Affaire Benalla : la saga de l’été !
Macron et Benalla nous offrent la saga de l'été. TF1 en rêvait, l'Élysée l'a faite. Amitiés, romance, trahisons, coups bas, scandales, mensonges d'État, machinations... et des rebondissements en veux-tu en voilà. Que demander de mieux ? Après le Mondial de foot, on est vraiment gâtés !
« Alexandre Benalla n'est pas mon amant »
En pleine affaire Benalla, le chef de l'État est enfin sorti de son silence devant les députés de la majorité, mardi soir, à la Maison de l'Amérique latine à Paris. "Le seul responsable c'est moi", a affirmé Emmanuel Macron, fustigeant "la République des fusibles" et disant avoir ressenti les "actes du 1er Mai" de son collaborateur comme "une trahison".
"On ne peut pas être chef par beau temps et se soustraire lorsque le temps est difficile. S'ils veulent un responsable, il est devant vous. Qu'ils viennent le chercher. Je réponds au peuple français", a ajouté le président.
Emmanuel Macron avait commencé son intervention avec une formule ironique :
"Alexandra Benalla n'a jamais détenu les codes nucléaires, Alexandra Benalla n'a jamais occupé un appartement de 300 m2, Alexandra Benalla n'a jamais eu un salaire de 10.000 euros, Alexandre Benalla n'est pas mon amant".
C'est la seconde fois que le chef de l'État dément une rumeur sur une prétendue relation homosexuelle ; la première fois, la rumeur concernait Mathieu Gallet.
Un peu plus tôt dans la journée d'hier, Bernard-Henri Lévy avait appelé, dans Le Point, à prendre la défense d'Emmanuel Macron contre les hordes de "piranhas" lancés par Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen. Indispensable BHL, notre phare dans la nuit...
BN de jeudi : « Macron et les piranhas ». Stop à la curée. Halte à l’hystérie. Assez du Watergate version #Benalla, inventé par #LePen et #Mélenchon. Quels que soient les légitimes désaccords qu’inspire sa politique, il faut, aujourd’hui, défendre #Macron https://t.co/XVjwdjTdFi
— Bernard-Henri Lévy (@BHL) 24 juillet 2018
Fight club
Il y a quelques jours seulement, la France ignorait tout de l'existence d'Alexandre Benalla, un homme qui gagne pourtant à être connu.
Garde du corps du président Macron, on l'a découvert déguisé en policier un 1er Mai, violentant un manifestant, mais aussi (féminisme et parité obligent) une manifestante :
Les images tournées par Taranis News, une agence de presse indépendante, deux à trois heures avant la bastonnade de la Contrescarpe, montrent un Alexandre Benalla en communication via un talkie-walkie et en constante présence de forces de l'ordre qui n'ont pas l'air de le chaperonner. Comme le note le site Reflets, le bodygard de l'Élysée "semble faire partie intégrante du dispositif policier".
N'omettons pas de remarquer que les deux manifestants molestés par Benalla s’en étaient pris juste avant aux CRS, jetant des projectiles sur leur boucliers à quasi bout portant :
Les 2 manifestants molestés le 1er Mai s’en étaient pris juste avant aux CRS, jetant des projectiles sur leur boucliers à quasi bout portant révèle une VIDEO @libe. Un éclairage important mais qui ne justifie pas les agissements de #Benalla et #Crase.
pic.twitter.com/YQ7UL94LHf— Guillaume Auda ⭐️⭐️ (@GuillaumeAuda) 22 juillet 2018
De là à dire "bravo" Alexandre ? Peut-être pas quand même...
Des privilèges exorbitants
Chaque jour, comme un festival, nous en apprend un peu plus sur les incroyables privilèges qui lui avaient été accordés.
Ainsi, Alexandre Benalla avait été habilité au titre du secret de la défense nationale, depuis 2017, après enquête menée par la DGSI :
#Benalla simple "porteur de bagages" et "chargé de logistique" de l'Elysée d'après #Castaner était en fait habilité "secret défense" et avait accès aux dossiers les plus sensibles au sommet de l'Etat. Le gouvernement et la République #EnMarche mentent aux Français. https://t.co/F6V1UwagLZ
— Eric Ciotti (@ECiotti) 23 juillet 2018
M. Benalla avait, comme on sait, un brassard et un badge.
L'homme était, selon L'Obs, sur le point de prendre la tête de la sécurité de l'Elysée.
Alexandre Benalla est passé du grade de sergent dans la réserve opérationnelle à celui de lieutenant-colonel dans la réserve citoyenne, affecté au cabinet du directeur général de la gendarmerie, le tout à seulement 26 ans.
Évidemment, une telle réussite fulgurante fait des envieux...
Dire qu'il m'a fallu 22 ans de service, passer par 5 écoles militaires dont l'Ecole de guerre, passer un doctorat, servir dans 4 régiments, me taper 6 opex et deux ans de vie en brousse, pour être lieutenant-colonel...alors qu'il me suffisait d'être une petite frappe. Quel con !
— Michel Goya (@Michel_Goya) 21 juillet 2018
De plus, d'après un document de l'administration consulté par Le Monde, Alexandre Benalla est domicilié depuis le 9 juillet (en dépit de son forfait) dans une dépendance de l’Elysée, au 11, quai Branly, dans le 7e arrondissement de Paris. C'est à cet endroit cossu qu'on trouve les dépendances de la présidence : 63 logements de fonction, sur 5 000 mètres carrés.
Selon L'Express, un budget de 180 000 euros aurait été prévu afin de faire des travaux dans l'appartement de fonction d'Alexandre Benalla et en faire un duplex.
En outre, la voiture mise à sa disposition disposait de nouveaux dispositifs utilisés par la hiérarchie de la police. “Même un directeur départemental de la police nationale n'a pas ce genre de voiture”, estime Dominique Rizet, consultant police-justice pour BFMTV.
Pour lui, il est inadmissible et incompréhensible qu'un chargé de mission de l'Elysée dispose de tels avantages, alors que “la police n'a plus de moyens”.
L'expert de Faites entrer l'accusé, qui en a pourtant vu d'autres, conclut : “Je n'ai pas vu ce genre de profil auparavant”.
En résumé, si l'on en croit le journaliste Guillaume Auda :
10000 € mensuels
1 appart de fonction à Paris 7
1 voiture de SuperFlic
1 bureau à l’Élysée
Sans parler du casque à visière.
Effaré par les privilèges accordés à Benalla, obligé parmi d’autres de la Macronie. Combien d’autres au Château ?
L’#AffaireBenalla est 1 affaire d’Etat. pic.twitter.com/Cebm6EQGEF— Guillaume Auda ⭐️⭐️ (@GuillaumeAuda) 20 juillet 2018
« Benalla faisait régner la terreur »
Lors des auditions de mardi après-midi, plusieurs représentants des syndicats de la police nationale ont insisté sur le comportement problématique, pour le moins, d’Alexandre Benalla envers les fonctionnaires de police et de gendarmerie.
Cette déclaration du secrétaire général de l’unité police FO au Sénat est sans doute l'élément le plus important dans cette "affaire" Benalla. #barbouzes pic.twitter.com/KMJhcjHIES
— Antoine Lévèque (@Antoine_Lvq) 24 juillet 2018
« Cador », « exécrable », « comportement indigne », les policiers auditionnés n’ont pas mâché leurs mots pour qualifier le chargé de mission auprès du chef de cabinet de l’Élysée.
Différents syndicalistes ont dénoncé « la confusion des rôles, l’ambiguïté des fonctions » de l’ex-collaborateur du chef de l’État et décrit les « relations exécrables » qu’il pouvait entretenir avec les forces de l’ordre.
Un syndicaliste policier est allé jusqu'à dénoncer les « barbouzes » au sein de la sécurité du président Macron ; selon lui, « Benalla faisait régner la terreur » au sein du GSPR, le Groupe de sécurité de la présidence de la République.
Benalla "faisait régner la terreur" au sein du GSPR, témoigne un syndicaliste policier pic.twitter.com/wQwMx6ReS1
— BFMTV (@BFMTV) 24 juillet 2018
Pour noircir encore un peu le tableau, ajoutons que Benalla aurait recruté un ex-garde du corps de Macron proche de Jawad Bendaoud, “le logeur de Daech”...
Et qu'il aurait aussi commandé des armes pour le mouvement LREM, d'après WikiLeaks (commande qui lui a été refusée, faut pas exagérer...) :
L'entourage du président a certes tenté de minimiser son rôle, comme lorsque Christophe Castaner l'a présenté comme un simple porteur des bagages des Bleus :
Benalla dans le bus des Bleus : "J'ai entendu dire qu'il était en charge de la logistique des bagages", avance Castaner pic.twitter.com/P23gum9Adq
— BFMTV (@BFMTV) 23 juillet 2018
Évidemment, c'est amusant...
On est heureux de savoir que dans la France de 2018, un bagagiste gagne le salaire d'un ministre. C'est sans doute la magie du nouveau monde version Macron.
Sous @EmmanuelMacron, un bagagiste gagne 10000 euros, logé dans un duplex de 300m2, avec chauffeur et voiture de fonction ! Nouveau monde
— Sergio Coronado (@SergioCoronado) 23 juillet 2018
Par ailleurs, on sait que les supporters des Bleus, amassés sur les Champs-Élysées au lendemain du sacre de leur équipe, ont été frustrés de ne voir passer les champions du monde en bus que pendant 12 minutes, au lieu de l'heure prévue.
Des centaines de milliers de français auront savouré les miettes de la célébration d'hier alors qu'ils attendaient depuis plusieurs heures sur les #ChampsElysees et devant le #Crillon, au profit d'une Garden Party à l'Elysée.. Le ruissellement, même dans le foot donc. Triste. pic.twitter.com/rEjOquVoG3
— Vikash Dhorasoo (@vikash_dhorasoo) 17 juillet 2018
Était-ce, là encore, le fait de Benalla, présent à l'avant du bus ?
Mensonge d'État ?
Mais revenons-en à des choses plus sérieuses.
Le lundi 23 juillet, Alain Gibelin, directeur de l'ordre public et de la circulation (DOPC) à la préfecture de police, indiquait devant la commissions des lois, constituée en commission d’enquête dans le cadre de ce que l’on appelle « l’affaire Benalla », qu'Alexandre Benalla "ne bénéficiait d'aucune autorisation de la préfecture de police".
C'est un vrai rebondissement dans l'affaire Benalla. On nous avait martelé que le monsieur Sécurité de Macron avait l'autorisation nécessaire pour être "observateur". Il s'avère que non.
— Paul Conge (@paulcng) 23 juillet 2018
Il indiquait aussi, sous serment, que Benalla avait participé, entre le 2 et le 18 mai, à des réunions préparatoires à la sécurisation de déplacements de Macron, ce qui contredit l'idée de mise à pied de 15 jours censée avoir été appliquée à cette période.
Commentaire du journaliste Sylvain Tronchet :
Nous sommes en train de vivre un truc sans précédent dans l’histoire de la Ve république : l’administration lâche le pouvoir politique et le renvoie à ses responsabilités devant le parlement... https://t.co/pw7VXsc8M1
— Sylvain Tronchet (@SylvainTronchet) 23 juillet 2018
Mardi matin, coup de théâtre : Alain Gibelin revient sur ses déclarations qui faisaient mentir l’Élysée en invoquant « une incompréhension sur la question ». Aurait-il reçu des pressions dans la nuit ?
L'économiste Jacques Sapir, commentant la séquence, jette la suspicion, n'hésitant pas à parler de "scandale Gibelin" :
"Dans la nuit du 23 au 24, un communiqué de l’Elysée démentait les propos de M. Gibelin. On apprenait le 24 au matin que M. Gibelin avait rédigé une lettre à l'attention de Yaël Braun-Pivet, la présidente de la Commission des lois qui préside actuellement la commission d'enquête parlementaire sur l'affaire Benalla. Dans sa missive, Alain Gibelin revient sur ses déclarations de la veille et dit avoir mal compris la question qui lui était posée par Marine Le Pen : il affirme qu'il pensait que la présidente du Rassemblement national évoquait la période allant du 2 mai au 18 juillet, et non du 2 mai au 18 mai. (...)
Pour avoir écouté le témoignage de M. Gibelin, on peut constater qu’un silence de mort règne à ce moment dans la salle. Mme Le Pen répète sa question à trois reprises. M. Gibelin ne varie pas dans ses réponses. On voit mal comment M. Gibelin aurait pu mal comprendre, ou mal entendre, les questions posées de manière très claire par Mme Le Pen. (...)
ce « rétropédalage » pourrait bien s’avérer fragile. Des responsables syndicaux CFDT de la Police, qui sont entendus et qui le seront encore demain 25 juillet, ont confirmé quant à eux la présence de M. Benalla aux réunions indiquées antérieurement par M. Gibelin. Ces réunions ont certainement données lieux à des procès-verbaux. Il ne reste plus qu’à attendre que ces procès-verbaux soient communiqués à la commission d’enquête. (...)
il pèse maintenant sur l’Elysée une suspicion de « subornation de témoin ». Ceci constitue un délit. La subornation de témoin constitue en effet un délit intentionnel relevant de la corruption. Ce délit est prévu et réprimé par l'article 434-15 du code pénal. Ce dernier le définit comme suit : « Le fait d'user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices au cours d'une procédure ou en vue d'une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s'abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende, même si la subornation n'est pas suivie d'effet »."
Le rétractation de #Gibelin de ce matin, contredite par l'audition des responsables policiers au #Senat cette après-midi cache-t-elle une tentative de subornation de témoin par l'Elysée ?https://t.co/zEUj76NZ9L pic.twitter.com/pNMS5V86aa
— Jacques Sapir (@russeurope) 24 juillet 2018
En effet, sur cette video, on peut voir que Marine Le Pen lui pose la question TROIS FOIS :
Le directeur de l'ordre public a beau démentir par courrier 12h apres son audition le fait que Benalla n'était pas présent aux réunions, sur cette video on peut voir que Marine Le Pen lui pose la question TROIS FOIS. 🤔 pic.twitter.com/aExGipvBu6
— Antoine Lévèque (@Antoine_Lvq) 24 juillet 2018
Suite au revirement de Gibelin, Marine Le Pen et Alexis Corbière ont réagi :
Revirement d'Alain #Gibelin : @MLP_Officiel exprime ses doutes, @LucCarvounas veut examiner le téléphone portable de #Benalla et @Alexiscorbiere demande l'audition d'@EmmanuelMacron. #AffaireBenalla #DirectAN pic.twitter.com/TYthcibJjN
— LCP (@LCP) 24 juillet 2018
Le revirement de Gibelin pose d'autant plus question que Jean-Marc Bailleul, secrétaire-général du syndicat des cadres de la sécurité intérieure, a confirmé sur RMC, mardi matin, sa première version. Des policiers ont vu Benalla assister à des réunions avec la préfecture du 2 au 18 mai :
Voici l'extrait où un syndicaliste policier confirme la 1ère version de #Gibelin. L'Élysée s'est réjoui trop vite. pic.twitter.com/qEgfm93nVR
— Kim-Jong-Un 🐸 (@KimJongUnique) 24 juillet 2018
Mais, à son tour, Bailleul a par la suite démenti les propos qu'ils avaient tenus devant Apolline de Malherbe, semant encore un peu plus la confusion :
Bailleul me dément finalement ses propos tenus ce matin sur BFM : "Je me suis basé sur les propos de Gibelin, qui depuis a démenti" cc @apollineWakeUp
— Paul Conge (@paulcng) 24 juillet 2018
Yaël Braun-Pivet a déclaré qu'elle envisageait d'auditionner à nouveau Alain Gibelin devant la commission d'enquête suite à son revirement :
.@YaelBRAUNPIVET envisage d'auditionner à nouveau Alain #Gibelin devant la commission d'enquête suite à son revirement, mardi matin #DirectAN #Benalla pic.twitter.com/0kpSZjedtM
— LCP (@LCP) 24 juillet 2018
Quoi qu'il en soit sur ce point, Sapir note au moins un mensonge de la part de l'Élysée :
"Le reste de la déposition de M. Gibelin n’est pas concerné par sa rétractation. Or, il a déclaré que M. Benalla, contrairement à ce qui avait été affirmé, n’avait pas l’autorisation d’être sur le terrain avec les forces de l’ordre. Donc, sur ce point aussi, il y a eu un mensonge de l’Elysée."
Eric Ciotti (député LR) accuse, quant à lui, Gérard Collomb d’avoir menti sous serment :
« Il a dit à Guillaume Larrivé “On n’a pas parlé de Benalla avec Macron”, puis quand je lui demande s’il a vu Macron ce week-end, il dit oui, et est bien obligé de reconnaître qu’ils en ont parlé “le moins possible” ».
Mardi après-midi, Patrick Strzoda, directeur de cabinet du président de la République, a assuré que Benalla avait respecté la sanction qui lui avait été infligée : "Je suis très formel, M.Benalla n'était pas à l'Elysée du 3 mai au 22 mai".
Patrick Strzoda, directeur de cabinet de l'Élysée : "Je suis très formel, M. Benalla n'était pas à l'Elysée du 3 mai au 22 mai."
>> https://t.co/HcrrUy0ZJh #DirectAN #Benalla #Strzoda pic.twitter.com/kB86SEpbbT— LCP (@LCP) 24 juillet 2018
Il dément le salaire de 10 000 € par mois, mais aussi le projet d'installation d'Alexandre Benalla dans un duplex de 300 m², sa nomination comme sous-préfet ou encore sa nomination à la tête d'un service de sécurité à l'Elysée.
"Une rémunération mensuelle de 10 000 euros", "un futur logement de fonction dans un duplex 200 m2 quai Branly", "une nomination à un poste de sous-préfet" : "C'est faux ! Je démens formellement !" affirme Patrick #Strzoda. #Benalla #DirectAN pic.twitter.com/TUJqlDCynq
— LCP (@LCP) 24 juillet 2018
Mais il refuse d'indiquer le salaire et les avantages réels dont Benalla bénéficiait. Comme le rappelle le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université Lille 2, selon l'Art. 6, III ord. 1958 : refuser de répondre à une Commission d'enquête est passible de deux ans d'emprisonnement et 7.500€ d'amende.
#AffaireBenalla
P. #Strzoda refuse d'indiquer le salaire et les avantages réels dont #Benalla bénéficiait.
Art. 6, III ord. 1958 : refuser de répondre à une #CommissiondEnquete est passible de 2 ans d'emprisonnement et 7.500€ d'amende.
Cc @GLarrive @faureolivier @YaelBRAUNPIVET— JPh Derosier (@JPhDerosier) 24 juillet 2018
Théories du complot : l'embarras du choix...
Sans surprise, l'affaire Benalla a donné lieu à de nombreuses conjectures sur les tireurs de ficelles. Qui a sorti cette histoire ? Pourquoi maintenant ? Et dans quel but ? Pour une fois, les théoriciens du complot n'étaient pas uniquement sur le Net, mais aussi sur le devant de la scène, comme sur BFM.
Ainsi, pour l'avocat d'Alexandre Benalla, Me Laurent-Franck Liénard, « le scandale d’Etat et l’affaire d’Etat sont montés de toutes pièces et on a utilisé ça à dessein pour casser un effet Coupe du monde […] pour casser une dynamique positive. […] Pour atteindre la présidence de la République, on utilise un fusible qui s’appelle Alexandre Benalla ».
Pour l'avocat d'Alexandre Benalla, l'affaire d'État a été "montée de toute pièce pour casser un effet coupe du monde" pic.twitter.com/jHGykSi5Gm
— BFMTV (@BFMTV) 24 juillet 2018
Pour Virginie Le Guay, chef adjoint service politique à Paris-Match, c'est carrément la France Insoumise qui serait à la manœuvre (et aurait donc tout pouvoir sur Le Monde, à l'origine des révélations) :
30 - Dans une séquence hallucinante @VirginieLeGuay chef adjoint service politique à @ParisMatch mêle fake news, théorie du complot, désinformation et propagande pour sauver l'idole du journal : @EmmanuelMacron, en accusant la FI d'être derrière le scandale #Benalla. pic.twitter.com/3i65A8rCji
— David Launay (@DavidLaunay1) 22 juillet 2018
Toutefois, selon Conspiracy Watch,
"la thèse d’une manipulation médiatico-politique organisée par LFI ne tient pas. Non seulement Taha Bouhafs [militant de la FI] ignorait qu’il filmait un collaborateur de l’Elysée, mais il a diffusé ses images sur les réseaux sociaux le jour même de la manifestation du 1er Mai. Ce n’est que plus tard qu’Alexandre Benalla a été identifié. Taha Bouhafs n’a en rien été en mesure de maîtriser un tel calendrier médiatique. Du reste, il eut fallu des dons surnaturels pour programmer le déclenchement de l’affaire Benalla en pariant sur la victoire de l’équipe de France de football et son effet consécutif sur la côte de popularité d’Emmanuel Macron."
Certains observateurs ont été surpris que la révélation de l'affaire Benalla soit venue du journal Le Monde, qui avait jusque-là soutenu Macron. De quoi susciter chez Jean-Yves Le Gallou (TV Libertés) et André Bercoff des interrogations sur l'action occulte de l'oligarchie, qui aurait, pour une raison inconnue, voulu punir son poulain, celui-là même qu'elle avait porté au pouvoir il y a un peu plus d'un an :
C’est @lemondefr qui a sorti l’affaire #Benalla , pourquoi ? Comment #Macron est-il passé si vite du léchage au lâchage sinon au lynchage ? Quelles sont les vraies raisons de cette évolution brutale ? Que lui reprochent les oligarques qui l’ont fait élire ? Matière à réflexion !
— Jean-Yves Le Gallou (@jylgallou) 20 juillet 2018
#AffaireBenalla ou #AffaireMacron ? Tout se passe comme si les commanditaires de l’élection de 2017, déçus par les médiocres résultats de leur poulain qui fait plus dans le show strass et paillettes que dans le business sonnant et trébuchant,lançaient un premier avertissement .
— André Bercoff (@andrebercoff) 20 juillet 2018
… "Où l’on retrouve, dixit Conspiracy Watch, la vision complotiste – circulant aussi bien à l’extrême droite que dans les rangs de la gauche radicale – d’un Emmanuel Macron « marionnette du Capital » (version Michel Onfray), agent servile d’un « pouvoir caché » (version « Osons Causer ») dont l’élection ne serait rien d’autre qu’un « putsch du CAC 40 » (version Aude Lancelin)."
André Bercoff s'était déjà illustré en mettant en doute la "version officielle" dans l'affaire Mamoudou Gassama. Alors que certains twittos ont ironisé sur le fait que Benalla ait pu être le fameux voisin qui avait retenu l'enfant (c'était pour rire)...
Ma théorie du complot préférée. pic.twitter.com/VKg1vBuC9a
— Impérialiste Ashkénaze (@ResistanceFRA) 20 juillet 2018
... Bercoff, lui, a pris très au sérieux ce rapprochement :
Notons encore que le journaliste Jean-Claude Bourret et le géopolitologue Alexandre Del Valle ont relayé la pseudo "révélation" du site Algérie patriotique, selon laquelle Benalla aurait été un agent des services secrets marocains.
#AffaireBenalla : leGarde duCorps @alex_benalla serait un "agent marocain" du #DGED d'après 1média algérien.. Il serait apparu via les réseaux PS de #Najat-VallauBelkacem liée au "Makhzen", l'"Etat profond" marocain..On aura tout entendu dans cette affaire..https://t.co/fTuMBcFncp pic.twitter.com/AI9oS2op9o
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 21 juillet 2018
Conspiracy Watch a épinglé Del Valle, le 22 juillet (à 8h43)...
Après Jean-Claude Bourret, c'est le géopolitologue A. del Valle qui se fait le relais de cette intox ne reposant sur aucune enquête (le papier fait 300 mots) et issue d'un site notoirement complotiste. Comme nous l'expliquons ici ⤵️https://t.co/CsaWTac7DH pic.twitter.com/JPdzRcnYJ0
— Conspiracy Watch (@conspiration) 22 juillet 2018
... sans tenir compte du fait que celui-ci n'avait pas repris à son compte la pseudo "révélation", mais avait au contraire pris ses distances avec elle, comme en témoignent la fin de son tweet ("on aura tout entendu dans cette affaire"), ainsi que l'usage du conditionnel, mais aussi et surtout d'autres tweets, postés dès le 21 juillet (à 10h02 et 10h04), soit près de 24h avant les accusations de CW, où il précisait sa pensée :
cela me semble exagéré et très peu probable https://t.co/FSiMbClwgK
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 21 juillet 2018
difficile de savoir, il faut rester prudent et cette source n'est pas du tout suffisante https://t.co/3KTDtMGTmX
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 21 juillet 2018
Certains ne savent pas lire, car je citais un journal algérien en disant "on aura tout entendu" à propos de l'affaire Benalla, et d'autres messages twitters que j'ai envoyés en réponse montrent que je doute de la fiabilité de cette info https://t.co/fKxXPTtVCk
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 22 juillet 2018
#AffaireBenallaMacron :Pour ceux qui font comme s'ils ne savaient pas lire, qui voient des Complotistes et pratiquent la mauvaise foi ou l'attaque ad hominem faute d'arguments, voilà ce que j'ai dit sur la rumeur du journal algérien accusant #Benalla d'être des services marocains https://t.co/jFc3aVEnVU
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 23 juillet 2018
Exact, mais certains cherchent la petite bête et ont besoin d'inventer des rumeurs de complotismes quand ils n'ont pas de complots réels sous la dent. L'invective remplace le débat, l'attaque-diabolisation est plus efficace dans la guerre idéologique que l'analyse honnête, hélas. https://t.co/gfBKQ3ZsCN
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 23 juillet 2018
Conspiracy Watch finira par reconnaître, le 24 juillet (0h34), au bout de trois jours, la bonne foi d'Alexandre Del Valle :
Ok, mais la conclusion du tweet ; "on aura tout entendu", est quand même assez explicite !!! en plus du conditionnel, merci de votre observation quand même ! https://t.co/4pNrXKFQ66
— Alexandre del Valle (@alexdelvalle3) 24 juillet 2018
D'innombrables questions se posent aussi à une certaine Pauline Mille, qui écrit sur différents sites d'extrême droite (Polémia, Réinformation.tv, La contre-révolution) :
"Les grands médias des grands oligarques de France ont fait Macron, ils sont en train de le défaire, ou de lui donner un avertissement, ou de jouer avec lui une comédie dont il est urgent de chercher la signification. (...) Quel est le vrai prénom de Benalla ? A-t-il des liens avec les services marocains ? (...) Est-il mandaté par quelqu’un d’extérieur aux institutions républicaines ? Accomplit-il des besognes inavouables ? Son étoile tient-elle à son silence sur certaines choses dont il aurait été témoin ? Ou encore est-il ce que l’on avait accusé Mathieu Gallet d’être, l’amant du président ? (...) Je n’irai pas jusqu’à suggérer que Collomb a donné lui-même l’info, mais c’est quelqu’un de son niveau, dans le système d’oligarchie, peut-être Minc, Atali, Niel, Pigasse ou quelqu’un des leurs. (...) Pourquoi cette affaire Benalla, et pourquoi maintenant ? Pour coincer la réforme constitutionnelle ? Pour faire descendre le jeune gorille trop dominant Macron de son arbre ? Ce serait un coup de Hollande, retour vers le passé ? Vous y croyez ? Alors quoi ? Les médias qui ont fait Macron s’apprêteraient à le défaire en constatant son échec ? Quel échec ?"
Un tel foisonnement de questions, sans un début de réponse, donne le tournis...
Une révolte du gouvernement profond ?
Quant au haut fonctionnaire et essayiste Éric Verhaeghe, ancien président de l'Association pour l'emploi des cadres (APEC), il estime que "l’affaire Benalla survient à un moment où l’exécutif tente de faire plier la fonction publique. Et qu’elle est révélatrice de la capacité de nuisance de l’appareil d’État face à toute tentative de réforme en profondeur."
Offrant une autre lecture de l'affaire Benalla, il se demande si nous n'assistons pas à une révolte des fonctionnaires contre Macron :
"Pourquoi l’affaire est-elle tombée entre les mains du Monde, qui a ouvertement fait campagne pour Macron, et pas du Figaro ou de Libération (ou encore de Mediapart) ? La question mérite d’être traitée au regard du contexte politique où elle survient.
Plusieurs dossiers annoncent en effet un été sensible pour le régime Macron (...). Au premier rang, la presse (Le Monde lui-même) s’est beaucoup attardé sur la réorganisation en cours de la sécurité de l’Élysée, qui, dessaisirait le GSPR, c’est-à-dire la police, de cette responsabilité, au profit de l’Élysée lui-même. On voit bien le raisonnement qui est suggéré : Benalla est victime d’un règlement de comptes d’autant plus sanglant de la part des policiers officiels qu’il devait, tôt ou tard, les supplanter.
Cette version, au demeurant contredite par le Préfet directeur de cabinet du Président, n’exclut pas, qu’elle soit vraie ou fausse, de relever le contexte toxique beaucoup plus large dans lequel l’affaire Benalla s’inscrit.
Au premier chef, on notera que Macron envisage sérieusement de modifier l’équilibre des pouvoirs en taillant fortement dans les effectifs de l’Assemblée Nationale. On ne s’étonnera pas de voir que le Parlement au sens large a réagi fortement à cette affaire à un moment où le Président s’emploie à le marginaliser. (...)
Mais d’autres dossiers tout aussi sensibles sont sur le feu, qui méritent d’être inscrits dans le contexte explicatif de l’affaire Benalla. (...)
La première concerne la PMA (...). Au fond, Macron est un conservateur élu avec des voix progressistes. Ces derniers n’ont pas ménagé leurs efforts pour forcer Macron à céder sur un sujet sensible. Et rien n’exclut qu’ils y soient allés d’une belle boule puante pour punir Macron de se montrer un peu raide sur le sujet de la PMA. Cette hypothèse est d’autant moins farfelue que certains défenseurs de la PMA se révèlent parfois proches de la hiérarchie policière… (...)
L’affaire Benalla, une vengeance du gouvernement profond ?
(...) Qu’avons-nous entendu pendant deux jours sur le sujet ? Des « politiques » qui expliquent n’avoir jamais été informés par leurs fonctionnaires. Et des fonctionnaires qui expliquent en détail comment ils travaillent avec les politiques. Peu à peu, l’opinion publique a compris ce que signifie le mot « technostructure », et qui est synonyme en France de gouvernement profond. C’est un ensemble de hauts fonctionnaires sans qui les ministres ne sont rien, et qui tiennent au jour le jour l’appareil d’État et les décisions qui vont avec.
De façon hallucinante, les Français ont entendu un ministre de l’Intérieur, dont le bureau est géographiquement situé à moins de 500 mètres de celui du Président de la République, qui fut l’un des premiers soutiens de ce Président, expliquer qu’il ne connaissait ni d’Êve ni d’Adam le chef de cabinet adjoint de l’Élysée, qui occupait le 4è étage du siège de campagne du candidat Macron et qui ne quitte jamais Emmanuel Macron d’une semelle.
Puis, le Préfet de police de Paris est venu expliquer aux députés qu’en réalité le cabinet du ministre suivait l’affaire Benalla dès le 2 mai au matin, en lien avec l’Élysée. On a aussi compris que l’inspection générale de la police nationale s’était intéressée au dossier très rapidement.
Et peu à peu, s’est dessiné un monde avec deux hypothèses possibles. Soit les élus (et en particulier Gérard Collomb) ont menti à l’Assemblée Nationale. Auquel cas mal leur en prend car les fonctionnaires se rebellent. Soit ils sont réellement aux fraises pendant que les décisions se prennent dans leurs ministères.
Dans les deux cas, il est clair que, à l’occasion des auditions par l’Assemblée Nationale, les fonctionnaires policiers et ceux de la préfectorale ont décidé de ne pas se laisser faire. (...)
De là à dire qu’il s’est trouvé un nombre suffisant de fonctionnaires au sommet de l’État pour ne pas empêcher la diffusion de l’affaire Benalla dans les medias, et bien décidés ensuite à ne rien passer au gouvernement, il n’y a qu’un pas qu’on franchira rapidement.
Le gouvernement profond en révolte contre Macron
Le principal enseignement à tirer de l’affaire Benalla est sans doute là : la haute fonction publique ne fait pas de cadeau à Macron et ne se laissera pas faire. La perspective d’une réforme fondamentale de la fonction publique soulèvera de profondes résistances, des résistances systémiques qui produiront leur cortège de boules puantes pour le pouvoir exécutif.
Ces premières résistances apparaissent clairement. Quand un Préfet de Police contredit son ministre devant l’Assemblée, on ne parlera pas d’autre chose que d’une réaction inquiétante du gouvernement profond face à la mainmise du politique, naturelle en démocratie.
L’affaire Benalla doit faire réfléchir tous les libéraux. Elle constitue un missile nucléaire d’avertissement contre une réforme ambitieuse de l’État. Emmanuel Macron sera désormais en difficulté pour toucher à la dépense publique. C’était peut-être cela, l’objectif…"
A moins que...
A moins que toute cette folle histoire ne soit que le résultat de l'influence un peu magique d'un porte-poisse qui annihile les espoirs de tous les cadors auxquels il se colle, au gré de ses coups de cœur changeants...
Et si elle était tout simplement un truc vaudou de destruction totale ? pic.twitter.com/bg2PAPh2DK
— Hélène Fontanaud ⭐️⭐️😴🐝 (@HeleneFontanaud) 23 juillet 2018
Allez savoir...
Si j'étais scénariste, j'ajouterais bien à notre saga de l'été cette petite touche de fantastique.
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