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La quête d’une improbable identité

 

Nous vivons une époque formidable marquée par un anachronisme insidieux où, oublieux des leçons de l‘histoire, on semble de nouveau se repaître de situations que l’on n’imaginait plus possibles et qui ne sont qu’un très écœurant remugle des années funestes du défunt siècle, les années trente et quarante où se déchaînèrent les ferments d’une haine raciale dont on mesure encore aujourd’hui les funestes conséquences.

Les descendants de ces martyrs d’alors ont juré qu’on ne les y reprendrait plus et, pied-de-nez insolite du destin et même certains - habiles rhéteurs - ont su cultiver le terreau de la repentance obligée des Français pour se placer aujourd’hui du côté du manche où ils ne sont pas hélas ! les derniers à prêcher l’hallali contre d’autres Français qui ont le tort de ne pas avoir la bonne couleur de peau ou la bonne religion.

Rien ne semble pouvoir encore contrarier ce bégaiement de l’histoire que renforce encore la pandémie qui nous accable tous plus ou moins avec les inévitables conséquences économiques et sociales qui lui sont liées mais qu’annonçait déjà un essoufflement industriel en marche depuis des décennies.

On ne peut que voir avec appréhension se profiler la suite et bien que les extrapolations optimistes annoncent des lendemains capitalistes qui vont à nouveau chanter après un ixième passage à vide, ces prévisions sont hasardeuses car, en l’occurrence instruit du passé, l’on sait qu’elles ne se vérifient que rarement ou en tout cas si peu que cela tient parfois au miracle.

Les économistes sont plus savants pour nous expliquer le passé que pour jouer les oracles même s’ils sont animés des meilleures intentions, ce que je veux bien leur concéder.

Pour ne rien arranger, malgré des priorités absolues qui devraient s’attacher à réassurer l’offre de santé publique mise à mal par les atteintes à la Sécurité Sociale d'abord insidieusement puis presque ouvertement développées depuis des années sous des prétextes dont l’inanité nous éclate aujourd’hui à la figure et qui devraient souder la nation autour de quelques idées simples, des malfaisants de toutes les obédiences persistent à vouloir inoculer le poison de la division entre les différents groupes ou ethnies qui composent la nation française.

Le paradoxe étant que, sous prétexte de faire une et indivisible leur France idéalisée, ils s’efforcent de porter à incandescence des différences entre citoyens tant et si bien que, prêchant avec une conviction macabre les malheurs futurs, ils arrivent à en favoriser l’émergence.

 

Certes autant on peut craindre les initiatives d’un gouvernement qui se laisserait dicter sa conduite par les émotions collectives autant on doit se défier de celui qui les ignore.

Ainsi au départ d’un constat justifié par des réalités (au départ surtout fantasmées) plutôt que de réfléchir aux moyens à mettre en application pour résorber les injustices, c’est la matraque que choisit le gouvernement pour faire taire les voix discordantes.

C’est sans doute une manière de soigner le mal par le mal dans le plus pur style de l’homéopathie adaptée à la démesure politique, prospérer sur la discorde au lieu de cultiver, pour les faire prospérer dans l’unité du pays, ces apports divers qui font nation, laquelle n’est pas seulement une unité physique mais aussi un principe spirituel partagé, encore faut-il donner l’envie de le partager.

 

Il y a maintenant « eux » et « nous », concepts lourdingues se définissant en miroir selon les camps dans lesquels on est intimé de se ranger ; les bons et les mauvais sont interchangeables dans une approche de la politique où la manichéisme le plus rétrograde tend maintenant à donner le ton.

 

On ne construit pas l’identité française au gré des fantasmes ou des spéculations politiques, elle se construit comme elle s’est toujours construite par des ajouts successifs, des sédimentations rapportées qui l’ont enrichie et continueront à le faire, n’en déplaise aux prophètes de malheur, aux broyeurs de noir toujours nostalgiques d’époques voire d’épopées révolues.

 

La France - l’appellation serait apparu après la victoire de Philippe Auguste à Bouvines en 1214 - s’est laborieusement forgée autour de Paris et de sa région (où les différentes dynasties régnantes ont choisi d’installer le siège du pouvoir royal) avec comme vecteur essentiel le triomphe dans l’administration de la langue d’oïl sur le latin et ensuite par le rattachement, par conquêtes ou mariages ou encore intrigues mortelles, des différents territoires qui composent la France d’aujourd’hui.

Des flots de sang ont été versés pour créer un état qui est devenu de gré mais le plus souvent de force une nation.

La France est donc centralisée parce que l’histoire l’a ainsi voulu en assurant la domination de Paris sur les autres régions. Le jacobinisme fait partie de l’identité française mais le doit-il éternellement ou doit-il s’accommoder de nouveaux particularismes en cherchant la cohabitation harmonieuse, la raison inclinerait à pencher pour cette dernière approche.

Facteur déterminant de l’identité, la langue française a été imposée à tous par les lois instaurant l’école gratuite et obligatoire, il n’est d’ailleurs pas anodin qu’on ait donné aux instituteurs de la IIIème république le nom de hussards noirs tant les conditions de l’époque dans un environnement souvent hostile faisaient de leur métier un véritable apostolat.

 

Ainsi donc dans la quête d’une identité qui serait à jamais figée dans on ne sait trop quel décor du passé, on veut dénier à des Français le droit d’avoir ou de cultiver des singularités la plupart du temps anodines et on se sert d’un folklore religieux venu d’ailleurs - au demeurant passablement ridicule mais pas davantage que les rites qui étaient déjà installés - pour affoler des citoyens en leur donnant une mentalité d’assiégés en plus de celle d’assistés, car on a eu beau promouvoir le laisser-faire du marché, à la moindre bourrasque un peu « décoiffante » les tenants de l’orthodoxie libérale pure et dure balancent aux orties leurs chers principes pour quêter l’assistance de cet état dont ils n’ont de cesse de fustiger l’interventionnisme.

 

Dans cet ordre d’idées, il est indubitable qu’on assiste à une surenchère verbale - parfois assassine - aussi bien du côté des enflammés islamistes (puisqu’il faut bien les nommer) poussant le bouchon toujours plus loin pour éprouver les capacités de réponse de l’état de droit que des milieux dits identitaires dont toutes les gesticulations malvenues autant que grotesques ne visent qu’à faire vivre le vieux principe : action > réaction pour le plus grand profit de formations politiques qui se repaissent de la fange agitée par ces hurluberlus.

Il en est même une pour qui c’est en somme le seul fonds électoral, l’incapacité de sa dirigeante et la médiocrité de ses cadres lui interdisant l’accès à de plus élevées ambitions qu’un opportunisme passéiste pour le pays.

La meilleure réponse ne serait-il pas de les ignorer, tous ces grotesques, plutôt que de les mettre à la Une en leur consentant une publicité inespérée pour leurs revendications consternantes de bêtise.

Il en est même une pour qui c’est en somme le seul fonds électoral, l’incapacité de sa dirigeante et la médiocrité de ses cadres lui interdisant l’accès à de plus élevées ambitions qu’un opportunisme passéiste pour le pays.

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4 réactions à cet article    


  • Rantanplan Kador 15 décembre 2020 09:36

    Le point Godwin est révélateur d’une incapacité à qualifier précisément ses ennemis et, partant, de savoir ce qui est vraiment menaçant : « A quel manque de maturité sommes nous réduits pour nous révéler incapables de qualifier le bien et le mal politique autrement que par une référence vieille de plus de soixante ans ? » - François de Smet – Reductio ad hitlerum.


    • Gégène Gégène 15 décembre 2020 10:18

      j’ai un peu de mal à associer « hussard » et « apostolat »  smiley


      • Julien30 Julien30 15 décembre 2020 11:28

        « aussi bien du côté des enflammés islamistes (puisqu’il faut bien les nommer) poussant le bouchon toujours plus loin pour éprouver les capacités de réponse de l’état de droit que des milieux dits identitaires dont toutes les gesticulations malvenues autant que grotesques ne visent qu’à faire vivre le vieux principe :  »

        J’adore le « puisqu’il faut bien les nommer », on sent que ça ne plait pas à l’auteur, il le fait du bout des lèvres avant de vite embrayer sur le RN, qu’il a l’immense indécence de mettre sur le même plan que les islamistes dont il relativise le danger (quelle surprise !), lamentable comme d’habitude.


        • Aristide Aristide 15 décembre 2020 11:33

          J’adore les expliquements de notre situation française d’une nation séparée entre islamistes et identitaires. La lucidité de la distance entre Paris et Bruxelles. 

          Un perle tout de même «  Des flots de sang ont été versés pour créer un état qui est devenu de gré mais le plus souvent de force une nation » ; La France qui aurait l’exclusivité de ces .flots de sang, ahhh, c’est vrai que pour toutes les autres nations ou état, c’était un long fleuve tranquille ...

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