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Commentaire de Connolly

sur La fin de la lutte des classes


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Connolly 6 juin 2012 16:35

« 1/ Relisez moi, je sais que le socialisme est « théoriquement » anti-étatique, mais en pratique il ne peut que l’être puisqu’il est impossible d’empêcher la propriété privée et l’échange marchand sans l’usage de la force, donc d’un Etat d’une forme ou d’une autre »

Vous êtes vraiment culotté cher ami ! Car dans aucun de vos posts vous écrivez que « le socialisme est « théoriquement » anti-étatique ». Au contraire, vous ne cessez de répéter à satiété que celui-ci est intrinsèquement étatique puisque toute politique interventionniste est pour vous synonyme de socialisme. Vous allez même jusqu’à assimiler le néo-libéralisme à du socialisme. Il faut qd même le faire !

Sauf que le néo-libéralisme (qui n’est pas du libéralisme stricto sensu, je vous l’accorde) est la conséquence inéluctable d’une politique fondée sur les principes auxquels vous adhérez. Vous oubliez de préciser que cet interventionnisme va dans le sens des attentes des grands groupes privés via le lobbying, le copinage, voire la corruption (dans certains cas). Si ce dernier est répréhensible par la loi, rien ne peut empêcher les deux premiers, sans que cela ne porte atteinte aux libertés qui vous sont soi-disant chères. En d’autres termes, le libéralisme stricto sensu ne peut empêcher (sous peine de devenir « anti-libéral » justement) le copinage et le lobbying, même s’il le désapprouve théoriquement ou moralement. D’où l’inéluctabilité du néo-libéralisme via les principes du libéralisme stricto sensu.

Idem : si la concurrence libre et non faussée est, en théorie, encouragée par les entrepreneurs, tous, en pratique, cherchent inconsciemment ou consciemment à la contourner (fusions, rachats) ou à l’éliminer (dépôt de bilan des concurrents en raison de vos performances nettement supérieures) de manière à avoir le monopole sur le marché et donc à s’enrichir encore plus, puisqu’il n’existe aucun frein à l’enrichissement.

Quant aux entreprises et services sous contrôle étatique, ceux-ci fonctionnent de plus en plus selon les principes des entreprises et services privés. Sous cet angle, l’étatisme ne peut donc même plus être assimilé à une quelconque forme de socialisme (comme dans les pays de feu le bloc soviétique), puisqu’il est aujourd’hui (de plus en plus) mis au service des intérêts privés (grand groupes privés) et fonctionne comme une entreprise privée. D’où l’expression d’ « Etat privatisé » utilisé pour le désigner tel qu’il se décline aujourd’hui.

Dernier point enfin : la présentation que j’ai faite du socialisme n’était qu’une synthèse de ses diverses obédiences. Or toutes, parmi ces dernières, n’aspiraient pas à l’abolition de la propriété privée en tant que telle (je pense notamment au socialisme proudhonien). Du reste, aujourd’hui, à l’exclusion peut-être d’une infime minorité d’ultras, aucune ne le souhaite vraiment non plus. Que chacun soit individuellement propriétaire de sa maison, de sa voiture, de son lopin de terre, …., de son outil de travail (seul ou en coopération) ne pose aucun problème.

Quant à l’échange marchand, entendu comme l’échange de marchandises, celui-ci non plus ne pose aucun problème non plus, bien au contraire. Le problème provient de l’échange à but lucratif, sans limite. Si l’échange en tant que tel est un droit imprescriptible, ce n’est nullement le cas de l’échange à but lucratif, au sens où l’enrichissement infini n’est nullement indispensable à l’homme. Travailler pour l’enrichissement infini n’est qu’une activité parmi bien d’autres, ce qui signifie que l’homme pourrait très bien s’en passer tout en nageant dans le bonheur. Maintenant, vous les libéraux, vous en faites un droit et une liberté que vous placez au-dessus de tous les autres, puisque pour vous le bonheur est fonction du degré d’enrichissement de chacun. Là réside le pb, puisque au nom ce droit et cette liberté (non imprescriptible, ne vous en déplaise) vous permettez que puisse se développer des inégalités complètement délirantes ainsi que toutes formes de nuisances (pollutions, malbouffe et autres) au nom du sacro-saint profit illimité.

« 2/ L’enrichissement par l’échange librement consenti ne se fait au détriment de personne mais au profit de tout le monde, puisqu’il ne peut y avoir échange qui ne soit pas mutuellement bénéfique. »

Dans vos rêves, cher ami, dans vos rêves... Dans la réalité, l’échange se fait, la plupart du temps, au profit et au détriment de quelqu’un. Descendez de votre tour d’ivoire. Venez voir ce qui se passe un peu sur terre. Rencontrez les gens , discutez avec eux, vivez avec eux. Ca vous changera de vos lectures qui déforment par bien des aspects les réalités humaines.

« 3/ Oui dans la production de valeur il y a travail collectif, mais la répartition de la valeur se décide par contrat. Si vous poussez la caricature à l’extrême, vous pouvez imaginer une entreprise qui achète une production à ses salariés et qui la revend plus cher à ses clients, comme un commerçant il y a 3000 ans qui allait acheter du sel à un endroit pour le revendre plus cher à un autre. Ce n’est que de commerce, ça marche par contrat, si vous n’êtes pas content des termes du contrat vous ne le signez pas et vous allez voir ailleurs, c’est tout. Et si certains sont très contents de signer des contrats de ce type, vous n’avez aucun droit de penser à leur place ou de leur dire quoi faire : ils sont libres. Les salariés de bill gates ont été très content (et très bien payés) de travailler chez microsoft, si vous et votre petite personne ne trouvez pas ça juste on s’en fout complètement, vous n’êtes pas chez microsoft, ça ne vous regarde donc pas. Là encore, vous mettez votre nez dans les affaires privées des autres, vous tentez d’imposer vos vues de force aux autres sans tenir compte de leur avis : vous êtes un vrai petit tyran. »

Que la répartition de la valeur se décide par contrat ne pose pas de problème en soi. Sauf que ce n’est pas parce qu’il y a contrat que celui-ci est juste par définition. Et tel ne peut être le cas dans un monde où les rapports de force sont de plus en plus favorables aux détenteurs de capitaux.

Vous vous donnez bonne conscience à peu de frais via votre « si vous n’êtes pas content des termes du contrat vous ne le signez pas et vous allez voir ailleurs ». Car si on finit par signer c’est généralement qu’ailleurs on n’a pas trouvé mieux, et que ce contrat, insatisfaisant, n’est au fond qu’un pis-aller, un moindre mal.

Quant à ceux qui seraient satisfait, il est facile de « corrompre » les individus, comme chez microsoft, en les rémunérant bien (notion on ne peut plus subjective du reste. Que signifie être bien rémunéré  ?). Sauf que même cette « bonne rémunération » n’en constitue pas moins, au fond, une arnaque par rapport aux bénéfices dégagés. Car dans une œuvre collective chaque élément compte et a autant d’importance que tous les autres. Je ne vois donc pas en vertu de quoi certains toucheraient 500 fois plus que d’autres dans une même entreprise, au sens où nul ne peut dire « j’ai créé 500 fois plus de valeur que Pierre, Paul ou Jacques ».

Je ne parle ici que des grandes boîtes bien sûr. Dans beaucoup de PMI, les écarts en termes d’émolument s’inscrivent sur une échelle qui va de 2 à 5, ce qui, à titre perso, me paraît raisonnable.

« Les salariés de bill gates ont été très content (et très bien payés) de travailler chez microsoft, si vous et votre petite personne ne trouvez pas ça juste on s’en fout complètement, vous n’êtes pas chez microsoft, ça ne vous regarde donc pas. Là encore, vous mettez votre nez dans les affaires privées des autres, vous tentez d’imposer vos vues de force aux autres sans tenir compte de leur avis : vous êtes un vrai petit tyran. »

Mais vous non plus vous n’êtes pas chez microsoft. Dans ce cas-là « si vous et votre petite personne » trouvez ça juste « on s’en fout complètement » aussi. Sauf que, au nom de quoi est-ce que vous m’empêcheriez de donner mon point de vue sur ce qui se passe ailleurs ? La tyrannie, elle se situe plutôt chez vous, cher ami. Je ne cherche nullement à imposer mais à convaincre, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, et libre aux gens d’adhérer à mon point de vue ou pas.

« 4/ Produire est une liberté, un droit. Certains produisent pour le fun, d’autres pour le fric, et nous n’avons pas à leur interdire d’avoir leur motivation propre. Si j’ai envie de produire et d’échanger avec mes voisins contre profit, c’est mon droit et je me fous de votre avis. Si certains ont envie de se sacrifier pour la communauté libre à eux, si certains ont envie de donner leur production gratuitement à la collectivité libre à eux, mais si certains préfèrent vendre leur production avec profit libre à eux aussi. Les clients en face sont eux aussi libres d’acheter ou non. Ce ne sont que des transactions volontaires entre adultes responsables, ce ne sont pas vos oignons. Vous n’êtes pas un être supérieur qui savez ce qui est mieux pour tout le monde et qui aurait donc le droit d’imposer des choses contre la volonté des gens ; non, vous êtes un humain comme les autres et votre avis n’a pas plus de valeur que celui d’un autre. Arrêtez donc de vous prendre pour un être supérieur, et laissez les gens gérer leur vie comme ils l’entendent, ce ne sont pas des gosses mais des adultes responsables.

5/ Votre monnaie tout le monde s’y assoira dessus, la qualité que l’on demande à une monnaie c’est justement de servir de réserve de valeur et donc d’être thésaurisable. Si ça existe, c’est parce que les gens veulent pouvoir épargner, et c’est leur droit le plus fondamental. Tentez d’imposer une monnaie de force (en bon tyran que vous êtes) contre la volonté du peuple, et les gens échangeront en dollar. Et là quoi ? Là encore, vous ferez votre tyran et les foutrez en taule ? Vous enverrez l’armée ? Votre volonté n’a aucune valeur de droit, les individus sont libre et encore une fois si certains veulent du capitalisme c’est leur droit et vous n’avez aucune légitimité à vouloir leur interdire. Vous avez un sérieux problème avec la liberté des autres, tout votre discours transpire la même chose : vous voulez contrôler la vie des autres, imposer votre vue contre leur volonté, bref dominer autrui. C’est très malsain ! »

Et blablabla et bla bla bla. John_John dans toute sa splendeur. Dès qu’il n’a plus d’argument, il nous assène son couplet sur la liberté. Oh, à ce propos, vous avez oublié de mentionner ma jalousie viscérale envers tous ceux qui s’enrichissent.

En d’autres termes : on finit toujours avec John_John par atteindre une sorte de « Point Godwin » où il va vous accuser d’aspirer au fascisme par pure jalousie.

Quand cela se produit, c’est généralement qu’il se trouve en difficulté. Mais son égo surdimensionné l’empêche bien sûr de l’admettre. De sorte que, pour tenter d’avoir le dernier mot, il inscrit son discours dans une logique manichéenne où il se fait passer pour le « gentil » (le chevalier blanc, grand défenseur des libertés face à l’oppression) combattant acharné du « méchant » que vous êtes, vous le (soi-disant) tyran, grand pourfendeur des libertés (de s’enrichir à l’infini ! Vous rendez vous compte un peu du crime !).

Encore une fois, cher ami, il n’est nullement question d’imposer de force (d’autant que je ne l’ai écrit nulle part), mais de convaincre. Loin de moi l’idée de « faire le bonheur des gens malgré eux ». Le socialisme sera démocratique et libertaire ou ne sera jamais.

Par ailleurs lorsque vous dites « Votre monnaie tout le monde s’y assoira dessus », la tyrannie je la voie plutôt de votre côté. Car enfin, qu’en savez-vous ? Combien de gens connaissent ces desseins là ? Au nom de quoi vous permettez vous de penser et de décider à la place de « tout le monde » ?

L’épargne des gens n’existe non pas du fait de leur volonté mais parce que le système le permet, et les y incite directement ou indirectement. Car s’ils épargnent c’est moins par idéologie que par pragmatisme, l’épargne étant perçue comme une sécurité matérielle face aux vicissitudes de l’existence.

Quant à votre couplet sur « la qualité que l’on demande à une monnaie c’est justement de servir de réserve de valeur et donc d’être thésaurisable », il obéit à une logique capitalistique qui n’aura plus lieu d’être dans l’organisation que je prône. Vous vivez encore au 19e siècle, cher ami. Ne saviez-vous pas qu’aujourd’hui la monnaie est virtuelle pour 85 % de sa création (ce qui signifie que demain elle le sera à 100%) ? De sorte que l’on peut très bien créer de la monnaie (qui ne sera plus qu’un simple moyen d’échange, d’où sa disparition après usage) en fonction de la valeur des produits et services mis sur le marché pendant une période donnée. Nul besoin de réserve, donc, puisque le revenu universel constituera une sécurité matérielle à vie.

« 6/ Le commentaire sélectionné rappelle exactement ce que l’article dénonce : une incompréhension de l’économie (et d’ailleurs le mec se fait démonter dans les autres commentaires). La « tarte » n’existe pas, il n’y a que des gens qui produisent plus un moins de valeur, et on ne peut estimer les contributions qu’a posteriori, pas a priori. »

Vous inversez les rôles cher ami. C’est plutôt le commentaire sélectionné qui dénonce ce que l’article avance, et non l’inverse. Par ailleurs, le mec ne se fait démonter mais contredit par des contradicteurs (qui ne font que reprendre les arguments des auteurs) dont l’écrasante majorité est acquis à la cause du libéralisme, ce qui me paraît tout à fait normal compte tenu de la nature de la source.


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