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Accueil du site > Tribune Libre > Faut-il lire Hitler ?

Faut-il lire Hitler ?

Pourquoi reprendre "Mein Kampf" aujourd’hui ? D’abord parce que je ne l’ai jamais lu en entier, bien qu’il ait figuré dans la bibliographie que tout aspirant à Science Po, en année préparatoire, était censé avoir lu au début des années 1970.

Ensuite parce qu’Arte a diffusé le documentaire d’Antoine Vitkine mardi 6 mai – et que Le Monde 2 en fait tout un article (3 mai, p.16). Enfin parce que notre temps, bien qu’en train de célébrer Mai-68 et ses 40 bougies, revient de plus en plus aux vieilles idées pétainistes. La cause en est le vieillissement de la population, certes, mais aussi la crainte de l’avenir mondialisé, entre capitalisme financier et terrorisme islamique. Le capitalisme dans sa version ‘ultra’libérale américaine semble d’autant plus incontrôlable que l’ignorance française à son égard est abyssale, en raison de vieux préjugés cathos comme d’un enseignement marxiste sans faille depuis deux générations. Quant à l’islamisme, ce radicalisme que la majorité des Musulmans est loin de partager, il ramène trois siècles en arrière, à l’époque où Voltaire terminait sa correspondance par « écr. l’inf. » - écrasez l’infâme – mot de combat contre tout obscurantisme.

hitler-mein_kampf_nel-1934.1210062287.jpgHitler peut être lu dans la version 1934 des Nouvelles Editions latines, reprise en 1973. On peut aussi le trouver sur internet, à vous de chercher. Les deux volumes allemands de l’édition 1933 sont traduits en un seul, de 686 pages. Cette édition française fut « interdite » par Hitler lui-même, tant il disait clairement ce qu’il pensait de tout le monde et ce qu’il voulait leur faire. C’est assez indigeste, mots simples, mais style pensant. J’en retiens quatre thèmes, dont un seul présente encore un intérêt autre qu’historique de nos jours :

1. Les considérations politiques d’époque ont vieilli et s’étalent verbeusement.

2. Les délires racistes sur le Juif ne passent plus. Cette hantise paranoïaque servant de bouc émissaire à tous les maux de l’Allemagne n’est pas sensée. Il faut cependant la connaître parce que certains pays arabes d’aujourd’hui la reprennent telle quelle, complaisamment. Ils n’inventent rien : ils répètent. La phobie sexuelle d’Hitler le poussait à « nettoyer », éradiquer, « dératiser ». Quand on fait des humains des bacilles, l’extermination par le feu et la chimie industrielle n’est qu’un second pas qui coûte peu.

3. Les éléments d’autobiographie, bien que choisis et magnifiés, sont intéressants et vivants, mais servent surtout aux historiens pour comprendre le personnage.

4. Restent les chapitres qui concernent la propagande politique. Là, c’est du grand art. Hitler était en avance sur son temps : la nécessité de la foi politique, l’art de la parole plutôt que de l’écrit, la tenue des réunions avec organisation de service d’ordre, l’usage de la force pour impressionner et s’affirmer, le marketing de « créer l’événement », le sens de l’image, affiche et cinéma – qu’a-t-on réussi de mieux depuis ? Mai-68 n’a-t-il pas efficacement repris ces vieilles recettes ? Elles ne sont pas hitlériennes, elles appartiennent à la modernité des médias : image et son, mise en transe et émotion, sentiment océanique d’appartenir, manipulation des mots, choc médiatique pour devenir quelque chose, et ainsi de suite…

Cela ne fait guère qu’une soixantaine de pages sur l’ensemble, à peine 10 % du livre. Mais, pour cela seul, Mein Kampf vaut d’être encore lu par les gens raisonnables. Tout aspirant politicien devrait le faire, en parallèle avec le Que faire ? de Lénine et les écrits de Machiavel et de Mazarin. Est-il toujours dans la bibliographie conseillée aux étudiants de Science Po ? Pour le reste, Mein Kampf est aussi passé qu’un papier peint jauni jamais changé depuis l’époque kitsch.


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19 réactions à cet article    


  • gecko gecko 7 mai 2008 11:09

    Bon article a mettre en parallèle avec celui de Mr Dugué


    • Zalka Zalka 7 mai 2008 11:21

      "Mais, pour cela seul, ‘Mein Kampf’ vaut d’être encore lu par les gens raisonnables."

      C’est là où cela coince ? Comment reconnait-on une personne raisonable d’une qui ne l’est pas ?


      • geko 7 mai 2008 12:03

        Tu as raison Zalka ! Ne devrait on proposer "mon combat" en analyse au cours de l’éducation de chacun afin d’en démontrer la pensée putride plutôt que de proposer l’adoption d’enfants victimes de la shoa ?


      • rocla (haddock) rocla (haddock) 7 mai 2008 11:53

        si on mettait une étoile de couleur aux gens raisonnables Zalka , qu’ en penses-tu ?


        • Gazi BORAT 7 mai 2008 13:10

          @ Rocla

          Oui mais quelle couleur ?

          gAZi bORAt


        • Zalka Zalka 7 mai 2008 14:04

          Pourquoi faire ? On ne les reconnait pas à des traits de visages caractéristiques en fin de compte ?


        • Gazi BORAT 7 mai 2008 18:37

          @ ZALKA

          Oui, certainement.. Il suffirait pour cela de réhabiliter l’oeuvre de Pr Bertillon :

          http://www.nlm.nih.gov/visibleproofs/media/detailed/iii_c_138.jpg

          gAZi bORat


        • faxtronic faxtronic 7 mai 2008 13:23

          Moi aussi j’avais commencé a le lire, car il est dans la bibliotheque de mes parents. C’est chiant, aussi chiant que les Pensées de Pascal ou la Coran, que j’ai voulu lire aussi.

           


          • La Taverne des Poètes 7 mai 2008 14:20

            Et faut-il rire de Hitler ? Chaplin, lui, pensait que oui ! Dommage qu’il était le seul...

             


            • La Taverne des Poètes 7 mai 2008 14:23

              Car il eût fallu que le monde entier rie à ses dépens. Et alors, une crise de nerfs lui aurait été fatale.

               


            • jetudie jetudie 7 mai 2008 17:08

              @ l’auteur :

              Vous dites : Les délires racistes sur le Juif ne passent plus. Cette hantise paranoïaque servant de bouc émissaire à tous les maux de l’Allemagne n’est pas sensée. Il faut cependant la connaître parce que certains pays arabes d’aujourd’hui la reprennent telle quelle, complaisamment. Ils n’inventent rien : ils répètent. La phobie sexuelle d’Hitler le poussait à « nettoyer », éradiquer, « dératiser ». Quand on fait des humains des bacilles, l’extermination par le feu et la chimie industrielle n’est qu’un second pas qui coûte peu.

              Vous êtes vous intéressé aux rapports qui unissaient l’Amérique et l’Allemagne avant 1916 et surtout vous êtes vous vraiment renseigné sur ce qui s’est passé durant la période 1916-1930 ? Si je vous dis Balfour, ça vous rafraichira peut être la mémoire....Si je vous dis qu’Auschwitz faisait partie du complexe IG -Farben, filiale de Standard Oil Company, empire de Rockefeller.....et moults détails et anecdotes historiques qui viennent jeter un pavé dans la mare propagandiste chère à la bien-pensance....

              Ne faites pas de jugements à l’emporte-pièce....Hitler avait peut être des idées controversées mais ne le faites pas passer pour un fou.....ou dans ce cas dites autant de mal vis à vis des Etats-Unis mais vous ne le ferez pas , bien sûr (votre attitude est prévisible de "gerbitude")

              Comme beaucoup d’autres le font sur ce site, vous affirmez avec culot et arrogance votre inculture crasse digne d’un conditionnement d’un chien de pavlov prêt à saliver lorsqu’on lui tend la croix gammée....

              Y’en a marre d’entendre toujours cette même soupe relayée par tous les médias......alors en plus si vous vous y mettez, je ne vois pas vraiment pas ce que vous apportez de plus dans une construction honnête et intellectuelle d’une période qui est bien plus complexe que cela et qui comporte des enjeux stratégiques, economiques et politiques qui vont bien au-delà d’un délire de "phobie sexuelle humain"....(ne soyez pas si naïf !)


              • katalizeur 8 mai 2008 15:33

                @ jetudie

                bravo, encore bravo et merci

                je n’ai pas votre talent pour repondre a l’auteur (croc niqueur )

                tres critique vis a vis d’Hitler mais il distille lui meme la meme pensée ,elle etais qualifiée de fasciste elle renait sous sa plume neocons.


              • Le péripate Le péripate 7 mai 2008 23:24

                On fera ce que l’on voudra. Du moment que on n’est pas obligé...


                • moebius 7 mai 2008 23:30

                  -gestion des masses- Mein kampf, s’inscrit dans cette perspective ; celle de remobiliser les masses dans la pause de l’entre-deux guerre dans le but d’intensifier et de tester l’efficacité de la masse. C’est la finalité de tout les totalitarismes d’alors. Que la propagande ou la moderne communication instrumentalise les affects du corps social pour obtenir l’adhèsion de la masse a ce projet de guerre totale est secondaire par rapport a cette montée aux extrémes du conflit qui ne peut s’achever que par une auto- destruction sacrificielle. Plus que de disséquer l’oeuvre littéraire du dictateur somme toute d’une affligeante "banalité" et plutot "fleur bleu". Il serait oh ! combien plus interessant de s’interroger sur ce désir terrible de la masse à la passivité. La masse, ce collectif déshumanisé et décivilisé qui a été ou est peut etre encore toujours aussi prompt au sacrifice et à la violence du sacré


                  • ernst 8 mai 2008 01:58

                    On trouvera dans S.Sweig (qu’on ne peut en aucun cas taxer d’antisémitisme primaire ni de manie purificatrice sexuelle ) les ferments de la conjoncture anti-juive de l’après guerre 1918.

                    Il raconte dans ses Mémoires : À Vienne, les seuls hommes restant dans les rues en 1916 étaient juifs. Leur religion leur interdisant de tuer.C’est ainsi que la famille Zweig se rendit propriétaire du chateau des Capucines. Très belle demeure achetée une bouchée de pain à une veuve de guerre.

                    Compte rendu de Stefan Zweig qui devint pour un temps assez court correspondant de guerre sur le front de l’Est. Il fait la relation d’un train de blessés revenant vers la Pologne dans des fourgons à bestiaux, entassés et sans soins depuis des jours. Les brancardiers Polonais, tous juifs pour la raison que les goyim étaient au front, louaient leurs brancards à prix d’or. Sans aucune dérogation, quel que soit l’état du blessé.Zweig en fut horrifié.

                    À la fin de la guerre, dès 1917, on mourrait de faim dans les rues et il y eut des cas de dépeçage à vif des chevaux de poste.

                    On peut imaginer, sans pour autant l’excuser, que ces faits colportés, déformés aient pu cristalliser une rancune souterraine ciblée antisémite. Sans compter les Warburg qui, en 1915 envoyaient une fortune de 20 millions de DM-or pour financer la révolution du Parti Bolchevik.

                    De petits faits qui avaient de quoi influencer un esprit furibond de nature comme celui de A.H.Qui disait tout haut ce que la rumeur colportait avant lui.Sans compter que l’idée fasciste n’était pas de lui mais de Mussolini et qu’elle avait déjà dix ans d’âge.

                    Laisson à Hitler ce qui fut son talent majeur : la perfection des uniformes de l’armée qu’il dessina. Cuir, bottes, jodhpurs, brandebourgs, ceinturons, svastikas etc... super-chic !...Les américains de Bastogne avec leurs lourdes capotes de laines hydrophiles bavaient d’envie devant les doudounes blanches imperméables de l’ennemi mieux vêtu.Mais fallait-il pour autant confier le pouvoir absolu à un couturier, fut-il de génie ?...

                    Que cela nous serve de leçon. Nous avons bien élu un camelot de génie qui nous vend la casserole sans fond, deux pour le prix d’une ?...


                    • Marc P 8 mai 2008 10:22

                      Bonjour, voici ce que j’ai mis en commentaire à l’article de ce jour à B Dugué :

                      (il est dommage de ne pas mentionner certains inspirateurs d’A Hitler qui ne manque quant à lui toujours pas d’émules...)

                      pour une lecture réservée ou et "encadrée"...
                      par Marc P (IP:xxx.x31.224.225) le 7 mai 2008 à 11H34

                       
                      Bonjour,

                      Bernard, n’oublions pas, je sais que vous ne les ignorez pas les probables inspirateurs Français et Britanniques, entre autres sans doute, de A. Hitler et Hesse :

                      Gobineau et Chamberlain...

                      Et si on accepte les témoignages de C. RIBBE, un certain Napoléon fut son modèle sans doute jusque dans le sméthodes d’exterminations racistes...

                      http://www.afcam.org/Doc_illus...

                      "Dans son Essai sur l’inégalité des races humaines (1853 - 1855), Joseph-Arthur de Gobineau explique parla dégénérescence des caractères dominants que les multiples croisements tendent à diluer, et distingue trois races principales : blanche (dominée parles Germains), noire et jaune. Houston Stewart Chamberlain introduit une dimension psychologique au racisme : dans Les fondements du XIXe siècle (1899), il préconise le croisement limité aux familles voisines de la race (principe endogénique) dans une perspective d’enrichissement et d’ennoblissement de celle-là."

                      Sinon je suis assez pour une diffusion limitée aux experts de Mein Kampf car pour beaucoup la lecture doit être acciompagnée ou encadrée...

                      Il suffit de quelques esprits malveillants... on le sait trop...

                      Cordialement.

                      Marc P

                       


                      • Dimetrodon Dimetrodon 9 mai 2008 18:23

                        Je crois que le titre de l’article a été mal choisi.

                        Ne fallait-il pas lire : « Faut-il lire AGoraVox ? »

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Argoul

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