La princesse retrouvée de Léonard de Vinci
Une émission sur Arte, un livre à paraître prochainement nous révèlent une histoire étonnante : celle du profil retrouvé d'une princesse par le gaucher le plus illustre de la peinture.
Dans un livre à paraître, Peter Silverman nous raconte une histoire, comme il s'en écrit une par siècle, celle de la découverte d'une oeuvre oubliée de Léonard de Vinci. Au centre d'une rude bataille d'experts, le merveilleux profil de Bianca Sforza a pu être authentifié par les spécialistes du peintre de la Renaissance. Le plus incroyable est que ce tableau, en vente chez Christie's en janvier 1998, soit passé inaperçu, y compris par l'auteur du livre, un collectionneur expérimenté. A l'époque, on avait considéré que l'oeuvre était d'origine allemande et datait du XIXe siècle. Bien qu'il l'ait ratée par crédulité à la vente de Christie's, Peter Silverman continuait d'être hanté par ce profil à la beauté délicate fixé à tout jamais par le gaucher le plus célèbre de la peinture et qui frappe désormais par l'harmonie indicible des proportions. C'est dans une galerie new-yorkaise que Peter Silverman va de nouveau croiser ce portrait et l'entrelacs caractéristique de la coiffe et de la manche qui l'apparente irrésistiblement à "La dame à l'hermine" du même Léonard. Certain que ce tableau est du XVe, Silverman ne résiste pas à l'acquérir pour la somme de 19 000 dollars. L'examen au carbone 14, auquel il fait procéder sans tarder, indique que le profil est bien de la Renaissance mais cette preuve est encore insuffisante pour l'attribuer à Vinci. Conforté par l'examen au carbone, l'acquéreur s'adresse à Mina Grégori, une experte sans égal de la peinture florentine. Elle se rend chez lui accompagnée de Catherine Goguel, une spécialiste du dessin au musée du Louvre. Celle-ci prononce une remarque lourde de sous-entendu : Peter, il me semble que l'artiste soit un gaucher. D'autre part, si le vêtement est lombard, la délicatesse du visage est florentine. Il faut donc chercher un artiste florentin ayant travaillé à la cour du duc de Milan et qui, de surcroît, soit gaucher. C'est alors que la science va venir au secours de l'art grâce à un laboratoire de radiographie qui va numériser le portrait avec une caméra multispectrale. Or d'étonnants points de convergence se révèlent avec l'autre portrait de Léonard, celui de La Dame à l'hermine.
Mais, jusqu'alors, le profil n'est attribué à personne. En effet, quelle est cette très jeune femme présente à la cour des Sforza au même moment que le peintre ? En procédant par élimination, excluant celles dont la physionomie était connue, les experts vont tomber sur Bianca Sforza, la fille illégitime de Ludovic Sforza pour lequel Léonard travaillait. Le père, pour caser cette fille encombrante, lui fait épouser le commandant de ses armées Galeazzo Sanseverino. Malheureusement, la jeune femme, seulement âgée de 13 ans, mourra vraisemblablement des suites d'une fausse couche. Une telle découverte aurait dû provoquer l'enthousiasme du milieu culturel et c'est tout le contraire qui se produit. La nouvelle suscite un véritable déchaînement médiatique, certains spécialistes ne pouvant accepter de s'être trompés à ce point. Aussi font-ils courir le bruit qu'il s'agit d'un faux, que le tableau en lui-même n'a aucune qualité esthétique et, surtout, que Léonard n'a jamais travaillé sur parchemin et encore moins à la craie, au crayon et à l'encre. Or, on sait que Vinci fut surtout et avant tout un artiste qui n'a cessé d'expérimenter toutes les techniques possibles. Et que ce parchemin s'explique d'autant mieux qu'il provient d'un codex, l'une des quatre Sforziades à la gloire du duc de Milan, le mécène de Léonard dans lequel il était incéré et dont on retrouve la page manquante à la bibliothèque de Varsovie. C'est en tremblant que les experts présentent le dessin dont les dimensions, les trous dans la reliure coïncident irrévocablement. Désormais, l'acquéreur dispose de toutes les preuves que la princesse perdue a été retrouvée et que ce portrait est bien de la main gauche du maître italien.
Armelle BARGUILLET HAUTELOIRE
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