« Le Neveu de Rameau » de Diderot avec Nicolas Vaude au Théâtre du Ranelagh
c’est par ces mots d’adieu au café de la Régence que, sur le point de se rendre à l’Opéra, le neveu de Rameau prend congé de Diderot à la suite d’une conversation à refaire le monde entre Raison et Cynisme.
« Mes pensées, ce sont mes catins », c’est ainsi que Diderot a pu caresser ce dialogue improbable, lors de promenades de fin de journée non loin du Palais-Royal, entre « lui » et « moi » où le moraliste va mettre à l’épreuve du doute, les valeurs universelles de la morale confrontées au pragmatisme des intérêts particuliers.
Face au philosophe va se dresser le phénomène de l’anarchiste prêt à faire feu de tout bois pour assouvir l’objectif d’une liberté inconditionnelle destinée à assouvir tous les besoins et plaisirs terrestres.
Foin des contraintes socioculturelles, le séduisant rebelle va s’opposer dans des monologues brillants, mais le plus souvent spécieux, à toutes ambitions citoyennes et à toutes pédagogies progressistes visant à élever le destin de l’humanité.
La fascination de Diderot à l’égard de son interlocuteur virtuel n’aura d’égale que sa conviction relative concernant l’incarnation du génie humain lié au cortège des privilèges auxquels celui-ci ose prétendre.
Grâce à une maïeutique jonglant habilement avec les forces du bien et du mal, ce débat contradictoire, initié au XVIIIème siècle, pourrait avoir l’immense mérite de ne pas prendre les vessies de l’Esprit pour des lanternes de la Civilisation.
En ce 09/09/09, la première de la reprise du spectacle, créé en 2001 dans ce même Théâtre du Ranelagh, célébrait en générale de presse, le quatuor ayant déjà réuni initialement Nicolas Vaude, Nicolas Marié, Olivier Baumont en compagnie de leur metteur en scène Jean-Pierre Rumeau.
Rénovée avec des fauteuils confortables, la salle offre, plus que jamais, la magie de ses lambris au bénéfice d’une acoustique plus feutrée. Néanmoins sa profondeur reste un paramètre avec lequel les comédiens doivent s’accorder.
Ainsi, l’interprétation trublionesque de Nicolas Vaude, en phase avec les digressions étourdissantes d’une gamberge lutine, imprime un rythme étourdissant à sa composition du « neveu » dont parfois, les inflexions du spectre vocal aboutissent assourdies, aux derniers rangs d’orchestre.
En charge de témoignages musicaux fort bienvenus, Olivier Baumont consacre sa maîtrise du clavecin, à calmer le jeu ébouriffant de cet esprit follet auquel l’autre Nicolas semblerait davantage assister ensorcelé que dans l’audace de la répartie.
D’ailleurs à la décharge du rôle, Diderot ne s’offre même pas le prestige de la dernière réplique, puisque sans piper mot :
« Rira bien qui rira le dernier, Monsieur le Philosophe !... ».
photo DR.
LE NEVEU DE RAMEAU - ** Theothea.com - de Diderot - Jean-Pierre Rumeau - avec Nicolas Vaude, Nicolas Marié & Olivier Baumont - Théâtre du Ranelagh
4 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON