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Les contes de la crise

L’augmentation sans précédent de la Masse Monétaire aux Etats-Unis du fait des baisses de taux quantitatives nourrit des craintes certes justifiées d’un retour brutal du contexte inflationniste. Pour autant, la seule augmentation de la base monétaire n’est pas, à elle seule, suffisante pour déclencher le feu de l’inflation car il convient - comme dans tout marché traversé de flux - d’analyser l’interaction entre l’offre de liquidités et sa demande...

A cet effet, Milton Friedman avait bien résumé cette équation en expliquant que " l’inflation est toujours et partout un phénomène monétaire " qui n’est pas nécessairement générée par une augmentation de la Masse Monétaire. Friedman accordait ainsi une importance aux seuls soldes de monnaie en circulation après avoir tenu compte de la demande et de l’usage fait de cette même monnaie : C’est donc les déséquilibres monétaires qui débouchent sur une situation inflationniste tout comme c’est l’excès de monnaie en circulation - bien plus que l’augmentation de la Masse Monétaire isolée de son contexte - qui provoque une hausse des prix. L’inflation étant donc toujours et partout la résultante d’un déséquilibre monétaire.

Par ailleurs, le phénomène déflationniste est lui aussi mal appréhendé d’une manière générale : Incarnant trop souvent le mal ultime et absolu, la déflation s’avère toutefois un traitement de choc nécessaire pour corriger les excès des diverses bulles secrétées par notre système financier. Lutter contre elle ne sert souvent qu’à prolonger l’agonie tout en creusant les déficits publics à l’image de la mort à petit feu de l’économie japonaise lors de la décennie perdue. Au demeurant, le parallèle entre le Japon de 1989 et les Etats-Unis de 2009 est troublant : A la suite du traumatisme généré par la conflagration d’une bulle, la montée en puissance de l’épargne privée fut obligatoirement compensée par une ascension vertigineuse des dépenses d’un Etat qui, grâce à la multiplication des émissions obligataires, prenait la relève afin d’empêcher l’économie de chavirer. Le tout dans un contexte de système bancaire en mal d’inspiration qui se contentait de la routine bien rassurante des achats massifs de Bons du Trésor émis pas son pays de tutelle...

En pleine phase de déni, les autorités US ne pouvant quant à elles tabler sur un secteur des exportations ayant évité au Japon le naufrage total devront soit se résoudre à laisser les créances douteuses et autres mauvais investissements disparaître sous le poids de la sélection Darwinienne des marchés soit contraindre les Banques à prêter aux acteurs de l’économie. Alors que le contre exemple nippon est la preuve vivante que l’intervention Etatique ne peut prévenir à la longue le dégonflement de la baudruche constituée par les actifs contaminés, les établissements de crédit Américains ne subissent par ailleurs aucune pression les forçant à accorder des crédits par un Ben Bernanke dont l’obsession se révèle être la solvabilité de ses Banques au détriment hélas de l’économie réelle...Etablissements de crédit et Banques Zombies bénéficient ainsi d’un traitement équivalent de la part d’une Réserve Fédérale US qui semble confuse.

Dans ces conditions, la formidable appréciation des Bourses Américaines - redevable certes en partie aux océans de liquidités ( par nature inflationnistes ) déversés en direction du système financier - ne pourrait-elle tout aussi bien être attribuée à la dépréciation généralisée des actifs Américains du fait de la déflation rampante ?

De fait, les Bourses aux Etats-Unis ont progressé de quelque 12% depuis début Juin pendant que le rendement du Bon à 10 ans déclinait d’environ 80 points de base jusqu’aux environs des 3.10%. Concentré sur le long terme, le marché obligataire raconte ainsi une histoire déflationniste fort divergente par rapport aux contes dont se berce un marché boursier - dont l’horizon d’investissement ne dépasse guère le trimestre ou le semestre - qui mise, lui, sur la reflation de l’économie. Les marchés Boursiers et Obligataires US ayant divergé notablement en quatre occasions ( Eté 1987, Automne 1994, Eté 1998, Hiver 2000 ) ces vingt dernières années, les statistiques privilégient la version du marché obligataire - qui prévoit pour demain un monde dominé par la déflation - car l’expérience a finalement démontré un alignement du marché Boursier sur le marché Obligataire...


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15 réactions à cet article    


  • W.Best fonzibrain 10 octobre 2009 13:31

    hello,


    mais le M3 n’est il pas en train de se contracter ?


    • Michel Santi Michel Santi 10 octobre 2009 13:47

      http://www.federalreserve.gov/releases/h6/current/ : M1 et M2 en augmentation nette depuis 2007 


    • nortydal 10 octobre 2009 16:35

      l’augmentation de la masse monétaire = création de richesse pour les gogos à la tête du pouvoir. Il faut pas s’attendre à un quelconque changement de politique dans les mois à venir.

      Pour votre exemple japonais, on peut rajouter comme différence que les Etats unis sont déjà largement endetté... ça donne une idée de la catastrophe à venir.

      « la formidable appréciation des Bourses Américaines », il faut relativiser cette hausse par rapport à la baisse constante du dollars. On voit déjà que certains Etats interviennent pour protéger leur exportations... la marge de manoeuvre se rétrécie. (imaginez un dollars à 1.70, l’once à 1300, un dow à 12000 et un barril de pétrole à 100 usd...).

      Un certain hasard morale est de rigueur actuellement, et tout et n’importe quoi devient réellement possible. L’argent est disponible, pas cher pour certains notament ceux qui ont leur entrées dans les différents ministères et sont les grands gagnants de cette illusion (on va encore entendre hurler face aux milliards de bénéfices de certaines banques), les autres doivent faire face à la réalité sociale et économique du « marché libre ».


    • lechoux 10 octobre 2009 14:23

      « Par ailleurs, le phénomène déflationniste est lui aussi mal appréhendé d’une manière générale : Incarnant trop souvent le mal ultime et absolu, la déflation s’avère toutefois un traitement de choc nécessaire pour corriger les excès des diverses bulles secrétées par notre système financier. »

      Tout à fait d’accord. C’est bien peu sérieux de crier au loup lorsqu’il y a un réajustement des prix après bien des abus inflationnistes. Comme les restaurateurs ainsi que l’industrie agroalimentaire pleuraient cet été, sur leur baisse d’activité ! Ils ne pleuraient pas en 2007 et 2008, par exemple des abricots vendus en grande surface jusqu’à 4,5 € le kilo, car c’était les vaches grasses.

      Monsieur Santi, quel est l’impact de l’intervention des pays asiatiques d’avant-hier, sachant qu’ils sont intervenus pour plus d’1 milliard de Dollars selon le Figaro, et quelle est leur possibilité d’intervention, vu les montants des masses monétaires présentées par la réserve fédérale américaine ( votre lien) ?


      • Michel Santi Michel Santi 10 octobre 2009 14:44

        Les pays Asiatique ne font que défendre la parité (peg) de leur propre monnaie vis-à-vis du dollar et ce pour des raisons stricement égocentriques : un affaiblissement du billet vert / appréciation de leur monnaie nuirait hautement à leurs exportations tout en dévalorisant leurs réserves encore trop souvent libellées majoritairement en dollars...

        Ces interventions, strictement limitées dans leurs propres devises versus le dollar, seront sans aucun effet sur la parité Euro / USD qui n’est en rien concernée et qui va poursuivre un lent mais inexorable mouvement ascendant. En fait, je penche pour une accélération de la hausse de l’Euro ces prochaines semaines. 


      • plancherDesVaches 10 octobre 2009 21:10

        Et si chacun est « égocentrique » parce qu’il a du dollar, où allons-nous... smiley


      • plancherDesVaches 10 octobre 2009 21:03

        Monsieur Santi. Je persiste.
        Dans le fait que l’attaque économique de la zone asiatique ne peut servir de quelconque référence dans la situation actuelle.
        A moins que votre jeune age ne vous ait fait oublié que :
        - cette crise fut locale. Sortir un élément de son contexte est la première erreur humaine qui est la plus exploitée par les politiques.
        - les Japonais viennent de changer de pouvoir politique en place depuis... 50 ans. Chapeau. Après 50 ans dont une bonne crise locale... les pourris ont bien su garder leur place. Mais bon : un japonais a l’esprit virtuel, c’est bien ce qui peut lui rester après une bombe atomique et une haine du ricain.
        - la conséquence du gentil retournement actuel est un chômage mondial normal. Cela ne vous rappelle-t’il pas une certaine situation du premier tiers du siècle dernier... ??

        Je suis pour ma part trop jeune pour me souvenir de tout cela, étant né en septembre 2008. Mais j’écoute énormément. Cela fait murir de façon accélérée.

        Ainsi, une inflation ne viendra pas de l’aspect monétaire. Mais de la panne des pompes à finance intermédiaires. On se recontacte dans trois mois et on en discute devant un thé au coin de la cheminée.
        Pas plus de trois mois sous peine de venir à vélo...


        • Michel Santi Michel Santi 11 octobre 2009 09:03

          Pour ma part, je ne crois pas du tout à un retour de l’inflation car, si sortie de crise il y a et il y aura, elle sera néanmoins accompagnée d’un chômage élevé. Autrement dit, la consommation restera faiblarde ce qui ne favorisera pas l’inflation. La sortie de crise bénéficiant d’abord aux Banques et aux acheteurs d’actifs Boursier, immobilier, etc...

          Merci pour la proposition / invitation de boire un thé mais mon grand âge m’autorise une bonne bouteiile de vin. 


        • amipb amipb 11 octobre 2009 18:47

          « Le japonais » n’a pas plus l’esprit virtuel que d’autres, loin de là. La culture traditionnelle et un certain nationalisme toujours de rigueur ont conservé le pouvoir à droite, sans compter le vieillissement important de la population, penchant donc naturellement vers le conservatisme.

          Il faut d’ailleurs rappeler que le nouveau pouvoir politique est plutôt « à gauche de la droite ».


        • lechoux 12 octobre 2009 13:44

          J’ai bien noté votre réponse Mr Santi. Malgré tout, quand vous dîtes : "Ces interventions, strictement limitées dans leurs propres devises versus le dollar, seront sans aucun effet sur la parité Euro / USD qui n’est en rien concernée...", leur intervention a quand même un impact sur la valeur de la devise Dollar, puisqu’il y a transfert de masse monétaire. Et l’Euro est également valorisé dans ces devises. De plus, pouvez-vous me dire quel est la masse monétaire potentielle de ces devises que ces pays sont en mesure de mobiliser pour maintenir le cours du dollar au regard du volume d’échanges qui les concernent ?
          Concernant l’évolution de la parité Euro/Dollar, la une des Echos vous donne raison.


          • Michel Santi Michel Santi 12 octobre 2009 14:13

            Non l’Euro n’est pas directement convertible contre ces monnaies Asiatiques cat, du fait de l’indexation de ces devises au Dollar, une double opération de change doit être en permanence réalisée : monnaie Asiatique / USD puis USD/Euro...

            « quel est la masse monétaire potentielle de ces devises que ces pays sont en mesure de mobiliser pour maintenir le cours du dollar au regard du volume d’échanges qui les concernent ? »
            Réponse : l’équivalent de leurs réserves en dollars


          • FYI FYI 14 octobre 2009 14:05

            J’ai beau me creuser les méninges mais quelqu’un aurait-il l’obligeance de m’expliquer la valeur ajoutée d’un financier ?


            • FYI FYI 14 octobre 2009 15:39

              La dette, il faut le rappeler conduit à l’esclavage, ce qu’à résumé Jean Baudrillard : « on revient avec le crédit à une situation proprement féodale, celle d’une fraction de travail due d’avance au seigneur, au travail asservi. »
              Le sociologue Immanuel Wallerstein a raison lorsqu’il affirme que » nous sommes entrés depuis trente ans dans la phase terminale du système capitaliste ».


              • lechoux 15 octobre 2009 16:05

                Merci Mr santi pour votre réponse. Avez-vous un ordre d’idée du montant de leur réserves en Dollar et ce qu’il représente vis à vis de la masse monétaire totale en Dollar et de la masse monétaire totale en Euros. Pour expliquer ma demande, je souhaite savoir s’ils pèsent sur le jeu en cours, sachant que le marché américain représente je crois, de mémoire, le marché européen+le marché africain+le marché moyen oriental.


                • lechoux 17 octobre 2009 13:45

                  Après réflexion, le montant de Dollars possédés par les pays asiatiques qui sont intervenus sur le Dollar doit correspondre au minimum à la valeur de leurs achats dans cette devise à un moment donné. Ce n’est pas un montant fixe, puisqu’il y a une balance commerciale entre leurs ventes et leurs achats dans cette devise. Quel est le montant du matelas en Dollars qu’ils conservent pour garantir le fonctionnement de leur économie et qui a pu être utilisé pour cette intervention ? Quels sont leurs achats en Dollars et quel est leur montant ? Je pars donc à la chasse ...

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