Sendelica, le space rock qui vient de Galles

Au Pays de Galles, il n’y a pas que le rugby. On trouve aussi d’excellentes formations de rock et dans le genre progressif space et psyché, Sendelica se distingue avec comme noyau un duo de musiciens composé de Pete Bingham qui officie sur les guitares et autres distorsions électroniques, en compagnie de Glenda Pescado à la basse. Cette formation réduite leur permet d’exécuter un rock planant sobre, épuré mais d’une redoutable efficacité. C’est pour célébrer leurs dix ans d’existence que cette formation vient d’enregistrer quatre compositions lors d’une jam session. Le LP est sorti sur le label indépendant Fruits de Mer Records dont la vocation est de nous replonger plus de quarante ans en arrière avec des musiques dont le son est resté proche des expérimentations réalisées dans les early seventies avec les explorations floydiennes, le space rock à la Gong et Hawkwind sans oublier le meilleur de la scène germanique avec les riches expériences du krautrock.

Le LP intitulé « The Cromlech Chronicle » évoque un mégalithe vieux de 3000 ans et a été enregistré en marge d’un festival de rock dans un studio situé dans un coin perdu de la campagne galloise. Des nouvelles compositions sont proposées, à l’exception de 5 minutes extraites d’un ancien album et dont on reconnaît la différence de style, légèrement heavy et rappelant le premier vinyle sorti par Hawkwind. Au duo des origines se sont ajoutés un saxophoniste, un batteur et un claviériste qui ose s’aventurer au maniement de cet étrange instrument qu’est le thérémine. A ce quintet de base se sont joints trois comparses, chacun officiant sur l’un des trois morceaux enregistré en proposant voix, piano puis violon.

Le premier morceau est une longue suite expérimentale étalée sur plus de 20 minutes. On ne trouvera pas de mélodie car cette musique se situe aux antipodes de la pop music et se place dans un style space et ambiances planantes, assez proche des plages atmosphériques jouées par des formations de krautrock dans les seventies. Cette suite commence avec un calme étrange annonçant la tempête. Les parties de claviers sont fluides, très colorées, rappellent les étirements de synthé et de mellotron que l’on trouve dans les improvisations que proposait Agitation free, groupe allemand éphémère mais légendaire. Les parties de guitares sont étirées et jouée dans le pur esprit du free rock, avec une autre similitude, celle des longues séquences planantes jouées par le trio allemand Guru Guru. Au final, ces Gallois sonnent plus germanique que britannique et ce n’est pas pour déplaire. Mais la suite devient plus intense en évoluant progressivement vers un space rock déchaîné joué dans l’esprit du Careful Eugen du Floyd. La guitare se fait plus agressive, accompagnée par la rythmique qui s’active pour un résultat réussi, même si on a parfois une impression de déjà entendu. Le son est limpide. Les instruments parfaitement détaillés dans cette production visant l’excellence.

Les trois autres compositions figurant sur la seconde face du LP sont de la même veine, space, free et heavy, avec quelques différences stylistiques mais un même esprit, celui du rock expérimental qu’on a connu dans les seventies. Parfaitement dans l’objectif du label Fruits de Mers qui se signale aussi par la parution d’un EP signé Proud Peasant, formation progressive américaine signant deux reprises très seventies, l’une de Eloy et l’autre de Manfred Man. Bref, un saut entre l’école british et l’école germanique par-dessus l’Atlantique. Très intéressant, le rock alternatif est un genre planétaire. Au risque de me répéter, je milite pour soutenir ces productions indépendantes offrant des musiques alternatives tranchant avec les plans si convenus des industries culturelles promues par les médias de masse.