Le trumpisme et l’instabilité internationale
Nous sommes témoins de temps difficiles et sombres. Le monde devient chaque jour plus incertain et imprévisible. Notre système planétaire se caractérise par une toile de fond fluide, une instabilité et des bouleversements fréquents[1].
« Nous vivons peut-être une période de transition, mais une période longue avec nos limites humaines. Ce paysage fluide, avec l'incertitude qui le caractérise, est rendu encore plus imprévisible par ce qui se passe à Washington avec un président américain qui a une compréhension limitée des relations internationales et des réalités internationales, mais qui est entouré d'une oligarchie économique qui a ses propres objectifs. Un président à la politique chaotique, mais à travers laquelle on peut discerner certains objectifs géopolitiques, le principal étant de contrer la montée en puissance de la Chine. Dans le même temps, les contradictions intra-capitalistes s'aiguisent, comme le montre la politique de Trump consistant à imposer des droits de douane non seulement à la Chine, mais aussi aux partenaires commerciaux traditionnels des États-Unis, le Canada, le Mexique et l'Union européenne. Plus de 60 % des importations américaines proviennent de ces pays.
« La zone de libre-échange nord-américaine (États-Unis, Mexique, Canada) n'a pas été créée par les démocrates, mais par les présidents républicains, à commencer par Reagan, puis par Bush père et enfin par Trump lui-même, qui l'a renégociée en 2018. De nombreux analystes doutent que la politique concernant les taxes douanières de Trump, une politique du XIXe siècle, profite aux États-Unis. Selon ces analystes, les dommages collatéraux risquent d'être plus importants pour l'économie américaine que les bénéfices. Outre le fait que le trumpisme perturbe le système structurel et institutionnel de l'économie mondiale, qui est pourtant une création américaine de l'après-guerre.
« En ce qui concerne l'Ukraine, Trump gère essentiellement la défaite et tente en outre de voler ce qu'il peut à ce pays. Les démocrates feraient la même chose s'ils étaient au pouvoir, peut-être d'une manière différente, mais ils n'auraient pas le choix. Nous avons assisté à ce type de repli depuis la guerre du Viêtnam. Seulement aujourd'hui, l'empire est entré dans une ère de décadence. (…)
« Avec l'Ukraine, se joue aussi un jeu géopolitique qui a été adopté par la nuance trumpienne de l'impérialisme américain, l’éloignement de la Russie de la Chine. Je ne sais pas si cela leur réussira, il est très peu probable que Poutine tombe dans ce piège, mais c'est certainement dans leurs calculs.
« La paix ne concerne pas seulement l'Ukraine, même s'il s'agit d'un des grands fléaux actuels, mais aussi d'autres régions du monde dont l'impérialisme américain est responsable et dont Trump se fiche éperdument. Il s'agit également des populations affamées de ce monde, dont l'impérialisme américain est également responsable et dont Trump se moque également. Au lieu de cela, il cherche à expulser 11 millions de pauvres « illégaux » du pays le plus riche du monde. Dans le même temps, il pousse les Européens à augmenter leurs dépenses militaires à 5 % pour démanteler ce qui reste de l'État-providence. Est-ce compatible avec la paix ?
« Il y a eu aussi ce théâtre organisé par la Maison Blanche contre Zelensky, qui semble ne pas avoir réalisé qu'il était devenu le « nouveau shérif » à Washington. Et qui semble avoir porté ses fruits puisque, malgré le chantage qui a suivi, il signera finalement l'accord prédateur qui cède aux Américains les richesses minières et les terres rares de son pays. Zelensky a beaucoup de choses contre lui ; il a été l'instrument des Américains tant qu'ils ont eu besoin de lui, qui ont toléré sa corruption et le fait qu'il ait interdit les partis d'opposition et mis en prison ceux qui s'opposaient à la guerre. Maintenant que l'accord prédateur a été signé, il est probable que les jours du chef de l'Ukraine soient comptés. »
En même temps, la Turquie cherche à tirer profit de cette situation chaotique. Le président turc Erdogan déclarait notamment : « Les Européens doivent comprendre le rôle de la Turquie »[2].
Selon le site d'information Ahaber (cité plus haut) le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré que son pays s'efforçait d'adhérer pleinement à l'Union européenne et a appelé les Européens à comprendre le rôle de la Turquie dans le monde remodelé. Dans les remarques qu'il a formulées à l'issue du conseil des ministres du 10 mars, Erdogan a envoyé un message clair à l'Union européenne en déclarant : « Nous travaillons à l'adhésion pleine et entière de la Turquie. Nous nous efforçons d'obtenir l'adhésion pleine et entière à l'Union européenne. Nos amis européens doivent comprendre le rôle de la Turquie dans ce monde en pleine recomposition ». Il a rappelé également sa participation à la conférence des Londres des leaders européens.
En réalité, la Turquie cherche à vassaliser totalement la Syrie. Elle était derrière Ahmed al- Charaa fondateur et le chef du Front al-Nosra, puis de Hayat Tahrir al-Cham, (soutenu militairement par la Turquie). Al-Charaa devenu président par intérim de la Syrie depuis le 29 janvier 2025 a poursuivi ses « bonnes relations » avec la Turquie, qui souhaite notamment, outre les bénéfices économiques de la chute d’Assad, l’élimination et le contrôle des Kurdes syriens. Elle souhaite également pérenniser le contrôle direct d’une partie du territoire nord de la Syrie (que la Turquie contrôle déjà de facto).
[1] Partie de l’article basé sur :
- L’éditorial de Stefanos Constantinides (universitaire, écrivain et journaliste) dans le quotidien O Fileleftheros, daté du 10 mars 2025 et repris par le blog : https://pentalia.blogspot.com/2025/03/blog-post_10.html#more
[2] Partie de l’article basé sur les déclarations du président turc Recep Tayyip Erdogan, rapportées par le site d’information Ahaber ; dépêche datée du 11 mars 2025 : ahaber.com.tr
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