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Accueil du site > Actualités > Politique > Mécanisme Européen de Stabilité : la banque plus forte que la démocratie (...)

Mécanisme Européen de Stabilité : la banque plus forte que la démocratie ?

Un choix important pour l'avenir de notre démocratie va être soumis au Parlement mardi 21 février. Or cet évènement se produit dans un silence médiatique assourdissant, silence dissimulé par un assaut d'informations concernant des évènements de campagne éléctorale soigneusement mis en scène.

Mais, à propos, c'est quoi, le MES ?

Mardi aura lieu au Parlement un vote crucial engageant l'avenir de notre pays. En effet, les parlementaires doivent décider s'ils donnent leur aval à la mise en place du MES, première partie d'un cheval de Troie qui en comprend deux (l'autre partie étant constituée du Traité Européen de Stabilité, TSCG, Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance dans l'Union Économique et Monétaire Européenne qui sera voté en suivant) et qui va venir dynamiter le fonctionnement démocratique de nos pays.

Vous lisez cela et vous pensez que j'exagère. Vous avez entendu parler de ce texte et vous pensez qu'il est secondaire et qu'il n'engage à rien puisque ce qui importe, c'est le Traité, et que là, il y aura discussion. C'est le discours tenu, entre autres, par un certain nombre de socialistes. Est-il juste ?

Regardons le texte. Que dit-il ? En gros, on pourrrait dire qu'il s'agit, pour les États concernés, d'accepter de s'engager à fournir au MES de quoi constituer un capital afin d'aider rapidement un pays financièrement en difficulté : un mécanisme de solidarité, donc ?

Non, parce qu'il s'agit d'aider les États en difficulté financière. Donc de les aider à payer leurs dettes. Donc d'aider les financeurs (« institutions financières ») et pas d'apporter de quoi soigner les malades et venir en aide aux victimes de la crise. Moyennant quoi, les pays aidés devront appliquer des mesures préconisées associées à l'aide (comme l'a fait le FMI depuis longtemps, avec les conséquences sur les pays « aidés » que l'on sait, ou comme la Grèce le fait depuis plusieurs années avec la réussite que l'on observe tous les jours...). On peut imaginer sans trop risquer se tromper que ces mesures vont consister en mesure de rigueur.

On peut noter qu'il ne s'agit pas d'un pacte de solidarité mais de stabilité : ce ne sont pas les peuples qui aident les peuples, mais la finance qui a trouvé cette façon de faire payer à tout le monde ce que les seuls pays les plus pauvres n'arriveraient pas à donner, quitte à mettre tout le monde en faillite.

Qui va décider de ces énormes transferts d'argent ? Les « gouverneurs », ministres des finances de leur pays.

Mais il y aura une limite ?

Non.

Mais il y aura un contrôle ?

Non.

Autant on trouve dans le texte des précisions sur la vérification de la mise en œuvre des efforts demandés aux Nations recevant l'aide, autant il est précisé que les membres du MES ne peuvent être attaqués en justice. Le Parlement Européen n'a pas son mot à dire, et le MES passe au-dessus des Parlements Nationaux.

C'est bien là le premier et le plus simple signe de l'attaque frontale à la démocratie que veut imposer ce texte : les peuples vont perdre la souveraineté qu'elles ont sur leur budget. Et les démocraties seront soumises à punition si elles ne parviennent pas, par exemple, à verser leur obole au panier (un certain nombre de milliards, quand même, l'obole...).

Je conseille de lire le résumé du texte mis en lien ici "Le mécanisme européen de stabilité pour les nuls, le retour" de Liior.

Enfin, voici le texte d'une lettre dont je ne suis pas l'auteur, décrivant le danger de ce mécanisme et de ce traité, lettre destinée aux députés si l'on souhaite les alerter,

« Comme des millions de personnes dans toute l'Europe, je m'inquiète des dérives autoritaires, des politiques d'austérité et de la casse systématique des services publics qui sont mis en œuvre, sous prétexte d'une dette dont la légitimité n'est d'ailleurs toujours pas questionnée.
Nous voyons bien la réalité des conséquences de ces politiques en Grèce, où un véritable pillage du pays a lieu. Je ne développerai pas cette situation tragique que vous connaissez.

Je vous écris concernant le traité européen instituant le M.E.S. (Mécanisme Européen de Stabilité) sur lequel vous devrez vous prononcer le 21 Février.
Vous savez que ce mécanisme donnera à nouveau des pouvoirs complètement antidémocratiques à la Commission Européenne. Vous savez que les États européens seront soumis à une discipline budgétaire qui obligera à tout brader à la finance : service public après service public. À travers ce véritable pillage organisé, c'est toute la cohésion sociale et la qualité de vie dans notre pays, déjà bien entamée, qui seront mis à mal.

Je m'étonne du silence qui entoure ce traité crucial et m'indigne de l’absence de consultation populaire à ce sujet.

Des chèques en blanc à des personnes désignées !
Au sein de ce mécanisme, les décisions seront prises par le Conseil des gouverneurs composé exclusivement des ministres des finances de la zone euro. Aucun veto, ni aucune autorité des parlements nationaux n’est prévu sur ces ministres lorsqu’ils agissent au titre de gouverneurs. De plus, ils jouiront en cette qualité d’une immunité totale leur permettant d’échapper à toute poursuite judiciaire. Pourtant, ils disposeront alors librement des caisses de l’État qui devront accéder de façon « irrévocable et inconditionnelle » à leurs demandes. Il est aussi intéressant de noter que le budget de création du MES pouvant être réclamé aux États-membres dans un délai de sept jours seulement n’est pas plafonné et peut donc augmenter de façon illimitée sur simple décision du Conseil des mêmes gouverneurs.
Aucun membre ou employé de cette structure ne sera élu par la population ni responsable devant elle.

Une autorité pleine, entière et incontestable !

Plus fort encore, le MES peut attaquer en justice, mais ne pourra pas être poursuivi, pas même par les gouvernements, les administrations ou les tribunaux. Le manque de transparence concerne aussi les documents « inviolables », qui ne seront rendus publics que si le Conseil des gouverneurs le souhaite.

Négation des compétences fiscales et budgétaires des parlements nationaux, déni des principes de base de la démocratie, impossibilité d’opposer un veto, immunité judiciaire totale, opacité des documents… Autant de procédés antidémocratiques qui m'amènent aujourd’hui à vous demander d’adopter une position claire quant à ce traité.

Allez-vous l’accepter ou le rejeter ?
J'attends une réponse claire de votre part à mon adresse mail :
afin de la transmettre dans votre département à mon réseau sur le ( votre département
Votre absence de réponse sera considérée aussi comme une réponse.

Cette société devient étouffante d'injustice et témoigne de l'abandon des populations.
Je vous le demande, Monsieur le député, au nom de tous les citoyens dans ce pays, au nom de la souveraineté populaire, au nom de la justice sociale, au nom de la République et de la démocratie : par respect du peuple qui vous a tous élu, vous devez rejeter ce texte. »

 

On trouve un résumé du texte du MES ici :

http://blogs.mediapart.fr/edition/la-theorie-du-tout/article/261011/le-mecanisme-europeen-de-stabilite-pour-les-nuls-le-r

Et d'autres explications et liens dans ces deux billets et dans leurs fils de discussions :

http://blogs.mediapart.fr/blog/marie-caroline-porteu/130212/mes-et-regle-dor-la-tentation-totalitaire

http://blogs.mediapart.fr/blog/art-monica/160212/martine-orange-edwy-plenel-laurent-mauduit-au-secours?onglet=commentaires#comment-1693693

Un billet de blog ("L'orange pressée") avec la lettre aux députés et une explication en vidéo de Jean-Luc Mélenchon :

http://blogs.mediapart.fr/blog/lorange-pressee/190212/ecrivez-vos-deputes-pour-refuser-le-traite-mes-du-21-fevrier-2012
 

Billet paru aussi sur Mediapart


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13 réactions à cet article    


  • Lediazec Lediazec 20 février 2012 11:21

    Tapage médiatique monstrueux autour de la candidature de Minimus et... pendant ce temps, dans le fion ! C’est bel et bien d’un coup d’état dont il question. Ni plus ni moins. Je me demande où se trouve le seuil de tolérance pour que cela cesse, que nous nous mettions enfin à travailler pour le bien commun...


    • LilianeBaie 20 février 2012 14:05

      Oui, Lediazec, certains évoquent un coup d’état. D’autant plus redoutable qu’il est en train de s’accomplir par la voie parlementaire, donc légale, et à l’insu des citoyens, étant donné l’omerta médiatique sur cette question.
      Mais nous avons encore la fin de la journée pour prévenir nos parlementaires de ce que nous pensons de ce MES, et de leur éventuelle approbation de celui-ci. Les législatives ne sont plus très éloignées, il suffit de préciser à nos élus que nous aurons de la mémoire.


    • pepèreronchon pepèreronchon 20 février 2012 12:13

      ce sont des sujets qui doivent faire l’objet d’un référendum et exclusivement d’un référendum, combien de temps les peuples vont se laisser gruger !!!!


      • LilianeBaie 20 février 2012 14:15

        Il est pour moi évident que de telles décisions, engageant la France à long terme et risquant avoir des conséquences très lourdes pour ses habitants, doivent être soumises au référendum.


      • LilianeBaie 20 février 2012 14:12

        A noter : la très bonne analyse de Liior, avec rappel historique et vidéo, qui parait dans l’édition Agoravox de ce jour :
        Mécanisme Européen de Stabilité(MES) : ratification le 21/02/2012


        • Richard Schneider Richard Schneider 20 février 2012 16:35

          Sur un sujet aussi essentiel que le MES : silence assourdissant des médias - aussi bien de droite que de gauche.

          Le PS qui, une nouvelle fois, s’est fait piéger par Sarkozy, ne sait comment s’en sortir : il est pro-européen depuis toujours et il sait que son électorat est très divisé ; alors, il botte en touche en s’abstenant au moment du vote à l’AN ! (cf. Marianne 2 de samedi 18 février).
          Je ne comprends pas pourquoi Hollande, et surtout Mélenchon ou MLP ne réclament pas à cor à cri un référendum, puisque même le Président souhaite, paraît-il, redonner la parole au peuple ? 
          À moins que tout ce beau monde connaissant le résultat à l’avance (rappel : 2005) préfère proposer des consultations populaires sur « la longueur des sucettes » ou des sujets où ils sont sûrs du résultat. 
          Et pourtant, s’il y a une décision qui engage le destin de peuple français, c’est bien le MES.
          En conclusion : il y a de quoi être déçu par l’ensemble de la classe politique française !

          • Guy Liguili Guy Liguili 20 février 2012 18:57

            Mélenchon demande un référendum et il est un des seuls à en parler, à l’heure actuelle !


          • LilianeBaie 20 février 2012 17:21

            « Ce sont des tyrans parce que nous sommes à genoux ».
            Pourquoi est-ce que la classe politique, y compris socialiste, encense ce texte ou fait mine d’ignorer les atteintes majeures à nos principes démocratiques qu’il contient, et fait semblant de croire qu’il s’agit d’un traité de solidarité alors qu’il s’agit de sauver les banques ? Sans contre-partie et au détriment des citoyens..
            Pourquoi est-ce que les médias, et pas seulement les médias proches du pouvoir, n’ont pas alerté les citoyens sur ces textes et sur l’imminence de ce vote, ou ont laissé croire que Jean-Luc Mélenchon s’opposait à cause d’une posture d’opposition systématique, et pas pour le réel danger de ce qu’impliquerait ce texte s’il est voté ?
            Sans information, il n’y a pas de démocratie. Mais un afflux d’informations peut revenir au même : trop d’informations (sur l’entrée officielle en campagne électorale du Président de la République, par exemple) associées à un silence généralisé sur une question cruciale, cela revient au bon vieux mensonge par omission.
            Du genre « On vous dit tout... sauf l’essentiel ».
            Autant on comprend que ce soit le jeu du pouvoir (à déjouer cependant) autant la question du silence des médias me semble fondamentale.
            Et me fait penser au film « Les nouveaux chiens de garde » de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat.


          • LilianeBaie 21 février 2012 15:41

            @Stabilobûss

            Nous sommes nombreux à avoir compris que derrière l’apparence les décisions prises sont concertées, et pas dues à un simple hasard.

            Voici une phrase tirée de l’avant-propos du livre de Christophe Deloire et Christophe Dubois, chez Albin Michel « Circus politicus » :
            « Le cœur de ce livre révèle les dessous d’une forme de neutralisation du suffrage universel par une superclasse invisible qui dispose de réseaux souterrains pour orienter la décision politique en contournant le suffrage universel. Il dévoile les mécanismes des urnes magiques où l’encre des bulletins de vote s’efface pour restreindre l’expression du peuple, et nous fait entrer dans les salons feutrés où les programmes politiques font sourire. »

            Nous avons une preuve de cette stratégie de contournement avec le MES.


          • Jason Jason 20 février 2012 17:11

            Oui, c’est bien un 18 Brumaire qui se profile. Les banquiers ont remplacé les consuls.

            C’est la démocratie qu’on assassine.


            • Guy Liguili Guy Liguili 20 février 2012 18:59

              Le problème avec le MES c’est qu’à défaut de pouvoir les poursuivre, nous serons obligés de les raccourcir !


              • soubise 20 février 2012 20:07

                Et oui ,une fois installés dans leurs certitudes les banquiers n’auront plus qu’a récolter les fruits de notre labeur.
                Il n’y a pas de solution puisque nous sommes trahis par nos représentants, donc il faudra bien sortir avec les pics et les fourches.


                • LilianeBaie 21 février 2012 08:36

                  Voici un site qui est une mine d’informations sur la question du MES, notamment sur le futur vote de nos députés :
                  http://www.courtfool.info/fr_MES_les_votes_des_deputes.htm

                  Il n’est pas trop tard pour écrire aux députés par mail : peut-être que ceux-ci consultent leur smartphone pendant les discussions... D’autant plus que celles-ci doivent durer plusieurs jours si l’on en croit le site de l’Assemblée Nationale consulté hier.

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