A la télévision suisse, on choisit son adversaire
Grâce à la presse française, les Suisses apprennent les connivences entre journalistes et politiques.
C’est peut-être le cas en France aussi, mais en Suisse, nos ministres ont une capacité hors du commun à influer sur les producteurs de la télévision nationale publique, afin d’y choisir leur adversaire. Reste qu’en France, tôt ou tard, ce type de connivence s’apprend.
En Suisse, c’est déjà plus rare, et l’omerta médiatique verrouille l’information sur de telles pratiques. Le dernier exemple en date a été révélé par le quotidien français Le Monde, et l’on soupçonne que l’auteur de cet article n’avait pas vraiment conscience qu’elle donnait là un scoop.
Résumé de l’affaire : il y a deux mois de cela, notre ministre des affaires étrangères, Mme Calmy-Rey, jouait de la discrimination positive au sein de notre diplomatie, et refusait à engager six hommes, pourtant acceptés au concours diplomatique. Finalement, ne restaient que 4 hommes et 4 femmes, histoire, disait-elle, de rétablir un semblant d’égalité dans notre diplomatie.
En Suisse, l’affaire a fait grand bruit dans la presse, et une des émissions politiques phares de notre télévision publique, la TSR, a organisé un débat à ce propos.
Grâce au Monde, on apprend des choses bien intéressantes sur sur le fonctionnement de la télévision publique suisse, et de l’émission en question, nommée Infrarouge :
"Récemment invitée à la télévision pour s’expliquer sur son geste de discrimination positive au sein de la diplomatie, elle a catégoriquement refusé d’avoir face à elle Elisabeth Badinter, puis son ancienne collègue Martine Brunschwig-Graf, deux femmes de caractère, sous prétexte que cela nuirait à la cause féministe. Il fallut trouver en catastrophe une remplaçante, moins éclatante, et moins dangereuse, disent les mauvaises langues..."
La remplaçante en question, sortie du placard pour l’occasion, était une ancienne députée nationale libérale, Suzette Sandoz. Elle appréciera le compliment du Monde. Mais surtout, beaucoup aujourd’hui en Suisse doivent dire merci au Monde d’avoir ainsi révélé ce qu’à ma connaissance aucun média suisse n’avait évoqué : une nouvelle procédure de sélection dirigée par notre ministre des Affaires étrangères.
Chose amusante, un seul média suisse a repris cette information dans ses pages de politique nationale. Le quotidien fribourgeois La Liberté a en effet glissé quelques mots pour vanter les mérites de la politique de communication de notre ministre à l’étranger, tout en omettant le détail de l’émission Infrarouge.
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