Le temps des dictatures
Alors que j’évoque depuis des années cette lente descente aux enfers des institutions européennes qui prennent la forme d’une incroyable hallucination libérale, que nous subissons les effets dévastateurs du référendum de 2005 , balayé d’un tour de passe -passe par des dirigeants toujours plus allergiques à la volonté populaire, je ne pensais pas avoir à dénoncer de si tôt les risques graves de décadence fascisante. A tel point qu’ à quelques mois de l’élection présidentielle du printemps prochain, l’on sent bien que les véritables enjeux ne se situent déjà plus de ce côté là de l’échiquier politique continental. Car le futur Président quelqu’il soit ne sera que le pion d’un manège bien huilé et qui se dispense désormais des choix électoraux.
Chaque jour nous apporte en effet son lot de décisions prises dans les cénacles du pouvoir européen sans que les peuples n’aient eu droit à la parole. Et le détricotage systématique des droits sociaux est la base du cocktail mortel injecté à des populations qui se soumettent impuissantes aux forces des marchés financiers.
Les gouvernements de la zone euro sont tous passés à droite, de toutes manières, les gouvernements socio-démocrates au pouvoir en Espagne, au Portugal et en Grèce avaient tous adopté une politique de droite et ne pouvaient continuellement perpétrer cette mystification de la réalité. Autant que la droite assume pleinement la purge imposée par le marché. Dorénavant tous les étages de la fusée récession sont en ordre de marche et pas un Etat ne manquera à l’appel de la réduction des déficits.
N’oublions pas que la droite est là pour réduire le rôle de l’Etat jusqu’à ce que le privé ait sabordé les derniers arpents du bien public. Jusqu’à ce qu’ un monopole privé ne prenne possession des ultimes bastions de ce qui faisait et encore il y a peu, le lien social. Cela passe par le réduction des dépenses, pas par l’augmentation des impôts, une insulte par les temps qui courent.
Et encore, si les 17 pays de la zone euro avaient au moins droit de regard, l’on pourrait évoquer l’urgence de la situation et se contenter d’aquiescer face aux bouleversements engendrés par les rodomontades des agences de notations, mais en bon démagogue, le duo franco-allemand dirigé par l’Armada bancaire ne demande rien à personne et insiste sur l’inélucabilité des réformes engagées qui seraient dictées par la main invisible du marché.
Rétorsions à l’encontre des mauvais gestionnaires, punitions envers les cigales qui laissent dériver les déficits, sacro-sainte indépendance de la BCE, gardienne du temple inflation qui n’est surtout pas là pour aider les pays endettés, pour toutes ces mesures qui placeront l’Allemagne et donc la Bundesbank au centre du système, il faut une révision des Traités européens que l’on se gardera bien entendu de faire ratifier par les Peuples en se contentant de faire voter les Assemblées en catimini, à l’abri des charmes de la démocratie.
Pour ce qui nous concerne, ce scénario n’a pas la moindre chance de varier d’un iota, que ce soit l’un ou l’autre des prétendants au trône. En effet, De Funès a déjà baissé pavillon en s’inclinant face au diktat allemand et Hollande en bon toutou flingueur des classes populaires va bien nous planter un drapeau aux étoiles dans le creux des reins.
Alors me direz-vous, que pourrait avoir à y redire des électeurs anesthésiés, persuadés dorénavant d’avoir vécu, comme ont voulu lui faire croire les tenanciers de la boutique Europe, au dessus de leurs moyens ?
Les peuples pourraient à juste raison condamner ceux-là mêmes qui se targuent de rigueur budgétaire d’avoir en réalité ét les fossoyeurs du denier public. Pour ne prendre que l’exemple français il n’est que de revenir sur la gabegie qu’ont représenté les mesures fiscales des dernières années, assumées par l’ensemble des majorités de tendance de droite ou sociale-démocrate.
Niches fiscales, passe-droits, bouclier fiscal, réduction de l’impôt sur la fortune, annulation des droits de successions, la France de De Funès a accumulé 100 milliards d’euros de dette supplémentaire par an, 500 milliards de plus imputables pour seulement 30 % à la crise tant invoquée (dixit la Cour des comptes). 500 milliards dérobés, confisqués aux deniers publics, partis en fumée vers les paradis fiscaux, évaporés à l’abri des coffres-forts genevois ou luxembourgeois. 500 milliards d’euros, un beau paquet cadeau pour les amis du Fouquet’s, pour les financiers de campagnes électorales, 500 milliards qui ne sont que la face émergée de l’iceberg, l’autre partie, la partie immergée elle, n’avait pas attendu les cadeaux fiscaux et s’était déjà formée bien avant l’arrivée du nabot.
L’Italie de Berlusconi a déposé ses comptes et son bilan dans les banques suisses, l’Allemagne a construit son soi-disant socle vertueux sur l’endettement de ses clients du sud, la Grande Bretagne ne veut surtout pas rentrer dans la zone euro, elle bénificie de sa vingtaine de paradis fiscaux internes ( Gersey, Guernesey, les îles Caïmans etc…) et par la City fait affluer une bonne partie des échanges mondiaux de devises. L’Espagne et le Portugal sont passés à droite et suivront coûte que coûte les instructions données par Francfort. De plus, l’Allemagne exige que la BCE reste libre et indépendante ; on pourrait rétorquer que si elle l’était réellement elle pourrait comme bon lui semble s’engager sur la voie du rachat d’obligations d’états, mais on voit bien que cette liberté n’est que poudre aux yeux et que celle-ci s’arrête aux portes du pénitencier allemand.
Même Jacques Delors, grand Architecte de la construction européenne vient de fustiger l’ hégémonie allemande : »Une éventuelle réforme des traités européens, réclamée par Berlin, ne doit pas être uniquement punitive, car cela représenterait un gros risque pour l’Europe », prévient l’ex-président de la Commission européenne dans un entretien publié sur le site Internet de Challenges. « Faire un nouveau traité qui aura surtout un aspect punitif, c’est en effet prendre de gros risques pour la construction européenne. Il faut que les Allemands comprennent que les autres pays ont besoin de temps et de moyens pour entrer dans la globalisation et pour que chacun y ait sa part dans le respect d’une certaine diversité », explique-t-il.
Voilà le tragique tableau de cette satanée institution européenne, raillée par ses pères, qui devait apporter le bonheur sur le continent et au delà instiller la démocratie dans le monde entier, qui devait représenter un contre-pouvoir aux Etats-Unis et à la Chine, voilà le cadre enchanteur, cassé, de cette Europe illusoire qui avait pour but d’effacer jusqu’à la mémoire des conflits ancestraux.
Mais ne peut-on se rassurer en pensant que les De Funès, les Merkel ont été élus ? En ce sens ne sont-ils pas nos représentants directs qui ne font qu’agir au mieux de nos intérêts et qui sont les dignes héritiers des fondateurs de l’Europe ?
Mais Hitler, Mussolini, Ben Ali, Netanyaou, Moubarak n’ont-ils pas tous été élus ?
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