USA vs Iran : le spectacle continue
Tout est calculé en pariant sur le temps. Le temps pour gagner du temps, le temps pour faire durer les shows diplomatique (Trump) et militaire (Netanyahou), le temps pour espérer que les sanctions économiques et la pression psychologique pousseront un jour la population iranienne à se révolter contre ses dirigeants dans une sorte de printemps perse…
Le temps pour gagner du temps
Ni l’embargo économique américain ni les menaces militaires israéliennes encore moins le blottissement des monarchies du Golfe contre Washington ne permettront un retour à l’état normal des relations irano-saoudiennes d’avant la révolution islamique de 1979. Jusqu’à présent les joutes oratoires et gesticulations des responsables américains ainsi que les démonstrations de l’aviation israéliennes en Syrie ne semblent servir que les agendas électoraux des deux alliés. Pour le président Trump qui voit chaque jour l’étau des révélations toutes plus scandaleuses les unes que les autres, distillées dans la presse, se resserrer autour de sa personne, tirer le maximum de la diabolisation de l’Iran pour garantir un second mandat de quatre ans en 2020 est plus que vital ; d’autant que l’électorat juif américain ne lui est pas totalement acquis. En 2016 une majorité des inscrits de confession juive a voté pour sa rivale Hillary Clinton. Ces derniers ont préféré voter pour l’ex First Lady malgré son soutien au mariage gay plutôt que pour Trump plusieurs fois divorcé et remarié, ayant bâti sa fortune sur les casinos, soudoyé des filles de joie pour garder le silence et coopéré avec la mafia new-yorkaise particulièrement immobilière pour construite ses Tours et Palaces, sans oublier ses déclarations ambiguës après les violences de Charlottesville en août 2017… S’agissant du premier ministre Benjamin Netanyahou, également cerné par les scandales politico-financiers et fragilisé par la défection de son ministre de la défense ultra extrémiste Avigdor Liberman suite à une récente incursion militaire d’un commando d’élite de Tsahal qui a tourné au fiasco à Gaza même tactique pour remporter les prochaines élections anticipées prévues en avril 2019 : actionner au maximum le levier qu’est le double épouvantail iranien et hezbollahi pour rassembler plus d’Israéliens autour de lui. En fait pour revenir à l’époque où les relations entre l’Iran et les pétromonarchies du Golfe étaient apaisées normales il faut que l’Iran devienne une république sunnite ou au moins une monarchie proaméricaine comme du temps du Shah. Autant dire que c’est impossible, du moins pour la dizaine d’années à venir. N’oublions pas que le premier responsable de l’avènement de la révolution islamique iranienne est bien l’Occident. Si ce dernier, à commencer par les Etats-Unis, n’avait pas fermé les yeux sur un régime du Shah gangrené par le népotisme et la corruption il ne serait pas tombé aux mains des mollahs en 1979 et le royaume saoudien n’aurait pas été obligé de se ruiner pour le tenir à distance. « La Révolution iranienne de 1979 qui met fin au pouvoir despotique du shah, abolit la Monarchie. L’Arabie saoudite craint alors que la révolution iranienne ne conduise ce pays à vouloir imposer la République dans les autres Etats du Moyen-Orient pour mettre fin aux régimes conservateurs dans la région. L’Iran devint la Nation dominante de la région, ce qui lui vaut l’hostilité du régime saoudien. »
Sachant qu’une nouvelle guerre au Moyen-Orient serait aussi coûteuse que ruineuse des espoirs de Trump pour rempiler en 2020 l’administration américaine actuelle mise sur la guerre psychologique axée sur la « diplomatie froide » pour marquer des points contre une république iranienne dont la capacité militaire réelle échappe aux yeux et aux oreilles du Pentagone. D’où la tournée actuelle du secrétaire d’Etat Mike Pompeo dans la région et l’initiative spectaculaire de son administration pour la tenue d’un sommet à Varsovie les 13 et 14 février prochain. La Pologne est le pays de l’Union européenne le plus américanophile et le poste avancé de Washington en Ex-Europe de l’Est, autrement dit l’œil de Washington sur Moscou allié de l’Iran. Tout est calculé. Objectif : jouer la carte diplomatique en traînant les pieds ; car plus ça traîne plus l’électorat potentiel de Trump aura le temps d’apprécier son travail contre la menace iranienne et plus usines de guerre américaines vendront d’armes aux Saoudiens. Il reste 659 jours soit 1 an, 9 mois et 20 jours avant le 3 novembre 2020, jour de la présidentielle américaine. Donc pas de précipitation, rien ne presse. Après Varsovie, un autre sommet en Hollande et après les Pays-Bas peut-être Rome... Et pendant que Pompeo sillonne les capitales occidentales et arabes pour prêcher la bonne parole en essayant de construire une Union sacrée contre Téhéran, Netanyahou pourra continuer à bombarder des objectifs ennemis quelque part en Syrie ou à détruire des tunnels du Hezbollah à la frontière libanaise. Tout est calculé en pariant sur le temps. Le temps pour gagner du temps, le temps pour faire durer les shows diplomatique (Trump) et militaire (Netanyahou), le temps pour espérer que les sanctions économiques et la pression psychologique pousseront un jour la population iranienne à se révolter contre ses dirigeants dans une sorte de printemps perse… Inversement, le régime iranien en place compte lui aussi sur le temps en espérant que Trump se casse la gueule en 2020 et laissera la place aux démocrates qui annuleront la décision du retrait des Etats-Unis de l’accord nucléaire. Bref, à moins d’un miracle d’ici à 659 jours ce sera le statu quo au Moyen-Orient. Le spectacle continue !
http://chankou.over-blog.com/2019/01/usa-vs-iran-le-spectacle-continue.html
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