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Paradisial (---.---.55.43) 23 mars 2007 10:58

Des Irakiens tuent des Irakiens pour le compte des Etats-Unis

samedi 24 février 2007

Curtis Doebbler

L’exécution imminente des trois femmes irakiennes révèle le degré de dépravation atteint par les autorités irakiennes de collaboration, écrit Curtis Doebbler.

Plus de la moitié des pays dans le monde ont interdit la peine de mort. Ceci inclut chacun des 45 pays du Conseil de l’Europe ayant ratifié la convention européenne pour la protection des libertés fondamentales et des droits de l’homme.

Le gouvernement italien a appelé à un complet et universel moratoire sur les exécutions. Cette initiative a été soutenue par beaucoup de gouvernements européens. Les Nations Unies, en tant qu’institution, sont contre la peine de mort et les organisations de droits de l’homme de l’ONU ont fréquemment condamné la peine capitale comme étant une violation du droit à la vie. Mais la peine de mort après un procès injuste est considérée comme illégale partout et dans toutes les circonstances.

En septembre 2006, après qu’un article du New York Times ait révélé plusieurs exécutions en Irak, les autorités irakiennes ont été intérrogées par la communauté internationale au sujet de l’exécution de plusieurs Irakiens après des procès jugés injustes. Mais très peu d’informations filtrent de ces procès - les Etats-Unis et les autorités irakiennes collaborant pour assurer que peu d’informations soient publiées sur ces jugements - et ce souci a disparu dans le silence.

Après la sinistre exécution du Président irakien Saddam Hussein le 30 décembre 2006, de nombreux gouvernements et responsables de l’ONU ont soulevé des questions au sujet des exécutions ayant lieu après que des procédures judiciaires largement considérées comme injustes ; mais les autorités irakiennes n’ont pas tenu compte de cette condamnation publique.

Cette condamnation a été réitérée encore par plusieurs états et responsables d’organisations des droits de l’homme de l’ONU après que les autorités irakiennes collaborant avec le gouvernement des Etats-Unis aient exécuté deux personnes supplémentaires après le même type de procès inique. Et cela s’est encore reproduit plus récemment après le même genre de procès devant le tribunal spécial irakien.

On pourrait imaginer que n’importe quel gouvernement soucieux des droits humains cesserait d’exécuter des personnes après des procès injustes et face à une telle condamnation si forte. Tout au contraire, le gouvernement des Etats-Unis et ses collaborateurs irakiens semblent devenir plus assoiffés de sang irakien à mesure que leurs actes hideux sont exposés au grand jour.

En fait ils réalisent une sorte de « nettoyage pervers » de communautés détestées.

Les mêmes ont procédé ainsi en Libye où ils ont lutté pendant une décennie pour faire disparaître le mouvement de libération d’Omar Mukhtar [grand résistant lybien contre l’occupation italienne, capturé puis assassiné par les fascistes italiens en 1931].

Dans ces temps modernes, les Etats-Unis ont un statut unique parmi les pays du monde pour la barbarie de leurs exécutions. Ils appliquent la peine de mort à des enfants, à des personnes physiquement et mentalement handicapées, et des femmes, et par des moyens parmi les plus inhumaines.

La Commission Américaine des droits de l’homme, les cours de justice des pays européens et la Cour de Justice Internationale ont condamné le gouvernement des Etats-Unis pour des exécutions capitales après des procès injustes au cours desquels des défenseurs étrangers n’ont pas été autorisés à exploiter les droits consulaires censés être respectés par les Etats-Unis.

C’est la victoire en versant le sang de son propre peuple...

Un exemple saisissant du massacre sans scrupule de citoyens irakiens est le cas de trois femmes irakiennes qui font face actuellement à une exécution imminente par les autorités irakiennes après des procès iniques. Dans la prison d’Al-Kadhimiya de Bagdad, Mme Wassan Talib, 31 ans, Mme Zainab Fadhil, 25 ans, et Mme Liqa Omar Muhammad, 26 ans, attendent d’être exécutées après un procès qu’Amnesty International à condamné comme injuste.

Aucune des trois femmes n’a été légalement représentée et aucune d’elles n’a eu le temps ni les moyens suffisants pour préparer sa propre défense. Il n’est même certain qu’il y ait eu un procès. Comme l’a précisé le New York Times en septembre 2006, certains procès ayant pour résultat la peine de mort sont basés sur la prétention d’une évidence, qui selon la défense n’a même jamais été démontrée. On ne peut que seulement imaginer le genre d’évidence, le cas échéant, qui a servi à accuser ces trois femmes.

Chacune des trois femmes a été accusée de la façon la plus vague d’avoir agit contre le bien-être public, correspondant au paragraphe 156 du code pénal irakien. Cette disposition déclare que « toute personne qui commet volontairement un acte avec l’intention de violer l’indépendance du pays ou son unité ou la sécurité de son territoire, et si cet acte, par sa nature, mène à une telle violation est punissable de la peine de mort. »

Et tandis que ces trois jeunes femmes attendent leur exécution, deux d’entre elles prennent soin de leurs jeunes enfants ; l’une élève une fille d’à peine un an née en prison.

Des comédies aussi injustes ne correspondent même pas à la définition la plus simple de « procès » ; il s’agit en fait d’exemples de « crimes de guerre » consistant à imposer volontairement à des prisonniers de guerre ou à des civils des procès injustes.

Un soldat [américain] pourrait aisément être condamné à mort s’il tuait un Américain. Mais aucun Américain n’a été condamné à mort pour avoir tué un Irakien.

Bien que la communauté internationale a constamment, et avec de plus en plus de force, condamné verbalement les exécutions en Irak, aucune mesure n’a été prise jusqu’ici. Aucune utilisation n’a été faite des articles des conventions de Genève protégeant les civils et les prisonniers de guerre contre des jugements injustes. Ces dispositions exigent de tous les états de rechercher et d’amener devant leurs cours de justice toute personne impliquée dans un tel type de procès.

Ni les Etats-Unis ni leurs collaborateurs irakiens, ni la communauté internationale ne sont ignorants du genre de procès qui précède régulièrement les exécutions capitales en Irak. Les Américains impliqués dans ces procès se sont parfois vantés devant la presse du rôle qu’ils ont joué et de la responsabilité qui est la leur dans les procès suivis d’exécutions.

Dans ce vide général, la communauté internationale n’utilise que des mots là où il est avéré que des mots ne servent à rien, observant passivement comment des Irakiens tuent des Irakiens à la demande des leurs partenaires américains.

Une telle inaction signifie-t-elle que la communauté internationale est trop lâche pour agir contre ceux qui collaborent avec les militaires américains ? Signifie-t-elle que la condamnation de la peine de mort par plus de la moitié des pays dans le monde, aussi bien que par l’ONU, est simplement un geste sans signification ? Signifie-t-elle que pour les Américains et leurs alliés les vies des Arabes et des musulmans valent infiniment moins que leurs propres vies ?

Trois femmes irakiennes sont sur le point de donner leurs vies pour prouver que la réponse à chacune des trois questions est une retentissant « oui ».

Curtis Doebbler est enseignant à l’université An-Najah de Naplouse en Palestine

23 février 2007 - Al Ahram Weekly

Traduction : Claude Zurbach [Info-Palestine.net]


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