. Alors on découvrira que sous prétexte d’établir la mondialisation il s’agissait en réalité d’arracher ces peuples (quelle qu’en soit l’ethnie) à leurs terres ancestrales, physiquement mais surtout moralement, afin de leur imposer une existence uniquement fondée sur la dévotion de l’argent... et la crainte d’en être dépourvu ! Le sentiment tenace qu’il existe un organisme directeur secret contrôlant toute la haute finance afin de remodeler le monde, en défaisant ou refaisant des nations lorsque nécessaire, conduira inévitablement à l’interrogation suivante : dans quel but ? La réponse est déjà connue des esprits rebelles qui, parallèlement aux orchestrateurs de l’antitradition, possèdent une vision cyclique de l’histoire : faire en sorte qu’au moment où le dernier Âge s’achèvera, les conditions requises pour le retour de la Tradition ne soient plus réunies et que les peuples se révèlent dans l’incapacité d’exister selon des valeurs (non cotées en bourse !) qui constituaient la normalité du monde traditionnel et sont maintenant en exil des consciences. Des valeurs nommées droiture, honneur, humilité, fidélité, don de sa personne et, au sens médiéval du terme « Cœur », c’est-à-dire le courage inséparable de la générosité.  ».
        Rappelons que l’Histoire réelle de la Terre et de ses habitants n’a jamais été faite, les hommes ne l’ont pas voulu, ils ont jeté un voile sur la moitié des temps et les ont retranchés des fastes du monde.
        Et cette partie supprimée est cependant la plus importante, puisqu’elle contient l’explication des principes, c’est-à-dire des premières actions des hommes, de leurs premières idées, de leurs premiers travaux et des impressions reçues dans la jeunesse ancestrale, qui se sont gravées dans le cerveau humain d’une façon si profonde que l’atavisme les fait renaître dans chaque enfant qui recommence la vie.
        Et ceci nous explique pourquoi nous avons deux espèces de connaissances : celles qui furent acquises dans le monde primitif qu’éclairait la lumière de la Vérité, et celles qui furent acquises par la suite dans un monde déjà livré à l’erreur et au mensonge.
        Honoré de Balzac disait : « Il y a deux histoires : l’histoire officielle, menteuse, puis l’histoire secrète, où sont les véritables causes des évènements. ».
        Georges Bernanos disait qu’on ne peut rien comprendre à la modernité, si l’on ne comprend pas qu’elle est un vaste complot contre « l’Intériorité ».
        En effet, la Société ne tient qu’en « bouchant » toutes les « issues » vers le « haut » et en entravant « les conduites singulières ».
        Tout est fait pour détourner l’être humain de son intériorité. Une formule à la mode résume à elle seule ce projet néfaste : « s’éclater », c’est-à-dire penser surtout à se disperser vers l’extérieur.

        NB : Il est des gens naïfs qui croient que l’histoire est le récit exact des faits du passé. Ils semblent ignorer que le monde est, depuis longtemps, régi par le mensonge et que le désordre de la société actuelle en est la conséquence.
        A toutes les époques, il y a eu des partis qui, voulant s’emparer d’un pouvoir auquel ils n’avaient pas droit, ont appuyé leurs prétentions sur une idée, un système, une théorie religieuse ou sociale, qu’ils ont propagée par violence, par fraude ou par ruse.
        Nos enfants n’ont encore, à l’heure actuelle, d’autres notions sur les origines de la famille que celles qu’ils dérivent des grands Livres sacrés mais « révisés », d’une Tradition altérée et atomisée ou du relativisme des « modernes », et l’immense majorité s’en tient là toute sa vie. Nos jeunes gens apprennent encore les prétendues fables de la mythologie, sans qu’on leur indique ce que ces mystères cachent de vérité, partant d’intérêt. Et ces données inintelligibles, absurdes, parce que tronquées, faussent leur sens au lieu d’éclairer leur raison.
        Il y a deux manières de faire revivre le passé : l’une consiste à le remettre sous nos yeux en y réintégrant les deux sexes qui en ont été les auteurs ; l’autre expose sommairement ce que les hommes de l’époque étudiée on dit ou fait, en se gardant de rien ajouter au témoignage de ceux qui se justifiaient de crimes, de délits, de fautes commises ; ceux-là multiplient les références parce qu’ils savent que les gens sincères peuvent leur reprocher leur partialité, puisqu’ils suppriment le rôle joué par la femme à l’époque qu’ils étudient. Ceci prouve qu’il y a toujours eu, dans le monde, deux partis bien tranchés représentant les deux sexes : primo, des féministes affirmant leurs droits naturels et cherchant la justice dans le présent et dans le passé ; deusio, des masculinistes donnant les droits féminins aux hommes et défendant leur usurpation par des ruses, des hypocrisies, des mensonges.
        L’histoire écrite par les auteurs masculins s’occupe exclusivement de ce que font les hommes : la guerre d’abord, la conquête, le commandement, puis l’industrie et quelques notions concernant la vie privée, les mœurs, et ce qu’ils entendent par le mot religion. Tout cela dans le but d’affirmer les droits donnés aux hommes par les codes masculins. Quant à la vie morale et spirituelle des femmes, il n’en est jamais question ; non seulement on néglige ce chapitre, mais on l’amoindrit en le désignant dédaigneusement sous le nom de fables ou de Mythologie. C’est cependant cette partie de l’histoire qui explique toutes les origines, en même temps que toute la vie intellectuelle des peuples.
        LIEN


        • titi titi 21 juin 21:13

          @L’auteur

          Je pense que vous sur interprétez les choses.

          Pourquoi l’histoir d’Haïti n’est elle pas connue ici ? Pourquoi n’est elle connue qu’à travers Toussaint l’Ouverture ?

          C’est très simple : à partir du moment ou Haïti n’est plus la France, alors ça ne nous concerne plus.

          L’histoire de Toussaint l’Ouverture a un coté romantique.
          Son enfermement au chateau de Joux, dans un des coins les plus froids de France, ça fait pleurer dans les chaumières.

          Mais pour le reste ce qui s’est passé en Haïti... bah ça ne nous interesse pas vraiment.

          Le fait est que si on devait s’interesser à l’histoire contemporaine de toutes les colonies que la France a controlées, même temporairement, même symboliquement, (Fort Coligny ou Nouvelle Angoulème) , ça nécessiterait une vie.


          • Christophe 21 juin 23:35

            Article intéressant qui met en exergue la falsification historique comme outil de propagande dogmatique.

            Haïti est très loin d’être un cas isolé, il faut pour cela que les autochtones se réapproprient leur histoire, recherchent et documentent pour démonter cette falsification dans laquelle les pays européens et leurs cousins sont passés maître.

            Heureusement que l’historiographie avec des compétences locales permet de remettre en question tous ces narratifs qui reposent sur certains faits mais détournent totalement le sens afin de fournir aux maîtres de l’écriture historique le meilleur rôle pour expliquer que nous sommes toujours du bon côté ; l’adversaire étant systématiquement diabolisé, ignoré ou rabaissé.


            • titi titi 22 juin 19:27

              @Christophe
              "l faut pour cela que les autochtones se réapproprient leur histoire,

              "

              Vue la situation actuelle du pays, je pense que c’est le cadet de leurs soucis...

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