2012 : La France face à son destin, sortir de l’Histoire ou rentrer dans le XXIeme siècle
" Si nous n'étions pas le peuple français, nous pourrions reculer devant la tâche et nous asseoir au bord de la route en nous livrant au Destin. Mais nous sommes le peuple français ! (...) Il est temps que se forme et s'organise le Rassemblement du peuple français qui, dans le cadre des lois, va promouvoir et faire triompher, par dessus les différences des opinions, le grand effort du salut commun et la réforme profonde de l'Etat." ( discours de fondation du RPF, 7 avril 1947, Charles De Gaulle)
Le XXIeme siècle a désormais bien commencé. Après la crise de la bulle internet, le choc du 11 Septembre, l’individualisme latent et le libéralisme égoïste, le recul des idéologies et le retour du religieux, vient la première grande crise du capitalisme mondialisé. Elle pose les bases sur lesquels vont se développer ce siècle nouveau. Confronté à une redistribution des cartes en matière géopolitique, économique et environnementale, le monde change à une grande vitesse et les pays qui en sont l’accélérateurs, encore nommés il y’a peu « pays émergents », sont ceux que l’ont peut désormais appeler les « puissances de demain ». Le « choc des civilisations » que prévoyait Samuel Hutington semble pour certains en train de se mettre en place au vue des mouvements nationalistes, les replis régionalistes ou les mouvements terroristes pseudo-religieux. D’autres comme Emmanuel Todd prévoit plutôt une « rencontre des civilisations », à la vue de l’évolution des sociétés arabes par exemple avec le printemps révolutionnaire de 2011.
Quelle place alors pour la France dans ce monde nouveau et plus qu’incertain ? La France est une vieille nation, ancienne grande puissance, qui semble ne même pas vouloir se battre pour conserver une place digne de son rang au vue de son histoire et des ses atouts. 2002, l’élection se jouait sur la peur, et le bilan de Jospin, qui aurait du être visualisé dans son ensemble, n’a été abordé que dans son résultat discutable en matière de sécurité. 2007, l’illuminée du Poitou, par l’extravagance de son personnage, n’a même pas permis le débat, et laissé M.Sarkozy paraître, à juste titre, comme le plus apte à diriger la France. 2012 va soulever des enjeux beaucoup plus nombreux. M.Sarkozy sera le probable candidat de la droite, et le duel à gauche se jouera entre M.Hollande et Mme.Aubry. Chacun des candidats passe pour des candidats crédibles, mais devant présenter désormais un réel projet politique, voire de société. Le modèle républicain, la politique industrielle, le chômage et l’emploi, la sécurité, la régulation financière, le pouvoir d’achat, les régimes spéciaux, l’Europe, la réforme fiscale, l’avenir de la jeunesse, le logement, l’environnement et la pollution, le financement de l’assurance maladie, tant de sujets qui vont faire de 2012, du moins je l’espère, une campagne complète et non pas ciblée sur quelques sujets phares pour les médias.
Il me semble alors que dans l’intérêt de la France et des français, 4 points principaux constituant une certaine Ambition Française, digne de notre pays et de son peuple, se dégagent et présenteraient la preuve d’une réelle volonté politique de changer la France :
- De la fracture sociale à la solidarité nationale : en partie pourrie par le clivage archaïque et nauséabond droite/gauche, la France ne connaît pas une fracture, mais des fractures multiples. Il ne faut pas tomber dans l’excès et la démagogie à propos de cette fracture comme le font les partis extrémistes, ni la nier comme le font les partis de gouvernement et une majeure partie des élites médiatiques. Créer cette solidarité nationale consisterait déjà à remettre en place un service civique, de 6 mois à 1 an, dans un panel large de services publics tel que l’armée, les pompiers. Remettre la nation et la république au cœur des passions des français par une réelle éducation civique à l’école. Et que les élèves soient tous obligés durant leur lycée, à participer au moins une fois par trimestre, à une action bénévole dans une association caritative afin de les sensibiliser à des valeurs telles que l’entraide et la générosité, valeurs bien souvent oubliés dans l’individualisme ambiant.
- Place à la jeunesse et à l’avenir : les pistes pour cet axe se base surtout sur une poursuite des réformes dans les domaines de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur. Remettre les savoirs au centre de l’école, et non plus l’élève. C’est-à-dire condamner l’idéal « pédagogiste » mis en place de puis 1989 avec la loi d’orientation scolaire, favorable à une découverte autonome d’un élève des matières étudiées. La maîtrise des savoirs de base, par un apprentissage plus ou moins autonome, est la clé de la réussite académique. Il faut revaloriser les autres filières que le bac général, dont on fait trop souvent l’apologie idiote, et dont le corollaire est l’échec de nombreux élèves par la suite en enseignement supérieur. Pour redonner du dynamise à ces autres filières, il faudrait accentuer le caractère généraliste du baccalauréat technologique et réduire le nombre de spécialisation précoce, transformer les CAP en « bac pro » afin d’élever le niveau de qualification, continuer à étendre le nombre de licence professionnelles et créer une licence technologique, répondant à l’intérêt des entreprises. Pour ce qui concerne le bac général, la filière S a trouvé son équilibre, la filière ES doit avoir un niveau renforcé en maths et privilégier l’économie plutôt que la sociologie en SES, la filière L doit elle être revalorisée à partir des langues, de la communication et du droit.
- Restaurer la compétitivité des entreprises françaises : notre marché n’est sans doute pas assez flexible. Quand en Angleterre, un licenciement prend 15 jours, il prend 3 mois en France. Le noyautage des PME par les syndicats et la multiplication des comités d’entreprises créent en permanence un climat de méfiance entre le patronat et les salariés. Il faut ainsi adoucir la législation sociale, afin de ne pas verrouiller le marché l’emploi comme il est aujourd’hui, où le patron se dit que si il fait une erreur de personne pour le poste, il lui sera trop difficile de s’en débarrasser par la suite. Il faut également développer le modèle de coopération, que prône par exemple Arnaud Montebourg dans son livre « des idées et des rêves ». De plus, en France, on a cette odieuse habitude de plus taxer le travail que le capital. Certes, nous ne travaillons pas assez avec nos 35 heures par semaine, mais ce n’est pas là la vraie question. Le fond du problème est dans le cout horaire du travail qui est beaucoup trop élevé par rapport à la moyenne, tellement élevé qu’il ne compense même pas la productivité des travailleurs français, l’une des meilleures au monde. Au niveau de l’industrie, il nous faut, pour une fois légitiment, prendre exemple sur le modèle allemand. La France ne se voit que dans des grands groupes. Or cela ne suffit plus. Il nous faut développer les PMI en les aidant à grandir et à travailler dans la durée, créer un grand ministère de l’industrie digne de ce nom, avec des équipes d’ingénieurs compétentes et des outils financiers puissants, opérer une réforme de la politique de la concurrence à Bruxelles afin de (enfin) favoriser les groupes européens. A ceux qui pensent que malgré toutes les réformes possibles, notre pays serait voué au déclin, je conseille de lire des thèses plus audacieuses parues récemment comme « Le fabuleux destin d’une puissance intermédiaire » de Jean Hervé Lorenzi ou encore « Les Trentes Glorieuses sont devant nous » de Karine Berger et Valérie Rabault.
- De l’Europe germano-centrée à l’Europe Européenne : François Mitterrand a fait le choix de l’Europe, en pensant que suite à la réunification allemande, le seul moyen de laisser nos deux pays sur un pied d’égalité, serait la monnaie unique. Excellente théorie gâchée par la réalité des faits ! L’Allemagne n’a pas joué le jeu de l’harmonisation et a finalement créer une sorte d’ « euro-mark », tout autant au service de son pays. Jouant depuis longtemps la politique désinflationniste sur ses salaires, elle garde un avantage comparatif certains par rapport à ses partenaires européens, d’où son excédent commercial de 50 milliards, quand la France a une balance négative à hauteur de 100 milliards. L’Europe doit donc changer, et cesser d’être au service de l’Allemagne et d’être un parangon (et d’ailleurs le seul) d’un libéralisme économique pur et dur. Tout d’abord, cela passe par la fin de cette apologie parfaite de la concurrence, en mettant réellement en place la « préférence communautaire », sorte de protectionnisme modéré. Il faut le dire ouvertement : l’Union Européenne doit favoriser les entreprises européennes, les intérêts nationaux, et ne pas être un laquais de l’OMC, dont nous sommes la seul puissance économique à vouloir absolument respecter les règles. Il faut également que la BCE cesse de seulement s’occuper de la politique monétaire en se préoccupant des taux d’intérêt, mais intègre une notion de l’économie plus large en affichant des objectifs de croissance et s’occupant également de la politique de l’emploi. De plus, l’Europe à 27 est ridicule dans la mesure où on s’élargit plus vite que l’on harmonise. Il est nécessaire de coordonner la fiscalité, la politique économique afin d’être un ensemble économique cohérent et non plus un animal aux milliers de têtes frivoles. Enfin, le conseil européen doit jouer son rôle en évitant la dérive oligarchique de la commission, pour remettre les peuples européens et leurs nations respectives au centre du jeu. On ne réussira pas l’Europe sans les européens.
Ces 4 points ne représentent qu’une ébauche et donnent seulement quelques indices de réflexions, sans la moindre prétention à avoir le niveau d’un programme politique. Néanmoins, ils sont l’incarnation d’un véritable cri du cœur, voire de détresse au vue de la situation. Pour certains, comme Jean Pierre Chevènement dans son brillant livre « La France est-elle finie ? », nous pouvons comparer la future échéance de 2012 comme celle de 1940. Année traumatisante de notre roman national, où les élites ont fait le choix du pétainisme, et une minorité se sont opposés à ce choix du déclin assumé au moment du vote. Tandis qu’une infime partie de personnes ont fait le choix du gaullisme, c’est-à-dire de la résistance au courant dominant, de faire face à l’Histoire, pour être digne de notre patrie. Si l’on fait une comparaison un tantinet excessive, on pourrait imaginer que nos élites aient capitulé devant la globalisation, l’Europe libérale et ne veulent plus se soucier de la France, qui parait trop petite dans ce monde de géants désormais. Et alors que seule une minorité une fois encore, serait prête à combattre, en ayant pour discours qu’effectivement, une autre voie est possible. Je ne sais pas si la comparaison est juste, mais elle mérite d’attirer l’attention. Ma seule certitude est que la réponse au livre de Jean Pierre Chevènement est que non, la France n’est pas finie, elle est juste en sommeil. Victime d’une dégradation lente, la France n’arrive pas à se rendre compte qu’un sursaut nécessaire face au nombreux défis que nous proposent le XXIeme siècle. Il ne lui reste qu’à prouver qu’une fois plus dans son Histoire, elle saurait faire face, verra son peuple se dresser comme un, et se résoudre à la formule de Danton restée célèbre au moment où la France était au plus mal : « de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace et la République sera sauvée ! »
8 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON