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Renouvellement du Conseil Constitutionnel : où sont les femmes ?

Le 1er mars 2010, Michel Charasse, Hubert Haenel et Jacques Barrot remplaceront Olivier Dutheillet de Lamothe, Dominique Schnapper et Pierre Joxe.

Ce 24 février 2010, trois nouveaux membres du Conseil Constitutionnel viennent d’être officiellement nommés respectivement par le Président de la République Nicolas Sarkozy, le Président du Sénat Gérard Larcher et le Président de l’Assemblée Nationale Bernard Accoyer.


Première nomination de l’ère Sarkozy

C’est la première nomination au Conseil Constitutionnel pour Nicolas Sarkozy, et la seule pour son mandat actuel. Mais l’élément majeur est son aspect doublement novateur.

D’abord, par les textes, la réforme des institutions de juillet 2008 (voir §ad), le pouvoir de nomination du Président de la République est désormais encadrée par les parlementaires (comme pour la désignation du nouveau président de Radio France).

Ensuite, par la pratique personnelle de Nicolas Sarkozy qui a voulu rendre ces nominations transparentes, au risque d’y voir la cacophonie et des amertumes. Nicolas Sarkozy a en effet voulu procéder à ces nominations en concertation avec Gérard Larcher et Bernard Accoyer (une réunion a eu lieu le 22 février 2010).

Apparemment, ces nominations ont préoccupé depuis longtemps Nicolas Sarkozy qui aurait voulu aussi en discuter avec le Président du Conseil Constitutionnel, Jean-Louis Debré, mais ce dernier a refusé toute discussion en disant qu’il prendrait acte des nominations sans faire de commentaire. Histoire de rappeler qu’à sa propre nomination à la tête des Sages, le 5 mars 2007, Jean-Louis Debré avait essuyé une remarque peu agréable de son prédécesseur direct, Pierre Mazeaud.

Les préoccupations de Nicolas Sarkozy étaient triples : d’une part, s’assurer que sa décision sera irréprochable ; d’autre part, avoir un Conseil Constitutionnel sur lequel il puisse compter (plusieurs lois ont été "retoquées", ce qui a provoqué plusieurs fois la contrariété présidentielle) ; enfin, saisir l’occasion de continuer l’ouverture politique et troubler l’opposition.

Finalement, aucune concertation vraiment "intelligente" n’a eu lieu entre les trois personnages de l’État chargés des nominations puisque, en définitive, deux sénateurs ont été nommés sur les trois et le troisième est un ancien député. Les trois membres désignés ont autour de 70 ans. Victime collatérale : la féminité puisque elle n’est plus représentée que par une seule personne (soit moins de 10% !).


Nomination de Nicolas Sarkozy : Michel Charasse

Michel Charasse (68 ans), sénateur, est un mitterrandien de pure souche. Devenu sénateur quand Roger Quilliot est devenu ministre en 1981, il était avant tout conseiller de François Mitterrand à l’Élysée. De 1988 à 1992, il occupa l’important Ministère du Budget. Il était tellement proche de François Mitterrand que ce dernier hésita à le nommer Premier Ministre en mai 1991.

Pour des raisons de politique locale dans le Puy-de-Dôme, Michel Charasse a été exclu du Parti socialiste en 2008, ce qui l’a conduit à se rapprocher du groupe RDSE (ex-gauche démocratique) qui rassemble les radicaux de gauche et de droite au Sénat.

Sa nomination au Conseil Constitutionnel serait une promesse de Nicolas Sarkozy lors de sa campagne présidentielle, Michel Charasse ayant choisi de le soutenir. Michel Charasse est le maire de Puy-Guillaume qui se situe sur la circonscription de Brice Hortefeux, Ministre de l’Intérieur et proche de Nicolas Sarkozy.

Nicolas Sarkozy réussit aussi à maintenir une présence pseudo-socialiste après le départ de Pierre Joxe et évite la critique selon laquelle le Conseil Constitutionnel serait monolithique. Il rappelle également sa grande capacité de "digestion mitterrandienne" après avoir nommé le neveu de l’ancien Président, Frédéric Mitterrand, au Ministère de la Culture.

Étrange que Nicolas Sarkozy soit à l’origine de la consécration de deux personnalités de gauche : Bernard Kouchner avec son bâton de maréchal du quai d’Orsay et Michel Charasse au Conseil Constitutionnel. À ces consécrations peut s’ajouter celle de Didier Migaud à la tête de la Cour des Comptes.


Nomination de Gérard Larcher : Hubert Haenel

Également sénateur, depuis vingt-trois ans, Hubert Haenel (67 ans), conseiller d’État, est un élu alsacien qui a cumulé beaucoup de fonctions au sein du Sénat. Il est notamment Président de la Commission des affaires européennes (en vertu de la réforme des institutions de 2008), juge titulaire de la Cour de Justice de la République (qui va se prononcer sur le cas de Charles Pasqua), président du groupe d’amitié avec le Vatican, membre du groupe français de l’Union interparlementaire…

Selon les observateurs, la nomination d’Hubert Haenel au Conseil Constitutionnel va libérer beaucoup de postes au Sénat que Gérard Larcher pourra attribuer à certains sénateurs dans l’optique de sa réélection en octobre 2011, une élection de tous les dangers puisque le groupe socialiste est de plus en plus imposant et que l’UMP n’a plus de majorité absolue.

Autre argument utilisé par Gérard Larcher, celui de rééquilibrer le Conseil Constitutionnel en faveur du Sénat, les membres actuels ayant en leur sein trois anciens députés dont un ancien Président de l’Assemblée Nationale (les deux autres étant des anciens Présidents de la République). Le rééquilibrage va donc être important puisqu’il y aura deux sénateurs.

Par ailleurs, Hubert Haenel a fait partie de la Convention sur l’avenir de l’Europe, créée par le Conseil européen de Laeken en décembre 2001 et présidée par Valéry Giscard d’Estaing, qui a abouti à la rédaction du Traité Constitutionnel Européen adopté au Conseil européen de Rome le 29 octobre 2004. Hubert Haenel est donc un Européen convaincu qui connaît bien les rouages institutionnels de l’Union Européenne.


Nomination de Bernard Accoyer : Jacques Barrot

Au moins, voici un centriste qui n’aura pas perdu avec son ralliement immédiat à l’UMP en 2002. Jacques Barrot (73 ans) est un démocrate chrétien qui est devenu chiraquien par opportunité.

Député très jeune, à 30 ans, pour succéder à son père Noël, Jacques Barrot suivit Jacques Duhamel dans le soutien centriste à Georges Pompidou (déchirant le Centre démocrate qui, majoritairement, soutint Alain Poher). Il se retrouva sans discontinuité dans tous les gouvernements de la Présidence de Valéry Giscard d’Estaing et au début de la Présidence de Jacques Chirac (Présidents qu’il va retrouver au Conseil Constitutionnel), à des postes plus techniques que politiques : logement, commerce, santé, travail et affaires sociales. Soit neuf années de longévité ministérielle.

Secrétaire général du Centre des démocrates sociaux (parti réunifiant les centristes propompidoliens et les autres) sous la présidence de Jean Lecanuet puis de Pierre Méhaignerie (de 1976 à octobre 1991), Jacques Barrot a rejoint Jean-Pierre Raffarin, Dominique Perben et Michel Barnier dans leur tentative d’unifier l’UDF et le RPR pendant la cohabitation Jospin.

En juin 2002, Jacques Barrot (député chevronné) obtint son bâton maréchal en président l’immense groupe UMP à l’Assemblée Nationale (on constate avec Jean-François Copé que ce poste est essentiel dans le dispositif de la majorité).

Nommé Vice-Président de la Commission européenne pour la période sortante, 2004-2009, d’abord aux transports puis à la justice, Jacques Barrot abandonna la présidence du groupe UMP à Bernard Accoyer qui fut élu en juin 2007 le Président de l’Assemblée Nationale qui va le nommer au Conseil Constitutionnel. En 2004, il laissa sa circonscription à son suppléant Laurent Wauquiez, membre du gouvernement actuel.

Européen convaincu, Jacques Barrot défendait sa nomination parmi les Sages auprès de Nicolas Sarkozy en disant qu’il était nécessaire d’y désigner des personnes qui connaissent bien les institutions européennes afin de prendre des décisions qui ne seraient pas invalidées par la Cour de justice européenne.

Jacques Barrot pourra donc poursuivre son activité politique jusqu’à ses 82 ans.


Victime collatérale : la mixité sexuelle

Trois nouveaux membres : deux sénateurs, deux anciens ministres, deux fins connaisseurs des institutions européennes, deux originaires de l’UMP, deux Auvergnats.

Mais au total, sur les onze membres du Conseil Constitutionnel, il ne reste plus qu’une seule femme, Jacqueline de Guillenchmidt, dont le mandat s’achèvera au prochain renouvellement, en février 2013.

Si l’on souhaite une meilleure représentativité sexuelle du Conseil Constitutionnel, lançons le défi que les trois prochains membres désignés en 2013 soient tous… des femmes !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (24 février 2010)


Pour aller plus loin :

L’ouverture politique.

Nomination à la Cour des Comptes.

L’amertume de Pierre Joxe.

Historique des nominations au Conseil Constitutionnel.

Les nominations présidentielles.



 

Documents joints à cet article

Renouvellement du Conseil Constitutionnel : où sont les femmes ? Renouvellement du Conseil Constitutionnel : où sont les femmes ? Renouvellement du Conseil Constitutionnel : où sont les femmes ?

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10 réactions à cet article    


  • Michel DROUET Michel DROUET 24 février 2010 15:18

    Ces jeunes gens incarnent la notion d’emploi à vie qui ne sied guère avec la logique libérale qui est la leur.


    • voxagora voxagora 24 février 2010 15:49

       Excellent article, à la hauteur de la question qu’il pose.
      Je ne peux m’empêcher de remarquer que le 1er commentaire qu’il suscite
      non seulement évacue complètement la question « où sont les femmes »,
      mais l’illustre à merveille en digressant sur ..
      les jeunes gens, l’emploi à vie, la logique libérale ..


      • Romain Desbois 25 février 2010 00:44

        C’est une vraie question que vous posez là.
        La parité pourrait très bien s’appliquer dans ces institutions.

        L’Etat a encore du chemin à faire dans ce domaine.


        • curieux curieux 25 février 2010 08:34

          La femme est l’égale de l’homme
          La loi sur la parité est antidémocratique. On aurait pu penser que les femmes ameneraient un mieux dans la politique mais je suis maintenant de l’avis contraire. Elles sont probablement pire que les hommes
          Regardez Tatcher,
          En France, elle sont aussi pourriTes, arrivistes et opportunistes : Dati, Lagarde, MAM, Yadé et la meilleure Bachelot


          • King Al Batar Albatar 25 février 2010 11:08

            Bon article sauf le titre et la conclusion.

            On nomme des personnes pour leur compétences et non pour leur sexe. La parité est effectivement anti démocratique et du même ordre que les quotas.

            La démocratie c’est l’égalité des chances d’arriver là ou on veut arriver, pas l’égalité des postes. Sinon on crée une inégalité des chances. En effet un homme très competent pourrait ne pas être pris s’il y a déjà 50% d’hommes dans les postes occupés.

            Quid de la parité chez les SDF, les eboueurs, les livreurs de pizza, les ouvriers du BTP, et autres metiers que les femmes ne veulent pas faire ?

            Quid de la parité chez les juges et les procureurs de la republiques constitué à 70% de femmes ?

            Aujourd’hui chacun a la possibilité de faire des grandes études, la majeure partie des femmes qui font Sciences Po s’orientent dnas la magistrature, là ou les hommes préferent embrasser une carrière politique. Ce sont des choix, et réclamer une parité aurait pu être un argument interressant il y 35 ans. Aujourd’hui cela est un argument vieux et totalement dépassé.


            • Sylvain Rakotoarison Sylvain Rakotoarison 25 février 2010 12:33

               A Albatar 25 février 11:08

              Il y a une différence entre regretter la quasi-absence de femmes (une seule dans cette instance !), ce que j’ai écrit, et proposer d’instituer une parité de nominations, ce contre quoi je serais.

              Bien sûr que la compétence est le critère théoriquement le plus important, mais alors, la quasi-absence de femmes au Conseil Constitutionnel signifierait-elle qu’il n’existe pas de femmes compétentes pour cette mission ?

              Vu le nombre très restreint de places (trois tous les trois ans), il est clair qu’il y a un grand nombre de personnes (hommes ou femmes) aptes à occuper cette fonction, donc le problème de la compétence n’en est pas un.

              D’ailleurs, d’après les échos bien informés de la presse, Nicolas Sarkozy aurait bien voulu qu’une femme au moins soit nommée, donc, il avait bien conscience qu’il fallait aussi non pas féminiser l’institution, mais déjà stabiliser le nombre de femmes (qui vient donc de diminuer). Ce n’est pas un hasard si dans ce gouvernement, il y a aussi une quasi-parité hommes et femmes.

              Enfin, pour reprendre votre argument selon lequel (pour résumer) les femmes seraient plus « juristes » que « politiques » (par leur choix de carrière), à supposer que cette assertion soit vraie, elle prêcherait plutôt pour augmenter le nombre de femmes au Conseil Constitutionnel dont le rôle doit être surtout juridique et pas du tout politique.

              Cordialement.


            • COLRE COLRE 6 mars 2010 16:24

              Albatar : « On nomme des personnes pour leur compétences et non pour leur sexe », ni pour leur couleur… ? C’est donc pour cela que par ses compétences, Depardieu, jugé meilleur acteur de son âge, a été choisi pour jouer Dumas…
              smiley


            • Senatus populusque (Courouve) Senatus populusque 25 février 2010 12:36

              Au moins on est sûr que DSK ne posera pas sa candidature ...


              • Kristen Kristen 28 février 2010 18:09

                triste 5 éme Républik...le renvoi d ascenseur pour les copains qui ont sû prêter main forte pour la présidentielle...ça mérite petite récompense....
                je ne comprends pourquoi le président de la République nomme des membres du conseil constitutionnel si l on aspire à la séparation des pouvoirs...et pourquoi une fois leur mandat terminé il intègre le conseil constitutionnel...
                cette république est bien une République d opérette il y a urgence à fonder la 6 éme République à moins que les Français se rejouissent de pratiques monarchiste par un élu de leur choix...


                • Maldoror Maldoror 6 mars 2010 15:44

                  « Représentativité sexuelle » muhahaha. Vous votez en fonction du sexe de la personne ? On se demande bien en quoi le sexe serait un critère politique pertinent. Des femmes ils n’auront aucun mal à en trouver, de la même caste de politicards professionnels, et on se demande bien ce que ça changera.
                  Enfin si, ce que ça change c’est que quand une femme est nommée à un poste politique il sera plus facile de faire diversion par le biais de la peopleisation. Regardez Berlusconi, il a tout compris lui, il est pour la parité, c’est un véritable féministe.

                  http://www.dailymotion.com/video/x93qon_alain-soral-face-%C3%A0-bachelot-chez-ar_news
                  http://www.dailymotion.com/video/x93r2r_alain-soral-face-%C3%A0-bachelot-chez-ar_news

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