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Accueil du site > Actualités > Politique > La Droite républicaine n’a pas attendu N. Sarkozy

La Droite républicaine n’a pas attendu N. Sarkozy

« Il y a overdose d’immigration » J. Chirac – 1991

« L’immigration, un problème majeur » F. Lefebvre, bouche de N. Sarkozy, le 5 août 2010

La droite sous l’impulsion de N. Sarkozy a perdu son caractère républicain. L’historien P. Weil souligne à juste titre ce basculement dans l’interview parue dans Le Monde le 3 août 2010. Elle fait suite aux déclarations du président de la République qui pousse encore un peu plus loin la surenchère sécuritaire et la stigmatisation ethnique. Le Front National montre la voie depuis 30 ans, finalement le parti de droite classique, comme aiment à le dire les grands éditorialistes, se rallie à ce mode de pensée. Non sans convulsions, même si les symptômes datent. La droite Républicaine et « gentillette », aujourd’hui presque regrettée, voire fantasmée s’est aussi vautrée dans le marigot et plus qu’une fois. Sans N. Sarkozy. On semble l’oublier. Les silences gênés de toute la majorité (hormis la bigote C. Boutin) montrent peut-être qu’il ne fallait pas grand-chose pour provoquer ce basculement.

Les mêmes sous d’autres oripeaux

On semble découvrir les sarkozystes. Éléments vierges tombés du ciel, sans passé, sans jugements, sans états d’âme. Nés Sarkozystes. Capable d’assimiler l’extrême droite, d’en épouser les thèses sur un claquement de doigts. Ces Hommes nouveaux ne le sont pas. Tous cinquantenaires, ils sont le pur produit du RPR. Issu de la droite républicaine dont P. Weil chanterait presque les louanges. Qu’est-ce qui change alors ? Une plasticité exceptionnelle qui ferait du militant puis dirigeant de droite un être totalement adaptable même au plus ignominieux ?

À titre d’exemple, N. Sarkozy (lui-même) était président du comité de soutien de J. Chirac en 1980. Trente années plus tard, ce même gaulliste historique crée le ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale dont on dit qu’il lui fut soufflé par le politologue, mais surtout fin connaisseur de l’extrême droite P. Buisson. F. Fillon catalogué « droite sociale » (si cela peut être possible) se compromet silencieusement dans un flirt avec les thèses lepenistes sans sourciller. Mais comme bien d’autres. Toute la structure de l’UMP, est issue de l’usine RPR. De la droite républicaine…

Les silences (si peu gênés) de la majorité actuelle face aux débordements présidentiels sur les Roms et l’immigration provoquent la surprise des commentateurs. Il est pourtant surprenant que ces silences surprennent. En y regardant de plus près on pourrait s’apercevoir que les germes étaient (peut-être) là. Que la droite n’a attendu que l’hégémonie pour se décontracter un peu.

Un hémisphère droit amnésique

Rien de nouveau concernant la figure rhétorique de l’étranger agressif. L’envahisseur menaçant l’intégrité de la nation française réputée pure. En 1991, au Figaro Magazine V. Giscard d’Estaing (UDF) déclarait « Le type de problèmes auxquels nous allons être confrontés n’est plus l’immigration, mais l’invasion ». La même année J. M. Le Pen s’étranglait « Nous sommes victimes d’une invasion apparemment pacifique, mais qui, évidemment nous menace mortellement dans notre identité et notre sécurité ». Toujours au Figaro, Le très républicain et chiraquien J. L. Debré s’inquiétait « Ce qui était une immigration de renfort démographique devient une immigration de substitution », c’était en 1996. J. Chirac lui se préoccupait du travailleur français glissant vers la folie à cause des étrangers en évoquant « le bruit et l’odeur ». Déjà, le général de Gaulle (cité par A. Peyrefitte) s’emparait du thème, affirmant « Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront 20 millions et après-demain quarante ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Eglises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées ! ».

Tout en refusant une alliance objective avec l’extrême droite, ce type de déclarations furent monnaie courante. Que dire des personnalités passées en un clin d’oeil des franges nationalistes à la droite parlementaire conservatrice et respectable. Les visiteurs du GRECE ou du Club de l’Horloge nostalgique de la France blanche catholique et coloniale. Nazillons passés de l’ombre brune à la lumière d’une députation.

P. Weil pointe judicieusement le tour dangereux que prennent les évènements. Un Président de la République qui s’empare de faits divers pour se répandre sur l’immigration, l’insécurité et promettre des déchéances nationales devient un sujet de questionnement voire de tracas. L’historien rappelle les grands principes républicains, ce cordon sanitaire politique qui a tenu jusqu’à présent. Démonstratif à ce propos, il prend pour exemple le cas de V. Giscard d’Estaing qui voulut renvoyer les Maghrébins en situation régulière. Dont le projet méphitique fut contrecarré par des démocrates, chrétiens et gaullistes de sa majorité. Démonstratif, mais pas définitif. Car la mue est fulgurante, sans heurts et trop silencieuse.

Difficile dans ce cadre politique de tenir une position progressiste (même de droite) à propos de l’immigration. Dans toutes les bouches, elle est un « problème », largement corrélé à l’insécurité. L’espace est saturé de haine et d’idées préconçues que l’argumentation ne semble pas pouvoir abattre. En 1990, B. Megret déclarait « Notre stratégie de conquête du pouvoir passe par la bataille du vocabulaire. Lorsqu’ils parlent d’identité, les hommes de la rue, journalistes et hommes politiques entrent dans notre champ lexical. »

Sources citations : Les mots sont importants

Vogelsong – 5 aout 2010 – La Vigie


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