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Accueil du site > Tribune Libre > Acquittée après un « infanticide » par un jury populaire courageux

Acquittée après un « infanticide » par un jury populaire courageux

Les journaux n’ont pas beaucoup commenté l’acquittement de Lydie Debaine le 9 avril 2008, jugée en Cour d’assises pour avoir mis fin aux jours de sa fille, handicapée extrême, souffrante... Ayant souvent le démarrage au quart de tour, j’avais écrit un billet sans doute trop enflammé et approximatif pour mériter une parution sur Agoravox. Je le livre tel quel aux lecteurs***. L’affaire Debaine est simple, mais complexe si on recadre cet événement loin d’être anodin dans le contexte social et moral. Parce qu’on touche à la mort et au sacré, au don de la mort et à l’interprétation philosophique de cet acte. Peut-on se donner la mort ? Oui, le suicide est considéré de cette manière, sans doute par commodité, par refus de voir la réalité en face. Le suicide d’une personne est toujours annoncé avec cette formule ; X s’est donné la mort. Du point de vue juridique, c’est un assassinat pur et simple. Sauf que celui qui se donne la mort ne peut plus être poursuivi. On pourrait imaginer les bonnes consciences morales prêtes à participer à une Cour dans l’au-delà pour juger celui qui a commis un tel acte.

Le geste de Mme Debaine est différent d’un suicide. C’est, du point de vue juridique, un assassinat, certes, dans des circonstances particulières, mais c’est ce qui a été retenu par la juridiction pour traduire cette dame devant une Cour d’assises. Qui a prononcé un verdict stupéfiant ! L’acquittement ! Prenons le cas d’une Cour devant juger ou rejuger un meurtre. Comme celui dont fut acquitté en appel Omar Haddad. Suivant son intime conviction, la Cour acquitte le prévenu si elle est persuadée qu’il n’est pas l’auteur du crime, autrement dit, le fait imputé à l’accusé n’existe pas (ou du moins, la Cour pense que les preuves sont insuffisantes et que le doute doit bénéficier à l’accusé). Dans le cas contraire, certaine de l’acte, elle prononce une peine, inférieure ou supérieure à celle requise par le procureur, tenant compte des circonstances. Dans l’affaire Debaine, il y a bien eu un assassinant, mais le jury a prononcé un acquittement, ce qui signifie qu’aux yeux des jurés, ce n’était pas un meurtre dont il s’agissait. Alors que le fait est avéré. C’est ce qu’on appelle ouvrir une boîte de Pandore. Les jurés ont jugé que les faits n’étaient pas ceux qui ont été qualifiés par la justice. Et, donc, qu’il n’y avait pas assassinat, alors que si l’avis du procureur avait été suivi, une peine de trois ans avec sursis ou même six mois, l’acte aurait été reconnu et le jugement n’aurait pas créé un tel précédent. Cette décision de la Cour est énorme dans la mesure où elle ébranle nos certitudes. Et, comme on pouvait s’y attendre, les ligues de vertu, les défenseurs de la vie, ont été choqués, voyant dans cette décision la voie vers un permis de tuer.

C’est leur droit. Ces gens-là sont bornés. On ne peut pas les faire changer d’avis. Leurs arguments, invoquant la sacralité de la vie, sont les mêmes que ceux déclinés dans le débat sur l’euthanasie. La vie est une instance supérieure face à laquelle toutes décisions et actions doivent être subordonnées. Ainsi parle la ligue de vertu. Avec les commandos anti-avortements, les pourfendeurs de l’euthanasie, les disciples de Jérôme Lejeune. Toujours le même scénario, les mêmes craintes. Ces gens-là ont peur de la liberté. Du moins, c’est une circonstance atténuante qu’on pourrait leur accorder. S’agissant de Mme Debaine, ils vous diront que cette dame n’avait pas le soutien des familiers et, surtout, des structures sociales pour servir de béquille au service de la sacralité de la vie et que si cette mère a craqué c’était la faute au manque de soutien social. Ils ont tenu le même discours pour Chantal Sébire. Et pour l’avortement c’est du pareil au même. Ils sont prêts à empêcher une jeune fille d’avorter en jouant sur le remords et en se portant autour de cette jeune future mère en lui assurant aides, moyens, soutiens. Mais qui sont-ils pour s’arroger le droit d’interférer dans la vie et le don de la vie prodigué par autrui, cet acte intime, ce libre choix, qu’ils n’hésitent pas à profaner au nom de convictions religieuses ? C’est comme si cette vie leur appartenait dès lors qu’ils interfèrent avec les décisions de la personne habilitée à le faire. Et, pour le don de la mort, ils font de même. S’appropriant le destin choisi de Chantal Sébire ou celui qu’a choisi Lydie Debaine pour cet enfant désiré, né prématuré, aimé, ayant grandi dans un enfer de souffrances qu’elle décida d’abréger. Sans en référer à d’autres instances, aux vautours de la bonne moralité. En ce sens, le verdict des jurés peut être compris. Le don de la mort a été prononcé pour assistance à personne en danger et, en de rares cas, la mort est le seul moyen de mettre un terme à cette dangerosité de souffrances. Les questions d’interprétation et de sens marquent chaque époque. Le jury a été à la hauteur d’un nouveau regard sur la vie et surtout, la Liberté !

C’était un acte d’amour. Au nom de quoi les ligues de vertu s’arrogeraient-elles le droit d’interférer, d’imposer un soutien, refusé du reste par Mme Debaine, pour maintenir cette souffrance au nom d’un idéal qui n’a rien de supérieur ni de transcendant, mais qui est culturellement (mal) construit ? Qui sont-ils ces moralistes ? Ces gens-là, connaissent-il l’amour ou bien sont-ils des êtres desséchés, s’appuyant sur quelques prétextes moraux pour agir en croyant sauver ceux qui n’ont rien demandé, excepté qu’on respecte leur Liberté et qu’on les aide dans leur choix ou du moins qu’on ne les condamne pas. La décision de la Cour a été applaudie. Mais ce verdict de la Cour instituerait-il un permis de tuer ouvrant la voie vers l’assassinant légal, et même l’assassinant d’Etat, socialement géré ? En d’autres temps, il y eut des crimes d’Etat. Mais confondre la biopolitique meurtrière d’un Etat totalitaire et un acte individuel témoigne d’une confusion mentale.

Et, pour un point de vue complet, interrogeons cette science médicale et industrielle qui permet à des fœtus de 6 mois de survivre artificiellement, avec souvent des séquelles et des conséquences dramatiques. Comme en attestent les études récentes. Se pose la question de cette industrie génitrice. Là aussi, un débat devra avoir lieu, sur ce lourd problème hérité du progrès scientifique et qui interfère avec les questions d’ordre moral. La vie et la mort sont des actes libres, qui ne concernent que les intéressés, aux moments déterminants évidemment. Lorsqu’on est amené à décider, de ne pas s’acharner, ni sur la naissance artificielle d’un être qui souffrira ni sur le prolongement de la mort par des voies artificielles. La science médicale n’a pas forcément vocation à produire de la souffrance et des malheurs. Même si les intégristes de la croix en ont décidé ainsi.

Je n’ai qu’une devise pour conclure, la mienne, celle qui annonce les prochaines Lumières :

Liberté, amour et vérité !

*** Brouillon écrit le 9 avril (à lire comme un brouillon, non définitif). Lydie Debaine avait reconnu avoir mis fin aux jours de sa fille, prématurée puis handicapée motrice cérébrale, ayant vécu jusqu’à l’âge de 26 ans avec un quotient intellectuel évalué à 5 ans, des maux de tête, des vomissements. Cette mère qui pourtant aimait sa fille lui a administré des anxiolytiques avant de la noyer en 2005. Aux yeux de la loi, c’est un assassinant. Jugé en Cour d’assises. Aux yeux du jury populaire, ce n’était pas un assassinat. Ainsi en a jugé la Cour après une délibération plutôt rapide pour ce genre d’affaire. Ce verdict sera-t-il commenté dans la presse ? Nul ne sait, mais il fera date. S’inscrivant dans la thématique de la mort administrée au nom de la raison et du cœur. Un acte qui a fait débat il y a peu lors de l’affaire Sébire et de la question de l’euthanasie. Que de rhétoriques, de sophistiques, de détours, d’hypocrisies de la part des membres distingués de la gent médicale et politique, des culs bénis du dolorisme, des obsédés de l’acharnement thérapeutique, des législateurs secs et sans âme, des pourfendeurs moralisateurs, des élites de la loi, bref, une intégrale d’hommes de loi et de pouvoir qu’en d’autres temps Voltaire aurait désignée comme l’infâme, tout défendant à l’infâme le droit d’exprimer ses opinions. A l’occasion de l’affaire Sébire, les infâmes se sont exprimés. Certains auront la légion d’honneur, d’autres auraient rêvé d’une stèle au Vatican, quelques-uns s’en fourrent plein des poches, en exploitant le drame humain et en le maintenant en l’état. C’est de bonne guerre. Le profit ne connaît pas la conscience, il n’a que la puissance en vue et la domination. Les guerres de 39 et toutes les autres n’ont-elles pas duré pour le bon plaisir des financiers. A qui sert l’infâme ?


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30 réactions à cet article    


  • Aspiral Aspiral 14 avril 2008 13:31

    Je partage votre effroi, même si notre analyse et nos solutions divergent. Si je jury populaire est plus que nécessaire pour désencrouter la justice de ses rigidités, il n’est quand même pas juste d’appeler bien ce qui est mal. Le pervers précède la loi, dit-on. Quand ceux qui font la loi la transgressent eux-mêmes, qui va les juger ? Gandhi qui proposait la transgression de la loi comme homme politique, refusait de payer les cautions. Pour le reste, j’ai déjà fait mon commentaire sur l’autre article sur le même sujet.


    • claude claude 14 avril 2008 14:08

      merci bernard pour cet article émouvant.

      comme d’habitude, vous évoquez le problème et posez les questions sans emettre de jugement.

      en matière de douleur et de désespoir, personne ne peut se mettre à la place de ceux qui les ressentent. c’est certainement ce que les jurés ont voulu souligner en acquittant mme debaine.

      la condamnation, mme debaine se l’est elle-même infligée en donnant la mort à sa fille qu’elle aimait tant. en tant que mère, cet acte me boulverse au plus profond de moi : je n’imagine pas devoir un jour être confrontée à cette situation.

      cette dame a un courage extraordinaire, et le mieux que l’on puisse lui souhaiter maintenant, c’est qu’elle puisse faire enfin totalement son deuil et (re)trouver une certaine sérénité.


      • Icks PEY Icks PEY 14 avril 2008 16:43

        @ l’auteur

        Nos articles se croisent, effectivement, mais ne se ressemblent pas.

        J’y note une différence profonde : dès la fin de votre deuxième paragraphe, vous tombez dans l’insulte de ceux qui ne pensent pas comme vous.

        Une telle violence dans votre propos m’a fait peur et je me suis demandé si, sans le vouloir, je n’étais pas aussi tombé dans l’invective et la haine de mon contradicteur dans mon propre article sur le sujet. Heureusement, il n’en est rien.

        Vous parlez de liberté, d’amour ou de vérité.

        Je vous invite à étudier la notion du respect car cela vous fait visiblement défaut.

        Icks PEY

        PS Sous mon article, vous évoquez le fait que vous avez validé mon article lors de son passage en comité de rédaction. Sous prétexte de diversité de point de vue. Je ne sais pas ce que vous attendez d’une telle déclaration, mais sachez bien que je ne me sens aucunement redevable de quoique ce soit à votre égard en contrepartie. D’ailleurs, je n’aurai probablement pas voté en faveur du votre. Mon article, contrairement au votre, pose sereinement des problématiques juridiques et sociales que mon humilité ne m’empêche pas de trouver pertinentes là où le votre ne fait que répandre votre agressivité.


        • 5A3N5D 14 avril 2008 18:43

          @ X Pet,

          Une telle violence dans votre propos m’a fait peur et je me suis demandé si, sans le vouloir, je n’étais pas aussi tombé dans l’invective et la haine de mon contradicteur dans mon propre article sur le sujet. Heureusement, il n’en est rien.

          Dans votre article, il n’est nullement besoin de lire tout un paragraphe pour tomber dans l’injure : la violence du titre suffit.

          Mais, comme vous ne voyez la poutre que dans les yeux des autres, il est parfaitement normal que vous vous donniez vous-même l’absolution. 

           


        • Bernard Dugué Bernard Dugué 14 avril 2008 19:03

          @ XP, comme le signale le commentaire à votre commentaire, la violence, elle est contenue dans votre propos malgré un titre provocant. Je sais où sont vos idées, vous vous référez à Jérôme Lejeune, personnage controversé dont on connaît l’influence sur les commandos anti-avortement. Je n’entre pas dans la polémique sur une influence réelle ou par le biais d’idées qu’il lança.

          Je crois que la sacralité de la vie, mise en tension avec la sacralité de la liberté sur sa vie (et sur celle qu’on a donnée et que dans le cas de L Debaine, on retire) est le débat philosophique qui doit avoir lieu

          Quand la vie devient souffrance et indigne, la liberté de la raison et de l’éthique est-elle supérieure à une sacralité de la vie que d’aucuns décrètent comme étant leur combat et qui s’arrogent d’interférer avec des décisions relevant de l’intime conviction. C’est une affaire religieuse dont il est question. Foi dans la liberté ou foi dans des préceptes religieux hérités d’une culture plus que du texte

          Sur cette affaire, je revendique le progressisme, comme ceux de la pilule et l’avortement en 1970. Comme sur l’autre affaire C. Sébire. C’est une confrontation entre votre position et la mienne. Vu la menace sur les libertés que représente votre mouvance religieuse, je prends le parti inverse et le défends avec force, sous ma vraie identité du reste, j’assume et on peut venir me trouver de vive voix pour en débattre lors des cafés actus que j’anime à Talence, le mercredi


        • Le péripate Le péripate 14 avril 2008 22:32

          Pour avoir raison, rien de mieux que de présenter un faux dilemme. Ainsi donc, il n’y aurait rien entre les forces du mal et de l’obscurantisme incarné par X Pey et vous même le progressiste des forces du bien. Bon, j’avais présenté un point de vue different, mais je suis probablement du côté des anti-IVG.

          Malgré tout, comment justifier ceci : Du point de vue juridique, c’est un assassinat pur et simple. Sauf que celui qui se donne la mort ne peut plus être poursuivi. On pourrait imaginer les bonnes consciences morales prêtes à participer à une Cour dans l’au-delà pour juger celui qui a commis un tel acte.

          Sachant que à ma connaissance, personne n’est jamais poursuivi pour tentative d’assassinat sur lui même ?

           


        • Bernard Dugué Bernard Dugué 14 avril 2008 23:02

          Cher Péripate, je ne te poursuivrai pas pour le délit de lenteur à la comprenette

          Au plaisir de trinquer un verre de l’amitié à la Taverne


        • Le péripate Le péripate 14 avril 2008 23:09

          C’est une idée ! Mais, attention, je suis terriblement bavard, et vite ennuyeux...surtout quand je n’ai pas les réponses que j’attends


        • Pierre JC Allard Pierre JC Allard 15 avril 2008 01:27

          @ l’auteur : Je vous copicolle mon commentaire à Icks Pey qui parle par lui-meme.

          " Je suis horrifié que Mme Debaine ait noyé sa fille. Je suis solidaire du geste qu’elle a posé, parce que c’est le triomphe du BIEN - qui est de lutter contre le mal et la souffrance - contre le MAL qui est de permettre la souffrance, parce que quelqu’un l’a légitimée. ( Milgram) - mais je suis horrifié qu’elle ait dû le faire.

          Il faut que notre société soit bien veule et dégénérée pour que, se disant laique, elle continue, comme dans l’affaire Sébire, a nier à quiconque le droit de mettre fin à ses jours et de recevoir l’aide de la société pour le faire, sous le pretexte, toujour soigneusement occulté, que sa vie le lui appartient pas, mais appartient à "dieu".

          Quand il s’agit d’une personne inconsciente, mineure ou qui n’est pas saine d’esprit, le débat est plus complexe, car il y a une présomption à faire que l’on pose bien le geste que poserait la personne, si elle était consciente, majeure et saine d’esprit ...et c’est cette présomption qui rend légitime le geste.

          Complexe et c’est une casuistique, mais on ne traitera pas correctement de cette casuisique si on ne pose pas au départ le fait qie l’individu adulte et sain d’esprit est le seul maitre de sa vie, Si l’auteur le reconnait, nous n’avons pas de querelle et je passe mon chemin. S’il ne le reconnait pas, j’aurai quelques autres remarques à lui faire.

          Pierre JC Allard


        • Icks PEY Icks PEY 15 avril 2008 01:36

          @ Bernard

          Vous dites "Vu la menace sur les libertés que représente votre mouvance religieuse".

          D’abord, vous mettez de la religion là où je n’en mets pas.

          Ensuite, vous aurez beau maquiller un acte foncièrement mauvais et contraire à l’éthique du mot "liberté", cela ne changera pas la nature foncière mauvaise et contraire à l’éthique de cet acte.

          A quand des combats sur la "liberté de ne pas payer ses impôts", "la liberté de pisser dans la rue" ou "la liberté de stationner au milieu des passage cloutés".

          Plus sérieusement, vous me rappelez également ces pédophiles qui, ayant des relations sexuelles avec des mineurs consentants s’offusquent de ce que la société viennent mettre son nez dans leur lit. Nous sommes dans un cas tout à fait identique où des règles sociales supérieures d’intérêt général viennent supplanter la liberté individuelle.

          Icks PEY


        • Bernard Dugué Bernard Dugué 15 avril 2008 08:02

          Impots, passages cloutés etc...

          Mais cher XP, réviser et mettez à jour vos connaissances juridiques, et renseignez vous sur les droits naturels et les droits positifs. Quant à ce que je vous rappelle, vous avez l’esprit bien mal placé, à voir le mal partout, ne pas scinder les cas, bref, vous êtes dans un état de confusion, c’est bien ce que je disais dans mon billet. Mais c’est à votre honneur que d’être venu débattre ici, je vous en remercie


        • Le péripate Le péripate 14 avril 2008 18:02

          Du point de vue juridique, le suicide est un assassinat . A t-on jamais vu quelqu’un poursuivi pour tentative d’assassinat sur lui-même ? Je suis étonné que cela vous ait échappé, Bernard. Ce n’est donc pas la mort du suicidé qui éteint la procédure, c’est bien que le suicide n’est pas un assassinat.

          Une fois ce sophisme démonté, que reste-t-il ? Le fait qu’une majorité , puisqu’elle est majorité, peut enfeindre la loi. Et, c’est là que la bât blesse. Les majorités sont de circonstance, se font et se défont de manière contingente. La Loi,elle, a le mérite de sommer sur plusieurs générations les expériences de bien plus qu’une majorité. Elle est donc un principe supérieur à la stricte démocratie, qui peut changer la loi, mais avec lenteur, pondération, et prudence.

           En l’espèce, l’indulgence aurait du être le résultat du jugement, et non une déclaration d’innocence.Je ne sais pas quelle est votre position sur la peine de mort, mais il vous sera dorénavant très difficile d’arguer d’un principe supérieur qui interdit d’oter la vie si une majorité la réclamait.

          Bien sur, on peut changer la loi. Mais il faut rappeler que la loi s’applique également à tous, c’est la nécessaire isonomie qui est supérieure à la démocratie, et que donc elle ne peut absolument pas détailler toutes les exceptions présentes et à venir, tous les cas de figures envisageables, sauf à perdre ce qui fait sa force...

          Agir au nom du Bien est le propre du totalitarisme. Majorité qui pense agir au nom du Bien, c’est une démocratie totalitaire.

           


          • alceste 16 avril 2008 10:55

            @ péripate,

            "A-t-on jamais vu quelqu’un poursuivi pour tentative d’assassinat sur lui-même ? " : on ne le voit sans doute pas aujourd’hui, mais autrefois la religion chrétienne considérait le suicide comme un péché mortel, ce qui est logique : le suicidé s’est révolté contre l’une des vertus théologale, l’Espérance ; il a affirmé par son geste qu’il désespérait de la bonté de Dieu. Son corps n’était pas inhumé au cimetière, il était parfois traîné sur une claie dans les rues de la ville. Ses biens pouvaient être confisqués.

            voir aussi : http://fr.wikipedia.org/wiki/Point_de_vue_religieux_sur_le_suicide


          • Le péripate Le péripate 16 avril 2008 10:59

            Merci Alceste.


          • Bernard Dugué Bernard Dugué 16 avril 2008 11:02

            Intéressante précision Alceste, qui confirme l’idée que je voulais exprimer, certains seraient prêt à poursuivre le suicidé dans un tribunal de l’au-delà, décidant que la vie ne lui appartient pas. C’est là une précision qui montre les origines catholiques de ces débats sur la vie, la mort, l’euthanasie, l’avortement


          • Bernard Dugué Bernard Dugué 14 avril 2008 20:48

            Une réponse qui ne va pas m’attirer la sympathie mais qui me semble d’une sagesse évidente

            Si la médecine n’intervenait pas pour faire vivre artificiellement des nouveaux nés avec des déficits majeurs, il y aurait moins de cas du type de celui de Mme Debaine. Cet acharnement médical est une transgression sur la Nature, qui n’apporte pas un progrès mais un fardeau. Un conseil aux futurs parents. Essayez de vous entendre avec le médecin accoucheur pour demander à ce qu’aucune intervention ne soit pratiquée si le nouveau né n’est pas naturellement viable. Cette pratique est courante. Et qu’on ne mélange pas les problèmes. Ce n’est pas en s’infligeant ce fardeau inutilement qu’on aura fait avancer l’humanité et lutté contre la marchandisation et la chosification de l’être humain ! 


          • Icks PEY Icks PEY 15 avril 2008 01:23

            Merci Bernard d’apporter de l’eau à mon moulin.

            Dans mon article sur le même thème, je prédisais qu’un jour nous en viendrions à proposer l’avortement post-natal pour les enfants nés handicapés. Bingo ! Vous êtes en plein dedans !

            Au moins, je vous reconnais d’être pleinement cohérent avec vous même : pour vous le handicap grave est absolument incompatible avec la vie et euthanasier tous ceux qui ressemblent à la fille de Madame degaine serait un acte de santé publique doublé d’un humanisme incontestable.

            Joli programme.

            Icks PEY

             

             


          • Bernard Dugué Bernard Dugué 15 avril 2008 08:07

            avortement post-natal, euthanasie , que de confusions. Je ne préconise qu’une chose, laisser faire sa conscience et laisser la nature décider quand c’est le cas dans ce genre de situation. C’est clair pour moi


          • Icks PEY Icks PEY 15 avril 2008 11:04

            @ Dugue

            Nous admirons tous ce grand sens de l’humanisme qui vous anime et qui consiste à laisser crever un nouveau-né qui n’a pas la chance de vous plaire ...

            Nous sommes bien dans une logique d’avortement post natal : ce jeu de mots vous surprend, visiblement, mais il veut bien dire ce qu’il veut dire. Selon vous la personnalité humaine ne commercerait qu’à condition de naître vivant et ... normal ...

            Celui qui nait malformé ... et bien, ce n’est pas réellement un homicide que de le laisse crever car, en fait, ce n’est pas réellement une personne humaine ... on va dire que c’est une « parapersonne » affectée d’un désordre biologique, c’est cela ?

            Icks PEY


          • Bernard Dugué Bernard Dugué 15 avril 2008 11:10

            Mais cher XP, je n’impose rien, chacun son choix. Il ne faut pas se voiler la face, il existe des conventions non écrites que passent les futurs parents avec le médecin accoucheur, c’est une réalité. Quelle est votre position face à ces pratiques ? Moi je dis que ça regarde chacun et pas la société, sur ce cas précis, et pas un autre

             

             


          • Icks PEY Icks PEY 15 avril 2008 13:24

            Laisser le choix, laisser le choix, ces mots reviennent en permanence comme si le choix appartenait à qui que ce soit ... vous raisonnez en permanence en fonction des libertés ou des droits des uns et des autres ...

            Mais l’enfant, elle est où sa liberté ? Ils sont où ses droits ?

            Si je vous comprends bien, le seul droit que vous êtes prêt à reconnaitre au nouveau né handicapé, c’est le droit de mourrir ...

            Icks PEY


          • 5A3N5D 19 avril 2008 20:14

            "vous raisonnez en permanence en fonction des libertés ou des droits des uns et des autres ..."

            C’est une qualité qui ne risque pas de vous être attribuée. Les libertés et les droits des uns et des autres sont inconnus du monde religieux, ce qui en fait un monde bien peu suspect de démocratie.


          • Cartman 16 avril 2008 22:37

            Le titre de l’article est risible.

            La décision d’un jury, quelle qu’elle soit, n’est jamais accompagnée d’une justification et chacun de ses membres reste anonyme.

            La définition du courage implique une prise de risque pour soi-même. Les mots "jury" et "courageux" ne devraient jamais de trouver dans la même phrase.


            • phiconvers phiconvers 17 avril 2008 11:06

              Le parquet général de Versailles porte l’affaire en appel. L’explication du procureur se suffit à elle-même et me rassure sur la justice.

              "Sans méconnaître la situation dramatique de Mme Debaine, son profond désarroi et sa grande souffrance, il m’est apparu que le ministère public, avait le devoir, dans le souci de l’intérêt général, de requérir l’application de la loi et la condamnation de l’accusée", a expliqué Jean-Amédée Lathoud dans un communiqué.

              "Ce verdict d’acquittement pourrait en effet, être compris comme un encouragement à l’atteinte volontaire à la vie des handicapés, qui méritent notre protection et notre soutien", a-t-il encore déclaré.

              "Il m’apparaît que l’acte de Mme Debaine, s’il justifie une réelle compassion, ne peut être accepté en l’état du droit français, de nos valeurs éthiques et des principes qui fondent la vie en société", a-t-il dit.

              On ne touche pas à la vie, même par "compassion". C’est clair, et c’est fondateur d’une société libre et responsable.


              • Icks PEY Icks PEY 17 avril 2008 11:24

                Excellente décision que j’approuve totalement.

                Pour mémoire, voir mon avis initial sur la question : http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=38616

                Icks PEY


              • 5A3N5D 19 avril 2008 20:10

                "Ce verdict d’acquittement pourrait en effet, être compris comme un encouragement à l’atteinte volontaire à la vie des handicapés, qui méritent notre protection et notre soutien",

                Ce qui serait amusant, c’est que le jury de la cour d’assise d’appel confirme le verdict de première instance : l’euthanasie entrerait de facto et de jure dans le droit français sans qu’il soit besoin de légiférer, par la simple jurisprudence.


              • phiconvers phiconvers 17 avril 2008 12:09

                XP, je suis allé lire votre article, et je l’approuve intégralement. Je me réjouis qu’il ait été publié, même si le débat qui l’a suivi n’était pas franchement à la hauteur. Mais il faut accepter cet avatar, quand on publie sur Agoravox. J’en fais, comme vous, les frais.


                • Itamar 24 avril 2008 01:14

                  Vous avez le mérite d’avoir écrit un article sur un sujetextremement complexe et que nos élus et autres "sages" (songeons aux membres du comité de bioéthique) souhaitent éviter à tous prix.Regrettons le ton employé dans la seconde partie et qui a provoqué des réactions ...disons "épidermique" chez certains très ancrés dans leurs convictions. Je suis d’abord restée sans voix en lisant tous vos échanges mais la retrouve enfin ! Une chose m’émerveille chaque jour : la complexité des mécanismes de la vie.Une chose m’effraye souvent : la rage de l’Homme à vouloir devenir immortel....Dans la terrible affaire que vous commentez un seul point m’apparait essentiel : la souffrance indicible qu’a vécu l’enfant de Lydie Debaine....Je vais en faire hurler certains mais pour moi l’etre humain reste un etre fait de chair et de sang parmi toutes les éspèces vivantes.Certains le classent à part....certes il a la capacité de la sublime compassion autant que celle de l’ignoble cruauté,ce qui le différencie des autres mammifères.Mais devant la douleur qui écartèle,qui vrille,qui déchire,qui agonise de souffrances est-il si différent des autres etres vivants ?...A t’on le droit dans une société qui se veut évoluée de rejeter un véritable débat sur le droit à mourir dans la dignité,les possibilités d’euthanasie,le suicide assisté ? Pourquoi éprouvez vous le besoin de vous invectiver ? Avez vous vraiment été confrontés à l’agonie d’un etre cher ? Pour certains d’entre vous j’en doute ou alors ils ne se mettent pas dans la "peau de l’autre" et c’est une désolante infirmité morale. Au fait Ludo avez vous approfondi le sujet sur l’euthanasie pratiquée dans d’autres pays et abordé (succintement) par notre comité de bioéthique ?


                  • Itamar 24 avril 2008 01:32

                    Excusez-moi Ludo, je vous ai confondu avec un autre rédacteur----et tout comme Pierre Jc Allard je trouve épouvantable qu’une mère en soit arrivée a tuer son enfant....une enfant qu’elle aimait profondément,j’en suis certaine. Je ne me permet en aucun cas de la juger,soyez en surs.Reconnaissons que la décision des jurés amène à poser de nombreuses questions.Je me permettrai de relancer les débats à "ma facon" très prochainement. A bientot.,


                  • E-fred E-fred 24 avril 2008 08:47

                    Article ayant un certain point de vue, pas le mien, mais c’est ce qui fait la richesse d’ Agoravox et son interêt , vu le peu d’article "engagé" dans la presse quotidienne.

                    Les commentaires sont tous de grandes qualité, pourvu que celà dure. 

                    La souffrance de la fille handicapée ? La souffrance de parents confrontés au handicap de leur enfant ?Les structures adaptées pour les handicapés "lourds" ? Peut-on tuer par amour ? La juriceprudence de l’acquitement ? Infanticide -euthanasie-eugénisme ?

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