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Accueil du site > Actualités > Citoyenneté > Pour une commission d’enquête sur l’apparence d’impartialité

Pour une commission d’enquête sur l’apparence d’impartialité de la Justice française

Outreau et le rapport de la commission d’enquête parlementaire, ainsi que les auditions effectuées par cette commission, avaient occupé une place importante dans les médias et dans les débats publics. Mais maintenant qu’il s’agirait de traduire dans des mesures concrètes les conséquences de ces débats et constatations, une discrétion générale règne. Peu de dépêches et de déclarations sur les deux lois en cours d’adoption (formation et responsabilité des magistrats, équilibre de la procédure pénale). La campagne présidentielle n’évoque guère la réforme de la Justice. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur ces lois qui ont déjà déçu des acquittés d’Outreau et introduisent de surcroît des dispositions inattendues à l’insu de la grande majorité des citoyens. Mais un autre aspect essentiel apparaît de plus en plus clairement : la question fondamentale de l’apparence d’impartialité de la Justice est systématiquement ignorée. Insuffisamment abordé par la commission d’enquête sur Outreau, ce point central des déclarations et conventions sur les droits et libertés fondamentaux nécessiterait une enquête spécifique par une nouvelle commission.

Les travaux récents du Sénat sur la réforme de la Justice (loi organique et loi sur la procédure pénale) confirment pour l’essentiel les craintes exprimées dans mes articles précédents, notamment : sur le caractère optionnel de fait des enregistrements audiovisuels et sur leur domaine d’application restreint ; sur les nouvelles restrictions de l’accès des citoyens à la justice pénale ; sur la mise en cause du principe d’après lequel le pénal tient le civil en état... Des mesures faisant suite pour l’essentiel à des revendications des magistrats, alors qu’il s’agissait d’après la propagande d’écouter les citoyens.

Les dispositions sur les enregistrements audiovisuels ne mettent pas en avant l’intérêt supérieur du justiciable évoqué par la Cour européenne des Droits de l’homme dans ses arrêts, mais les besoins de l’instruction. Celles concernant les actions pénales avaient été adoptées en décembre dernier par l’Assemblée nationale à l’initiative du garde des Sceaux qui excipait d’un « encombrement » des chambres d’instruction et de nombreux « abus » imputés aux citoyens qui déposent des plaintes. Pascal Clément avait même déclaré : « Ce sont les magistrats (...) qui ont souhaité cette réforme : qu’on leur fasse confiance, ce sont des professionnels ! Ils sont déjà submergés de travail toute la journée... ». Quant aux citoyens, s’est-on soucié de demander leur point de vue ?

Certes, en matière de responsabilité des magistrats, le Sénat a simplifié la procédure de saisine d’une commission par les justiciables. Mais, en même temps, la rédaction du nouveau deuxième alinéa de l’article 43 de l’ordonnance 58-1270 devient : « Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d’une ou plusieurs règles de procédure constituant des garanties essentielles des droits des parties constatée par une décision de justice devenue définitive. » Combien de décisions de justice constateront, dans la pratique, des fautes de magistrats ? Ce n’est même pas vraiment leur rôle, le fond d’un litige pouvant être jugé sans aborder ce genre de questions. Et, même lorsqu’il s’agit d’annuler un jugement, rien n’oblige les auteurs de la décision à se référer explicitement à de tels incidents. L’appel a par lui-même un effet dévolutif sur le fond de l’affaire, et la cassation peut se borner à évoquer le vice de forme ou l’erreur de droit sans mettre en cause le comportement de tel ou tel juge. Il sera donc très rare que les décisions de justice en arrivent à signaler les manquements qu’évoque l’aliéna rédigé par le Sénat. Et quelles seront les garanties d’impartialité de la commission chargée d’étudier les réclamations des citoyens ?

Plus globalement, la question de l’apparence d’impartialité de la Justice et des instances dont elle dépend n’a guère été évoquée dans les débats parlementaires. Pourtant...

L’article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme et des Libertés fondamentales prescrit notamment : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle... » , et l’article 13 sur le droit à un recours effectif ajoute : « Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. » Les justiciables ont donc le droit à des garanties réelles d’impartialité de la Justice et à des voies de recours permettant d’obtenir la rectification des écarts par rapport à ce droit fondamental.

Dans le cas de la France, pour les juridictions de l’ordre judiciaire, ces garanties sont censées être fournies par l’article L731-1 du Code de l’organisation judiciaire dont le teneur est :

« Sauf dispositions particulières à certaines juridictions, la récusation d’un juge peut être demandée :
1° Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation
2° Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l’une des parties
3° Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l’une des parties ou de son conjont jusqu’au quatrième degré inclusivement
4° S’il y a eu ou s’il y a procès entre lui ou son conjoint et l’une des parties ou son conjoint
5° S’il a précédemment connu de l’affaire comme juge ou comme arbitre ou s’il a conseillé l’une des parties
6° Si le juge ou son conjoint est chargé d’administrer les biens de l’une des parties
7° S’il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l’une des parties ou son conjoint
8° S’il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l’une des parties.
Le ministère public, partie jointe, peut être récusé dans les mêmes cas. »

Pour la juridiction administrative, la définition des critères de récusation est beaucoup plus vague. Aux termes de l’article L721-1 du Code de Justice administrative, « La récusation d’un membre de la juridiction est prononcée, à la demande d’une partie, s’il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité » et l’article R721-9 prévoit notamment : « Si le membre de la juridiction qui est récusé acquiesce à la demande de récusation, il est aussitôt remplacé. Dans le cas contraire, la juridiction, par une décision non motivée, se prononce sur la demande. »

La récusation d’un expert est également possible dans toutes les juridictions.

Mais il paraît évident que, dans la pratique, le justiciable n’a aucune chance d’accéder à des informations lui permettant d’exercer vraiment son droit de récusation tel qu’il est défini par le Code de l’organisation judiciaire. Il pourra, tout au plus, connaître une petite partie des réponses aux questions que soulèvent de droit, pour chaque affaire, les huit points de l’article L731-1 précité. Au lieu d’un véritable droit, le justiciable se trouve confronté à du « si jamais vous apprenez que... vous pouvez... » Pas de quoi aller très loin, à de rares exceptions près. Une situation très inégalitaire, de surcroît. Car il paraît évident que ce sont les personnes riches et influentes qui disposent des meilleurs moyens pour se renseigner sur les magistrats et les experts et pour trouver des avocats prêts à les récuser.

Précisément, l’affaire d’Outreau a mis en évidence les limites de l’actuel dispositif légal et réglementaire en la matière. Dans mon article du 28 août, j’avais évoqué la récusation tardive (en juin 2004, trois ans après sa désignation), de l’experte Marie-Christine Gryson, dont le rôle et l’apparence d’impartialité ont été mis en cause lors des audiences de première instance. A cette époque, plusieurs innoncents avaient déjà subi une trentaine de mois de détention provisoire. On peut lire à ce sujet dans le rapport de la Commission d’enquête parlementaire : « Mme Marie-Christine Gryson-Dejehansart, à laquelle avait été confiée la réalisation des expertises psychologiques de seize mineurs, a été récusée [en juin 2004] pendant le procès d’assises de Saint-Omer après la remise en cause de son impartialité par plusieurs avocats. Il s’est avéré que Mme Gryson-Dejehansart était, depuis 2000, présidente de l’association Balise la vie, association ayant pour objet "de prendre en charge les enfants une fois que le processus judiciaire est terminé". Cette association était subventionnée par le département du Pas-de-Calais, qui par ailleurs était partie civile au procès dans lequel Mme Gryson-Dejehansart intervenait comme expert... (...) En tout état de cause, il revenait à Mme Marie-Christine Gryson-Dejehansart de renoncer à cette mission. » Peut-on vraiment se satisfaire de cette conclusion, alors qu’aucun contrôle d’office ne semble avoir fonctionné ?

Quant à la juridiction administrative, la loi 86-14 du 6 janvier 1986 avait prévu des critères d’incompatibilité pour les membres des tribunaux, qui correspondent aux articles L231-5 et L231-6 de l’actuel Code de Justice administrative, prescrivant que : « Nul ne peut être nommé membre d’un tribunal administratif ou d’une cour administrative d’appel s’il exerce ou a exercé depuis moins de trois ans dans le ressort de ce tribunal ou de cette cour : 1. Une fonction publique élective ; néanmoins un représentant français au Parlement européen peut être nommé membre d’un tribunal administratif ou d’une cour administrative d’appel à l’issue de son mandat ; 2. Une fonction de représentant de l’Etat dans une région, ou de représentant de l’Etat dans un département, ou de délégué de celui-ci dans un arrondissement, ou de directeur régional ou départemental d’une administration publique de l’Etat ; 3. Une fonction de direction dans l’administration d’une collectivité territoriale » et que : « Nul ne peut être nommé membre d’un tribunal administratif ou d’une cour administrative d’appel s’il a exercé dans le ressort de ce tribunal ou de cette cour depuis moins de cinq ans la profession d’avocat. » Mais ces dispositions, qui datent d’il y a plus de vingt ans, paraissent à présent très insuffisantes et ne permettent pas d’empêcher une profonde osmose entre tribunaux et administrations. L’absence totale de séparation de carrières, au sein du Conseil d’Etat, entre les cabinets ministériels ou la direction de grandes administrations d’une part, et la Section du contentieux de l’autre, en fournit un exemple frappant qui est loin d’être le seul. De mon modeste point de vue, les risques actuels de confusion d’intérêts dépassent de loin les prévisions du législateur de l’époque, qu’il s’agisse du Conseil d’Etat, des tribunaux administratifs ou des cours administratives d’appel.

Pour l’accès aux fonctions de juge administratif, le Code en vigueur, dans son article L233-4 basé sur la même loi de 1986, accorde une place particulière aux « professeurs et maîtres de conférences titulaires des universités ». De même un nombre significatif de magistrats, surtout au sommet des juridictions exerce-t-il en même temps des fonctions dans l’enseignement supérieur (notamment, de professeur associé aux universités). Pas seulement dans la juridiction administrative, d’ailleurs. Or, au cours des deux dernières décennies, les universités et les organismes de recherche se sont trouvés impliqués dans un nombre croissant de contentieux dont les OGM et l’amiante fournissent des illustrations particulièrement médiatisées, jusqu’à la mise en examen de trois prestigieuses institutions dans l’affaire de l’amiante de Jussieu. La situation très précaire de doctorants et jeunes chercheurs a également apporté un certain nombre de litiges. On voit, malgré cela, des magistrats qui sont en même temps des professeurs associés rémunérés à ce titre par le ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, intervenir dans le jugement de contentieux de ce ministère et des établissements qui en dépendent. Cette situation paraît manifestement anachronique, et la relation pourrait être bien plus longue. Pas seulement pour la Justice proprement dite, mais aussi pour le contexte global dans lequel elle est gouvernée, gérée, évaluée... et dans lequel sont préparées les dispositions qui la régissent.

C’est pourquoi il me semblerait pertinent qu’une commission d’enquête parlementaire soit mise en place, consacrée spécifiquement à la question de l’apparence d’impartialité de la Justice française et des institutions qui l’entourent, ainsi qu’aux garanties réelles de cette impartialité. Mais, pour ne pas en arriver à une impasse, comme cela s’est produit après le rapport parlementaire sur Outreau, une participation citoyenne beaucoup plus conséquente, ouverte et permanente paraît indispensable.


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47 réactions à cet article    


  • Romy (---.---.78.65) 15 février 2007 11:08

    Bonjour Isabelle,

    En effet, il faudrait une remise à plat générale dans ce domaine.

    L’idée paraît d’autant plus à creuser que, comme vous l’avez vous-même signalé dans d’autres articles, l’Etat français semble avoir une idée particulièrement restrictive de l’apparence d’impartialité. On oppose aux citoyens un prétendu « intérêt général » qui en réalité est celui d’un certain nombre de lobbies.

    Reste à faire passer une proposition qui risque de faire grincer beaucoup de dents...


    • Théo (---.---.254.44) 15 février 2007 14:08

      Justement, ce n’est pas sûr qu’il ait jamais été vraiment envisagé de s’opposer à ces intérêts. Il a pu y avoir d’autres raisons pour la mise en cause de la commission d’enquête sur Outreau.


    • (---.---.41.205) 15 février 2007 14:28

      En effet, les véritables objectifs de la création de la commission d’enquête sur Outreau n’ont pas forcément été très clairs. Voir aussi le débat qui a suivi l’article de De ço qui calt ? d’il y a quinze jours :

      http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=18423

      La réforme de la Justice, grande absente de la campagne présidentielle

      Ségolène Royal compte parmi ses conseillers Dominique Barella, secrétaire général de l’Union syndicale des magistrats jusqu’en octobre 2006 ; Nicolas Sarkozy semble avoir obtenu le soutien de Pascal Clément pour sa campagne présidentielle ; François Bayrou et Marie-George Buffet n’ont jamais voulu entendre parler de réforme de la Justice ; « plus à gauche », l’influence du Syndicat de la magistrature, membre fondateur d’ATTAC, n’est sans doute pas négligeable... Quelles en sont les conséquences ? En tout cas, le sujet de la réforme de la Justice se trouve pour le moment ignoré dans la campagne présidentielle. Comme si, à la fin des courses, quelqu’un avait demandé : « Les justiciables, combien de divisions ? »...

      (...)


    • (---.---.115.38) 16 février 2007 13:21

      Il y a une réelle perte de poids des citoyens dans la société actuelle. Les corporations de fonctionnaires influents ne représentent pas un grand nombre, mais elles ont leurs « entrées » un peu partout.


    • Lambda (---.---.130.117) 15 février 2007 11:31

      C’est désespérant de constater qu’on nous administre pendant six mois tout un tapage sur une commission d’enquête comme celle d’Outreau et qu’ensuite, non seulement ses conclusions restent lettre morte, mais les lois sont élaborées et votées en cachette à notre insu.


      • Théo (---.---.254.44) 15 février 2007 14:06

        Toute la question est de savoir quels intérêts s’agissait-il de défendre à la fin des courses. Peut-être pas forcément celui du « petit justiciable ».


      • (---.---.115.38) 16 février 2007 13:24

        « Peut-être pas forcément [l’intérêt] du »petit justiciable« . »

        Certainement pas. La preuve : où a-t-on eu l’occasion de donner un avis sur les projets de loi de Pascal Clément ? Nulle part.


      • Nadia (---.---.219.127) 15 février 2007 11:51

        De façon générale, les gouvernements aiment bien les mélanges de genres institutionnels, car ils rendent plus facile de faire taire les contestations des citoyens.

        Mais en France, depuis une trentaine d’années, on a vu s’installer dans les milieux décideurs une aversion particulière à l’égard de toute controverse à armes égales.

        Vous avez du pain sur la planche, pour essayer d’obtenir cette commission d’enquête.

        Bon courage, en tout cas...


        • Gaby (---.---.155.68) 15 février 2007 12:38

          Et pourquoi pas un manifeste, une pétition... ?


        • Antoinette (---.---.38.209) 16 février 2007 21:21

          Et pourquoi pas un ou plusieurs ouvrages citoyens sur la Justice, avec un éditeur un peu audacieux ?

          Cet article d’Isabelle est vraiment très bon et forme un ensemble cohérent avec tout ce qu’elle a écrit depuis le printemps dernier. C’est très novateur aussi, par rapport à ce qu’on entend dans les milieux « bien-pensants ».


        • Robert (---.---.218.75) 16 février 2007 22:11

          A mon avis, cette initiative peut aboutir si les justiciables et d’autres citoyens se mobilisent pour la soutenir. On a vraiment besoin d’une « mise à jour » du fonctionnement des institutions françaises.


        • Précaire (---.---.157.186) 15 février 2007 12:16

          L’exemple des litiges des doctorants et des jeunes chercheurs montre bien que les risques de confusion d’intérêts profitent invariablement aux plus puissants, et ce n’est qu’un cas parmi tant d’autres.

          C’est pourquoi vous risquez d’avoir le plus grand mal à obtenir cette commission d’enquête.

          Et, même si vous y parvenez, il restera le problème de la participation des citoyens, de représentants des plus faibles...


          • Antoinette (---.---.38.209) 16 février 2007 21:23

            Voir mon commentaire plus haut. Osons promuvoir l’édition d’ouvrages citoyens sur la Justice. Il serait grand temps.


          • Robert (---.---.218.75) 16 février 2007 22:13

            « Osons promouvoir l’édition d’ouvrages citoyens sur la Justice... »

            Par exemple, je suis d’accord. Le problème des associations et manifestations, ce sont les noyautages visant à tuer le noyau dur de l’initiative.


          • HGW (---.---.24.157) 15 février 2007 15:14

            Que cherchait vraiment le monde politique avec la mise en place de la commission d’enquête sur Outreau ? La question est intéressante.

            Par exemple, s’agissait-il de renforcer les droits de la défense des « petits justiciables », ou ceux des justiciables riches et influents ?

            Voici un article paru dans Indymédia en avril dernier :

            http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=59462

            Outreau n’est pas une affaire de blanchiment d’argent Dans la pratique, les « droits de la défense » ne sont pas les mêmes pour tous...

            Le bâtonnier de Paris, Yves Repiquet, a récemment évoqué la question des droits de la défense dans des termes dont le « petit justiciable » peut, pour le moins, se sentir assez éloigné.

            La rubrique « Les rencontres du Bâtonnier » sur le site de l’Ordre des Avocats de Paris nous apprend, à l’adresse :

            http://www.avocatparis.org/new/gpublic/rencontres/9_10_18_19.asp

            que, lors d’une rencontre avec « quelques 130 confrères » :

            « Interrogé sur les Droits de la Défense qui sont régulièrement remis en cause [par] le législateur (national et européen) notamment par la mise en place de la déclaration de soupçon, le Bâtonnier a rappelé qu’il mène depuis longtemps un combat pour inverser la tendance et qu’il continuera à se battre avec l’aide et le soutien de ses confrères. »

            Le bâtonnier a déclaré à ce sujet :

            « La profession doit se mobiliser pour expliquer aux pouvoirs publics que les avocats ne sont pas utilisables dans la lutte contre le blanchiment : si un avocat soupçonne une activité illicite, il doit s’abstenir de traiter le dossier et non dénoncer ».

            et, après cette phrase, la rubrique précise que :

            Pour conclure le Bâtonnier a toutefois souligné que depuis l’affaire dite d’Outreau les hauts magistrats ont pris conscience de la nécessité d’instaurer une culture de la défense dans la formation des juges... Affaire à suivre..

            Mais, dans la réalité, quel rapport entre la question des droits de la défense dans l’affaire d’Outreau et dans les affaires de blanchiment d’argent ? ? ? Les personnes soupçonnées de délits économiques sont sauf de rares exceptions riches et influentes, et peuvent s’offrir les meilleurs avocats : rien à voir avec les innocents du procès d’Outreau injustement poursuivis et incarcérés. Une nuance essentielle, mais qui apparemment n’a bénéficié d’aucun droit de cité dans cette rubrique de l’Ordre des Avocats de Paris.

            Justiciable

            [email protected]

            http://www.geocities.com/justiciable_fr

            le lundi 24 avril 2006 à 22h01


            • MPYQ (---.---.153.108) 16 février 2007 12:16

              On peut difficilement nier que le revirement de médias et politiques à l’époque des audiences de première instance de l’affaire d’Outreau a eu lieu dans un contexte de controverses autour de l’application en France de la Circulaire Européenne contre le Blanchiment de décembre 2001 :

              http://europa.eu.int/eur-lex/pri/fr/oj/dat/2001/l_344/l_34420011228fr00760081.pdf

              Le début de l’instruction de l’affaire d’Outreau, sous Jospin, est antérieur à cette circulaire.


            • Gérard (---.---.154.98) 15 février 2007 17:13

              Ne peut-on penser que l’allusion du procureur à Outreau était peu opportune ?

              jeudi 15 février 2007, 13h43

              Prison ferme pour un acquitté d’Outreau dans une affaire de stupéfiants

              Par Hugues HONORE

              DUNKERQUE (AFP) - Daniel Legrand fils, l’un des 13 acquittés de l’affaire d’Outreau, a été condamné jeudi à une peine de trois mois de prison ferme dans une affaire de stupéfiants, après être devenu héroïnomane.

              (...)

              Le procureur Laurent Czernik avait requis un an de prison dont cinq mois ferme. « S’il y a un message aujourd’hui à faire passer à l’intéressé, c’est que son statut d’acquitté d’Outreau ne saurait constituer une immunité. M. Daniel Legrand n’est pas en dessous des lois, il n’est pas au dessus non plus », a-t-il considéré.

              Roselyne Godard, autre acquittée d’Outreau et présidente de l’Association des innocents justiciés à tort, a affirmé jeudi à l’AFP que « si Daniel Legrand devait repartir en prison, ce serait tuer ce gamin et la société en serait responsable », évoquant le risque d’un suicide.


              • Jacques (---.---.40.29) 15 février 2007 20:39

                On ne lui rendra jamais la longue période qu’il a passé en prison étant innocent. C’est vrai que le discours du procureur, tel qu’il est répercuté par les médias, semble faire l’impasse sur la responsabilité de la société à l’égard de ce jeune, et qu’on peut le regretter.


              • Hira (---.---.36.163) 15 février 2007 21:54

                C’est plus fort, à mon sens : tels que les propos du procureur sont récueillis dans la dépêche, c’est un refus de considérer comme une circonstance atténuante le traumatisme des trente mois de prison d’Outreau.


              • Hira (---.---.36.163) 15 février 2007 22:00

                C’est d’ailleurs une question qui se situe au centre même du sujet de l’article : quelles garanties d’impartialité conviendrait-il de prévoir dans une situation comme celle-ci, où l’institution judiciaire peut considérer qu’elle cautionne sa propre mise en cause si elle reconnaît comme une circonstance atténuante le traumatisme d’Outreau ?

                Voici un sujet de réflexion pour la commission d’enquête.


              • Jean (---.---.159.227) 16 février 2007 12:48

                Il serait intéressant d’en savoir plus sur ce procès-éclair, avec un « flag » et des aveux, et qui est allé très vite.


              • bré-N’GUYEN (---.---.230.184) 9 mars 2007 11:54

                Nous vous soutenons Daniel !!!l’Injustice,ça gave trop Nous,on nous a piqué 2 de nos 3 bébés en PRISON SECRETE ! (ils apelent ça « placement » !)pour le MEME SCENARIO d’OUTREAU....DEPUIS 29 MOIS !on en peut plus !,,,scènes de cocaïneux-haineux-meurtres en cauchemards. http://LIBERTA.site.voila.fr merci pour ce ke tu as fait,ta jeunesse révoltée te dédouane. M.Mme Bré-N’Guyen O4 71 48 62 93


              • bré-N’GUYEN (---.---.201.151) 9 mars 2007 23:58

                Méfiez vous des crêches où on badigeone l’entrejambe de votre fifille avec de l’éosine (mercurochrome) !« pike,baton rouge !! »,,tous les enfants le disent,,,tout le monde le sait !,,sauf des obsédés dévoyés incompétents,,,=29 MOIS DE PLACEMENTS « SECRETS » !!!et on en a pris encore pour UN AN ! y’a pu de pleurs,,,une haine froide,,,nos fillettes sont anorexiques,caractérièles,,,en manques terribles d’AFECTION,,ici,en Cantal profond,sans écho,les tyrans judiciaires peuvent akumuler les bavures de potaches,,,« Si y’avait pas de délinquants,,,y’aurait pas de juge,alors,,, » http://CANTAL-BILE.site.voila.fr Fran & Yaô


              • hello (---.---.117.1) 15 février 2007 18:37

                Jetez donc un oeil sur la 2ème vidéo de ce site (en partant du bas de la page), et vous m’en direz des nouvelles :


                • Hira (---.---.36.163) 15 février 2007 21:52

                  Très bon article, mais les politiques vont spéculer sur le fait que les médias n’informent plus les citoyens et que ces derniers sont submergés d’une propagande qui leur parle de quelque chose d’autre.

                  Il faut persévérer et ne pas lâcher prise.


                  • Passant (---.---.219.216) 15 février 2007 23:49

                    En ce moment, ça n’arrive pas que dans la Justice...

                    Oui, c’est un très bon article et il faut aller de l’avant. Par rapport à la Justice, mais aussi ailleurs.


                  • Jean (---.---.159.227) 16 février 2007 12:51

                    Comme l’indiquait déjà un autre article :

                    http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=18423

                    le sujet a été à peu près banni de la campagne présidentielle.


                  • enzyme (---.---.189.229) 16 février 2007 11:44

                    Les deux lois sont profondément inégalitaires. Le riche avec un cabinet d’avocats « dévoué » pourra en tirer profit, mais pour le « fauché », ce sera pire qu’avant.


                    • Jean (---.---.159.227) 16 février 2007 12:52

                      Logique, donc, qu’il n’y ait pratiquement aucune publicité des travaux parlementaires en cours.


                    • Courouve (---.---.116.33) 16 février 2007 12:55

                      Les travaux parlementaires en cours :

                      information sur le site

                      http://www.assemblee-nationale.fr

                      http://www.senat.fr


                    • Sandrine (---.---.217.25) 16 février 2007 13:12

                      Mais pas dans les grands médias. Les débats parlementaires sont directement suivis par peu de gens, et pas régulièrement.

                      Du temps de la commission d’enquête, les grands médias étaient tous les jours pleins d’articles. Maintenant qu’on fait les lois, silence radio.


                    • (---.---.115.38) 16 février 2007 13:28

                      Ne comptez pas sur la TV, ni sur les grands journaux, pour nous tenir informés des coups fourrés législatifs et réglementaires. La dernière année de la législature Jospin, ce fut pareil. Y compris en matière de justice : procédure sommaire de rejet sans motivation des pourvois en cassation, etc...


                    • Rdd (---.---.43.102) 16 février 2007 15:41

                      Comment voulez-vous que les politiques puissent réformer la Justice ? En voilà encore une :

                      Vendredi 16 février 2007, 15h02

                      Chargés de mission de la ville de Paris : validation des mises en examen

                      PARIS (AP) - La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a validé vendredi les mises en examen de quatre anciens directeurs de cabinet de Jacques Chirac à la mairie de Paris dans le cadre de l’enquête sur les chargés de mission de la capitale, a-t-on appris de sources judiciaires.

                      Dans ce dossier, Michel Roussin, Robert Pandraud, Daniel Naftalski et Rémy Chardon, quatre anciens directeurs de cabinet de Jacques Chirac, alors qu’il était maire de Paris entre 1977 et 1995, contestaient les poursuites les visant.

                      (...)

                      L’information judiciaire a été ouverte en janvier 1999 suite à une plainte d’un contribuable parisien notamment pour « détournement de fonds publics », « faux et usage de faux ». Vingt personnes sont mises en examen dans cette enquête, dirigée par la juge financière Xavière Siméoni, soit pour avoir bénéficié d’un emploi fictif à la mairie de Paris, soit pour avoir fourni l’un ou plusieurs de ces emploi.

                      Parmi les bénéficiaires se trouvent notamment la femme de l’ancien ministre Hervé de Charette, François Debré, frère de Jean-Louis Debré, le secrétaire général de FO Marc Blondel ou encore Raymond-Max Aubert, l’ancien maire RPR de Tulle (Corrèze).

                      Il n’est pas exclu que Jacques Chirac soit convoqué par la juge Siméoni à l’expiration de son mandat présidentiel...

                      (...)


                      • (---.---.155.66) 22 février 2007 17:20

                        Il y a aussi Huchon, en ce moment...


                      • Marie-France (---.---.36.15) 16 février 2007 16:30

                        Cette histoire de la priorité donnée à des professeurs d’université pour devenir juges administratifs, ou la possibilité pour des juges d’être en même temps des enseignants du supérieur, est une belle illustration des anachronismes favorisant sans raison valable des corporations et des osmoses entre institutions.

                        Peut-être que ces dispositions ont pu s’expliquer lorsqu’elles ont été prises pour la première fois, mais à présent cela fait belle lurette qu’elles auraient dû être abrogées. Comme plein d’autres situations de ce genre.

                        Il n’y a pas que le développement des contentieux des universités et de la recherche. Plus globalement, on a affaire à un processus de contractualisation et de privatisation de ces institutions qui, si on continue à les mélanger avec les institutions de la Justice, ouvrira de plus en plus la voie à des dangers de confusion d’intérêts.


                        • Paul (---.---.96.248) 16 février 2007 19:33

                          Il y a quelques décennies, les universités étaient beaucoup moins liées au secteur privé et les contentieux de la Recherche et de l’Enseignement supérieur étaient rares. Les administrations n’avaient pas, non plus, développé ces services juridiques pléthoriques pour tenir tête aux administrés.

                          C’est évident que la situation a beaucoup évolué, mais tout porte à penser qu’il n’y a eu aucune évaluation des implications de cette évolution au niveau des rapports entre les Universités et la Justice.

                          Par exemple, les cours de Sciences Po forment souvent des dirigeants et des juristes des administrations et du secteur privé. Or, parmi ses enseignants actuels figure en toute légalité le président de la Section du Contentieux du Conseil d’Etat, Bernard Stirn. Voir :

                          http://www.sciences-po.fr/formation/master_scpo/mentions/affaires_publiques/liste_electifs _s1.htm

                          http://www.sciences-po.fr/formation/master_scpo/mentions/affaires_publiques/pdf/electifs_p rintemps_2006/stirn_gallet.pdf

                          http://www.admi.net/jo/20030225/MENP0300164D.html

                          Sur la relation des nominations de professeurs associés fournie dans ce dernier lien, on trouve également le président de la Cour Administrative d’Appel de Lyon Daniel Chabanol, auteur de l’édition commentée « Le Moniteur » du Code de Justice Administrative, un ouvrage devenu classique. Ce magistrat a été professeur associé à l’Université de Saint-Etienne pendant une dizaune d’années (1993-2004).

                          Un autre professeur associé à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris (depuis 2004) est le Président de la Cour de Cassation Guy Canivet, qui l’avait été auparavant à l’Université Paris V (1994-2004), voir :

                          http://fr.wikipedia.org/wiki/Guy_Canivet

                          Les professeurs associés sont normalement rémunérés par le Ministère de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche pour cette partie de leur activité.

                          Avec tout le respect dû aux nombreux magistrats qui travaillent en même temps dans l’enseignement supérieur, il paraît en effet équitable de penser que les citoyens ont le droit de demander un examen circonstancié, par une commission d’enquête indépendante, du bien-fondé de ce fonctionnement institutionnel hérité des décennies précédentes, à la lumière de l’évolution récente de la société.


                        • Thierry (---.---.152.62) 16 février 2007 20:09

                          Mais si vous vous demandez pourquoi les politiques ne veulent pas mettre en cause ces situations qui ne concernent pas que la Justice, la réponse est très simple : ils sont les premiers à en profiter. A commencer par Pascal Clément, qui est resté président du Conseil général de la Loire tout en étant Garde des Sceaux.

                          Lire cet autre article de la même auteure :

                          http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=15260

                          lundi 6 novembre 2006

                          Quelle apparence d’impartialité pour le médiateur de la République et le garde des Sceaux ?

                          Le projet de réforme de la Justice faisant suite aux conclusions de la Commission d’enquête parlementaire sur Outreau prévoit que les plaintes mettant en cause des magistrats de l’ordre judiciaire soient filtrées par le médiateur de la République d’abord, ensuite par le garde des Sceaux. Indépendamment de l’indispensable débat sur le contenu des trois projets de loi récemment déposés, la question se pose de savoir si l’actuelle pratique institutionnelle garantit suffisamment l’apparence d’impartialité d’instances susceptibles de disposer d’un pouvoir éliminatoire à l’égard des dossiers déposés. Malheureusement, tel ne semble pas être le cas, avec tout le respect dû aux institutions et aux personnes. C’est sans doute par un examen rigoureux de ces questions, et d’autres sujets analogues, que devrait commencer toute opération visant à réformer notre Justice.

                          L’identité des personnes est sans importance. Les appartenances politiques, également. L’intégrité des intéressés n’est pas, non plus, en cause. On ne peut d’ailleurs pas reprocher à des responsables d’exercer des fonctions auxquelles ils ont été régulièrement nommés. Il s’agit d’une question plus profonde de mode de fonctionnement, et les situations que j’évoque plus bas ne sont pas exceptionnelles, au point que les institutions françaises ont souvent été condamnées par la Cour européenne des Droits de l’homme (CEDH) pour des violations de l’exigence d’apparence d’impartialité. Deux exemples sont les arrêts Kress et Martinie, sur un problème qui ne paraît pas définitivement réglé (mes articles des 25 juillet et 4 août). Pour la CEDH, il en va d’un « intérêt supérieur » des administrés qui constitue un droit fondamental, du moment que la Cour s’estime compétente pour en connaître. Mais on peut craindre qu’au sein de l’Etat français, les carrières des politiques et des fonctionnaires haut placés ne soient devenues prioritaires.

                          Ministre de la Fonction publique, de la réforme de l’État et de l’aménagement du territoire du 7 mai 2002 au 31 mars 2004, Jean-Paul Delevoye est devenu le 13 avril 2004 médiateur de la République. Il peut donc se retrouver dans une situation de juge et partie par rapport à un domaine d’éventuelles saisines du médiateur, susceptibles de mettre en cause sa propre responsabilité, celle de ses anciens collaborateurs ou encore celle de fonctionnaires qu’il a nommés étant ministre. Par rapport à des événements survenus en 2004, la prescription en matière de responsabilité administrative n’interviendra que le 1er janvier 2009. D’autres formes d’actions sont également possibles. Or, le médiateur détient d’importantes attributions et possibilités d’intervention en la matière (mes articles des 29 octobre et 1er novembre). Jean-Paul Delevoye est également, en tant qu’ancien ministre, potentiellement concerné par d’éventuels contentieux en justice. Les mêmes types de problèmes se posent par rapport à la responsabilité d’autres ministères du gouvernement dont il a fait partie et dont il était censé être solidaire. Ancien président de l’Association des maires de France, Jean-Paul Delevoye est aussi maire de Bapaume, dans le Pas-de-Calais.

                          Pascal Clément est resté président du Conseil général de la Loire après sa nomination aux fonctions de garde des Sceaux, le 2 juin 2005. Il venait de bénéficier la veille, en tant que président dudit Conseil général, d’une décision (arrêt 274053 du 1er juin 2005) par laquelle le Conseil d’Etat a annulé une ordonnance du 22 octobre 2004 du juge des référés du Tribunal administratif (TA) de Lyon. Le TA de Lyon avait invalidé une décision du 27 septembre 2004 de la commission d’appel d’offres du département de la Loire, annulé la procédure de passation du marché ayant pour objet la restauration extérieure du chevet de l’église du Couvent des Cordeliers à Saint-Nizier-sous-Charlieu et enjoint le Conseil général de recommencer l’appel d’offres au stade de la mise en concurrence. Au moment de l’arrivée de Pascal Clément place Vendôme, l’arrêt 274053 du Conseil d’Etat était encore susceptible, entre autres, de recours en révision et en rectification d’erreur matérielle. D’après sa biographie sur Wikipedia, Pascal Clément est également le conjoint d’une magistrate.

                          Le garde des Sceaux n’est pas seulement l’autorité de nomination par délégation des juges administratifs et de l’ordre judiciaire. Il propose également les nominations des conseillers d’Etat, et même du vice-président du Conseil d’Etat...

                          (...)


                        • Andrée (---.---.36.211) 19 février 2007 11:26

                          Un autre exemple de simultanéité de fonctions magistrat - professeur d’université est celui de l’actuel président de la Cour Administrative d’appel de Paris, Pierre-François Racine, professeur associé à Paris-Dauphine depuis 2002 :

                          http://www.admi.net/jo/20020430/MENP0200931D.html

                          et rémunéré donc à mi-temps, à ce titre, par le Ministère de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.

                          L’Université Paris-Dauphine (Paris IX) est spécialisée dans le Droit, la Gestion, l’Economie, la Sociologie, la Politique... Les liens de cette Université avec le secteur privé sont très importants. Voir, par exemple :

                          http://forumentreprises.dauphine.fr

                          Pierre-François Racine vient d’être nommé président du comité de règlement des différends et des sanctions (CRDS) de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Voir :

                          http://www.professionpolitique.info/nem.php?id_article=21790#racine


                        • Jean-Pierre (---.---.25.24) 16 février 2007 22:33

                          L’idée de cette commission d’enquête, on ne peut qu’y souscrire. Il y a ensuite la question des modalités.

                          On a bien vu quel était le point faible des justiciables et des citoyens lors de l’enquête sur l’affaire d’Outreau.

                          Les politiques les ont écoutés, mais les parlementaires menaient la barque. A la fin, le Garde des Sceaux a fait ce qu’il a voulu, soutenant à fond les corporations influentes, avec l’aide des états-majors politiques.

                          Cette logique est à éviter. Il faut quelque chose d’autre.


                          • XQ (---.---.191.87) 16 février 2007 23:13

                            Une question qu’il paraît indispensable de soulever, à propos du fisaco de la « reforme Outreau », est celle de l’indépendance des parlementaires eux-mêmes. Non seulement à cause des « affaires », mais aussi parce qu’avec l’approche des présidentielles ils devaient penser à leur propre investiture pour les législatives.

                            C’est sûr que le poids des directions des partis politiques s’est à la fin avéré déterminant.


                          • César (---.---.102.232) 17 février 2007 11:07

                            Bonjour Isabelle,

                            Vous écrivez vraiment à contre-courant, et vous avez raison. Il règne dans ce pays une incroyable hypovcrisie. La devise « Liberté, Egalité, Fraternité », ceux qui sont quelque peu « installés » s’en fichent.

                            On attend que les gens meurent de faim ou de froid, et alors on voit courir associations, « personnalités », « intellectuels », fondations, vedettes de toutes extractions ... avec le « coeur » dans la main. Mais le SYSTEME, pas question de lui demander comment cela a pu arriver.

                            Un étudiant qui se fait débouter par une ordonnance d’un juge professeur d’université, un justiciable qui ne connaîtra jamais un proche lien de famille entre le juge et une partie adverse... Qui s’en soucie ?

                            C’est tout le drame de cette société française en décomposition.


                            • Andrée (---.---.36.211) 19 février 2007 11:28

                              Malheureusement, cette évolution risque de se poursuivre encore et la situation, avec les délocalisations, de se dégrader à des extrêmes jamais vus.


                            • Flag (---.---.131.150) 26 février 2007 12:23

                              Bonjour Isabelle,

                              A propos de votre article d’hier dont je reproduis un extrait, il me paraît évident, à la lumière de ces éléménts nouveaux (et si Chirac ne se représente pas, il sera logiquement lui-aussi membre du Conseil Constitutionnel) que les institutions françaises se trouvent dans une phase d’involution et de durcissement, en aucun cas de réforme.

                              Ce que l’on appelle pudiquement « modrrnisation », c’est le retour au haut Moyen-Age.

                              Bravo pour ce morceau de votre article d’hier :

                              http://www.geocities.com/petite_citoyenne/article250207.html

                              Conseil Constitutionnel, lois sur la Justice et impartialité des institutions

                              (Isabelle Debergue, 25 février 2007)

                              Le Président de la République a nommé vendredi Jean-Louis Debré à la tête du Conseil Constitutionnel. Deux autres nouveaux membres sont : Renaud Denoix de Saint-Marc, nommé par le Président du Sénat, et Guy Canivet qui l’a été par la présidence de l’Assemblée Nationale. La veille, les deux instances délibérantes du Parlement avaient définitivement adopté, avant d’interrompre leurs séances jusqu’au mois de juin, plusieurs textes législatifs dont deux sur la Justice : la loi organique sur la formation et la responsabilité des magistrats, et la loi sur l’équilibre de la procédure pénale. La première a fait le jour même l’objet d’une saisine du Conseil Constitutionnel par le Premier Ministre. Quant aux trois nominations à ce Conseil, il leur a aussitôt été reproché un certain manque de pluralité politique. Les informations sommaires des médias à propos des lois sur la Justice ne s’accompagnent guère de commentaires. Mais que peuvent raisonnablement en penser les citoyens ?

                              (...)

                              Le contenu détaillé des deux lois sur la Justice, telles qu’elles viennent d’être adoptées, fera l’objet d’une analyse ultérieure. Ces textes comportent toujours de nombreux aspects négatifs (voir mes articles des 25 décembre et 14 février). Cependant, sur un point la loi organique adoptée est moins défavorable pour les justiciables que la première version du Sénat : la notion de faute disciplinaire des magistrats n’est pas vidée de son contenu.

                              Mais Pascal Clément a tenu le jour même devant le Sénat ces propos inquiétants : « Au cours des débats dans votre assemblée, la définition de cette faute [des magistrats] a été modifiée afin de mieux l’adapter aux exigences constitutionnelles. Je regrette que cette nouvelle définition n’ait malheureusement pas été retenue par la commission mixte paritaire... Le terme de « réformette » que j’ai entendu ça et là n’émane souvent pas de professionnels de la justice, avocats, magistrats ou policiers, mais bien de ceux qui dans tous les domaines regrettent le « grand soir »... Ces derniers refusent de voir les avancées essentielles effectuées... » . Pareil, à peu de chose près, devant l’Assemblée Nationale. Des remarques qui suggèrent un rejet de la définition finalement adoptée pour la faute disciplinaire des magistrats, et se rapprochent de celles adressées par le Garde des Sceaux à l’Assemblée Nationale le 19 décembre : « ce sont les magistrats... qui ont souhaité cette réforme : qu’on leur fasse confiance, ce sont des professionnels ! ».

                              Les acquittés d’Outreau, qui ont subi jusqu’à trente mois de détention provisoire étant innocents, et qui ont exprimé leur déception devant les « lois Clément » en décembre dernier, seraient-ils des nostalgiques du « grand soir » ? Une telle appréciation paraît parfaitement infondée. Quant à la définition de la faute des magistrats, la version initiale du Sénat soutenue par Pascal Clément était : « Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d’une ou plusieurs règles de procédure constituant des garanties essentielles des droits des parties constatée par une décision de justice devenue définitive ». Mon article du 14 février en dénonçait l’absence de contenu réel et le piège qu’elle comportait pour les justiciables. Car la vocation normale des décisions de justice est de juger les affaires au fond, et pas de constater telle ou telle faute d’un magistrat. A la place, la version finale adoptée par le Parlement prescrit : « Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d’une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, commise dans le cadre d’une instance close par une décision de justice devenue définitive », ce qui est de loin préférable mais semble avoir déplu à la magistrature et au Ministère de la Justice.

                              Que dire, dans ce contexte, des trois nominations récentes au Conseil Constitutionnel ? Il s’agit de trois magistrats de carrière : un juge de l’ordre judiciaire (Jean-Louis Debré) et deux présidents des Hautes Juridictions françaises. Renaud Denoix de Saint-Marc fut pendant onze ans vice-président du Conseil d’Etat jusqu’au 3 octobre dernier, et Guy Canivet est Premier Président de la Cour de Cassation depuis 1999. Alors que : a) la réforme de la Justice semble susciter de nombreuses tensions et connaître des avatars inattendus ; b) le monde politique avait pris un certain nombre d’engagements pour « après 2007 » ; c) l’Union Syndicale des Magistrats maintient, dans sa proposition de « Pacte pour la Justice », son opposition à la réforme qu’auraient pu espérer de nombreux citoyens. Avec tout le respect dû à ces magistrats, de telles nominations sont-elles bien conformes à la « théorie des apparences » souvent invoquée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) dans les nombreuses condamnations subies par la France au cours des années récentes ? Mes articles des 13 septembre et 6 novembre avaient déjà évoqué des questions analogues. Ceux des 25 juillet et 4 août ont rappelé les arrêts de la CEDH et les problèmes posés par l’application en France de cette jurisprudence. Mais la situation qui vient de se créer me semble mériter quelques commentaires additionnels.

                              Malgré quelques flottements, le Gouvernement a logiquement saisi le Conseil d’Etat à propos des projets de loi sur la Justice début septembre, au moment où Renaud Denoix de Saint-Marc en était le vice-président. Ce dernier doit donc être regardé, sauf démenti, comme ayant participé à l’élaboration de l’avis rendu par la Haute Juridiction administrative et dont le Garde des Sceaux a fait état en octobre dernier. Il paraît donc contraire à l’exigence de l’apparence d’impartialité, ainsi qu’au principe de la séparation des pouvoirs et des fonctions, qu’un magistrat étant intervenu en tant que conseiller du gouvernement dans l’élaboration d’une loi en soit, quelques mois plus tard, juge constitutionnel. Plus globalement, des avis produits par le Conseil d’Etat après le départ de ce magistrat peuvent se baser sur ceux qui avaient été émis lorsqu’il en exerçait la vice-présidence. Le même raisonnement s’applique à Jean-Louis Debré, président de l’Assemblée Nationale qui a adopté la loi dont le Conseil Constitutionnel est saisi mais qui a également présidé l’élaboration de bien d’autres lois sur lesquelles la législature suivante peut débattre à nouveau. Quant à Guy Canivet, il s’est publiquement exprimé sur la réforme de la Justice et provient d’une juridiction directement concernée par le contenu de la loi litigieuse (voir mon article du 28 août).

                              Aux termes de l’article 41 de la Constitution, le Conseil Constitutionnel doit se prononcer dans un délai de huit jours à compter de sa saisine par le Gouvernement. En l’espèce, avant le 3 mars. Le 4 mars, Jean-Louis Debré sera le nouveau président de ce Conseil et Renaud Denoix de Saint-Marc et Guy Canivet remplaceront respectivement Simone Veil et Claude Colliard. A supposer que le Conseil Constitutionnel statue sans imprévu dans le délai légal, l’affaire ne sera pas close car : a) en cas de succès total ou partiel de la saisine en cours, le Parlement devra examiner à nouveau la loi attaquée ; b) dans le cas contraire, il restera la suite annoncée pour la législature suivante, avec toutes les promesses du monde politique. Quoi qu’advienne, la question de l’apparence d’impartialité du nouveau Conseil Constitutionnel risque de se poser, alors qu’il aurait été possible de faire prévaloir une meilleure séparation des carrières et une plus large ouverture de l’accès au sommet des institutions.

                              (...)


                              • Isabelle Debergue Isabelle Debergue 27 février 2007 01:00

                                Bonjour, et merci pour ce commentaire !

                                A propos de mon article d’aujourd’hui, je dois ajouter ce post-scriptum :

                                En écrivant que le Conseil Constitutionnel doit se prononcer dans un délai de huit jours sur la loi organique concernant la responsabilité des magistrats, je me suis basée sur le délai prévu pour les saisines contentieuses portant sur des questions de recevabilité. Mais, sur le plan formel, tel n’est pas en principe le cas ici. Pour un contrôle de constitutionnalité, l’article 61 de la Constitution dit notamment :

                                « Les lois organiques, avant leur promulgation, et les règlements des assemblées parlementaires, avant leur mise en application, doivent être soumis au Conseil Constitutionnel qui se prononce sur leur conformité à la Constitution.

                                Aux mêmes fins, les lois peuvent être déférées au Conseil Constitutionnel, avant leur promulgation, par le Président de la République, le Premier Ministre, le Président de l’Assemblée Nationale, le Président du Sénat ou soixante députés ou soixante sénateurs.

                                Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, le Conseil Constitutionnel doit statuer dans le délai d’un mois. Toutefois, à la demande du Gouvernement, s’il y a urgence, ce délai est ramené à huit jours.

                                (...) »

                                (fin de citation)

                                Le délai normal, pour le contrôle de la constitutionnalité d’une loi organique ou en cas de différend sur la constitutionnalité d’une loi, est donc d’UN MOIS. Sauf si le Gouvernement signale une urgence, dans lequel cas il est ramené à huit jours.

                                Une incertitude persiste donc, faute d’autres informations, quant à la composition du Conseil Constitutionnel qui examinera la loi organique sur la responsabilité des magistrats.

                                Amitiés

                                Isabelle


                              • Isabelle Debergue Isabelle Debergue 27 février 2007 01:09

                                J’écris « aujourd’hui », car l’article vient de paraître sur Agoravox à l’adresse :

                                http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=19875


                              • Eccoli qua (---.---.157.253) 1er mars 2007 19:32

                                Isabelle Debergue et De ço qui calt ? avaient bien raison de signaler que rien n’était joué. Le Conseil constitutionnel vient d’invalider :

                                http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2007/2007551/2007551dc.htm

                                les articles 14, 21, 24 et 34 de la loi organique relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats. Ce sont les articles suivants, sauf méprise de ma part :

                                http://ameli.senat.fr/publication_pl/2006-2007/248.html

                                Article 14

                                L’article 43 de l’ordonnance n° 58‑1270 du 22 décembre 1958 précitée est ainsi modifié :

                                1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

                                « Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d’une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, commise dans le cadre d’une instance close par une décision de justice devenue définitive. » ;

                                2° Au début du dernier alinéa, le mot : « Cette » est remplacé par le mot : « La ».

                                Article 21

                                Après l’article 48 de la même ordonnance, il est inséré un article 48-2 ainsi rédigé :

                                « Art. 48-2. - Toute personne physique ou morale qui estime, à l’occasion d’une affaire la concernant, que le comportement d’un magistrat est susceptible de constituer une faute disciplinaire peut saisir directement le Médiateur de la République d’une réclamation.

                                « Pour l’examen de cette réclamation, le Médiateur de la République est assisté d’une commission ainsi composée :

                                « 1° Deux personnalités qualifiées n’appartenant pas à l’ordre judiciaire, désignées respectivement par le Président de l’Assemblée nationale et par le Président du Sénat ;

                                « 2° Une personnalité qualifiée désignée par le Médiateur de la République ;

                                « 3° Une personnalité qualifiée n’appartenant pas à l’ordre judiciaire, désignée conjointement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général près la Cour de cassation.

                                « Les membres de la commission sont nommés pour une durée de cinq ans non renouvelable.

                                « En cas de vacance d’un siège pour quelque cause que ce soit, il est pourvu à la désignation, dans les conditions prévues au présent article, d’un nouveau membre pour la durée du mandat restant à courir. Son mandat peut être renouvelé s’il a occupé ces fonctions de remplacement pendant moins de deux ans.

                                « La commission est présidée par le Médiateur de la République.

                                « Le Médiateur de la République peut solliciter tous éléments d’information utiles des premiers présidents de cours d’appel et des procureurs généraux près lesdites cours, ou des présidents des tribunaux supérieurs d’appel et des procureurs de la République près lesdits tribunaux.

                                « Il ne peut porter une quelconque appréciation sur les actes juridictionnels des magistrats.

                                « Lorsque la réclamation n’a pas donné lieu à une saisine du Conseil supérieur de la magistrature par le chef de cour d’appel ou de tribunal supérieur d’appel intéressé, le Médiateur de la République la transmet au garde des sceaux, ministre de la justice, aux fins de saisine du Conseil supérieur de la magistrature, s’il estime qu’elle est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire. Il avise l’auteur de la réclamation et tout magistrat visé par celle-ci de la suite qu’il lui a réservée.

                                « Copie des pièces transmises par le Médiateur de la République au ministre de la justice est adressée à tout magistrat visé.

                                « Le ministre de la justice demande une enquête aux services compétents. Des poursuites disciplinaires peuvent être engagées par le ministre de la justice dans les conditions prévues à l’article 50-1 et au premier alinéa de l’article 63. Le ministre de la justice avise le Médiateur de la République des résultats de l’enquête et des suites qu’il lui a réservées.

                                « Lorsque le ministre de la justice décide de ne pas engager de poursuites disciplinaires, il en informe le Médiateur de la République par une décision motivée. Celui-ci peut établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel. »

                                Article 24

                                L’article 38-1 de la même ordonnance est complété par un alinéa ainsi rédigé :

                                « À l’expiration de cette période, s’il n’a pas reçu une autre affectation, le procureur général est nommé de droit, dans les formes prévues à l’article 38, à un emploi hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation. Il en est de même dans le cas où il est déchargé de cette fonction avant l’expiration de cette période. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l’effectif organique de la Cour de cassation. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction. »

                                Article 34

                                Le second alinéa de l’article 38-1 de l’ordonnance n° 58‑1270 du 22 décembre 1958 précitée est applicable aux procureurs généraux nommés antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi organique.


                                • Eccoli qua (---.---.157.253) 1er mars 2007 19:53

                                  http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2007/2007551/2007551dc.htm

                                  Décision n° 2007-551 DC du 1er mars 2007

                                  Loi organique relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats

                                  Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 22 février 2007, par le Premier ministre, conformément aux articles 46, alinéa 5, et 61, alinéa 1er, de la Constitution, de la loi organique relative au recrutement, à la formation et à la discipline des magistrats ;

                                  LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

                                  Vu la Constitution ;

                                  Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

                                  Vu l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État ;

                                  Vu l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

                                  Vu la loi organique n° 93-1252 du 23 novembre 1993 sur la Cour de justice de la République ;

                                  Vu la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 modifiée sur le Conseil supérieur de la magistrature ;

                                  Le rapporteur ayant été entendu ;

                                  1. Considérant que la loi organique soumise à l’examen du Conseil constitutionnel comporte trente-six articles regroupés en trois chapitres ; qu’elle a été adoptée sur le fondement du troisième alinéa de l’article 64 de la Constitution et du dernier alinéa de ses articles 65 et 68-2, dans le respect des règles de procédure fixées par son article 46 ; qu’elle modifie l’ordonnance du 22 décembre 1958 et les lois organiques des 23 novembre 1993 et 5 février 1994 susvisées ;

                                  - SUR LE CHAPITRE IER :

                                  2. Considérant que le chapitre premier de la loi organique, intitulé : « Dispositions relatives à la formation et au recrutement des magistrats », comporte les articles 1 à 13 ; qu’il n’appelle pas de remarque de constitutionnalité ;

                                  - SUR LE CHAPITRE II :

                                  3. Considérant que le chapitre II de la loi organique, intitulé : « Dispositions relatives à la discipline », comporte les articles 14 à 22 ; qu’il est relatif, en son article 14, à la définition de la faute disciplinaire et, en son article 21, à l’examen des réclamations portant sur le comportement d’un magistrat ;

                                  . En ce qui concerne les normes applicables :

                                  4. Considérant qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ;

                                  5. Considérant qu’aux termes de l’article 64 de la Constitution : « Le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. - Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature. - Une loi organique porte statut des magistrats. - Les magistrats du siège sont inamovibles » ;

                                  . En ce qui concerne la définition de la faute disciplinaire :

                                  6. Considérant que l’article 14 de la présente loi modifie l’article 43 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée qui définit la faute disciplinaire comme « tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l’honneur, à la délicatesse ou à la dignité » ; que le 1° de cet article 14 précise que « constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d’une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, commise dans le cadre d’une instance close par une décision de justice devenue définitive » ;

                                  7. Considérant que l’indépendance de l’autorité judiciaire, garantie par l’article 64 de la Constitution, et le principe de la séparation des pouvoirs, proclamé par l’article 16 de la Déclaration de 1789, n’interdisent pas au législateur organique d’étendre la responsabilité disciplinaire des magistrats à leur activité juridictionnelle en prévoyant qu’une violation grave et délibérée d’une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties puisse engager une telle responsabilité ; que, toutefois, ces mêmes principes font obstacle à l’engagement de poursuites disciplinaires lorsque cette violation n’a pas été préalablement constatée par une décision de justice devenue définitive ;

                                  8. Considérant, dès lors, qu’il y a lieu de déclarer contraires à la Constitution les dispositions du 1° de l’article 14 de la loi organique ; qu’il en va de même des dispositions de coordination prévues par son 2°, qui en sont inséparables ;

                                  . En ce qui concerne l’examen des réclamations portant sur le comportement d’un magistrat :

                                  9. Considérant que l’article 21 de la loi organique insère dans l’ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée un nouvel article 48-2 relatif à l’examen des réclamations des justiciables portant sur le comportement d’un magistrat ; que cet article 48-2 dispose que toute personne physique ou morale qui estime, à l’occasion d’une affaire la concernant, qu’un tel comportement est susceptible de constituer une faute disciplinaire, peut saisir directement le Médiateur de la République d’une réclamation ; qu’il prévoit que, pour l’examen de cette réclamation, le Médiateur est assisté d’une commission qu’il préside et qui est composée de cinq autres personnes dont quatre au moins n’appartiennent pas à l’ordre judiciaire ;

                                  10. Considérant que l’article 16 de la Déclaration de 1789 et l’article 64 de la Constitution garantissent l’indépendance des juridictions ainsi que le caractère spécifique de leurs fonctions, sur lesquelles ne peuvent empiéter ni le législateur, ni le Gouvernement, non plus qu’aucune autorité administrative ;

                                  11. Considérant que, si le législateur organique a précisé que le Médiateur ne pouvait porter une appréciation sur les actes juridictionnels, le nouvel article 48-2 lui donne néanmoins le droit de « solliciter tous éléments d’information utiles » auprès des premiers présidents de cours d’appel et des procureurs généraux près lesdites cours, ou des présidents des tribunaux supérieurs d’appel et des procureurs de la République près lesdits tribunaux ; qu’il prévoit que, lorsqu’il estime que les faits en cause sont de nature à recevoir une qualification disciplinaire, le Médiateur transmet la réclamation « au garde des sceaux, ministre de la justice, aux fins de saisine du Conseil supérieur de la magistrature » ; que le garde des sceaux doit, dans tous les cas, demander une enquête aux services compétents ; que, s’il n’est pas tenu d’engager des poursuites disciplinaires, il doit, lorsqu’il ne le fait pas, en informer le Médiateur par une décision motivée ; que le Médiateur peut alors « établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel » ; qu’en reconnaissant au Médiateur l’ensemble de ces prérogatives, le législateur organique a méconnu tant le principe de la séparation des pouvoirs que celui de l’indépendance de l’autorité judiciaire ;

                                  12. Considérant qu’il s’ensuit qu’il y a lieu de déclarer contraire à la Constitution l’article 21 de la loi organique ;

                                  13. Considérant, en revanche, que les autres dispositions de son chapitre II n’appellent pas de remarque de constitutionnalité ;

                                  - SUR LE CHAPITRE III :

                                  14. Considérant que le chapitre III, intitulé : « Dispositions diverses et transitoires », comporte les articles 23 à 36 ;

                                  15. Considérant que l’article 24 de la loi organique complète l’article 38-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée, qui dispose que : « Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de procureur général près une même cour d’appel », par un second alinéa ainsi rédigé : « A l’expiration de cette période, s’il n’a pas reçu une autre affectation, le procureur général est nommé de droit, dans les formes prévues à l’article 38, à un emploi hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation. Il en est de même dans le cas où il est déchargé de cette fonction avant l’expiration de cette période. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l’effectif organique de la Cour de cassation. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction » ; que l’article 34 rend applicables ces dispositions aux procureurs généraux nommés antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi organique ;

                                  16. Considérant qu’aux termes du septième alinéa de l’article 65 de la Constitution : « La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet donne son avis pour les nominations concernant les magistrats du parquet, à l’exception des emplois auxquels il est pourvu en Conseil des Ministres » ; qu’aux termes de l’article 1er de l’ordonnance du 28 novembre 1958 susvisée : « ... il est pourvu en conseil des ministres : - aux emplois de procureur général près la Cour de cassation, de procureur général près la Cour des comptes, de procureur général près une cour d’appel... » ; qu’en vertu de l’article 38 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, les décrets portant nomination aux emplois hors hiérarchie du parquet, parmi lesquels figurent ceux d’avocat général à la Cour de cassation, sont pris par le Président de la République après avis de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature ;

                                  17. Considérant que l’article 24 de la loi organique prévoit que, dans certaines conditions, les procureurs généraux près des cours d’appel sont nommés « de droit » avocats généraux à la Cour de cassation ; que, toutefois, il serait procédé à ces nominations non par décret en Conseil des ministres, mais « dans les formes prévues à l’article 38 » de l’ordonnance du 22 décembre 1958, c’est-à-dire par décret simple du Président de la République ;

                                  18. Considérant que le septième alinéa de l’article 65 de la Constitution impose, dans ces conditions, l’avis du Conseil supérieur de la magistrature ; que, si la loi organique examinée, en renvoyant à l’article 38 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, prévoit bien un avis du Conseil supérieur de la magistrature, cet avis serait privé d’effet utile dès lors que la nomination serait de droit ;

                                  19. Considérant qu’il s’ensuit que l’article 24 de la loi organique ainsi que son article 34, qui en est inséparable, sont contraires à la Constitution ;

                                  20. Considérant que les autres dispositions du chapitre III de la loi organique n’appellent pas de remarque de constitutionnalité ;

                                  21. Considérant qu’ont un caractère organique, par elles-mêmes ou du fait de leur inséparabilité de dispositions organiques, toutes les dispositions de la présente loi,

                                  D É C I D E :

                                  Article premier.- Les articles 14, 21, 24 et 34 de la loi organique relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats sont déclarés contraires à la Constitution.

                                  Article 2.- Les autres dispositions de la même loi ne sont pas contraires à la Constitution.

                                  Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

                                  Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er mars 2007, où siégeaient : M. Pierre MAZEAUD, Président, MM. Jean-Claude COLLIARD et Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Pierre JOXE et Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER, M. Pierre STEINMETZ et Mme Simone VEIL.

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