Remaniement : le couloir de la mort ?
Un remaniement c'est comme le couloir de la mort. Vous ne pouvez échapper à la sentence mais vous ignorez quand elle tombera.
Le couloir de la mort, c’est ainsi que Roselyne Bachelot appelle la période qui précède un remaniement. Cela va de quelques jours à plusieurs mois. Qu’on se souvienne ; en 2010, après les élections régionales, le remaniement attendu pour le lendemain des résultats s’est produit en novembre.
Pour avoir vécu cette séquence de la vie politique, je peux vous assurer qu’elle est éprouvante.
D’un point de vue purement pragmatique, cette pratique nuit gravement à l’administration du pays. Une épée plane au dessus des têtes des ministres et, de fait, sur leurs collaborateurs. Certains conseillers prennent des contacts informels avec des entreprises pour se recaser, avec la peur au ventre que cela se sache.
Tout le monde ignore la teneur de la sentence et quand elle sera appliquée. Les équipes de cabinet font leurs cartons, l’ambiance est glauque, tendue, noire. Sur un simple coup de sifflet, le Premier ministre se rend à l’Elysée pour remettre sa démission au président de la République. Les membres de son gouvernement l’apprendront par une dépêche AFP pour les premiers avertis, par les médias pour les autres. Mais à ce stade, ils ne lâchent pas une seule seconde le fil de l’actualité.
Puis c’est l’attente, la terrible attente du coup de téléphone.
« Monsieur le ministre, j’ai le Président en ligne pour vous. Je vous le passe ? »
Banco ! Vous embarquez pour la prochaine croisière.
« Monsieur le ministre, j’ai la secrétaire du Premier ministre pour vous. Je vous la passe ? »
C’est mort. Vous avez toutes les raisons de vous inquiéter. C’est foutu.
Mais là, c’est le meilleur des cas de figure. Parce qu’en règle générale, vous apprenez la nouvelle à la radio ou à la télévision, lorsque le Secrétaire général de l’Elysée fait la lecture des heureux gagnants sur le perron. Si vous l’apprenez comme un français normal, c’est que vous êtes redevenu un Français presque normal.
Une semaine plus tard, vos amis ne vous reconnaissent plus et vous avez l’impression d’avoir un portable factice tant il est devenu muet. Vous vous souvenez avec nostalgie du temps où vous vous plaigniez qu’il sonnait tout le temps.
Quand à la loi qui porte votre nom et que vous avez fait voter, les décrets d’application ne seront jamais pris parce que votre prédécesseur n’a pas envie de faire vivre un texte qui ne porte pas son nom. Il a encore moins envie qu’on se souvienne du vôtre.
Alors, un remaniement ; le couloir de la mort ou pas ?
5 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON