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Révision de la Constitution : le Parlement retrouvera-t-il vraiment son pouvoir ?


Concernant la répartition de l’ordre du jour, la Presse nous parle de « 50 % » pour le gouvernement, et 50 % pour le Parlement. Or, la réalité est tout autre…Comme le montre l’article 22. En effet, ce n’est pas le « Parlement », mais la « conférence des présidents » qui déterminera s’il est bon ou non de mettre à l’ordre du jour une loi. Sachant que les « présidents » sont des présidents de « groupes », tous les partis n’étant pas intégrés à un groupe, ou bien les élus « indépendants » ne pourront dès lors pratiquement jamais proposer quoi que ce soit, c’est-à-dire faire concrètement leur travail de parlementaires. Il y aura un « filtre » automatique, qui se fera à l’encontre des partis « minoritaires »… Alors que, par principe ces élus ne sont pas moins légitimes que ceux du PS ou de l’UMP.

Il existe pourtant un moyen plus démocratique. Pourquoi, au lieu de ce système de « censure » ne pas proposer plutôt une répartition à 50 % pour le gouvernement, 50 % pour le Parlement, avec un système proportionnel pour les propositions… Avec possibilité de « reporter » son projet.

Explication : chaque parti politique se verrait octroyer, en référence à ses scores aux législatives, un taux de propositions de loi à faire sur l’année. Exemple : sur 100 propositions de loi sur un an, l’UMP se retrouverait par exemple avec 44 % de propositions de loi à faire, le PS 36 %, le MoDem 6 %, le NC 12 %, etc. Cela permettrait à chaque groupe politique de :

1) proposer des lois sérieuses… Et non des lois « d’émotions ». Autrement dit, chaque groupe politique étant « limité » dans son nombre de propositions à faire, il y aurait plus de sérieux, de travail et d’examen évaluateur sur les lois.

2) ne pas servir à rien : tous les partis politiques se voyant reconnaître un % de propositions de loi à faire. Cela ne met pas en danger le « fait majoritaire », ni n’entrave l’action du gouvernement. En revanche, cela permet aux citoyens ayant voté pour des partis « minoritaires » de considérer que le Parlement le représente effectivement… Et non qu’il s’agit là d’une assemblée « de bulletin de vote ».

3) si, sur un an, un groupe politique ne fait pas autant de propositions de loi, que la Constitution le lui permet, il peut « reporter » celles-ci sur l’année suivante. Ainsi, un parti politique pourrait facilement retrouver la parole sur des problématiques diverses et variées, et surtout cela « espacerait » les réformes, les rendrait « lisibles ». On dit souvent qu’un mandat ne dure pas cinq ans… Mais deux. En effet, il semble qu’à partir de la troisième année, parlementaires et président se « reposent ». En mettant en place cette règle, qui aurait la durée du mandat, les partis politiques pourraient ainsi clarifier leur programme, en donnant un grand coup de collier les deux premières années, puis les trois dernières, ils pourraient « peaufiner » la réforme. C’est-à-dire, et c’est en lien avec la politique d’évaluation de la loi, retirée au Parlement (on ne sait trop pourquoi, sinon faire plaisir à Bercy), les parlementaires pourraient les trois dernières années « corriger le tir » si cela s’avère nécessaire, et comme cela demandera probablement plus de « petites lois » que les deux premières années, le « stock » fait par exemple en troisième année (année « surveillons comment la loi fonctionne ») servira à chaque parti de mettre sa pierre à l’édification d’une France comme nous le souhaitons tous.

Mieux vaut, à mon sens, un système « proportionnel » basé sur les suffrages obtenus aux législatives, qu’un procédé qui est d’une certaine manière assez arbitraire.

Sur la question des pouvoirs de nomination du président, on a une nouvelle fois l’impression d’avoir de la poudre aux yeux. On a l’air de nous dire que toutes les nominations importantes seront contrôlées par le Parlement, alors que le projet ne crée qu’un simple avis d’une commission parlementaire. Il n’y a aucune garantie sur la composition de cette dernière, ni sur ses pouvoirs. Ce n’est pas sérieux. Les membres du Congrès ne peuvent pas se prononcer devant un tel flou. Sauf à être particulièrement irresponsables… Et totalement désintéressés sur leurs prérogatives constitutionnelles. La commission des lois envisage un simple droit de veto à la majorité des 3/5e, ce qui est très insuffisant. Il faudrait à l’inverse que ces nominations soient acceptées à la majorité des 3/5e, puisque le président est irresponsable. Il y aurait peut-être des tractations sur les nominations, mais au moins il y aurait beaucoup plus de pluralisme dans les instances concernées. Par exemple, du fait de la majorité sénatoriale perpétuellement à droite, le Conseil constitutionnel a eu pendant seulement neuf ans, sur les cinquante de la Ve République, une majorité de membres nommés par la gauche. Actuellement, 8 des 9 conseillers, sans compter les anciens présidents de la République, sont de droite ou nommés par la droite. Notons sur ce point qu’il n’y a aucune raison pour que les anciens présidents de la République soient membres de droit du Conseil constitutionnel. Il faut mettre fin à cette exception française. De nombreux juristes ont démontré que c’était absolument anormal.

En ce qui concerne, cette fois, la liste des nominations concernées, il y a une vraie occasion de redéfinir précisément les nominations relevant du président et du Premier ministre. Selon la Constitution, les nominations faites par le Premier ministre sont la règle, et celles qui sont faites par le président sont l’exception (et sont soumises à contreseing). C’est en effet le gouvernement, et non pas le président, qui dirige la politique nationale et qui « dispose de l’administration » (art. 20). Mitterrand porte ici une grave responsabilité (mais aussi Chirac, qui a continué sur la lancée) car il a augmenté considérablement le nombre de nominations effectuées par le président. Cela peut permettre au chef de l’Etat de contrôler les individus et donc d’asservir l’administration à sa volonté. Il serait nécessaire de revenir à la Constitution en augmentant le nombre de nominations faites par le Premier ministre et diminuer celles qui relèvent du président.

De très nombreuses dispositions de ce projet laissent planer la plus grande incertitude en renvoyant à une future loi organique ou aux règlements des assemblées. On demande donc aux membres du Congrès de voter les yeux fermés. Ce qui, en démocratie, n’est pas tolérable. D’autant que, vu l’envergure des « révisions » prévues, il faudra faire la « publicité » de ce texte, avant son éventuel ratification par le Congrès, auprès des citoyens. C’est quand ces derniers se seront « emparés » du sujet, que les révisions pourront être considérées comme partagées par tous. L’absence de « débat » au sein de la société, tendrait à accroître le sentiment des citoyens qu’il s’agit d’un mauvais texte (ce qui n’est pas le cas, car il y a de réelles avancées).

L’extension des pouvoirs du Parlement, en particulier l’ordre du jour partagé, est un réel progrès. Autre avancée : la discussion des projets et propositions de lois portera au départ non plus sur le texte présenté par le gouvernement, mais sur celui adopté par la Commission. Le retour des résolutions parlementaires est aussi une bonne chose. Cependant ces pouvoirs seront exercés par la majorité parlementaire qui restera soumise au président. En effet, ce dernier conserve son arme essentielle : le droit de dissolution. De même, les modifications qui limitent l’utilisation de l’article 49-3 peuvent être considérées comme un progrès. Le 49-3 serait peut-être nécessaire. Tout dépend en effet de la majorité dont on dispose : si elle est très solide, l’utilité du 49-3 est moindre, tandis qu’avec une majorité relative, comme en 1988, il est très pratique d’avoir le 49-3 pour faire passer ses lois. Cependant, cet article absent dans de nombreux pays est trop souvent utilisé de manière abusive. La démocratie, c’est surtout réunir une vraie majorité et aller la chercher, en faisant des concessions s’il le faut.


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3 réactions à cet article    


  • mandrier 2 juin 2008 14:48

    Le Parlement , qui a dénié au Peuple Souverain le droit de conserver la "Force" de la Constitution , puis voté le "Traité européen bis" a perdu de fait tout pouvoir : il est devenu une chambre d’enregistrement des lois, decrets et directives européennes...

    Le Parlement francais est "out".... Et maintenant, il est "aux ordres" de Bruxelles... Il ne compte pour rien...

    Ils n’ont rien vu venir...


    • luteola luteola 2 juin 2008 15:31

      le plus étrange dans cette affaire c’est qu’on ne nous demande pas notre avis... Les français ont voté cette répartition des pouvoirs en 58, eux seuls devraient pouvoir la changer. Au lieu de cela on assiste à un marchandage pas très digne ni très transparent entre majorité et opposition. Il est clair que la constition de la Vèm est bancale, mais attention : elle fonctionne... Pas toujours très bien, mais bien mieux que la IVèm... Les fausses bonnes idées sont dangeureuse. Evidemment rendre plu de pouvoir au parlement ça à l’air bien sur le papier. En pratique, il faut se méfier car les partis prennent le dessus. Cette réforme foisonne de bonnes idées et d’autres bien plus dangeureuse. Sans compter que les 2 vrais problèmes de la 5èm ne sont pas abordés : le doublon du premier-ministre et la representativé du sénat (plus du domaine de la loi certes, mais problèmatique néanmoins). Je n’arrete pas de me demander à quoi joue Sarkozy en fait. Il y a un piège je le sens, mais où :D ? Outre le gain politique qu’il peut esperer contre l’opposition (que la réforme passe ou pas d’ailleurs), y a surement autre chose. Qu’on ne me fasse pas croire que ce gars accepte délibéremmet de se déléster de ses pouvoirs.


      • melanie 2 juin 2008 16:57

        @Lutéola

         

        D’accord avec toi, il y a un piège et cette illusion de laisser du lest ne cadre pas avec Sarkozy qui a verouillé toutes les instances.

        Que Manuel Valls qui est le plus "droitistes" des membres du PS soit favorable à cette loi est déjà suspect.

         

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anna


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