Le cinéma de Contis
Ma dernière séance ....
Un lieu à part …
Ce n'est pas une sortie ordinaire. Aller au cinéma de Contis, c'est s'offrir un voyage dans le passé, s'accorder une vraie tranche de septième art, entre initiés et amateurs, entre curieux et amoureux de la toile. C'est encore se lover dans des sièges à l'ancienne, se glisser dans un décor surréaliste, s'installer bien à son aise dans une immense salle, loin des espaces étriqués de nos machines à spectateurs.
Vous arrivez tout d'abord dans cette cité balnéaire, désertée par les touristes qui n'aiment que le soleil. Le vent balaie le sable fin qui vient s'engouffrer dans les recoins des maisons et des magasins. Vous avez le sentiment d'être au cœur d'un village de western, une cité fantôme dans laquelle surgira une bande de hors-la-loi.
La mer au loin, gronde. Un bruit permanent. L'Océan ici n'est pas tranquille, il ne cesse d'agresser la côte, il est virulent et violent. Le vent souffle, cingle les visages des quelques promeneurs emmitouflés dans des vêtements d'hiver. L'ambiance prépare merveilleusement à la plongée dans la salle obscure. Là, vous retrouverez le calme et la tranquillité.
Vous approchez du Cinéma. Des personnages grimaçants sont installés sur la façade. Vous n'êtes pas dans un établissement formaté. Reiner, le projectionniste, barman, ouvreur et homme- orchestre vous accueille avec un grand sourire, vous demande de vous dépêcher car un car de touristes japonais va arriver.
Vous allez patienter dans de confortables fauteuils de salon. Vous vous sentez chez vous : vous observez, interloqué, l'arrivée de spectateurs nombreux. D'où viennent tous ces gens dans ce village vide ? Ils sont amateurs de cinéma, fidèles visiteurs, abonnés de l'endroit. Ici, vous êtes entre gens de bonne compagnie ; on devise d'un groupe à l'autre, on parle cinéma comme ailleurs météo.
Le grand rideau rouge se soulève, Reiner, ou sa femme, vous prie de pénétrer dans le saint des saints : la grande salle au décor suranné. De nouveau des monstres grimaçants, des personnages colorés encadrent une grande scène au fond de laquelle trône le grand écran. Une batterie et un piano attendent quelques musiciens de passage. La vie et la culture transpirent en cet endroit miraculeux.
On devine bien ici où là les outrages du temps. Cependant, rien ne vous met mal à l'aise. Vous allez vous installer confortablement. Vous avez le choix et de la place pour vos jambes, vous n'êtes pas importuné par les mangeurs de friandises. Ici, on murmure entre gens bien élevés. Soudain, nos hôtes surgissent pour présenter le film, le programme à venir, les moments forts de la semaine.
Il se passe toujours quelque chose au cinéma de Contis, perdu au bout du monde ; il propose des courts métrages, il reçoit des réalisateurs en résidence, il s'offre des avant-premières : il fait son festival à la fin du mois de juin. Aujourd'hui, un jeune réalisateur en séminaire d'écriture a la lourde responsabilité de présenter le film à venir : « Fatima » de Philippe Faucon. Vous vous apercevez vite qu'il doit être plus à l'aise avec une caméra à la main que devant un auditoire …
Le noir se fait. Des bandes-annonces sans publicité ; le bonheur retrouvé d'une salle qui ne se prostitue pas devant les marchands du temple. Vous vous calez, enfoncé dans ce fauteuil moelleux, vous vous préparez à un voyage hors du temps. Il sera personnel : le film ne plaît pas à vos amis, il est trop long, trop lent, trop naturaliste.
Vous êtes beaucoup plus indulgent. Rien de ce qui est présenté ici ne sera jamais pour vous insupportable. Vous avez tant de mansuétude pour le cinéma de Contis. Vous vous promettez d'y revenir malgré la petite demi-heure de voiture. Il n'est pas question d'aller ailleurs qu'en ce lieu magnifique. Vous êtes prêt à retenter l'aventure.
Cinéphilement vôtre.
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