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Accueil du site > Actualités > International > Afghanistan : check list

Afghanistan : check list

 Les ours polaires n’ont sans doute rien à faire de la nouvelle année, tout comme les éléphants de Serengeti. Parlons donc, en forme de bilan, de l’Afghanistan. C’est une bonne occasion, maintenant que l’on nous dit, avec le langage binaire habituel, que les journalistes enlevés ne sont pas victimes des talibans mais de gangsters. Ouf, ce n’est qu’une question de sous, respirons un coup, de l’argent nous en avons. D’ailleurs, c’est tout ce que nous avons. Il nous manque la stratégie, le fameux prétexte romain, la cause, l’intérêt, les hommes et surtout la vision. Essayons donc de voir tout cela d’un peu plus près. Quelles étaient les raisons de notre engagement ? Voyons un peu cette check-list que les médecins - à force d’être débordés -, vont utiliser avant chaque intervention, pour s’assurer, l’air de rien, que le malade qu’ils opèrent est bien le bon. Cochons donc, pour nous assurer que nous sommes bien en face du bon patient.

Nous sommes allés en Afghanistan pour en finir avec Al Quaida et mettre hors d’état de nuire ses chefs, à commencer par Ben Laden

Opération pleinement réussie. L’ordre règne à Kaboul, à tel point que l’on peut désormais y envoyer les clandestins du square Villemin. L’Afghanistan est un long fleuve tranquille qui déborde vers le Pakistan, y amenant sa tranquillité et son bien être. C’est tellement calme que les terroristes partent en vacances vers les côtes somaliennes et le désert mauritanien, les Aurès et Zanzibar, Mombassa et le Caire. Il y en a qui s’aventurent jusqu’à Londres ou New York, certains poussent même jusqu’à Copenhague, pour participer à leur manière au succès éclatant de la conférence homonyme. Quant aux chefs, ils ont tellement disparu qu’on ne les voit plus qu’en cartes de vœux, sur internet bien sûr, c’est dire qu’ils sont à la page et aspirés par les chimères du progrès, notre progrès. D’ailleurs il n’y a plus de chefs. Il n’y a que des lieutenants et des colonels, qui n’en font qu’à leur tête, ce qui prouve bien que le mouvement est à la dérive, un peu comme les icebergs qui ont rencontré le Titanique.

Nous sommes allés en Afghanistan pour régler le problème de l’opium.

Alors là, c’est un franc succès. On peut dire ce que l’on veut sur la modernisation de l’Afghanistan, mais ce qui est incontestable c’est que nous avons réussi de passer de l’artisanat à l’industrie lourde en moins d’une décennie. De l’oligopole au monopole. Les années de production record se suivent et se rassemblent. D’ailleurs, l’ensemble du pays s’y est mis, avec fougue et détermination. Il n’y a pas un district, une région, qui ne peut se vanter d’avoir fait mieux que l’année précédente. Les birmans, les mexicains, les libanais, les turcs font grise mine, tout comme les kazakhs, les ouzbeks et autres tadjiks qui ont dû accepter de jouer les seconds couteaux se recyclant pour certains en d’autres drogues, ou assumant leur rôle subalterne de passeurs et d’autre métiers associés. Les seigneurs de la guerre et les chefs de clans afghanis, exigent désormais que l’ONU et la communauté internationale participent à cet essor phénoménal en construisant des routes et autres travaux d’irrigation et d’électrification pour couronner ce renouveau économique.

Nous sommes allés en Afghanistan pour importer la démocratie électorale

Sur ce point, il faut avoir le succès modeste.  Les afghanis se sont débrouillés quasi tout seuls. D’ailleurs, l’argent de la communauté internationale destiné aux élections étant superflu, il a été utilisé pour d’autres projets de développement, localement et à nationalement, pour l’érection de madrasas et la fermeture ses écoles pour filles. Pensez un peu gagner les élections avec 49,8 % des votes : même en France on a pas eu un score aussi serré, preuve s’il en faut d’une démocratie saine et paisible. A la prochaine élection américaine il faudrait des observateurs afghans, seuls garants d’un processus qui, aux USA, connaît des imperfections criardes. Ils seront accompagnés d’observateurs zimbabwéens, proposés gracieusement par le président Mugabe.

Nous sommes allés en Afghanistan pour sécuriser les voies pétrolières.

Même si cet objectif n’était pas ouvertement annoncé, il n’en faisait pas moins partie de la check list. Peu importe. Peut-être pas de manière idéale, ce problème a aussi été résolu. Pendant que l’on guerroyait en Afghanistan, des ingénieurs et des ouvriers consciencieux ont réussi à relier la Chine à l’Asie centrale par un pipe line gigantesque, qui permet de calmer les anxiétés chinoises et surtout les tensions géopolitiques qui en découlaient. De lui même, l’Afghanistan a réglé ce problème épineux. Hostile à l’utilisation de son territoire, il a envoyé les sept sœurs du côté de Kashgar. Ne reste plus qu’à régler le problème ouïgour. Mais on fait confiance à la sagesse chinoise.

Nous sommes allés en Afghanistan pour éradiquer la corruption.

Sur ce sujet, la messe est dite : Ismaêl Khan, l’émir de l’ouest et de Herat, en envoyant au palais présidentiel un camion plein de ballots de cent dollars (des millions, des milliards ? comment compter ?) a mis un point final aux discussions sans fin des fonctionnaires onusiens : l’argent parle. Et si nous voulons des taxes et des impôts, en voici, en voilà. Pas la peine de s’attarder avec des lois incongrues et contradictoires…

En conclusion de notre check list nous pouvons, sans nous tromper, dire que les raisons qui nous ont envoyé en Afghanistan étaient les bonnes, que le succès est indiscutable et que désormais nous pouvons rentrer chez nous, l’âme en paix du travail bien fait. Alors plions bagage, les Somalies et autres Yémen nous appellent…


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14 réactions à cet article    


  • John Lloyds John Lloyds 4 janvier 2010 09:40

    Excellent article, même si on sait fort bien que le valet Sarkozy n’hésite pas à y envoyer du soldat à casser pour lécher la botte américaine, qui elle-même traque un terrorisme fantôme afin de justifier le IV° Reich qui se met en place.

    Quant aux journalistes disparus, difficile de se prononcer pour l’instant, j’espère simplement que le ministère de la propagande française n’a pas envoyé au casse-pipe ses soldats du petit écran, le journaliste d’aujourd’hui n’étant plus l’indépendant objectif d’hier : un agent en mission de propagande peut parfaitement être vu - et à juste raison - comme un complice de l’ingérence en place.


    • furio furio 4 janvier 2010 10:53

      Excellente remarque sur le soldat de la propagande qu’est devenu le journaliste occidental. Cela permet de faire passer un massacre comme celui de Gaza, car il y eu massacre et même génécide (de PLUSIEURS DIZAINES DE MILLIERS de PERSONNES..sans défense aucune), pour un bilan de grippe saisonnière avec 1500 morts.
      Par contre sur le premier paragraphe, il faut nuancer si notre rambo national de 1m59 sans talonettes, est en Afghanistan c’est surtout sous « influence » de Tel Aviv. Car not’ talonetto est un soldat de l’armée sioniste avant tout. 


    • furio furio 4 janvier 2010 11:02

      Et pourtant avec des bottes de mille lieues !!!
      (Au F-Haine : comment s’étonner de la pauvreté d’esprit pour analyser un texte quand on a de toute évidence été si peu à l’école)


    • 65beve 65beve 4 janvier 2010 11:35

      Bonjour,

      Merci à l’auteur pour cet article.

      Les forces de la coalition (dont nous faisons partie) bombardent les talibans et leurs familles.

      Connaitrons-nous un jour le nombre exact de victimes civiles imputé à notre armée d’occupation ?

      Un milliard pour des vaccins inutilisés + un milliard pour faire la guerre aux afghans ; voilà déjà un bon usage de notre argent dilapidé par l’UMP !

      Vive l’amour au lieu de la guerre, et vive la soixanthuitude !


      • Defrance Defrance 4 janvier 2010 12:14

        Sans compter que ceux qui reviendront, autrement que dans des sacs en plastique, risquent de se retrouver en manque assez rapidement et de poser par consequent quelques problemes collatéraux ?


        • Defrance Defrance 4 janvier 2010 12:21

          On ne parle pas assez pu problème de l’oléoduc, qui en fait le VRAI prétexte ? Pour régler tout cela je propose les arènes de Nimes ou d’ailleurs ou l’on mettrai : BUSH, Nabot 1er, Obama, Berlsconard, Merkel Brown, Blair..... et Oussama , Omar et autant de leur troupe pour équilibrer le combat, a main nu bien sur !

          Les vainqueurs seraient rapatriés immédiatement chez eux !


          • manusan 4 janvier 2010 12:35

            bon article, il est temps de plier les gaules. Le job restant est pour les Afghans.


            • goc goc 4 janvier 2010 13:10

              @ l’auteur

              il ne faut pas oublier aussi comme motif, le respect des droits de la femme
              et là aussi on peut parler de franc succès, non ??


              • Reinette Reinette 4 janvier 2010 14:37



                exact, goc
                 
                Les maltraitances faites aux femmes afghanes était l’un des sujets favoris, en 2001, que les médias français nous donnaient à voir... (aujourd’hui c’est l’oubli complet de ces femmes)


                dans son livre paru en 2001 : « En Afghanistan, les bouddhas n’ont pas été détruits, ils se sont écroulés de honte », Mohsen Makhmalbaf, écrit page 85 :

                « C’est le père ou le frère, pas la mariée qui dit »oui« 
                Il semble que près de 180 organisations internationales sont actives en Afghanistan. Elles ont écarté mes questions non politiques. Finalement, j’ai compris que leur rôle était restreint. Une de leurs tâches consiste à distribuer du pain à ceux qui ont faim. La deuxième est de lutter pour l’échange nord-sud des prisonniers, et la troisième de fabriquer des prothèses de bras et de jambes pour les victimes des mines anti-personnel.

                plus loin :
                La femme afghane, la femme la plus réprimée du monde.
                La société afghane est une société masculine. En fait, les droits des 10 millions de femmes qui composent la moitié de la population sont moindre que les droits de la plus petite des tribus afghanes inconnues.
                Avec l’arrivée des taliban, les écoles de filles ont été fermées et pendant longtemps les femmes n’ont pas été autorisées à aller dans la rue. Plus tragiquement, même avant l’arrivée des taliban, seule une femme sur vingt savait lire et écrire. Les statistiques indiquent que la culture afghane avait pratiquement privé 95% des femmes de scolarité et les taliban en ont privés les 5% restant.

                Alors pourquoi ne pas se demander de manière plus réaliste si la culture afghane est affectée par les taliban ou si cette culture est à l’origine de ce que l’on montre d’eux ?

                Une femme afghane est en compétition avec ses rivales. La polygamie est très ordinaire en Afghanistan et fait que beaucoup de maisons afghanes sont des harems. Le prix pour se marier est si élevé que cela équivaut à acheter une femme.


                plus loin, Mohsen Makhmalbaf nous dit :

                J’ai vu des vieillards, pendant mon tournage, »donner" leur fille de 10 ans et, avec l’argent se marier eux-mêmes avec une fillette du même âge. Il apparaît que le même capital est échangé de main en main, afin de placer des petites filles de maison en maison. Parmi elles, il y a des femmes qui ont une différence d’âge de 30 à 50 ans avec leurs maris.

                Une fois, quand nous avons demandé à des femmes afghanes de jouer dans le film (en burqa), leurs maris ont dit qu’ils étaient trop pudiques pour montrer leurs femmes. Nous leur avons expliqué que leurs femmes seraient filmées en burqa, mais ils nous ont répondu que les spectateurs du film sauraient qu’il y a une femme sous la burqa, ce qui est en contradiction avec la pudeur...

                Au camp de Niatak, en Iran : les Afghans ont fermé d’eux-mêmes le bain public disant que quiconque passant le long du bâtiment sait que des femmes sont nues derrière ses murs - ce qui pousse au péché !!!



              • kaisergarde kaisergarde 4 janvier 2010 15:30

                Nous sommes aussi allés en Afghanistan pour protèger l’arsenal nucléaire civil & militaire du Pakistan et l’empêcher de tomber aux mains des tabilans et autres extrémistes.





                • TITI 4 janvier 2010 15:47

                  Somalie, Yemen et surtout Iran nous appellent...car n"oublions pas que les mollahs exportent le terrorisme un peu partout et qu’ils concurrencent sérieusement al qaida.


                  • ELCHETORIX 4 janvier 2010 20:09

                    non , jacob c’est le sionisme qui déstabilise la paix dans le monde !
                    les marchands de « canons » ont besoin d’ennemis pour vendre leur « camelote de morts » , avant c’étaient les nazis financés par la finance internationale , puis le communisme et maintenant le terrorisme vert inventé et encouragé par les oligarques de l’industrie-militaire pour faire tourner leurs usines d’armements , les chars , les avions et toutes leurs technologies au service de la destruction des peuples !
                    @ l’auteur , votre article est excellent !
                    RA .


                  • Reinette Reinette 4 janvier 2010 20:04


                    Bonsoir Michel Koutouzis

                    Effectivement c’est un désastre. Pratiquement tout le monde peut voir que l’Afghanistan n’a pas été envahi par les troupes et les zassociations diverses et variées pour apporter la démocrassie aux Afghans.

                    que devriendront les Afghans quand les occidentaux vont partir ?


                    • Phil Phil 10 janvier 2010 11:32

                      Le constat est excellent,le ton est franchouillard ! bravo
                      L’auteur pourrai maintenant nous dire quelles sont ses solutions pour mettre un termes au trafic d’opium en afghanistan, (au maroc aussi).Le cynisme, c’est bien à petite dose ! à forte dose cela rends stérile tout début de solutions.
                      Etant consultant auprés de l’onu quelles sont vos solutions,
                      merçi de nous en faire part

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