Lorsqu’on
se promène sur le sommet du Mont Beuvray en ce début d’automne, que le
mercure peine à dépasser le zéro même en journée, on comprend mieux
pourquoi Bibracte fut, à partir de 20 avant J.-C. délaissée par ses
habitants, lui préférant Autun alors que les Éduens y avaient pourtant
fondé leur capitale un siècle plus tôt (le journal de Saône-et-Loire, édition du 26 octobre).
Cela me rappelle une remarque de Vincent Guichard, directeur du site : si l’on se réfère aux conditions topographiques et climatiques... l’installation sur cette montagne défie apparemment toute logique......pour une agglomération qui se veut urbaine (revue Gallia 55, 1-140, p. 9).
Quel contraste avec le Mont-Saint-Vincent, étonnante position forte au centre de la très riche Bourgogne du sud, ancienne ville murée dont la caractéristique climatique très appréciée des habitants est qu’on y jouit d’un climat doux, même en hiver. Car Mont-Saint-Vincent, c’est là où je situe, depuis plus de 30 ans, le véritable emplacement de la ville gauloise et, en aucun cas dans les forêts du mont Beuvray. Jamais, aucune ville antique n’a eu autant de documents pour la localiser d’une façon précise ; les Commentaires de Jules César à condition de bien les traduire et de bien les interpréter ; les discours du rhéteur Eumène qui la décrit mais en lui donnant le nom d’Augustodunum qu’elle partage avec Autun ; l’affrontement entre les rois burgondes et francs signalé entre autres par le trésor de Gourdon caché sous une simple tuile, la chanson des Nibelungen, et j’en passe.
J’aurais aimé expliquer la chanson des Nibelungen, chant par chant, depuis le Mont-Saint-Vincent. J’aurais aimé me consacrer à cette tâche plutôt que de perdre mon temps à essayer de convaincre des concitoyens archéologues à la tête de bois qui ne veulent rien entendre sur le véritable emplacement de l’antique Bibracte. A une époque charnière de notre évolution où le débat se brouille sur le sujet de notre identité nationale et européenne, comment expliquer cet acharnement archéologique à vouloir situer les origines de notre histoire sur le site déshérité qu’est le mont Beuvray ; un mont Beuvray qui n’est, en réalité, que le site stratégique de Gorgobina qu’occupèrent successivement les guerriers germains d’Arioviste puis boïens ? Tout cela, je l’ai expliqué en long et en large dans mes ouvrages et mes articles, sans beaucoup de succès il est vrai.
En 732, Charles Martel, prince de Neustrie et d’Austrasie, remporte sur les Sarrazins sa célèbre victoire de Poitiers. Childebrand, son frère, devient comte d’Augustodunum. Son fils, Nibelung, charge l’abbaye de Fleury d’écrire “les gestes des Francs”. (Chronique de Frédégaire, citation de G. Bulliot dans "L’abbaye de Saint-Martin d’Autun" pages 93 et 94). Augustodunum ? c’est-à-dire Mont-Saint-Vincent/Bibracte.
Une génération après Charles Martel, le manuscrit du comte d’Augustodunum/Mont-Saint-Vincent serait donc, et de loin, le plus ancien de tous les manuscrits qui ont suivi, car cette geste des Francs dont parle Frédégaire, il n’y a pas à hésiter, c’est bien la chanson des Nibelungen. Le nom que Childebrand a donné à son fils en est la preuve la plus éclatante.
L’affaire est d’importance quand on sait que cette histoire, mainte fois reprise, sera pour les peuples germaniques ce que l’épopée d’Homère fut pour le monde grec.
Comment de ne pas voir les étonnantes concordances entre ces merveilleux chants épiques et l’histoire tragiquement entremêlée des Burgondes et des Francs et cela, même s’ils ne nous sont parvenus qu’au travers de réécritures ?
Lorsque Siegfried (Sigebert) vainquit le nain Alberich, lui et ses guerriers s’emparèrent de trésors fabuleux et aussitôt, ils prirent le nom de Nibelungen. A la mort de Siegfried, le trésor échut aux Burgondes du Mont-St-Vincent, et ils reprirent ce nom fameux qui signifie : “fils du brouillard”.
Gunther (Gontran) régnait sur les Burgondes (à Mont-Saint-Vincent et Chalon-sur-Saône) et Brunehild (Brunehaut) était devenue sa femme après avoir connu l’amour de Siegfried, car Siegfried l’avait trahie pour épouser Kriemhield (Frédégonde). Et voilà que Brunehild fit assassiner Siegfried. Pour venger son époux, Kriemhield appela le roi Etzel (Attila).
Et voilà que les Burgondes arrêtèrent Attila aux champs catalauniques (est-ce vers Châlons-en-Champagne ou vers Chalon-sur-Saône, à Champforgeuil, campus fereoli, ce qui serait beaucoup plus logique ?). Mais voilà que la terrible Kriemhield attira Gunther et les Burgondes dans un piège meurtrier où, après un combat sans merci contre les Huns, ils trouvèrent tous la mort.
Le dernier Burgonde s’appelait Hagen. C’est lui qui avait tué Siegfried. Kriemhield lui trancha la tête d’un seul coup de son épée.
Braves chevaliers, gentes dames, sachez que le fidèle vassal Hagen, avant d’aller à la mort, a caché le formidable trésor des Nibelungen… dans les eaux tumultueuses du Rhin (?)… dans les eaux tranquilles de l’Arar (?)… ou dans la petite rivière voisine du Rhein (?).
Oyez, braves chevaliers, oyez, gentes dames du chastel du Mont-St-Vincent, je suis le pauvre trouvère. Je marche dans le brouillard et sous la pluie, et je chante. Je chante dans la brume qui flotte sur la Saône, sur la montagne haute, à l’ombre du château mort, au milieu des oiseaux de proie défunts, sentinelles avancées d’un autre âge. Je chante pour les âmes de tous ceux qui ont vécu ici...
Sur cet éperon rocheux à l’histoire de légende, dans leurs grottes souterraines, les nains d’Alberich garderaient-ils encore une partie du fantastique trésor des Nibelungen ? Ils s’appelaient les Nibelungen, les fils du brouillard... à Mont-Saint-Vincent, l’antique Bibracte.