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Accueil du site > Actualités > Technologies > Petit panorama 2007 de la fusion nucléaire

Petit panorama 2007 de la fusion nucléaire

De tous les domaines de recherche sur l’énergie, la fusion nucléaire est sans doute le plus délicat. On cherche à y maîtriser le feu ultime, après l’avoir laissé s’échapper dans les bombes H. Depuis cette époque, la fusion est présentée comme l’espoir d’obtenir une énergie propre et illimitée, mais, comme le chante Brassens, « l’âge d’or sans cesse est remis aux calendes ». Aujourd’hui, pourtant...

Historiquement, après un départ dans un désordre et une diversité favorables à la recherche, l’essentiel des scientifiques, au niveau mondial, s’est réuni pour imiter les Russes qui, à la fin des années 60, réussissaient une expérience de fusion dans un tokamak, sorte de grand aimant en forme d’anneau (chambre toroïdale à confinement magnétique - type ITER).

Peu de choses ont changé depuis, sinon qu’on trouve aujourd’hui des tokamaks jusqu’en Chine et en Iran. En Occident, la communauté des scientifiques et des industriels concernés par la fusion s’est transformée en un formidable lobby. Le projet international ITER en est un bon exemple : cette expérience de dix milliards d’euros aura mis vingt ans pour aboutir sur le papier, et autant à se réaliser. Mais, au mieux vers 2030, le futur roi des tokamaks, implanté en France, dira-t-il si on peut un jour en espérer quelque chose pour produire de l’électricité, dans la seconde moitié du siècle. En privé, les scientifiques en attendent peu, sinon de la "belle science". Mais au CEA français, pas une tête ne dépasse. Même les plus opposés refusent de s’exprimer : on leur a déjà coupé les crédits, mais ils gardent encore un salaire...

Les États-Unis ne participent qu’à hauteur de 10 % dans ITER. Chez eux, ils développent aussi la fusion par laser (confinement inertiel), très orientée militaire et autre grande dévoreuse de crédit. La France fait de même avec le projet Mégajoule, et les Anglais pilotent un projet civil européen, Hiper. Si la phase préparatoire lancée début 2008 est concluante, sa construction coûtera 750 millions d’euros. Comme pour ITER, pas d’espoir de production d’énergie avant 2050.

Pour tous les systèmes, le défi de la production d’électricité par fusion nucléaire n’est pas tant d’obtenir une réaction que de le faire durablement, et en produisant plus d’énergie qu’on en consomme dans le processus. Aucune expérience n’y est encore parvenue, si grosse soit-elle, mais de récentes annonces américaines augurent d’un possible changement de cap de la recherche, vers des solutions à plus petite échelle.

DU NEUF EN AMÉRIQUE

Pour avoir laissé pousser des racines de recherche, sans grand soutien mais sans non plus chercher à les éliminer, l’Amérique se découvre aujourd’hui plusieurs cartes en main. Depuis des années, en effet, quelques scientifiques persistent à y explorer des voies différentes, des francs-tireurs qui gardent l’objectif révolutionnaire d’une électricité propre, abondante et bon marché. À l’opposé des tokamaks, qui consomment un mélange de deux isotopes de l’hydrogène (deutérium, stable, et tritium, radioactif), certaines de ces alternatives visent une fusion presque parfaitement propre, grâce à une très faible émission de neutrons ("fusion aneutronique"). Avantage, elle ne rejetterait que de l’hélium, inoffensif, alors qu’ITER restera grand producteur de radioactivité, quoique moins que les centrales actuelles à fission.

Les plus spectaculaires de ces annonces viennent de la "Z-machine" des laboratoires Sandia, au département de l’Énergie. Après avoir déjà fusionné du deutérium en 2003, cet engin de recherche militaire produisait un plasma de plusieurs milliards de degrés en 2005, un record, bien assez en théorie pour déclencher une fusion aneutronique. Entièrement rénové cette année pour une centaine de millions de dollars, installé dans un simple hangar, il préfigure de mieux en mieux le générateur d’électricité auquel rêve Craig Olson, responsable du Pulsed Power Inertial Fusion Energy Program de Sandia. Selon lui, développer un réacteur par "Z pinch" (striction axiale) ne prendrait pas vingt ans. Et comme la "Z" actuelle n’est pas faite pour cela, Sandia appelle son administration de tutelle à la doubler dans un cadre civil. Celle-là bénéficierait aussi d’un système d’allumage qu’Olson qualifie de "révolutionnaire", récemment mis au point avec des Russes très intéressés, puisqu’ils disposent de la seconde "Z-machine" la plus puissante du monde. Auréolé de ces réussites, le "Z pinch" à tout pour être la bête noire des Français. Évidemment, il n’est même pas mentionné dans le rapport sur la fusion, présenté au gouvernement par l’Académie des sciences, au printemps 2007. La France dispose pourtant d’atouts dans ce domaine, avec une petite "Z-machine" aujourd’hui réservée à l’armée, et la Russie ne demanderait sans doute pas mieux que d’étendre ses collaborations. Si le citoyen en veut, il peut toujours signer cette pétition européenne.

Autre annonce étonnante, celle de Robert Bussard, l’un des premiers papes de la voie tokamak US. Invisible pendant des années, le voilà qui ressurgit et raconte son histoire : finalement convaincu que les tokamaks posent des problèmes insurmontables, sa petite entreprise a retravaillé un des premiers concepts de réacteur (confinement électrostatique), avec un micro budget alloué par la Navy, l’idée initiale étant d’en équiper un porte-avion. Onze ans de recherche intense, interdite de publication, jusqu’à fermeture du labo pour compression de budget, fin 2005. Bilan : une expérience finale réussie et quelques brevets. Aux dernières nouvelles, la Navy replongerait pour quelques mois, le temps de valider la dernière expérience. Si tout va bien, Bussard cherchera ensuite 200 millions de $ pour un prototype industriel. Il les trouvera alors facilement, le secteur privé ne restant pas indifférent au domaine. On pourrait même assister à un « boom » de la fusion.

LE PRIVÉ AUSSI

Réchauffement climatique, crise de l’énergie... la fusion serait la bienvenue. Et que ce soit des idées entièrement neuves ou d’anciennes améliorées, beaucoup de systèmes tiennent la route sur le papier. Les brevets s’accumulent, reste à passer au concret. Quelques grands noms du capital-risque américain viennent ainsi d’investir 40 millions de dollars dans Tri Alpha Energy, en Californie, pour développer un réacteur à plasmoïde rotatif autoconfiné, alimenté par accélérateurs de particules, avec conversion directe de l’énergie produite en électricité - Colliding Beam Fusion Reactor in Field Reversed configuration. Selon ses concepteurs, Frank Monkhorst et Norman Rostoker, les premières expériences marchent encore mieux que prévu. Eux visent la fusion aneutronique, et ils ne sont pas les seuls. Le "Plasmak" de Paul M. Koloc cherche lui aussi des investisseurs pour son magnétoplasmoïde sphérique, qui rappelle la foudre en boule, tout comme les plasmoïdes toroïdaux en collision frontale de Clint Seward, qui restent stables à l’air libre.

Autre amateur de plasmoïde, Eric J. Lerner perfectionne la "Focus Fusion" depuis des années. En guise de financement, il reçoit les dons défiscalisés du public par internet. Il collabore aussi avec des universitaires mexicains, la Commission chilienne pour l’énergie nucléaire... et vient de vendre une première licence, à un Européen. Objectif : un prototype pour 2012, qui tiendra dans un garage. C’est encore bien gros pour les partisans de la Sonofusion, dont le réacteur devrait tenir sur un coin de table. Deux entreprises et quantité d’universitaires se disputent cette idée des années 30, qui reste très controversée. Pour eux, des ondes sonores envoyées dans un liquide y généreront des bulles dont l’implosion produira la fusion attendue. Il ne resterait plus qu’à trouver le bon liquide... et les bonnes ondes. À l’inverse, la fusion de deutérium par cristal pyroélectrique a vite été reconnue. Issue de l’Ucla en 2005, il est vrai qu’elle ne prétend pas (encore ?) produire d’énergie - plutôt alimenter un équipement radiologique de poche.

Avec ce tour d’horizon, et alors que le traité ITER ne date que de 2006, le paysage de la fusion nucléaire apparaît nettement plus chaotique qu’il y a seulement deux ans. On y voit des Goliath face à d’ambitieux David, des interférences entre recherche civile et militaire, des programmes bien gras accaparer les ressources publiques, des systèmes pollueurs et d’autres sans impact, des installations de petites tailles qui remettent en cause l’hypercentralisation officiellement revendiquée... Mais, en science, quand une idée dérange, on ne fait pas que lever les boucliers, on sort aussi le glaive : alors qu’eux-mêmes se disent en bute à de graves difficultés scientifiques et technologiques, les partisans du tokamak ou des lasers dénigrent volontiers leur nouveaux challengers, qui le leur rendent bien.

Bien que le sujet ne soit pas au programme du Grenelle de l’environnement, la recherche sur la fusion nucléaire gagnerait certainement à une remise en question, dans une optique sarkozyste de reprise en main tous azimuts, et pour le plus grand bien du reste de l’humanité. À l’image des travaux sur la maladie d’Alzheimer, aucune piste ne devrait y être négligée. Rêvons un peu : selon son président, Total pourrait s’orienter vers le nucléaire pour anticiper la fin du pétrole. Une infime fraction de son bénéfice lui suffirait à se payer la "Focus Fusion" en entier...

Mezigue & Co


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24 réactions à cet article    


  • Vincent 27 septembre 2007 14:05

    Article intéressant, Je ne suis pas assez callé pour faire des remarques d’ordre technique, par contre j’adore la science fiction, et là, nous sommes en plein dedans.

    Attention ce n’est pas péjoratif du tout, au contraire, je dirais que les rêves et les intuitions des chercheurs doivent être entretenus afin que nous puissions progresser.

    Mais le propre des rêveurs et d’être souvent inaccessibles, leur communication laisse la plus part du temps à désirer, ils ne savent pas vendre leur projets tellement ils sont persuadés par leur idée et ne comprennent pas pourquoi vous ne les suivez pas.

    Ceci dit, je doute que notre président omniscient sache faire la différence entre la fusion et la fission nucléaire.

    Voilà peut-être un domaine où il nous foutra la paix et ne viendra pas expliquer aux professionnels du métier comment faire. Par contre il risque de se faire enfumer pas ses collaborateurs.

    Pour conclure, un transformation quelle qu’elle soit qui produirait plus d’énergie qu’elle en consomme reste encore du domaine du rêve, mais au cas où cela se produise que ferions nous des excédents énergétique, car à un moment donné il faudrait les évacuer ?


    • El Fredo El Fredo 27 septembre 2007 15:04

      « que ferions nous des excédents énergétique, car à un moment donné il faudrait les évacuer ? »

      Coluche disait : si on donnait le Sahara aux technocrates, dans 2 ans il faudrait qu’ils aillent chercher du sable ailleurs.

      Si notre seul soucis est l’excédent d’énergie, l’Humanité est sauvée pour les prochains millions d’année. Contrairement aux sources d’énergie, les moyens d’en dépenser sont infinis : on pourrait fabriquer un climatiseur géant pour lutter contre le réchauffement climatique, ou alors terraformer la Lune ou Mars smiley

      Plus sérieusement, dans le cas de la fusion nucléaire, la production d’énergie s’arrête dès qu’on cesse d’entretenir la réaction. Contrairement à la fission qui peut s’emballer et doit donc sans cesse être maîtrisée.


    • imarek imarek 27 septembre 2007 17:04

      >>>Ceci dit, je doute que notre président omniscient sache faire la différence entre la fusion et la fission nucléaire.

      Le pauvre sarko, tout les sujets sont bons pour le descendre. Cela dit, sur Agoravox, ceux qui connaisent le principe de la fusion et de la fission nucléaire ne doivent pas etre nombreux. Pour ceux que ça interesse voici 2 liens :

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Fission_nucléaire

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Fusion_nucléaire


    • Dégueuloir Dégueuloir 29 septembre 2007 18:07

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Fusion_froide http://quanthomme.free.fr/energielibre/fusion/PageMenuFfroide.htm

      pour ceux qui voient plus loin que le bout de leur nez , il n’y a aucun avenir avec l’énergie nucléaire ,soyez en persuadé !!


    • samy31500 27 septembre 2007 14:50

      Article tres interresant mais je trouve que l’on reste un peu sur notre fin. Manque des liens et illustrations de fonctionnement. Et surtout les avantages et inconvénients de chaque système. @ l’auteur si cela etait possible quelques liens supplémentaire smiley Merci par avance


      • El Fredo El Fredo 27 septembre 2007 15:08

        Article de grande qualité qui dresse un panorama complet de la recherche sur la fusion nucléaire. Et qui rappelle bien le problème principal : le plus dur n’est pas d’initier une fusion nucléaire (un étudiant Américain a récemment créé un mini réacteur pour un projet de fin d’année), mais d’atteindre le « break even », point où la réaction produit plus d’énergie qu’on n’en consomme pour l’entretenir.

        (au passage, un bon point supplémentaire pour ne pas avoir évoqué la fusion froide smiley).


        • Raphael Jolly Raphael Jolly 28 septembre 2007 17:48

          « un étudiant Américain a récemment créé un mini réacteur pour un projet de fin d’année » Son nom est Craig Wallace, c’était en 2003 : Fun with fusion : Freshman’s nuclear fusion reactor has USU physics faculty in awe


        • Raphael Jolly Raphael Jolly 28 septembre 2007 17:55

          On peut mentionner également ceci : En vidéo : Comment fabriquer du positronium « La possibilité théorique d’une telle synthèse avec des faisceaux de positrons envoyés sur la surface d’un cristal de quartz ouvrirait la voie à de nombreuses applications pratiques de l’antimatière, comme un laser à rayon gamma, moins encombrant et moins gourmand en énergie pour réaliser la fusion inertielle. »


        • Dégueuloir Dégueuloir 29 septembre 2007 18:15

          (au passage, un bon point supplémentaire pour ne pas avoir évoqué la fusion froide )......IGNORANCE ??

          energie libre aussi http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_libre

          http://membres.lycos.fr/quanthomme/

          laissez le nucléaire,il n’apportera que désolations.......


        • Asp Explorer Asp Explorer 27 septembre 2007 18:05

          C’est pas vrai qu’on nous refait le coup de la z-machine ! Signalons pour ceux qui ne connaissent pas le principe - et qui ne ratent rien - qu’il est effectivement possible d’obtenir par striction des confinements compatibles avec la fusion nucléaire... pendant quelques nanosecondes et dans un volume de l’ordre du millimètre cube. La machine en question tient sans doute dans un hangar, mais un gros : trente mètres de diamètre, dix de haut, c’est plus grand que le réacteur ITER. Il faut des heures avant de recharger l’objet entre deux coups, et bien sûr, l’énergie produite est incomparablement inférieure à l’énergie consommée par le système.

          Mais c’est vrai, il y a tant de savants incompris qui ont LA solution miracle pour sauver la planète en dépit des lobbies, des politiciens et du complot de la NSA... Il suffit de leur envoyer quelques millions de dollars... Blablabla...


          • Barbathoustra Barbathoustra 27 septembre 2007 22:22

            Z-machine, c’est quoi, une concurente de la X-box ?


          • Asp Explorer Asp Explorer 27 septembre 2007 22:39

            Non, pas du tout. Sur la X-box, il y a quelques bons jeux.


          • Dégueuloir Dégueuloir 29 septembre 2007 18:11

            mais la Zmachine existe bien,elle sert à faire des simulations nucléaires aux USA........


          • pepin2pomme 28 septembre 2007 14:24

            Pourquoi s’acharner à faire de la fusion nucléaire, alors qu’on sait d’avance que la voie explorée par Iter est une impasse technologique ? On ferait mieux de concentrer l’energie des chercheurs sur le nucléaire de 4ième génération, puisque les stocks d’uranium appauvri dont dispose la France suffiraient pour plusieurs millénaires. De quoi voir venir, et d’ici là développer sereinement la fusion.


            • Asp Explorer Asp Explorer 28 septembre 2007 14:39

              Je suppose que vous êtes un éminent professeur de physique des plasmas pour poser avec tant d’assurance qu’un projet de recherche est voué à l’échec. Ou alors, comme beaucoup de gens sur internet, vous prenez vos désirs pour des réalités ?


            • pop 29 septembre 2007 17:17

              Voila à quoi ressemble la Z-machine en action :

              si vous voulez en savoir plus sur la Z-machine, son fonctionnement décrypté et commenté par un spécialiste français de la MHD :

              http://www.jp-petit.org/science/Z-machine/z_machine2.htm

              http://www.jp-petit.org/science/Z-machine/from_geffray/ltd.html

              Extrait :

              LBUQUERQUE, N.M. - Un circuit électrique devant fournir suffisamment de puissance pour parvenir enfin à la fusion nucléaire contrôlée avec un rendement élevé et, chose tout aussi importante devant le faire toutes les 10 secondes, a été testé de manière intensive dans des expérimentations préliminaires et des simulations informatiques au sein des laboratoires Sandia hébergeant la Z-machine.

              La Z-machine, lorsqu’elle est mise à feu, est aujourd’hui le plus gros producteur de rayons X sur terre, et elle a déjà pu générer des neutrons de fusion. Mais des tirs à répétition rapide sont nécessaires pour les futures centrales opérationnelles afin de pouvoir produire de l’énergie électrique à partir de l’eau de mer. Cela n’était pas jugé faisable jusqu’à maintenant.

              Sandia est un laboratoire de la National Nuclear Security Administration.

              Comment ça marche ?

              Un moteur à explosion qui mettrait le feu à un seul cylindre et patienterait ensuite des heures avant de recommencer n’emmènerait pas la voiture bien loin.

              De la même manière, une machine devant fournir à l’humanité de l’énergie électrique illimitée, à partir d’eau de mer abondante et bon marché, ne pourrait se contenter de tirer un seul coup puis de rester au repos le reste de la journée. Elle doit fournir l’énergie pour fusionner des granules d’hydrogène toutes les 10 secondes, et conserver cette cadence durant des millions de tirs entre chaque révision - une sorte de moteur à combustion interne pour la fusion nucléaire. C’est du moins la méthode de fusion préconisée dans la Z-machine aux Laboratoires Sandia et ailleurs, sous la dénomination « fusion par confinement inertiel ».


              • the_dude 30 septembre 2007 16:45

                Merci à l’auteur pour ce panorama.

                Mais qu’il s’agisse de Z-machine ou d’ITER, on n’est pas encore en mesure de dire lequel emprunte la meilleure voie ! La recherche fondamentale a encore du boulot, et ce n’est pas le moment de remettre ITER en question. JP Petit, dont le site web est cité ci-dessus, est sans doute parfois visionnaire mais quand même un habitué de la contestation et de l’anti-conformisme et malgré tout mon respect pour lui je ne suis pas sûr qu’il soit une référence en terme d’objectivité.


              • Jacques 30 septembre 2007 19:33

                La fusion contrôlée est symptomatique de notre optimisme exagérée dès qu’il s’agit de technique. Il suffirait de mettre un peu plus d’argent dans tel ou tel domaine, pour arriver rapidement à un résultat tangible. Tous les opposants à des augmentations de budget sont des arriérés, qui quelques siècles plus tôt doutaient déjà de l’existence de l’Amérique ou de la possibilité du vol humain.

                Pourtant 2 livres récents mettent à mal notre fierté technologique :

                • Rien ne va plus en physique - l’échec de la théorie des cordes - Lee Smolin. Ce livre affirme en gros que 30 ans de recherche en physique fondamentale, centrés sur la théorie des cordes, n’ont apporté aucun nouvel élément vérifiable à l’aide d’une expérience scientifique. La physique fondamentale a fait des pas de géants au 20eme siècle et piétinerait depuis les années 80.

                • Impasse dans l’espace - Serge Brunier. Ce livre constate, entre autre que les fondamentaux des moyens de propulsion dont nous disposons pour envoyer quelqu’un sur la lune ou sur mars sont les mêmes que ceux des années 60. Ce qui rend ce genre de mission incroyablement couteux et donc impossible à démocratiser. Il met aussi en doute l’intérêt scientifique des vols habités et des stations spatiales. Tout cet argent serait mieux employé en programmant des sondes automatiques plus résistantes, moins chères et plus efficaces que l’homme dans l’espace.

                Les progrès accomplis ces dernières décennies en informatique nous ont amené à penser que d’autres domaines tels que l’astronautique et la physique fondamentale avaient le même potentiel. Malheureusement non : ces 2 domaines en particulier semblent avoir atteint un palier ou les fondamentaux n’ont pas changé depuis trop longtemps. De nouvelles idées sont nécessaires. Mais ou sont les Einstein, les Von Braun du 21eme siècle ?

                Entendons nous bien, ceci n’est absolument pas une critique de la recherche et de la technique. Bien au contraire, c’est plutôt une mise en garde contre notre manque de discernement dans l’évaluation de nos capacités. La pertinence de nos investissement scientifiques et techniques doit pouvoir etre remise en cause, ce qui visiblement ne c’est pas produit dans les 2 exemples cités.


                • finael finael 4 octobre 2007 14:07

                  @ Jacques

                  Pour moi la situation est paradoxale : d’un côté il y a plus de chercheurs en exercice qu’il n’en a vécu depuis le début de l’humanité, de l’autre aucune découverte fondamentale (j’insiste sur le « fondamental ») n’a été faite depuis plus de 50 ans.

                  Je ne parle pas des percées en recherche appliquée (ou en application de la recherche) ni de celles concernant l’ingénieurie, mais bien des fondements théoriques de cette recherche.

                  Jai bien des idées sur les raisons de ce « sur-place », mais il serait trop long de les développer ici.

                  Pour ce qui est de la fusion nucléaire contrôlée, je trouve l’article excellent.


                • Thierry LEITZ 30 septembre 2007 21:30

                  Bon aperçu des pistes de recherche en fusion nucléaire.

                  Mais je rejoins le commentaire de Jacques sur le jugement d’opportunité d’investissement qui doit rester « dépassionné ». Autrement dit il faut élargir les sources d’informations sur un projet quelconque de grande ampleur, car c’est aussi notre contribution qui utilisée là, ne l’est pas ailleurs. Les errements économiques subséquents à l’engagement dans des impasses sont un luxe que l’humanité ne peut plus se permettre.

                  Or la fusion par confinement magnétique n’est pas une voie nouvelle. La « nouveauté » d’Iter est de vouloir produire un plasma plus ample sur une durée supérieure. Sur le site ITER, l’ambition annoncée est de dégager une énergie de 500 Mw sur une durée de 400 secondes. Ce qui en soit donne une idée de la difficulté physique de stabilisation de plasma. Les températures attendues de 200 millions de degrés dans un volume de 840m3, soit le plus grand tokamak jamais conçu va requérir une énergie électromagnétique de confinement énorme. Le préchauffage des éléments lui aussi très énergivore montre qu’on espère faire avec cette installation beaucoup d’énergie...avec beaucoup d’énergie, et non pas « quelques litre d’eau de mer » ce qui est une caricature grossière qui insulte autant le bon sens que la physique elle-même.

                  Les résultats observés dans les tokamaks précédents, en Russie, JET en Angleterre ou Tore Supra à Cadarache, ou au Japon sont objectivement très loin de donner confiance dans l’exploitation civile de la fusion.

                  Les résultats attendus d’Iter sont repoussés, avant même la construction de la machine, à 40 ans : 10 ans de construction (sans les retard et autres pépins) 30 ans d’« expérimentation ». De quoi offrir carrière et prestige dans un projet certes passionnant du point de vue théorique mais dont il faut -en raison même de son coût, 10-15 milliards d’€- évaluer les chances de réussites et l’éloignement des conclusions, ce qui est rédibitoire en raison même de l’évolution probable des menaces diverses et concrètes : crise financière et climatiques notamment.

                  Même si ITER ouvre la voie de la fusion, ce qui n’est pas prouvé (on se donne 40 ans pour) il en faudra encore autant pour valider une filière électronucléaire de fusion, ce qui fait pas loin d’un siècle...

                  Bon mettons que cela marche. A quel coût ? Quel niveau technologique et financier sera requis pour gérer les systèmes en toute sécurité ? Les découvertes d’ITER ne font pas l’objet d’une utilisation contrainte de la part des partenaires du projet (qui possèdent déja la bombe...excepté le Japon). Quid du détournement militaire des travaux ?

                  Ca fait beaucoup d’incertitudes pour quelques certitudes : son coût extravagant et son utilité aussi lointaine qu’incertaine. Mais si çà fait rêver le peuple en attendant, c’est déjà çà ! Et puis c’est lui qui paie !


                  • manusan 1er octobre 2007 06:09

                    Z comme Zorglub ?

                    ouais, perso, j’attend de voir, cette article est publié au même moment que la tournée de Bush sur le thème « la science sauvera la planète », merci les gosses.

                    j’espère qu’on ne nous fait pas encore le coup de la fusion froide. Et puis, je rappelle aussi que la science traverse une crise due aux nombreuses publications ne respectant pas la méthode scientifique (expériences truquées ...), comme le cas de la fusion froide ou du clonage en Corée.

                    Aujourd’hui cet article ne sert qu’à 2 choses : remonter la politique du président US et faire voter des crédits aux complex militaro industrielle. Sans tomber dans la paranoia ou l’anti-américanisme primaire, la physique étant une science expérimentale (et le sujet me passione), j’attend de voir l’expérience (par d’autres scientifiques) qui confirme la validité système, aprés je sauterais de joie.


                    • Dr. Goulu Dr. Goulu 3 octobre 2007 18:39

                      Pour ceux que ça intéresse, j’avais pondu un petit article d’introduction à la « fusion pour les nuls » ici : http://drgoulu.wordpress.com/2005/12/11/la-fusion-thermonucleaire/

                      Il finit par cette conclusion : << La fusion contrôlée est donc beaucoup plus complexe à mettre en oeuvre que la fission, dans laquelle « yaka faire une bombe atomique qui pète lentement ». De plus, alors qu’on dit souvent que la fusion est un « Soleil en laboratoire », propre, écologique etc, on va en fait vers l’utilisation d’une réaction différente de celle existant dans la nature, mise en oeuvre de manière très différente aussi. Les physiciens ne sont donc pas en train de reproduire un phénomène naturel existant, mais d’en inventer un complètement nouveau.

                      Ceci va vraisemblablement prendre beaucoup de temps, pour autant que ça réussisse. On parle aujourd’hui de 50 ans à un siècle avant que cette forme d’énergie soit exploitable commercialement. Il est très probable que ça ne sera pas prêt au moment de l’épuisement du pétrole, donc que l’humanité devra trouver autre chose entre la fin des énergies fossiles et le début de la fusion. >>

                      A part ça, j’habite à côté du CERN et je peux vous le confirmer : avoir une installation de ce type amène de la matière grise, de l’argent, des entreprises, donc « booste le business » d’une façon spectaculaire. Normalement, Cadarache devrait ressembler à Genève très bientôt smiley


                      • Dr. Goulu Dr. Goulu 3 octobre 2007 18:40

                        Ouille le texte de la conclusion que j’avais mis entre < et > a disparu... le voilà :

                        La fusion contrôlée est donc beaucoup plus complexe à mettre en oeuvre que la fission, dans laquelle « yaka faire une bombe atomique qui pète lentement ». De plus, alors qu’on dit souvent que la fusion est un « Soleil en laboratoire », propre, écologique etc, on va en fait vers l’utilisation d’une réaction différente de celle existant dans la nature, mise en oeuvre de manière très différente aussi. Les physiciens ne sont donc pas en train de reproduire un phénomène naturel existant, mais d’en inventer un complètement nouveau.

                        Ceci va vraisemblablement prendre beaucoup de temps, pour autant que ça réussisse. On parle aujourd’hui de 50 ans à un siècle avant que cette forme d’énergie soit exploitable commercialement. Il est très probable que ça ne sera pas prêt au moment de l’épuisement du [Pétrole], donc que l’humanité devra trouver autre chose entre la fin des énergies fossiles et le début de la fusion.


                      • Mezigue Mezigue 11 octobre 2007 11:04

                        Le Dr. Robert W. Bussard, dont il est question dans l’article, est décédé le 7 Octobre 2007.

                        En plus de ses contributions à la fusion, avec notamment son concept de réacteur Polywell, il restera comme l’inventeur, dans les années 1960, d’un mode de propulsion spatiale autorisant le voyage interstellaire, connu sous le nom de Bussard ramjet.

                        Son équipe entend poursuivre son oeuvre.

                        http://newenergyandfuel.com/http:/newenergyandfuel/com/2007/10/09/details-on-dr-robert-w-bussard-passing-away/#comment-100

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