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Accueil du site > Tribune Libre > Hommage à Pierre Pflimlin

Hommage à Pierre Pflimlin

Pierre Pflimlin aurait 100 ans... Ancien ministre, ancien président du Conseil, c’est lui qui a passé le relais au Général de Gaulle en mai 1958 et fut donc l’homme charnière de la IVe à la Ve Republique. Il fut aussi maire de Strasbourg de 1959 à 1983, président de l’Assemblée du Conseil de l’Europe de 1963 à 1966, président du Parlement européen de 1984 à 1947.Un « eurodynamique » qui savait allier réalisme et idéalisme. Un homme d’Etat hors pair, trop méconnu.

Une vie, une œuvre, des pages d’Histoire.... Ce 5 février, Pierre Pflimlin aurait cent ans ! Mort avec le nouveau millénaire, en l’an 2000, cet homme d’Etat, à la fois réaliste et visionnaire, pragmatique et idéaliste, aura profondément marqué la deuxième moitié du XXe siècle, à Strasbourg, en Alsace, en France et en Europe. Son sens de l’action au service de l’intérêt général, doit rester une source d’inspiration et un modèle en cette période de crise de la et Du politique. Et les messages qu’il a laissés à travers des livres, des articles, des conférences, des discours restent pleinement d’actualité.

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ITINERAIRES D’UN EUROPEEN

J’ai eu la chance, le bonheur et l’honneur, avec mon ami Jean-Louis English (qui lui aussi nous manque cruellement), de converser avec ce personnage hors du commun durant des heures et des heures, des jours et des jours, lors d’interviewes menées sur plusieurs années : déjeuners, soirées, entretiens autour d’un magnétophone ou devant des caméras...

Résultats : une série exceptionnelle d’articles dans la rubrique « L’invité de la semaine » que Jean-Louis et moi avions créée dans les Dernières Nouvelles d’Alsace (du 15 au 29 janvier 1985), un livre de près de 400 pages publié en novembre 1989 aux éditions de la Nuée Bleue (« Pierre Pflimlin, Itinéraires d’un Européen »), trois documentaires de 52 minutes réalisés par Bernard Kurt et diffusés sur France 3.

PFLIMLIN , PHILOSOPHE PERSONNALISTE

Résultats aussi et surtout peut-être : un enrichissement personnel inquantifiable. Leçons de vie, leçons d’Histoire, leçons de politique. Leçons de morale et d’éthique, de philosophie même. De cette philosophie qui fut le premier amour de sa vie : « J’aurais voulu être professeur de philosophie, mais mon père m’a dirigé vers le droit ». Leçons d’exigence, de rigueur, de respect. « La politique est une morale » (...) « Le respect est un impératif. Respect des soi et des autres. Des idées, des croyances et des aspirations des autres. Y compris de ses adversaires. Respect des faits, aussi, donc des réalités. Respect de la vie... »

Dans ces entretiens, Pierre Pflimlin nous est apparu, souvent, bien différent de l’image qu’il a pu donner dans l’exercice de ses diverses et multiples fonctions, locales, régionales, nationales et européennes.

"ON NE FAIT JAMAIS ASSEZ"

Le « patron » dit « cassant », « autoritaire », volontiers pris de vraies et de fausses colères, était d’abord un homme inquiet, soucieux de donner du sens à la vie, jamais satisfait : « On ne fait jamais assez »...

L’orateur hors pair qui savait si bien donner chair au verbe et déchaîner l’enthousiasme de ses auditeurs était le plus souvent dans l’écoute, dans la réflexion, dans l’introspection. Une dose de timidité (mais oui !), énormément de pudeur, une grande honnêteté intellectuelle. Le souci de ne pas altérer le trésor des trésors : l’intimité de la mémoire et de la conscience. L’art de savoir que le silence est aussi, parfois, de l’éloquence. Et l’obsession de tous ceux qui, en fait, sont d’abord des solitaires : le culte du « jardin secret ».

CETTE PAROLE QUI FAIT L’HOMME

« Tout n’est pas à dire, tout ne doit pas être dit... Ce n’est pas que j’aie des choses à cacher, des secrets à préserver. Mais notre époque pâtit de l’exhibitionnisme ambiant, de l’impudeur érigée en mode, du verbiage qui remplace la Parole...Dire c’est faire, c’est Etre. J’ai toujours essayé de faire ce que je dis et de ne dire que je que je fais ou peut faire... C’est pour cela que je n’ai jamais aimé les porteurs de micros qui attendent une, « petite phrase » ou un « bon mot » qui fera office de débat politique ou d’actualité... Il ne faut pas dévaloriser la parole. C’est la parole qui fait l’Homme ». Que dirait-il aujourd’hui devant le déluge du verbiage médiatico-politique ?

PFLIMLIN, L’EPICURIEN

Le juriste devenu vite économiste d’apparence austère, le travailleur infatigable et sérieux, les responsable à l’emploi du temps surchargé avait ses béquilles secrètes, : l’ironie, d’abord (y compris sur lui-même), (une « vraie vitamine, l’ironie ! »), ses souvenirs de son « époque Montparnasse » (peinture, poésie, musique, théâtre..), son épicurisme (l’amitié, l’amour, les bonnes tables, les cigares, les promenades à pieds...) :

« La vie est faite de mille et une choses. Nous passons trop souvent à côté de ces joies, de ces plaisirs, de ces petits bonheurs.... Tout a du sens. Tout donne du sens. Il suffit de vivre éveillé pour souvent s’émerveiller. Ce monde est si chargé de malheurs, si porteur de tragique ! Ne négligeons pas les petits plaisirs simples de la vie quotidienne.Et, noublions jamais : l’existence n’est qu’un passage.Une vie réussie, c’est une vie pleine" »

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Robert Schuman

Le catholique pratiquant aux allures de curé laïc, cet homme de Foi si imaginable en moine (comme son ami Robert Schuman) était d’abord un humaniste, un personnaliste... « Je dirais même spiritualiste, si cela n’était pas pris pour de la prétention ».

LES FORCES DE L’ESPRIT

« C’est "L’Esprit" qui nous évite les pièges des intégrismes, des intolérances, des mentalités de « Croisés ». C’est "l’Esprit" qui nous pousse à mieux connaître et mieux comprendre les autres. Je suis très heureux que Strasbourg ait été l’un des centres les plus fertiles de l’œcuménisme, du dialogue inter-religieux, des échanges entre croyants et non-croyants, des limages de cervelles entre civilisations. Il faut faire encore plus et mieux. Il faudra faire de plus en plus et de mieux en mieux »

C’est « l’ Esprit » aussi ce qui commande à l’Homme, même si la perfection n’est pas de ce monde, de tenter de faire triompher l’humain contre l’inhumain. De vaincre "la bête" qui est dans cet " humain, trop humain"...

« Mon attachement aux dDroits de l’Homme n’est pas que formel. Je suis profondément hostile à toutes les formes de racisme, de rejet de l’Autre, de discriminations des autres. Je suis viscéralement un non-violent. C’est pour cela que je suis depuis longtemps contre la peine de mort. C’est pour cela que j’ai fait très tôt le choix de la « décolonisation ». C’est pour cela que je ne suis pas fier que mon pays soit l’un des plus grands producteurs et exportateurs d’armements... C’est pour cela que je suis contre toute forme de guerre dite préventive. Tout cela ne veut évidemment pas dire que je sois un naïf. « Non-violent » mais non « pacifiste » : Toute société, tout Etat doit avoir les moyens de se défendre...J’ai trop souffert, j’ai eu trop honte, pendant la débâcle pour ne pas en être pleinement conscient »

medium_maritain.jpgJacques Maritain

LE PRINCIPE D’HUMANITE

Le « principe d’humanité » qui met l’Homme au cœur de toute action, qui fait de l’amélioration de la condition humaine la finalité de toute action, Pierre Pflimlin a grandi avec. Et l’a cultivé.

« J’ai toujours essayé de ne jamais confondre la fin et les moyens. En politique, il importe de définir des buts et de ses donner les moyens de la atteindre. Tout doit aller de conserve : le pourquoi, le en vue de quoi, le comment et au prix de quoi. J’ai très vite compris que le droit était un outil qui ne suffisait pas à assurer la justice. Si je me suis très vite rendu compte de l’importance de l’économie, ce n’est pas par goût, mais par réalisme, ce n’est par économisme, mais par pragmatisme. L’économie est un moyen : le fin c’est le bien-être humain, le progrès partagé, le plus de justice sociale possible. La politique aussi n’est pas une fin en soi : elle est un moyen à utiliser au service de la "Cité" »

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Emmanuel Mounier

Influences de ses lectures, de ses rencontres et de ses réflexions philosophiques. Influences de « l’humanisme rhénan ». Influences du frère Médard, des conférences du FEC, à Strasbourg, « avant même la deuxième guerre mondiale », du christianisme social. Emmanuel Mounier, Jacques Maritain, Marc Sangnier...

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Frère Medard

RESPECT DE LA PERSONNE ET SENS DE LA COLLECTIVITE

« L’un de mes soucis permanents, depuis longtemps, est de concilier en tout et pour tout, les libertés de la Personne et la justice sociale, la Liberté et l’Egalité, de faire la synthèse entre le respect de la Personne et le sens de la Communauté, sens large du terme. Une synthèse dialectiquement aisée mais extrêmement problématique dans la réalité »

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Marc Sangnier

Ce « principe d’Humanité », si malmené, si mal respecté, si oublié, faisait de ce « libéral » un adversaire de l’hyper-capitalisme, de « l’hyper-liberalisme », du « laisser- faire et laisser-passer n’importe quoi n’importe comment ».

Ce « principe d’humanité » lui permettait de ne pas confondre (entre autre)« autorité et « autoritarisme », « patriotisme » et « nationalisme », « régionalisme » et « micronationalisme »...

L’EUROPE ? LA SOUVERAINETE DES VALEURS

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C’est ce « principe d’Humanité » aussi qui a fondé ses engagements européens.

Parler de « Pflimlin, l’Européen », c’est un pléonasme... « Je suis Européen, parce qu’alsacien et parce que Français... Je suis Européen parce que je suis très attaché à la vraie souveraineté. Chaque individu, chaque nation aspire à la pleine souveraineté, c’est-à-dire la maîtrise de son destin. Or, aujourd’hui, la souveraineté individuelle et collective des Européens passe par la construction d’une Europe Unie ! Comment peut-on être « souverainistes » et « anti-européens » ? Mais l’Europe n’est pas qu’un marché : c’est une Communauté de valeurs »

La pensée de Pierre PFLIMLIN devrait éclairer davantage les débats politiques et européens d’aujourd’hui...

Daniel RIOT

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Palias des droits de l’homme, Strasbourg

PIERRE PLIMLIN, VISIONNAIRE... Ce texte date du 4 Avril...1958

"La paix véritable n’est pas seulement, nous le savons bien, le silence des armes. Elle demeure bien fragile tant qu’elle repose seulement sur des pactes ou sur un équilibre de forces que le progrès foudroyant des techniques de destruction peut remettre en cause à tout instant. Nous vivons au temps de la guerre psychologique. Il devient de plus en plus clair que la partie décisive ne se livre plus sur les champs de bataille, mais dans les esprits et dans les cœurs des hommes. C’est le déchaînement des passions collectives qui en­fièvrent actuellement des centaines de millions d’êtres humains, qui fait peser sur les peuples libres la plus terrible des menaces.

"Il devient de plus en plus évident que le péril ne pourra être conjuré que si nous sommes capables de démontrer que les valeurs dont nous nous réclamons- la liberté, la démocratie, le respect de la personne humaine - ne sont pas de simples formules, mais des forces capables de répondre à la soif de justice et de bonheur qui soulève les multitudes déshéritées. Il est grand temps que l’Occident mobilise ses forces spirituelles sans lesquelles il sera impossible de vaincre les forces qui menacent la paix, je veux dire le racisme, le nationalisme et la lutte des classes.

"Dieu veuille entendre les prières qui, dans ce temple et dans tous les temples du monde, s’élèveront pour la sauvegarde de la paix, la paix véritable, récompense de la justice, fruit d’une fraternité unissant par les sommets les hommes arrachés à leur médiocrité et à leur égoïsme par les plus hautes exigences de l’esprit.

(Discours prononcé à l’occasion de la Consécration de la Synagogue de la paix de Strasbourg)

VOIR AUSSI L’ARTICLE DE PAUL COLLOWALD SUR RELATIO >>>>>>>>>

A LIRE EGALEMENT : RENDEZ-VOUS AVEC L’HISTOIRE >>>>>>

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17 réactions à cet article    


  • Rocla (---.---.237.207) 6 février 2007 13:27

    Merci monsieur Riot d’ avoir fait mieux connaitre Pierre Pflimlin, d’r Pflim’la comme on disait en Alsace . J ’ avais une douzaine d’ années au moment du relais à Charles De Gaulle . Impressionnant d’ apprendre presque 50 ans après un peu de la vie cet homme illustre . Je continuerai de lire tous vos articles .

    Bien à vous .

    Rocla


    • (---.---.99.134) 6 février 2007 14:22

      La notion d’homme illustre dépend du système économique et social.


    • Rocla (---.---.197.99) 6 février 2007 17:50

      Illustre dans mon petit dico : célèbre , renommé .

      Rocla


    • (---.---.99.134) 6 février 2007 14:20

      Comme bien d’autres, Pflimlin a été un ministre de la France coloniale. Il a également été l’un des fondateurs de l’euronationalisme et de l’euro-impérialisme de l’après-guerre. Bayrou est un continuateur de sa politique.

      http://www.homme-politique.com/biopflimlin.php

      05-02-1907 : Naissance de Pierre Pflimlin à Roubaix

      xx-xx-1933 : Avocat au barreau de Strasbourg après un diplôme en droit et en sciences politiques

      xx-xx-1941 : Travaille au Secrétariat général de la jeunesse à Vichy

      xx-xx-1941 : Juge d’instruction à Thonon-les-Bains jusqu’en 1944

      xx-xx-1944 : Procureur de la République de Metz

      xx-xx-1945 : Membre du Mouvement Républicain Populaire (MRP) dès sa création

      xx-xx-1945 : Elu Député de l’Assemblée Constituante

      xx-xx-1946 : Administrateur du Port autonome de Strasbourg

      xx-xx-1946 : Elu Député de l’Assemblée Constituante

      xx-xx-1946 : Elu Député du Bas-Rhin de l’Assemblée Nationale jusqu’en 1971

      06-02-1946 : Sous-secrétaire d’État à la Santé publique et la Population

      24-06-1946 : Sous-secrétaire d’Etat à l’Economie Nationale

      24-11-1947 : Ministre de l’Agriculture jusqu’au 02 décembre 1949

      03-07-1950 : Ministre de l’Agriculture

      xx-xx-1950 : Président du Comité d’études et d’action pour l’économie alsacienne

      11-08-1951 : Ministre du Commerce et des Relations économiques extérieures

      xx-xx-1951 : Elu Conseiller général du Bas-Rhin jusqu’en 1976. Président du Conseil Général du Bas-Rhin jusqu’en 1976

      20-01-1952 : Ministre d’Etat chargé du Conseil de l’Europe

      08-03-1952 : Ministre de la France d’Outre-Mer jusqu’au 08 Janvier 1953

      23-02-1955 : Ministre des Finances et des Affaires économiques jusqu’au 01 Février 1956

      xx-xx-1956 : Président du MRP jusqu’en 1959

      06-11-1957 : Ministre des Finances, des Affaires économiques et du Plan

      14-05-1958 : Président du Conseil

      28-05-1958 : Démissionne de ses fonctions face à la menace de guerre civile en Algérie

      01-06-1958 : Ministre d’Etat jusqu’au 08 Janvier 1959

      xx-xx-1959 : Président de la Société d’aménagement et d’équipement de la région de Strasbourg

      xx-xx-1959 : Maire de Strasbourg jusqu’en 1983

      xx-xx-1959 : Représentant de la France à l’Assemblée du Conseil de l’Europe et du Parlement européen jusqu’en 1967

      14-04-1962 : Ministre d’Etat chargé de la coopération jusqu’au 16 Mai

      xx-xx-1963 : Président de l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe jusqu’en 1966

      xx-xx-1965 : Président de la Compagnie générale pour la navigation sur le Rhin

      xx-xx-1965 : Président de la Commission de développement économique régional d’Alsace

      xx-xx-1967 : Président du conseil de la Communauté urbaine de Strasbourg jusqu’en 1983

      xx-xx-1970 : Président du Port autonome de Strasbourg

      xx-xx-1970 : Président d’Honneur de la Commission de développement économique régional d’Alsace

      xx-xx-1971 : Président du Consortium international de la navigation rhénane

      xx-xx-1979 : Député européen jusqu’en 1989

      24-07-1984 : Président du Parlement Européen jusqu’au 20 Janvier 1987. Il décide de se retirer de la vie politique

      xx-xx-1991 : Publie les « Mémoires d’un Européen »

      27-06-2000 : Décès à Strasbourg


      • Aeglin (---.---.32.236) 6 février 2007 18:04

        Ministre de la France colonial et alors ? Mitterand l’a ete aussi. Il serait temps d’arreter l’autoflagelation a ce sujet. En ce qui concerne Pierre Pfimlim, j’avoue qu’on le connait fort peu, et ce qu’on nous en dit, c’est qu’il eut la malchance d’etre le dernier president du conseil de la IVeme avant de Gaulle en pleine crise a Alger sans avoir les epaules pour s’en sortir. C’est malheureux et je remercie M.Riot de mieux nous faire connaitre ce personnage qui a joue un role cle a un moment de notre histoire.


      • Daniel RIOT Daniel RIOT 6 février 2007 22:59

        Quelques précisions sur son action politique en France

        L’homme charnière entre deux Républiques Rendez-Vous avec l’Histoire

        Des Rendez-vous avec l’Histoire, Pierre Pflimlin en a eu à plusieurs époques. Et à des niveaux différents. Celui qui vient le premier à l’esprit de ceux qui n’oublient pas que l’Histoire contemporaine est l’une clefs d’une citoyenneté active et effective et d’un compréhension des événements d’aujourd’hui ? C’est évidemment le passage de témoin au général de Gaulle. Changement de locataire à Matignon, changement de régime, changement de République, sur fond de guerre d’Algérie, de menace de putsch militaire et de guerre civile en métropole...

        « A Matignon, j’ai vécu une nuit extraordinairement angoissante, confiait Michel Poniatowski, collaborateur de Pierre Pflimlin, Président du Conseil (Premier ministre dirait-on, aujourd’hui). J’ai été réveillé par des Gardes Républicains qui sur le perron rythmaient leurs pas avec leurs crosses : « Algérie française ! Algérie française ! »...Vous imaginez l’ambiance ! Et l’état de l’Etat ».

        « TROP TARD »

        Constat unanime des observateurs politiques de l’époque : « Pierre Pflimlin a été appelé trop tard à Matignon. En 1956, il aurait pu prendre les affaires en mains et rétablir la situation. En 1958, c’était trop tard » a confié René Rémond. « Il est arrivé au pouvoir à un moment où soit il brisait sa carrière soit il la poursuivait avec quelqu’un autre », a confié Jean Ferniot. Droiture, courage, réalisme, légalisme : « Plongé dans une situation ridicule, Pierre Pflimlin a fait plus que son devoir. Et en est sorti dans la dignité », a résumé Alain Decaux. Le ridicule:le 13 mai. La sortie digne:le 28mai...

        Passage de témoin réussi ! Pierre Pflimlin restera Ministre du Général (jusqu’ en janvier 1959avant d’y revenir en 1962 jusqu’à la rupture sur l’Europe) et il sera l’un des rédacteurs de la Constitution de la V ième République (une Constitution dont il a eu bien des occasions de déplorer les dérives qui se sont additionnées).

        AGRICULTURE ET...RAVITAILLEMENT

        Mais ce passage de témoins n’est pas le seul rendez-vous avec l’Histoire nationale de cet Homme d’Etat hors pair. Le premier se situe dès 1946. Schuman, Président du Conseil, lui propose l’économie. Lui pense (à juste titre) que l’agriculture et la ravitaillement sont la priorité des priorités, l’urgence de toutes les urgences. Trois ans durant, il contribuera à redonner à manger à des Français affamés et à remettre en ordre un outil de production bien endommagé. Une histoire trop oubliée, des mérites trop peu reconnus.

        Comme les qualités qu’il a du déployer lors que ministre des Finances à un moment où les caisses de l’Etat étaient vides... Ou quand il a pris en charge l’Outre-mer avec une lucidité bien rare à l’époque. Eu courage certain face à des troubles annonciateurs de tempêtes plus graves, en Cote d’Ivoire notamment.

        Mais nous n’allons pas ici évoquer tous les postes ministériels (une bonne quinzaine) qu’il a occupés, toutes les réformes lancées, toutes les initiatives prises ...et tous les défis relevés. De ces démissions aussi, « par honnêteté ».Ou des propositions ministérielles refusées, « par fidélité à mes idées » ...

        « Je n’ai jamais recherché à occuper des postes pour le plaisir d’avoir des fonctions ou des honneurs. Ce qui importe, c’est ce que l’on peut faire, ce que l’on doit faire...et ce que l’ont fait. Mais quoi qu’on fasse, on ne fait jamais assez, ni pour sa ville, ni pour sa région, ni pour son pays, ni pour l’Europe »

        Daniel RIOT


      • T.B. T.B. 6 février 2007 20:12

        Un autre portrait, selon Wikipédia, de P. Pflimlin :

        Il fit ses études au lycée de Mulhouse, à l’Institut catholique de Paris et enfin à l’Université de Strasbourg.

        Diplômé en droit et en sciences politiques, il devint avocat en 1933 au barreau de Strasbourg.

        Il travailla brièvement au secrétariat général de la jeunesse, à Vichy, en 1941, puis fut nommé juge d’instruction à Thonon-les-Bains (de 1941 à 1944), et substitut du procureur de la république à Metz (en 1944).

        Il fut membre du MRP dès sa création en 1945 et en occupera la présidence de 1956 à 1959.

        Ses premières fonctions ministérielles furent celles de sous-secrétaire d’État au ministère de la Santé publique et de la Population (en 1946), puis de sous-secrétaire d’État à l’Économie nationale.

        Très souvent ministre durant la Quatrième République, notamment ministre de l’Agriculture dans huit gouvernements entre 1947 et 1951, sans compter des portefeuilles dans une grande partie des gouvernements s’étant succédé jusqu’en 1958 (commerce, l’Europe, la France d’outremer, les finances et les affaires économiques, etc.).

        Il fut l’avant-dernier Président du Conseil de la Quatrième République ; investi par l’Assemblée le 14 mai 1958 à deux heures du matin (par 274 voix contre 129), il n’avait constitutionnellement aucun pouvoir au moment où se déroulaient la veille les événements d’Alger (le 13 mai) et il est donc absurde de lui reprocher son inaction ce jour-là ; le 28 mai suivant, devant la menace de guerre civile, il préféra remettre sa démission.

        Ayant dû céder la place à Charles de Gaulle, il occupa toutefois dans son gouvernement le poste de ministre d’État (1er juin 1958 - 8 janvier 1959).

        Il revint au gouvernement lors de la nomination de Georges Pompidou, comme ministre d’État, ministre de la coopération (15 avril-15 mai 1962), démissionnant prématurément au bout d’un mois avec les autres ministres issus du MRP, en raison de graves désaccords avec le général de Gaulle au sujet de la construction européenne.

        Il passe pour avoir été le premier maire catholique de Strasbourg de 1959 à 1983. En fait il fut, semble-t-il, le premier maire faisant profession de catholicisme. Il y avait eu avant lui Charles Hueber (1929-1935), baptisé catholique mais qui, passé au communisme, encourageait les ouvriers à sortir de l’Église.

        Président du Parlement européen européen de 1984 à 1987, il se retire de la vie politique à la fin de sa présidence.


        • Daniel RIOT Daniel RIOT 6 février 2007 23:03

          Pour ceux qui s’intéressent à l’Europe et à l’Histoire... « Le Grand PAIR de l’EUROPE »

          Je reprends ici intégralement mon éditorial de RELATIO >>>>> Je suis un fanatique de l’unité européenne... Que chaque génération compte des « pères de l’Europe » !... Au corps économique, il faut ajouter une tête politique, un cœur social et une âme culturelle.... Construisons L’Europe de l’Esprit " !<<<<<<

          Question stupide : que dirait aujourd’hui, Pierre Pflimlin de la crise actuelle de Union européenne ? Sa parole nous manque. Sa vision nous manque. Son intelligence nous manque. On sait ce qu’il a dit des crises d’hier. De ces crises nombreuses, multiples et graves qu’il a vécues en spectateur attentif, ou en acteur constructif. « Ferraillons...Continuons... Rien n’est gagné...Tout reste à faire à faire...Chaque génération doit avoir des Pères de l’Europe »

          Des crises ? Il a essayé souvent, parfois en vain, de les éviter. Comme en 1954, quand il n’a pas réussi, dans un entretien de la dernière chance avec Pierre Mendes-France, à sauver la CED, cette communauté européenne de défense « qui était aussi et d’abord un projet de communauté politique ». Comme sous De Gaulle, quand il a sacrifié sa propre carrière politique sur l’autel de la cause européenne : « Il est des ruptures qu’il faut assumer quand l’essentiel est en jeu ». « Volapük », le mot de trop. « Chaise vide », l’erreur de trop. « Enfin, c’était un grand Homme », de Gaulle...

          Des crises ? Pflimlin a contribué à en éteindre quelques unes. Comme celles des années 80 provoquées par l’europhobie et la pingrerie de Maggie Thatcher et par les hésitations de gouvernements déboussolés par l’ère nouvelle ouverte par Gorbatchev, par le duo entre les deux grands par-dessus la tête et dans le dos des Européens.

          Il a été le quatrième Mousquetaire de la sortie de crise et de la relance européenne, avec le trio Kohl, Mitterrand, Delors en une époque où l’euroscepticisme, l’europessimisme et l’europhobie étaient au moins aussi importants qu’aujourd’hui. Ce que l’on oublie trop ! Ce que gomment trop les (faux) nostalgiques d’une Europe à 12 qu’il condamnaient autant qu’ils pestent aujourd’hui contre celle des 27... Mémoires sélectives de l’extrême gauche, de l’extrême droite et de ceux qui se disent « souverainistes » en méconnaissant le vrai sens du mot « souveraineté ».

          C’est du perchoir du Parlement européen de 84 à 87 que Pierre Pflimlin a agi beaucoup et bien : sortie de l’impasse budgétaire, préparation de l’Acte unique(ah ! cette Maggie...), Conseil européen de Milan (où il avait débarqué avec tout le bureau du PE, fait sans précédent !), CIG de Luxembourg, élargissement des compétences du PE, lancement de la politique communautaire,si essentielle, de la recherche (avec la complicité de Michel Poniatowski), prise en compte des questions environnementales, efforts pour accentuer la politique sociale (« essentielle, la dimension sociale ! »), approfondissement de l’entente franco-allemande, activisme diplomatique (avec Reagan, Gorbatchev, le pape, entre autres...) et relance de ... ce qui reste encore à faire : une Union politique, grâce aux travaux du » Club Crocodile » et du rapport Spinelli.

          J’en passe... L’une des Présidences les plus riches de l’histoire du Parlement européen. Deux ans et demi d’activités intenses et de réussites incontestables.

          « J’ai ferraille, ferraillé, oui... Tout cela a abouti à quelques résultats, mais bien en deçà de ce que nous espérions, voulions... Tant reste à faire ! « Pas à pas », avait prévenu Robert Schuman. Avec même des pas en arrière ! L’Europe est une longue patience. L’Europe est une entreprise révolutionnaire qui réclame de l’énergie, de la patience, de la persévérance... Continuer, Continuer, exhortait Monnet après chaque crise ! Car en fait avons-nous le choix ?

          Dans ce monde, c’est pour l’Europe l’unité ou le déclin. Il importe surtout que celles et ceux qui en ont conscience ne mettent jamais leur drapeau européen dans leurs poches. Chaque fois que ma famille politique l’a fait ou le fait, elle a eu tort, elle a tort. L’Europe n’est pas qu’un idéal. Elle constitue un impératif. Or l’Europe reste inexistante sur un plan politique. C’est scandaleux, intolérable et stupide. Elle doit exister notamment au niveau de la défense »

          Sur l’Europe, le discret Pierre Pflimlin était intarissable. Celui que Germain Muller avait affectueusement surnommé « le Grand PAIR de l’Europe » connaissait l’histoire de la construction européenne mieux que quiconque, avait réfléchi plus qu’aucun responsable politique à la culture européenne et savait allier réalisme et VISION.

          Pflimlin vu par André Wenger Ses regrets ? Innombrables... Ses motifs de découragements ? Inexistants...

          « L’Europe, c’est l’entreprise historique la plus fantastique, celle qui est le plus porteuse d’un avenir qui ait du sens. Pas seulement parce que l’unité européenne est une rupture avec un passé de guerres, mais aussi parce que seule l’unité des pays européens, dans le respect de leurs spécificités, de leurs richesses propres, de leurs caractéristiques, peuvent assurer la survie de notre civilisations, de nos valeurs... Rien n’est gagné. Tout reste à faire.

          Que les jeunes reprennent le flambeau ! Il faut des « pères de l’Europe » dans chaque génération pour les générations qui suivent. Que le corps économique et commercial ait une tête politique, un cœur social et une âme culturelle, spirituelle même. C’est l’Europe de l’Esprit qui doit se construire.

          Une Europe ouverte qui unisse les hommes (et ne coalisent pas que les Etats), comme disait Monnet. Qui soit maîtresse de son destin. Qui soit solitaire de ce qu’on appelle le tiers-Monde. Qui agisse pour la paix et le respect des droits de l’Homme dans le monde. J’ai passé ma vie à combattre les fanatismes, mais je suis un fanatique de l’unité européenne »

          CONTINUONS... FERRAILLONS...

          Daniel RIOT


          • La Taverne des Poètes 6 février 2007 23:12

            ça doit pas être triste d’entendre prononcer « Pflimlin » par la technologie readspeaker !


            • Rocla (---.---.197.99) 7 février 2007 09:57

              A moins de quarante ans d’ écart naissent Gandhi , Einstein , Hitler , Pflimlin , Schumann et bien d’ autres

              Un non-violent , un génie , un fou-furieux ,et des hommes de rassemblement .

              Les traces que peuvent laisser les constructions cérébrales ...

              Rocla


              • leauraine (---.---.143.96) 7 février 2007 13:32

                @ l’auteur , En bref c’ést un cumulard que vous encensez là.


                • candide (---.---.220.95) 11 février 2007 22:02

                  D Riot a dit

                  « Je suis un fanatique de l’unité européenne... »

                  ...A Hitler, Staline dans un passé récent également. Mais je ne pense pas qu’eux mêmes aient eu l’audace de se définir comme « Fanatiques ». Il faut vraiment être auréolé de la sacro sainte connerie « Europe » pour tremper dans un déversoir d’immondices pareilles. l’immunité « Europe » semble protéger ses sbires et les absoudre de toute autocritique , mieux de toute analyse ou cartésianisme caractérisant leur fascisme primaire au motif de « l’amitié entre les peuples », de « l’unité entre les nations ». mais l’immunité ne protège pas de la connerie.

                  Le tout étant de savoir in fine quelle raison profonde, quel Noeud gordien ou quel Oedipe non résolu peut amener un individu à devenir un « fanatique » de l’unité européenne, tout autant qu’on puisse être un « fanatique » dans les tribunes de Boulogne, et aimer le football modérément, ou encore sur les gradins du grand stade à Nuremberg en 1934 et s’intéresser de loin à la chose politique !

                  L’aveu consistant ici à montrer le caractère extrême et donc condamnable des Ouiouistes européistes et de leur Imposture devant les instances démocratique et le peuple souverain qu’ils bafouent et qu’ils vomissent à longueur de « prose journalistique ».

                  Le reste appartient aux citoyens dans les Urnes ( c’est de cela dont il est question dans un PAYS démocratique et qui est le plus IMPORTANT ) qui peuvent à loisir accréditer ou mettre en pièce comme ce fût le cas en 2005 le paradigme dictatorial de l’Union Européenne y compris les gérontes affables et niais que fûrent Schuman et Gasperi dans les années 50.

                  France : Non au TCE à 54 % le 29 Mai 2005 Hollande : Non au TCE à 60 % le 01 Juin 2005 La GB n’a toujours pas voté Idem pour la Tchéquie Et les Danois non plus

                  Réscusiter les morts pour faire vivre votre « Europe », vous êtes vraiment...au ras du gazon !

                  Continuons à nous battre...partout, avec délectation et détermination contre cette Europe et ces fachos déguisés en humanistes.


                  • Rocla (---.---.99.162) 11 février 2007 22:11

                    Rasdugazonnés et pareillesimondicées tenez-vous par la main , voilà l’ homme nouveau , celui qui argumente en vomissant .

                    Rocla


                    • Rocla (---.---.99.162) 11 février 2007 22:29

                      Candide , l’ homme nouveau qui vomit , qui s’ essuie et qui parle en même temps .Recherchés au cirque Amar , comme phénomènes à l’ entracte .

                      Rocla



                    • candide (---.---.220.95) 11 février 2007 22:47

                      Rocla,

                      Quelles sont vos fonctions exactes au cirque Amar ?

                      Dame pipi ? Vendeuse de Glaces ? Entremetteuse ? Accompagnatrice ? Dame de compagnie ?

                      Eu égard au grand âge, je miserais pour la Dame de Compagnie.

                      Avec ou sans le Dentier au fait ? smiley


                      • Rocla (---.---.99.162) 11 février 2007 22:51

                        Je suis le patron , je montre des bêtes sauvages et féroces grimées et maquillées en unité européenne mais façon candide .

                        Rocla

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