Effort, travail, entreprise contre liberté, égalité, fraternité
Notre président s’est distingué par deux discours dont chacun comportait une déclaration importante, en dehors de celle mentionnant l’installation d’un ordre mondial auquel nous ne devrions pas échapper. Le premier message fut de parler de l’avenir d’une civilisation de l’éthique pour reprendre une expression de Edgard Morin, et le second message est la refondation du capitalisme, dont il avait donné une définition en rappelant que le capitalisme c’est l’effort, le travail et la capacité d’entreprendre.
En dehors du fait que ces thèmes furent repris sur Agoravox par certains d’entre nous, je n’ai pas d’échos qu’ils furent l’objet de débat d’idées ni d’idéaux ailleurs que dans quelques émissions télé, style « riposte, c’est dans l’air etc.
Nous aurions pu penser de telles déclarations de nature à interpeller la classe politique, les intellectuels et la population. Le sont-ils peut-être mais ce doit être dans des cercles très fermés et inaccessibles aux journalistes.
A mon sens le président semble particulièrement seul dans ce crédo, bien qu’il ait enfoncé le clou en répétant qu’il était pour un capitalisme d’entreprise, et ce depuis sa prise de parole devant le MEDEF histoire de confirmer leur collusion d’intérêt et de dire ainsi qu’il serait avant tout leur président.
Donc pas surprenant qu’après la crise il ait fustigé ce qu’il appelle le capitalisme financier. Mais quand il parle de « refonder » le capitalisme, ce qui signifie revoir ses fondements, j’avoue que je ne comprends plus, où plutôt je comprends que lui et moi et certainement d’autres spécialistes de la question n’avons pas la même définition du capitalisme, j’y reviendrai.
C’est pour cela que je rappelais la définition qu’il en donnait « l’effort, le travail et entreprise ». La première résonance en moi fut liberté égalité fraternité, puis travail famille patrie. Chacun furent porteur d’un message qui s’est fortement érodé sous les coups de butoir du capitalisme.
Que faut-il donc en comprendre ? Personnellement j’ai fait mon diagnostic depuis le changement de sigle du patronat français, et déjà en 1999 je l’écrivais
Ainsi le CNPF est devenu MEDEF. Le Conseil du Patronat français, terminologie dans laquelle s’affirme le poids de l’autorité de celui qui commande dans son seul intérêt (image péjorative du profit), a opté pour une image plus fluide et moderne : Le Mouvement des Entreprises de France.
Cette idée de mouvement signifie : nous sommes agissants, nous faisons vivre les entreprises qui vous emploient, les entreprises agissent.
Mais elle signifie également beaucoup plus que cela, son fondement sociologique crucial se situe autour du mot mouvement
En effet, la captation par le patronat du mot mouvement ne fut pas anodine, il a une connotation sociologiquement importante.
Il signifie que le patronat se fixe comme objectif d’agir au travers de la notion d’entreprise pour, établir un nouvel ordre de vie.
Généralement ce mot se trouve toujours devant celui désignant sa finalité, (mouvement féministe, écologiste, mouvement syndical, mouvements millénaristes, messianiques, etc.) ce sont toujours des mouvements qui se donnent pour mission la conquête d’un objectif. Ils indiquent clairement la mise en action des conditions à faire prévaloir pour développer ce qui le caractérise. C’est dans cet ordre d’idée que doit être compris ce changement de sigle, le patronat déjà puissant, présent dans la sphère politique, qu’a-t-il donc à conquérir si ce n’est un ordre de vie, celui qui s’est mis en place à partir de 1994. Je n’en développe pas plus pour ne pas alourdir le sujet, mais cette date doit parler aux spécialistes.
Cette vision de l’entreprise, beaucoup plus dynamique, dilue dans l’intérêt collectif de l’entreprise, la notion de profit personnel qu’affirme la notion de patronat et par la caractéristique de la Société Anonyme protège ses dirigeants et s’ouvre à la population, se démocratise.
Ainsi, à partir du sigle CNPF, qui est le reflet d’une organisation corporatiste, défendant ses intérêts particuliers, nous passons au sigle MEDEF qui affiche une volonté de développer son ordre de vie et d’y incorporer la population par l’actionnariat. Dans cette logique un jour des candidats du MEDEF se présenteront au suffrage universel.
Je ne dirais pas que c’est presque fait, mais çà risque d’être notre futur. Déjà l’on comprend mieux les déclarations de notre président devant le MEDEF après son élection, comme se comprennent mieux toutes les mesures de déréglementation du monde du travail pour que seul l’effort, le travail, l’entreprise soient récompensés ; il faut comprendre le bouclier fiscal dans cet esprit, comme les modifications visant les nouvelles mesures touchant les chômeurs.
Notre président est sur une ligne de conduite claire qui a déjà transpiré et dont il ne s’est pas caché, faire de l’État une grande entreprise et de son parlement une assemblée d’actionnaires.
Dés lors je crois que l’on peut répondre à ce que va être sa refondation du capitalisme, car ses propos sur le sujet n’ont pas fait monter au créneau le MEDEF, alors qu’il y aurait de quoi puisqu’il veut remodeler ce qui fait leur puissance. Mais rien dans ses décisions n’ont été de nature à l’inquiéter. Le président a poursuivi la déréglementation du travail pour que le salaire s’obtienne par l’effort et le travail dans un esprit dévoué à l’entreprise, comme le font les entrepreneurs, qui ne comptent pas leurs heures ni leur travail, et certains ne peuvent plus même compter leur « salaire ». Il semble donc que sa refondation soit un retour à la source du XIX siècle dans l’idée.
Car le capitalisme ne se distingue pas par le marché, il a existé avant lui, pas par la recherche de son intérêt ceci est inhérent à toutes les espèces vivantes et plus, pas par l’exploitation de l’homme par l’homme, il y a eu pire, pas par la liberté d’entreprendre, il y a des millénaires que l’homme entreprend, pas par le commerce c’est par lui que l’occident à colonisé le monde bien avant le capitalisme, pas par l’effort car l’homme en à toujours fait suivant sa condition, pas par le travail l’homme à toujours travaillé suivant sa condition.
Mais il n’y a pas toujours eu la notion de louage de sa force de travail apparu en 1804, dans le même temps que la disparition de la fixation d’un salaire par les corporations et leurs disparitions sous l’effet conjoint des lois Allard et le Chapellier en1791, comme conséquence de l’industrialisation qui a remplacé les manufactures.
D’’autres économistes défendent que le capitalisme dans le vrai sens du terme apparaît avec la Révolution Industrielle, initiée en Angleterre, dans le XVIII siècle. Sans aucun doute, que celle-ci a contribué à la création d’un capitalisme résultant des principes : travail, industrie, alliés au développement technologique et l’existence de main d’’œuvre bon marché, un ltravaille salarié mal rémunéré, avec un nombre d’’heures de travail quotidien exhaustif et une bourgeoisie active et entreprenante.
Étymologiquement le mot signifie l’accumulation de capital lié à deux entités : travail et production.
Beaucoup d’’économistes cherchent les origines du capitalisme dans le XVI siècle, lors de la création de richesse, résultant l’activité commerciale avec l’extérieur dans les entreprises de colonisations qui réclamait de nombreux capitaux et rapportait des richesses.
D’autres recherchent son origine dans la période Préhistorique du Néolithique qu’ils appellent « Accumulation Primitive du Capital », quand est apparue la première division du travail et l’’accumulation de richesse (capital), quand les agriculteurs cultivent pour leur compte personnel et que les bergers gardent la possession des têtes de bétail qui naissent.
Partant de cette interprétation qui à mon sens est la moins soutenable, on peut ajouter que d’autres espèces sont capitalistes comme les fourmis qui cultivent, les abeilles qui capitalisent leur miel et qui se répartissent les tâches etc. autant dire que notre monde est capitaliste comme d’autre on dit sans plus de raison qu’il était peuplé d’humains. Si le capitalisme doit désigner l’aptitude du comportement humain d’avoir dégagé les moyens de survivre alors il faut en faire une donnée d’ordre biologique et non plus de civilisation.
Donc c’est le passage à l’industrialisation avec accumulation de capitaux qui caractérise le capitalisme à partir non plus du commerce extérieur, mais intérieur, cela, permis par une libéralisation du salaire, et dans le berceau du libéralisme qui était passablement secoué par la résistance du corporatisme et l’étatisme ambiant de l’époque.
Le capitalisme n’est qu’un changement de dimension dans l’évolution des moyens de production humain.
Tout ceci ayant été précisé, la définition du Président se comprend un peu mieux, effort, travail, entreprise. On comprend aussi peut-être pourquoi il y a si peu d’échos, plus d’un ont dû sourire de lui voir mettre en place une aussi grosse ficelle, sauf que moi je n’en ris pas car cela se veut de remplacer, liberté égalité fraternité qui symbolise la république, par effort travail entreprise qui symbolise la puissance économique. C’est pour cela que je rappelais l’épisode du MEDEF et le lapsus de Fillon au sujet de la dette de l’Etat.
Alors que va-t-il refonder, les banques, en demandant à ses dirigeants de ne pas s’augmenter, ou cela rentre-t-il dans le cadre de la civilisation de l’éthique, ou notre président dira au jour le jour qu’elle en est la morale. Va-t-il réorganiser la production industrielle ou supprimer toutes les contraintes qui fixent les salaires, smic et syndicats comme d’antan.
Va-t-il faire la chasse aux fainéants pour qu’ils retrouvent de l’ardeur au travail pour pas grand-chose, ou va-t-il mettre au travail les rentiers, car ils ne me semblent pas concernés par effort, travail, entreprise.
Je crois qu’il s’adapte à ce qui se veut de préfigurer le nouvel ordre mondial, dans lequel la notion de liberté, d’égalité, de fraternité, ne sont pas compatible avec « la loi du marché ». Ce nouvel ordre ne se définira plus par les états, mais par les zones d’influence économique des grands groupes. Ceux-ci aujourd’hui profitent de l’occasion de cette crise pour contester la puissance des banques dont ils se sont toujours défiés, c’est la notion de la lutte contre le capitalisme financier du président, comme ils cherchent d’imposer l’abandon d’une éducation républicaine etc.
Qui conteste aujourd’hui l’esprit de se vêtir aux couleurx de l’entreprise dans laquelle on travaille en signe d’appartenance.
Alors c’est vrai, qu’à ce capitalisme qui aura vaincu la république il faudra lui donner une morale, non pas que nous n’ayons plus celle judéo-chrétienne, mais nous avons mis à mal toute sa régulation des désirs égoïstes qu’il faut donc remplacer par la civilisation de l’éthique.
Ainsi nous avons des informations cruciales qui se perdent dans la boulimie médiatique qui ne développe qu’une information versatile et qui risque d’enterrer par la structure mise en place des idées aussi importante que celles développées par notre président.
Faute d’un consensus il risque de vouloir les imposer par le droit de la force. D’une certaine manière il risque d’être la victime de ce sur quoi il s’est fait élire, la peur, entretenue par la litanie constante des faits divers, et de glisser vers ce qui se met en place que j’appelle une démocratie totalitaire, car nous voterons pour élire nos chefs d’entreprises d’État.
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