Mollahs d’Iran et Amérique : Guerre ou bien négociations ?
Bien que le scénario d’escalade militaire qui a prévalu pendant des jours après l’assassinat du général Qassem Soleimani ait considérablement diminué, il n’est pas possible de dire définitivement que le spectre d’une guerre par procuration entre le régime des mollahs et l’Amérique s’est complètement éloigné de la scène du conflit et de ses champs d’action attendus.
La volonté des parties à la crise, les mollahs d’Iran et la Maison Blanche américaine, d’éviter la guerre n’est pas entièrement suffisante pour mettre fin aux attentes de guerre car d’autres partisans de la ligne dure sont capables de déclencher une crise majeure qui pourrait amener les deux parties à mener une guerre dont elles ne veulent pas. Au premier rang de ces partis, bien sûr, on trouve les partisans de la ligne dure des Gardiens de la révolution iranienne et de ses milices déployées sur l’échiquier du Moyen-Orient.
Il est vrai que les chefs de ces milices suivent les ordres des chefs des gardes. Mais il reste du travail à faire pour améliorer les conditions d’une éventuelle négociation.
Par ailleurs, des erreurs de calcul sont possibles, dans la dynamique du travail de ces milices irrégulières, qui opèrent parfois dans certaines circonstances et pour certains objectifs, en dehors des systèmes de contrôle et de hiérarchie auxquels elles sont soumises.
Une lecture attentive des détails de la scène actuelle du conflit irano-américain nous permet de dire que la négociation est toujours la possibilité future la plus probable. C’est l’option la moins coûteuse et la plus conforme aux intérêts des deux parties de la crise, après que toutes deux aient obtenu ce qu’elles voulaient au niveau militaire, sans tenir compte de l’évaluation objective et spécialisée de ce qui a été obtenu.
Le président Trump a démontré que l’assassinat du général Soleimani démontre sa capacité à prendre la décision difficile de dissuader le régime iranien, en évitant une échappatoire politique continue que ses adversaires exploitent en parlant de son administration de la question iranienne. Il y est parvenu dans une large mesure.
D’autre part, les mollahs ont évité une grave attaque militaire américaine et ont échappé aux répercussions catastrophiques de l’assassinat du général Qassem Soleimani au cas où ils risqueraient une réponse militaire inconsidérée à l’attaque américaine. Ils ont choisi une réponse calculée qui n’était ni proportionnelle aux réactions iraniennes ni aux attentes du peuple iranien. Mais la réponse était conforme aux priorités du régime des mollahs et à leur pragmatisme extrême, qui place les intérêts du régime, sa survie et son maintien au dessus de toute autre considération.
Les deux parties à la crise qui a menacé le Moyen-Orient après l’assassinat de Soleimani étaient bien conscientes de la nécessité d’accélérer le retour aux règles du jeu implicitement convenues.
Les mollahs se sont rendus compte qu’ils avaient violé ces règles en prenant pour cible l’ambassade américaine dans un acte qui touchait à une mauvaise mémoire historique de l’esprit politique américain. Ils n’ont pas réalisé que le président Trump ne pouvait pas permettre que son règne soit lié au siège répété d’une ambassade américaine par les Iraniens. Les discussions du Conseil national de sécurité iranien dirigé par le Guide suprême (pour la première fois) ont contribué à freiner la ruée et à identifier les erreurs et les priorités avec une grande précision et un grand réalisme. Le régime a choisi une réponse militaire calculée pour sauver la face, en se concentrant sur une voie politique basée sur l’idée de retirer les forces américaines d’Irak. C’est aussi une façon de sauver la face.
Il sera probablement difficile d’atteindre cet objectif dans un avenir prévisible, car il a des répercussions négatives qui ont un impact grave sur les Etats-Unis. Je suis convaincu qu’une grande partie de ce qui se passe dans l’espace des relations irano-américaines au stade actuel visait encore à améliorer les conditions de négociation et à renforcer la position de négociation, en particulier de la part du régime iranien.
Le régime iranien est bien conscient que sa principale force est due à certains facteurs, notamment la grande marge de manœuvre dont il dispose dans son domaine régional vital grâce aux armes de sa milice sectaire. Ses capacités en matière de missiles peuvent être transformées en un temps record en capacités fusées/nucléaires.
Ces deux éléments sont actuellement l’objectif de la stratégie américaine. La stratégie américaine cherche à changer le comportement du régime des mollahs au niveau régional, en le dépouillant de ses capacités régionales et de missiles, ou du moins en limitant sa capacité de mouvement et d’expansion stratégique et en sapant les sources de sa menace, en particulier pour Israël, et cela en élargissant la portée de l’accord nucléaire pour inclure la réduction des capacités de missiles de l’Iran.
Les mollahs d’Iran ont parié sur leur capacité à supporter les effets des sanctions. Les sanctions touchent principalement le peuple et n’affectent pas beaucoup le régime. Le régime a élaboré une stratégie pour gagner du temps jusqu’à la fin du mandat présidentiel du président Trump dans l’espoir de la venue d’un nouveau président américain qui rendra son pays à l’accord nucléaire dont le président Trump s’est retiré.
Au cours de la période récente, les mollahs se sont efforcés d’ajouter de l’huile sur le feu et se sont efforcés d’affaiblir la position du président Trump au pays et ont mal compris sa mentalité de dirigeant. Ils ont voulu déclencher des crises embarrassantes pour lui, comme l’abattage du drone américain, et s’impliquer dans plusieurs opérations visant des pétroliers, jusqu’au siège de l’ambassade américaine à Bagdad et au ciblage des bases militaires américaines en Irak.
Et leurs comptes dans tout cela étaient séparés des comptes de l’autre partie (Président Trump). Ils n’ont laissé au président d’autre choix que de risquer la décision de tuer le général Soleimani pour dissuader l’Iran et arrêter l’accélération de ses actions hostiles contre son pays.
Il est vrai que le président Trump n’a peut-être pas un environnement interne qui lui permettrait de mener une guerre de grande envergure contre l’Iran, en raison notamment de son conflit avec la Chambre des représentants, des positions hésitantes de ses alliés européens de l’OTAN et du rejet de la guerre avec l’Iran par la Russie et la Chine.
Mais même si la guerre ouverte ou totale ne fait pas partie des options militaires des États-Unis, les frappes militaires chirurgicales rapides comme l’éclair fondées sur la supériorité des missiles américains en font partie. Le président Trump y a fait référence explicitement lorsqu’il a parlé de cibler les sites culturels iraniens, puis il a rapidement reconsidéré la question après avoir constaté que cette affaire contredisait le droit international.
Mais le message est parvenu aux dirigeants des mollahs et a atteint son but. Les symboles culturels dont parlait le président Trump comprennent peut-être la plupart des sites qui peuvent être encore plus importants pour le régime iranien que les capacités et les installations militaires, y compris les centrales nucléaires elles-mêmes.
Il semble que le président Trump avait l’intention de transmettre ce message pour freiner la folie des mollahs d’une incitation accélérée contre tout ce qui est américain en Irak, jusqu’à ce que le général Soleimani soit tué.
Dans l’ensemble, les signaux échangés entre les mollahs et l’Amérique peuvent être compris même dans les moments les plus furieux et les plus émotionnels.
Le président Trump défend la décision de tuer Soleimani et souligne qu’il « planifiait une attaque contre quatre ambassades américaines, » et que l’Iran envisageait de « bombarder » l’ambassade américaine à Bagdad. Pendant ce temps, le représentant spécial des États-Unis pour l’Iran, Brian Hook, s’exprimait à Bruxelles sur la volonté de Washington de tenir des discussions sur la question iranienne. Hook a déclaré que le président américain Donald Trump avait annoncé l’ouverture de nouvelles portes à la diplomatie américaine pour négocier ce dossier.
Par ailleurs, le délégué iranien auprès de l’ONU Majid Takht-Ravanchi a évoqué l’idée de dialogue, affirmant que l’administration américaine actuelle n’est « pas prête » au dialogue, vu son « antagonisme envers le peuple iranien. »
Ce sont de petits signaux mais ils témoignent d’une tendance mutuelle à se calmer et à revenir au langage des signes mutuels en vue de s’asseoir à la table des négociations. Tout report de cette étape ne signifie pas la possibilité d’une guerre autant que cela signifie que les termes des négociations pour les parties ou l’une d’entre elles ne sont toujours pas favorables.
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