Une découverte récente enrichit la compréhension des processus cellulaires que l’on sait déjà être complexes. A se demander si la mise à jour de la totalité des mécanismes est en vue, à moins qu’elle ne soit tout simplement impossible pour des raisons épistémologiques. Néanmoins, la biologie moléculaire a livré une masse de détails mécanistiques suffisante pour permettre une réflexion sur la logique du vivant. L’un des débats les plus importants de ce siècle va concerner la détermination de l’ontogenèse et de l’évolution et plus précisément, l’évaluation des instances pertinentes pour comprendre des phénomènes. Faut-il mettre l’accent sur les gènes ou bien sur le génome ? En fait, c’est le scientifique qui en premier ressort, décide de ce qu’il veut savoir (ou bien souvent, de ce qu’il veut produire pour justifier ses financements). Auquel cas, il privilégie un objet épistémologique qui sera le gène ou alors le génome. Par la suite, cet objet devient un élément permettant de théoriser le vivant et son évolution. Les études sur l’ADN peuvent ainsi se focaliser sur les mécanismes produits par les gènes ou bien sur des mécanismes d’ordre plus systémique permettant de conceptualiser des phénomènes globaux comme le fonctionnement de la cellule, le développement de l’organisme, l’évolution du vivant. Les deux études présentées sommairement illustrent l’enjeu du prochain débat sur les deux théories du vivant centrées sur le gène ou bien sur le génome. L’option « génocentrique » semble en effet dépassée alors qu’une approche plus globale, mettant l’objet génome au centre du dispositif théorique, paraît prometteuse (voir plus loin la présentation de cette approche initiée par Heng et ses confrères)
Comme on le verra, le principe d’une conception centrée sur le génome privilégie le fonctionnement du tout sur la partie. Autrement dit, prendre le gène comme ressort déterminant du vivant conduit à une conception tronquée de la logique des processus cellulaires. C’est à l’inverse le génome, pris comme un système intégré qui détermine la mécanique du gène. L’ADN n’est pas cette molécule stable qui se réplique de génération en génération, tout en mutant pour répondre surtout au besoin d’explication des évolutionnistes. L’ADN est un système intégré, complexe, associé à des protéines nucléaires pour former les chromosomes et il est par nature instable. Parmi les sources d’instabilité, certaines engendrent des aberrations chromosomiques de grande ampleur alors que d’autres mécanismes semblent traduire une certaine fantaisie dans la réplication du génome. C’est notamment le cas des transposons, ces petites séquences d’ADN se déplaçant d’un bout à l’autre des chromosomes et s’insérant comme s’ils étaient autonomes avec les techniques de transposition qu’on compare souvent à du couper-coller ou bien du copier-coller. Ils constituent une proportion non négligeable de l’ADN chez les espèces pourvues d’un génome de grande taille. La moitié de l’ADN humain est constitué par des transposons. A l’inverse, ils sont peu fréquents chez les bactéries ou les levures. La particularité du transposon est d’inclure un gène codant pour la protéine qui va lui permettre de se transposer. Le principe ressemble à celui du virus sauf que le transposon est endogène, il ne sort pas de l’espèce en jouant de concert avec l’appareil réplicatif dont il pourrait être l’un des instruments. Le transposon se déplace ainsi grâce à la transposase. Parfois il permet à un ou plusieurs gènes fonctionnels d’être transposés d’un endroit à un autre de l’ADN.
Le transposon instrument du dispositif réplicatif ? La question n’est pas posée de cette manière mais un élément de réponse vient d’être apporté par une équipe de généticiens de Berkeley (Spradling et al. PNAS, août 2011). Leurs investigations se sont focalisées sur l’élément P, un élément transposable présent depuis 80 ans dans le génome de la mouche drosophile. En analysant une imposante base de données génomiques, Spradling et ses collaborateurs ont mis en évidence une sorte de stratégie réplicative utilisée par les séquences P dont on connaissait la rapidité de diffusion au sein du génome de la drosophile. Les séquences P se fixent dans un lieu ciblé du chromosome, près de la zone qui contrôle la réplication nécessaire à la division cellulaire, plus exactement l’ORC (origin recognition complex), système de six sous-unités protéiques amenées à s’activer dès que la réplication se met en route. A l’inverse, d’autres types de transposons (Minos, piggyBac) n’ont pas ce comportement ciblé qui semble alors être une spécificité des séquences P. Un mécanisme qui selon les chercheurs rend compte de la multiplication des copies du transposon dont l’astuce est de se placer au bon endroit, près de l’origine de la réplication génomique. Tout en suggérant que le nucléosome prend une structure le rendant exposé aux mécanismes de transposition. Comme si l’ADN était un texte évolutif offrant des zones vides pour l’insertion de séquences transposées. Il se confirme que la réplication du génome use des mécanismes de transposition.
Spradling et ses confrères livrent à la fin de leur étude une piste intéressante offrant quelques indices sur de possibles mécanismes de transposition ayant joué un rôle dans l’évolution du génome au sein d’une espèce. Les évolutionnistes penseraient à la micro-évolution, par opposition à la spéciation qui elle, pourrait être due à un autre processus. Le principal enseignement que l’on retire de ces études, c’est que les mécanismes de transposition ne s’effectuent pas au hasard mais semblent obéir à une logique génomique précise qui peu à peu, se dessine, tout en restant bien mystérieuse. Ce qui ouvre la voie vers une conception duale où deux logiques se complètent, celle interne et systémique du génome évolutif et celle des processus de la vie avec le milieu qui exerce une pression adaptative. On sait que la plasticité du génome est essentielle à l’adaptation. Le transposon semblant alors intervenir dans cette plasticité en tant que mécanisme ciblé et sans doute, finalité.
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à bernard Le principal enseignement que l’on retire de ces études, c’est que les
mécanismes de transposition ne s’effectuent pas au hasard mais semblent
obéir à une logique génomique précise qui peu à peu, se dessine, tout en
restant bien mystérieuse. que de circonvolution pour ne pas avouer : Le principal enseignement que J’EN retire de ces études, c’est que
les
mécanismes de transposition ne s’effectuent pas au hasard mais
semblent
obéir à une logique DIVINE précise qui peu à peu, se dessine,
tout en
restant bien mystérieuse.
questions : 1° n’y a - t - il pas des recherches qui partant de l’inerte essaieraient de construire un organisme basique vivant ? 2° quel est l’organisme vivant (naissance ,maturation , reproduction , mort ) le plus simple connu aujourd’hui ? merci de votre réponse .
Aïe ! Je subodore quelque chose de fort important là-dessous mais j’avoue être bien largué... Pourriez pas nous faire un petit résumé en termes plus accessibles ?
Cette nouvelle découverte conforte effectivement un modèle d’une ontogénèse dans laquelle le rôle des gènes est beaucoup moins déterministe, beaucoup plus probabiliste.
Il va dans le sens d’une épigénèse probabiliste et d’une canalisation expérientielle, et donc conforte l’idée que les processus ontogénétiques sont animés par des facteurs bidirectionnels entre différents systèmes interreliés.
Conformément aux théories générales des systèmes dynamiques les variations à un niveau du système, ici le déplacement du transposon grâce à la transposase et qui permet à un ou plusieurs gènes de se fixer à différents endroits de l’ADN, peuvent avoir des incidences au niveau de systèmes supérieurs, jusqu’à l’organisme tout entier.
De même, les conditions même des interactions continues de l’individu dans son milieu (ou eco-système) peuvent avoir une incidence sur des systèmes situés à des niveaux inférieurs, ici les caractéristiques du milieu cellulaire dans lequel ces déplacements se produisent.
Cependant, n’y a pas un temps du développement, mais des temps, différents, des processus de mutation quasi instantanés, et d’autres s’incrivant dans une modification sur un très long terme.
De même certaines caractéristiques du milieu de vie de l’organisme peuvent avoir des incidences plus ou moins diluées dans le temps.
L’idée de co-évolution est celle de cette indissociabilité des influences entre les éléments constitutifs (ici les chromosomes, les transposons, la transposase, le milieu cellulaire, etc.) d’un système biologique, et les relations permanentes et continues de ce système avec les autres systèmes du vivant, partageant le même milieu et/ou dans lequel ce système est enniché.
j’adore les gens qui font des beau discours incompréhensible, enfin surtout du blabla...
surtout quand c’est pour dire :
« les gènes ont un impact sur l’homme et inversement, et que cela peut être causé par l’environnement de l’individu »
Bref rien de réellement nouveau sous le soleil sachant que dans un individu des changements aussi important que les transposons ne se font jamais au hasard. La cellule utilise pas de l’énergie sans raison.
A part ça vous avez remarqué que si l’on demande à un scientifique s’il pense qu’il existe de la vie ailleurs que sur la terre, il répond en général oui, le contraire étant, probabilité oblige, difficilement défendable. Seulement ce qui est intéressant c’est lorsqu’il décrit cette sorte de vie et là ils répondent tous pareils : sous forme de bactéries, de molécules de vie, vie embryonnaire, photosynthèse etc. Donc surtout pas d’évolution permettant d’envisager une vie à l’état supérieur, donc animale et humaine. Ce qui fait qu’au fond comment, puisqu’on est est bien d’accord que sur terre aussi la vie a été embryonnaire et qu’elle a évolué jsqu’à l’animal et l’humain, comment donc envisagent-ils l’idée que la vie pourrait resté sans évolution. Je me le demande. A titre d’exemple voici justement cette remarque d’un scientifique de l’observatoire de genève au sujet des exoplanètes : http://www.tsr.ch/video/info/journal-19h30/#id=3392912 ;nav=info/journal-19h30/?year=2011&month=9&day=12