Conjoncture économique : des raisons d’espérer ?
Alors que les indicateurs macroéconomiques restent peu encourageants, certains signes venus du monde des entreprises peuvent inciter à plus d’optimisme. La reprise serait-elle en marche ?
L’année qui s’achève est l’une des pires que nous ayons connue. La crise est passée par là et la défiance structurelle des Français sur leurs capacités n’a cessé de croître. En termes de compétitivité, notre fameux « modèle français » révèle chaque jour davantage sa fragilité. La hausse de l’euro face aux autres devises (qui renchérit nos importations et rend plus difficiles nos exportations), le coût élevé de la main d’œuvre, la fiscalité des entreprises (parmi les plus lourdes), la complexité byzantine de notre système de droit (droit du travail en tête) contribuent à noircir le tableau. Et pourtant, alors même que les indicateurs macroéconomiques et structurels restent, eux aussi, bien sinistres – 2009, annus horribilis, s’achève avec une croissance négative de 2,1 %, un déficit record de 130 milliards d’euros et une dette gonflée à plus de 1 400 milliards – nous revendiquons un optimisme renforcé. En effet, l’arbre des données macro-économiques moroses ne doit pas cacher la forêt des vraies réussites d’entreprises françaises.
Le trop fameux slogan « pas de pétrole mais des idées », qui avait connu son heure de gloire dans les années 1970, n’a jamais été aussi vrai. Le traditionnel (et lourd) déficit de notre balance commerciale témoigne en effet bien plus d’une vigueur de la demande intérieure pour les produits importés que d’une faiblesse dans l’absolu de nos exportations. La France peut même, osons le dire, s’enorgueillir du dynamisme de ses entreprises à l’étranger. Nombreuses sont celles qui réussissent, par leurs seuls moyens, à pénétrer des marchés au-delà de nos frontières et à attirer la confiance d’investisseurs du monde entier.
Le cas, tout récent, de l’introduction en bourse particulièrement réussie de CFAO, la filiale distribution en Afrique du groupe PPR, en fournit un exemple éclairant. Que n’avait-on entendu, en effet, il y a quelques mois quand François-Henri Pinault avait annoncé son souhait de s’ouvrir aux investisseurs ! Inopportune pour les uns, suicidaire pour les autres, cette stratégie était, selon la plupart des commentateurs, une erreur que le marché se chargerait de sanctionner par sa passivité. Le marché, lui, en a décidé autrement. L’offre CFAO a été souscrite 2,5 fois, au prix de 26 euros par action, permettant à PPR de lever plus de 800 millions d’euros et de signer la plus importante introduction en bourse réalisée sur Euronext Paris ces dernières années. Ce succès est d’autant plus notable qu’une opération comparable menée exactement au même moment à la bourse allemande, et qui aurait dû être la plus grosse opération de ce type depuis plusieurs années, a tourné à la catastrophe : le numéro 1 allemand du BTP, Hochtief, a en effet échoué à céder 49% de sa filiale Hochtief Concessions, faute de souscripteurs.
Cet événement doit non seulement nous inciter à réviser nos a priori pessimistes sur l’image de nos entreprises auprès des investisseurs étrangers (ces derniers ayant souscrit à l’offre autant que les Français), mais pourrait bien se révéler, a posteriori, comme l’un des succès économiques majeurs de cette année. Keynes expliquait très justement que les cycles de croissance et de récession sont fortement liés aux anticipations des chefs d’entreprises. Ces derniers sont constamment à l’affût des signaux de confiance et de croissance et contribuent, en les révélant et en en tirant profit, au retour général de l’optimisme. Les anticipations positives affichées par certains alimentent en effet celles des autres. En tentant une entrée courageuse – et réussie – sur un marché boursier qui en était sevré depuis deux ans, PPR a peut-être donné au marché, sans le savoir, ce signal de la reprise qu’il attendait.
A rebours des impressions laissées par les mauvaises statistiques macroéconomiques – qui sont des symptômes et non des explications – la reprise viendra à n’en pas douter de l’audace d’entreprises et d’entrepreneurs qui, en période de doute, oseront assumer leur rôle d’éclaireurs, de « first mover », comme les nomment les théoriciens de la stratégie. C’est dire comme ce succès est une bonne nouvelle pour l’ensemble de notre économie.
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