Trop d’élus, trop de dépenses ou les deux ?
En France, 1 élu pour 100 habitants et 1 médecin pour 1100 habitants. A priori, pas de comparaison possible sauf que pour les médecins, on peine à en trouver dans des zones rurales alors que des élus, il y en a partout.
Pour les élus, il en va comme pour les médecins, il y a des spécialistes (parlementaires, conseillers intercommunaux, départementaux, régionaux) et des généralistes.
Maires et conseillers municipaux, en lien avec l’intercommunalité jouent ce rôle de généralistes sauf que la plupart du temps, ils ne gèrent pas grand-chose, faute de moyens financiers, humains et techniques pour remplir leur compétence prétendue générale. Les « spécialistes », eux, se trouvent au Conseil Départemental ou Régional ou bien à Paris ou à Bruxelles autant dire qu’on ne les voit le plus souvent sauf lors des campagnes électorales, et encore…
Trop d’élus ?
A cette question, on nous répond invariablement que les quelque 500 000 élus communaux ne coûtent quasiment rien et qu’ils sont sur le terrain tous les jours pour régler les problèmes du quotidien des administrés. On aimerait s’en persuader, mais la difficulté liée à l’émiettement des compétences entre les différents niveaux de gestion cités plus haut ne rend pas la vie facile aux élus municipaux qui répondent le plus souvent aux administrés : « Ce n’est pas de notre compétence, mais de celle de… (cochez le bon niveau). Pas simple pour les usagers !
Le nombre d’élus est trop important mais le diminuer ne résoudra jamais à lui seul la question de la dépense publique des collectivités locales.
A chaque niveau de collectivité, sa structure
Pas d’économies importantes à attendre de la diminution du nombre de communes si on ne touche pas à l’environnement politique, administratif et technique qui accompagne chaque assemblée délibérante en gros à tout ce réseau d’obligés et d’interdépendance.
L’exemple de la création des communautés de communes ou des Métropoles est là pour nous dire que les économies d’échelles qu’on aurait pu imaginer se sont traduites au contraire par de nouvelles embauches, étant entendu qu’un élu sans troupes n’a pas l’impression d’exister, et donc par des doublons.
La réforme calamiteuse des Régions censée produire des économies s’est au contraire traduite par une augmentation des dépenses étant entendu qu’on a gardé l’ensemble des élus des anciennes régions, qu’il a fallu construire ou louer des locaux plus grands, que les régimes indemnitaires des personnels ont été alignés sur la région la mieux-disante et que tout cela créé des frais de fonctionnements supplémentaires.
Les Conseils départementaux dans leur souci d’être au plus près (de maintenir sous tutelle ?) des communes et intercommunalités ont créé des « Maisons du Département » coûteuses en fonctionnement et qui ont été l’occasion de recruter de nouveaux agents : quels résultats aujourd’hui ?
Les freins aux économies « consenties »
Le réseau des collectivités locales, plus dense en France que dans d’autres pays européens a une utilité mais qui ne concerne pas les administrés : elle sert au Sénat à maintenir son influence dans le paysage politique français. Selon la Constitution, le Sénat est le représentant des collectivités locales. Aucune raison, donc, qu’il se tire une balle dans le pied en acceptant la diminution de leur nombre et de leurs élus.
Le second frein au changement est que les collectivités locales sont une formidable pépinière pour les partis politiques et elles favorisent l’entre soi et la cooptation pour les futures échéances électorales. On ne connait pas le nombre exact de conseillers, chefs de cabinet, chargés de mission ou de communication et emplois politiques recrutés par les collectivités locales ( surtout dans les moyennes et les plus importantes), qui œuvrent moins pour le bien des administrés que pour celui de leur Maire ou Président et également pour le parti qu’ils représentent, le tout payé avec nos impôts locaux. Une forme de financement des partis politiques méconnue des citoyens… Par ailleurs, le cumul de mandats locaux est toujours d’actualité.
Le troisième frein, déjà évoqué, est qu’un élu dont les compétences sont confiées à une autre collectivité répugnera à voir ses effectifs de fonctionnaires diminuer et trouvera de nouvelles missions, pas toujours utiles, à leur faire assurer.
Voilà comment la dépense publique locale prospère… Et encore, on ne parle pas des contrats et marchés passés avec des entreprises pour leur assurer leurs fins de mois : la dépense publique a parfois du bon…
La contrainte, seule voie envisageable ?
Le précédent gouvernement avait déjà décidé de diminuer les dotations financières de l’Etat aux collectivités locales, les obligeant de fait à faire des économies sans trop avoir recours aux impôts locaux.
Cet épisode a permis de parvenir à des regroupements autoritaires d’intercommunalités ainsi qu’à des fusions de communes consenties. Les élus locaux semblent avoir découvert, à l’occasion de cette mesure de contrainte financière les vertus de la coopération avec les voisins, et c’est bien.
Le nouveau gouvernement, lui, va plus loin puisqu’il supprime la taxe d’habitation perçue par les communes et intercommunalités en affirmant compenser le manque de recettes occasionné : une belle hypocrisie à 10 Milliards.
L’Etat n’envisage pas un seul moment de compenser en totalité cette perte de recettes et le ferait-il que cela se résumerait à augmenter d’autres impôts qui annuleraient les quelques gains de pouvoir d’achat concédés aux plus modestes. L’augmentation du prix du diesel et du tabac procède d’ores et déjà de cette escroquerie. D’autre part, les communes et intercommunalités étant ainsi mis à la diète se hâteront d’augmenter les impôts fonciers et procèderont à des révisions à la hausse des tarifs des services publics locaux ou à leur suppression.
Au final, c’est bien le contribuable qui paiera la facture, pas le possédant.
D’autres solutions ?
Oui : supprimer un niveau de collectivité et à ce jeu-là le Conseil Départemental qui a perdu beaucoup de ses compétences au profit de la Région lors des derniers transferts de 2015, apparaît comme le maillon faible entre des Régions puissantes et des intercommunalités désormais bien assises.
Il tire sa légitimité de l’action en faveur des populations fragile (aides sociales) ce qui constitue désormais environ les deux tiers de son budget. Certains Présidents de conseils départementaux demandent que l’Etat, qui ne compense plus la totalité des dépenses de RSA reprenne cette compétence à son compte. Allons plus loin, et recentralisons toutes les dépenses sociales au niveau de l’Etat qui les fera assumer par les CAF, déjà sur ce créneau.
Il ne restera plus alors qu’à confier la gestion des collèges à la Région (qui s’occupe déjà des lycées et des transports des élèves) ainsi que la gestion du réseau routier et de quelques politiques résiduelles pour vider totalement le Conseil départemental de son utilité et donc de supprimer un peu plus de 4100 mandats d’élus ainsi qu’un nombre indéterminé (mais important) de petites mains politiques, faire valoir de leurs élus.
Au bas mot, il y a plus d’un milliard d’euros à économiser sans que le service public soit altéré.
Intéressant, non ?
Poussons le bouchon un peu plus loin et intégrons les communautés de communes dans les Pays en leur donnant le statut d’une collectivité locale. Quatre ou cinq Pays par département, travaillant avec la Région sur l’aménagement du territoire au lieu d’une quinzaine de communautés de communes, il y a également là de belles synergies à trouver et aussi sans doute des économies à réaliser.
Mais il y a un hic à tout cela : si on laisse faire les élus, on n’a aucune chance d’arriver à cette organisation économe et pourtant toute aussi efficace, voire plus.
La parole est donc aux citoyens.
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