Les questions clés des régionales

Qui sortira vainqueur de la bataille du leadership à gauche ?
Moins d’un an après les élections européennes, qui ont vu la liste Europe-Ecologie talonner le Parti Socialiste (16,28% contre 16,48), la formation écologiste, qui arborera les mêmes couleurs aux élections régionales sans pour autant avoir constitué de parti, a-t-elle les moyens de prolonger l’élan des élections européennes ? Le dernier sondage CSA daté du 17 janvier 2010 attribuait 15% des suffrages aux écologistes contre 22% aux socialistes. Un score tout à fait satisfaisant mais Daniel Cohn Bendit vise plus haut : l’objectif est d’installer Europe-Ecologie comme la troisième force de l’échiquier politique. La recette des européennes, un habile cocktail d’associatifs, de politiques et de personnalités de la société civile, a été prolongé, avec de nouvelles arrivées, comme le chanteur Sanseverino, Augustin Legrand des Enfants de Don Quichotte mais aussi des membres du collectif Jeudi Noir. De plus, la question écologiste a occupé les devants de la scène à l’occasion du sommet de Copenhague et la prise de conscience de l’impératif écologique est désormais incontestable : selon un sondage commandé par le salon Produrable en mai dernier, 93% des français se disent concernés par les enjeux environnementaux.
A l’inverse au PS, si les polémiques se tarissent, le constat alarmant qui avait amené les socialistes à la déroute des européennes est le même : flottements idéologiques tenaces (Le Parti Socialiste plongé dans une crise idéologique), absence de leadership qui induit une cacophonie contradictoire dès qu’il s’agit de s’exprimer sur une thématique d’actualité et un manque cruel d’innovations, de procédés nouveaux et susceptibles d’aiguiser l’intérêt des français. A l’inverse, la vague rose qui avait déferlé aux élections régionales précédentes, en 2004, témoigne du fort ancrage local du Parti Socialiste, un avantage non négligeable dans l’optique de conserver ses 22 régions sur 24. Reste pour cela de ne pas être devancé par les Verts au premier tour...
La stratégie de l’union de la droite portera-t-elle ses fruits ?
Dernières échéances avant les présidentielles de 2012, ces élections régionales sont l’occasion pour Nicolas Sarkozy, qui ne cache guère sa volonté de rempiler pour un second mandat, de mettre à l’essai sa "Majorité Présidentielle", susceptible d’engranger un excellent score au premier tour, puis, au second tour, compenser l’absence de réserve de voix par la dynamique qu’engendrera le score du premier tour. Ce pourquoi le ralliement de Philippe de Villiers, Frédéric Nihous, Hervé Morin, Jean-Marie Bockel et Eric Besson est fondamental. Habile dans la théorique, reste à la mettre en pratique. A titre d’exemple, un récent sondage du JDD en Ile de France, créditait la liste UMP de Valérie Pécresse de 34% au premier tour, contre 23% pour Huchon et 16 pour Duflot, mais seulement de 48% au second tour ! A Rhônes-Alpes, François Grossetête pour l’UMP, devancerait certes Jean-Jack Queyranne de 4 points de pourcent (28 contre 24)...mais serait largement dominée au second tour (58% contre 42). Mais si la formule s’avère efficace, nul doute que Nicolas Sarkozy en tirera les leçons à l’horizon 2012.
Or, comme l’indiquait récemment un ministre au Figaro, la théorie de la dynamique du premier tour ne résiste pas à l’arithmétique du second tour. Et si l’on en croit les sondages,la Majorité Présidentielle ne devrait pas obtenir les performances escomptées : trop hétéroclite, elle ne pallie pas l’impopularité du président de la république et si elle parvient à séduire les villiéristes, les électeurs de centre-droit ne semblent guère enthousiasmés par cette UMP élargie. En Picardie, en Franche-Comté et en Champagne-Ardennes, les chances de victoire de la droite ne sont pas infondées. Quant à l’Alsace et la Corse, les deux seuls conseils régionaux détenus par l’UMP, la victoire est certes probable, mais loin d’être acquise. En réalité, l’UMP parie sur un maintien des Verts ou des communistes au second tour, et espère les voir se maintenir dans le cadre d’une triangulaire au second tour et ainsi disperser les voix de gauche. A la condition que le Front National ne s’invite pas au deuxième tour : pour cela, il lui faudra réunir 10% des suffrages. Loin d’être une mission impossible puisqu’en 2004, le Front National s’était maintenu au second tour dans dix-sept des vingt-six régions.
Le combat de trop pour Jean-Marie Le Pen ?
Âgé de 81 ans, Jean-Marie Le Pen s’apprête à livrer son ultime bataille politique, après trente huit ans passés à la présidence du Front National. Tête de liste dans la région PACA, Jean-Marie Le Pen savoure d’autant plus cette échéance régionale qu’il n’avait pu se présenter il y a six ans, faute de payer un impôt dans la région puisque le FN prenait en charge les frais de son appartement à Nice. Cruelle déception qui avait privé le président du FN de son siège de conseiller régional. Le dernier sondage en date relatif à la région PACA date d’octobre 2009 et créditait la liste de Jean-Marie Le Pen de 14% des suffrages exprimés, provoquant ainsi une quadrigulaire avec l’UMP, le PS et les Verts. Le minimum syndical pour le président du Front National à qui les échéances régionales réussissent plutôt bien, il s’agit d’ailleurs, après les présidentielles, des élections qui réussissent le mieux au parti frontiste avec 13,9% des suffrages exprimés en moyenne. Mais conscient du danger que constituerait la présence du FN au second tour des élections régionales, l’UMP a investi un candidat MPF afin de concurrencer Jean-Marie Le Pen et éviter que ce dernier n’atteigne le seuil des 10%.
Si le FN parvenait à se maintenir au second tour, nul doute que les ambitions de Jean-Marie Le Pen serait satisfaites tant les performances électorales du Front National se dégradent inexorablement depuis la déception des présidentielles 2007 : déroute aux élections législatives, où le score moyen des candidats FN ne s’était pas élevé au-delà des 4,8% des suffrages (contre 11% en 2002) tandis que le FN n’avait pas dépassé un point de pour cent aux municipales 2008. De plus, l’adhésion des français aux idées portées par le FN est en net recul, comme en atteste un récent sondage de la Sofres pour Le Monde : le taux d’adhésion global aux idées frontistes est passé de 26% en 2006 à 18% aujourd’hui. En revanche, plus de 42% des français estiment que le FN n’est pas un danger pour la démocratie contre 29% il y a trois ans : le Front National, à la faveur de le dédiabolisation entamée par Marine Le Pen commence à s’affirmer comme un parti républicain à part entière.
Un grand chelem socialiste est-il possible ?
Hypothèse paradoxale tant le PS navigue en eaux troubles, mais loin d’être dénuée de sens. Déjà majoritaire dans 22 des 24 conseils régionaux, le Parti Socialiste a l’avantage de bénéficier de l’implantation locale de ses élus et d’une gestion des régions durant les six dernières années jugée efficace et saluée. A Rhônes-Alpes, la réélection de Jean-Jack Queyranne semble acquise à la vue de la popularité dont bénéficie ce dernier. A l’instar de ce dernier, la plupart des présidents de conseil régionaux socialistes bénéficient d’une certaine popularité, en raison de leur proximité et de leur isolement vis-à-vis de Solférino. Les présidents de conseil régionaux se sont construits à l’écart du PS. Et ils ne sont guère enthousiasmés à l’idée d’accueillir Martine Aubry ou toute autre figure nationale du parti à l’occasion de la campagne des régionales. De fait, en dépit des errements du Parti Socialiste, un grand chelem n’est pas hors de portée. Pour cela, un accord avec les Verts sera bien entendu nécessaire car une triangulaire avec deux listes de gauche et l’UMP serait l’assurance d’une défaite. Un grand chelem qui serait paradoxal, et qui illustrerait ce PS qui ne doit sa pérennité qu’à ses élus locaux.
A retrouver dans son contexte original sur http://lenouvelhebdo.com
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