Mais où Wallons-nous ?
Au bistro de la Toile :
- Alors Victor, où wallons-nous ? Où wallons-nous ?
- On ne sait pas où on va Loulle, mais on y va ! Mais est-ce que nous valons les Wallons ? Certainement pas. A écouter les machines à bruits et les lucarnes à décerveler, ces moins de quatre millions de Gaulois arriérés bloquent la marche vers le bonheur ultra libéral de cinq-cents millions d'Européens ! Mais au contraire, ces Wallons sont l'honneur de l'Europe. Ils montrent la voie. Ils prouvent que l'on peut encore s'opposer aux diktats de la finance et des conglomérats mafieux multinationaux. Et leur ministre-président est le seul, je dis bien le seul qui a les aliboffis bien pendus parmi la foultitude de politicards soucieux avant tout de leurs propres intérêts en se foutant comme de leur première magouille de l'intérêt général des peuples qui les ont élus. En disant NON à ce traité félon, négocié sournoisement sur le dos des populations par des technocrates irresponsables élus par personne, ils redonnent de l'ESPOIR à ces peuples régulièrement manipulés, méprisés, trompés. Comme le peuple français qui a voté NON à la « constitution européenne » et a été baisé jusqu'au trognon par Sarko et ses sbires, sur injonction des euronuisibles de Bruxelles. Comme les Irlandais, sommés de revoter jusqu'à ce qu'ils « votent bien ». Comme les Grecs, écrasés par la morgue de l'Europe teutonne.
- Alors, il faut frexité ? Foutre le camp de l'U.E. ? Comme les Britiches avec leur Brexit ?
- Certainement pas. L'Europe est la plus belle utopie réalisée. Mais elle a été dévoyée par une dérive fatale vers l'ultralibéralisme, vers cette « concurrence libre et non faussée » qui met surtout en concurrence les laborieux des pays entre eux. Entre le salaire minimum d'un Bulgare (160 euros) et celui d'un Luxembourgeois (1900 euros), il y a un sacré fossé. Les pays membres de l'U.E. n'ont d'ailleurs pas tous de Smic. Trois groupes se distinguent : - Les salaires inférieurs à 500 euros (Bulgarie, Roumanie, Lituanie, Lettonie, République tchèque, Estonie, Hongrie, Slovaquie, Pologne, Croatie) ; - Les salaires minimums entre 513 et 790 euros (Portugal, Grèce, Malte, Espagne, Slovénie) ; - Les plus hauts salaires, entre 1343 et 1923 euros (Royaume-Uni, France, Irlande, Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, Allemagne). Les six autres Etats membres (Autriche, Chypre, Danemark, Finlande, Italie, Suède) ont fixé un salaire minimum par branches ou prévoient que les salaires minimums soient déterminés par négociation entre les partenaires sociaux. Longtemps intransigeante sur la question, l'Allemagne a mis en place un salaire minimum de 8,50 euros de l’heure le 1er janvier 2015. Dès lors les rapaces de la finance qui ont pris le pouvoir et qui régissent l'Europe ont tout loisir de faire se concurrencer entre eux les sans-dents qui n'ont que leur sueur à vendre. Avec les « travailleurs détachés », autre appellation de la répugnante directive « Bolskesteim », l'esclavage revient à la vitesse Grand V.
Donc, pas question de quitter l'Europe, mais il faut la refonder. A quelques pays seulement, autour des membres fondateurs historiques. La sortie de la Grande-Bretagne montre la faillite de l'Europe actuelle. Il faut en profiter pour renverser la table et tout remettre à plat. En refondant les institutions européennes sur des bases réellement démocratiques, où la Commission serait responsable devant les citoyens européens et non un machin hors-sol à la solde de tous les lobbies, dirigé par des voyous comme Barrosso et Junker. Et c'est faisable : la petite mais héroïque Wallonie le prouve ! Par la volonté d'un élu courageux elle met à la poubelle cette horreur économique qu'est le Ceta.
- Espérons que, finalement, les Wallons ne se déwalloneront pas… Bon. Mais explique-moi simplement en quoi ce traité commercial est nuisible ?
- Il y a dans ce traité – 1598 pages, uniquement en Anglais !!! - des choses probablement positives, en tout cas facilitant les échanges commerciaux entre les 30 millions de Canadiens et les 435 millions d’Européens (plus 500 millions puisque les Rosbifs ont brexités !). Mais le hic, c'est que ce traité se veut global et pas seulement commercial. La France a réussi à en faire sortir la culture, mais pour combien de temps ? Donc, dans ce Ceta, il y a beaucoup de sauce pour cacher deux choses essentielles qui sont rédhibitoires.
La première, c'est l'institution de tribunaux privés devant lesquels les multinationales pourront trainer les États dès lors que ceux-ci voteraient des lois susceptibles de nuire à leurs intérêts. Cette privatisation de la justice, au seul profit des entreprises et au détriment des peuples et des États qu’ils se sont choisis, est scandaleuse. Elle est rejetée par toutes les populations formant l’U.E.
Dans les faits, à travers de telles juridictions privées, composées d’avocats d’affaires et de juristes au service des entreprises, les multinationales pourraient attaquer un gouvernement qui, prendrait, par exemple, des décisions contre le tabagisme, et réclamer des sommes fabuleuses pour « compenser » leur manque à gagner. Ou contre l'interdiction de la fracturation pour l'extraction des gaz de schistes. Juridictions sans appel possible. Dès lors, avec une telle épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête, aucun gouvernement n'osera voter des lois allant à l'encontre des intérêts des multinationales. C'est la mort de la démocratie et l'avènement des ploutocraties.
- Plouto quoi ? C'est quoi ce truc ?
- C'est du Grec, comme bien des mots français. De « ploutos », richesse, fric et « kratos », pouvoir. C'est le gouvernement des riches au profit des seuls riches. C'est exactement ce qui caractérise le fonctionnement de l'U.E. actuelle, dans laquelle les « lobbies », les groupes de pression des multinationales influent sur la Commission qui propose les « directives » que les États de l'Union sont ensuite contraints d'intégrer dans leurs législations nationales. Nous pouvons dire un énorme MERCI aux Wallons qui, seuls, font face à ces horreurs.
- Et la deuxième choses rédhibitoire ?
- Çà concerne la libéralisation des services. C'est très vaste, ce ne sont pas seulement les banques ou les assurances mais tous les nouveaux secteurs de l'économie, de la santé à l'éducation, en passant par l'énergie et la culture, malgré les réticences de la France. D'ordinaire, dans les accords de pays à pays, les partenaires établissent une liste des secteurs qu'ils incluent dans les accords. C'est ce qu'on appelle « liste positive ». Mais le traité Ceta, comme Tafta et Tisa (une autre belle saloperie) veut inverser cette logique en instituant des « listes négatives ». C'est-à-dire que les États devront établir la liste des secteurs d'activité qu'ils veulent explicitement exclurent du domaine de juridiction des accords. Tout le reste étant dès lors libéralisable ! Ce qui ouvrira la possibilité de libéraliser par défaut. Les États seront donc menacés de poursuites s'ils maintiennent des monopoles publics ou favorisent leurs entreprises locales pour relancer leur économie par exemple, à moins d'avoir auparavant négocié des exemptions dans certains secteurs.
- Ah ouais. C'est dingue ce truc. C'est mettre nos systèmes politiques à la merci des seuls marchands de soupe, des multinationales qui deviennent ainsi supérieures aux États. C'est effectivement la fin de la démocratie. Mais attend Victor, comment nos gouvernants, nos soi-disant élites ont-ils pu accepter ça ? Et pourquoi les médias nous enfument ? Ils sont incompétents ou complices ?
- Ils sont plus complices qu'incompétents. Alors qu'est-ce qu'on dit aux Wallons ?
- Merci, mille merci ! Et, tè, Victor, en leur honneur, on va trinquer à la bière ! J'ai à la cave quelques boutanches de « Trappistes » sérieuses.
- A la nôtre et aux Wallons !
Illustrations : merci à Chimulus et à X - Droits réservés
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