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Penser la censure aujourd’hui avec Jean Bricmont

 Jean Bricmont ou la réhabilitation du réel... 

 La démocratie ce n'est pas un débat à la télé ou à la radio, sûrement pas non plus une presse entre les mains de la Banque, du lobby de l’armement et de l’industrie du luxe, et pas davantage les élections depuis qu'il n'y a plus d'offre politique, les gouvernements étant prisonniers d'un carcan économique et financier qui ne permet plus aucune rupture ni bifurcation.

La démocratie, c'est la libre circulation des idées - dissidentes et/ou minoritaires de surcroît -, ainsi que le droit à l'opinion et à une information honnête et indépendante pour le plus grand nombre ; et la défense de ce droit dans une critique essentielle et frontale à propos de… qui fait quoi, à qui, où, comment, pour(-)quoi et pour le compte de qui.

La démocratie c'est aussi un mode de résistance contre la tyrannie exercée contre le droit à une critique sans concession des mécanismes de domination et la diffusion d’une telle critique sans laquelle toute vie sociale crève lentement sous la chape de plomb d’un politiquement correct qui cache mal une débauche et une orgie de prise de pouvoir et d’intérêts sans nombre et sans précédents. Et nous ne sommes qu’au tout début de ce disfonctionnement citoyen et démocratique.

 

 La liberté d’expression est une et indivisible ; elle est bel et bien la première des libertés, et parfois aussi, la dernière : celle des déshérités.

Nul doute... le véritable enjeu aujourd’hui, en France, c’est la défense de cette liberté ou bien plutôt, sa reconquête, et le soutien qu'il faut apporter à tous ceux qui la font vivre car, une liberté d’expression qui privilégie une opinion qui est celle de tout le monde n’est pas une liberté mais une dictature molle qui porte le nom de consensus... jusqu'au jour où cette dictature lève le masque : s'ensuivent alors... racket, procès en dommages-intérêts, calomnies, bannissement médiatique et intimidation physique.

 

 

 Jean Bricmont nous rappelle avec raison que c'est bien l'instrumentalisation à des fins politiques (diviser pour mieux continuer de régner et de trahir tous ses engagements) de l'antifascisme, de l'antiracisme et de l'antisémitisme (et du génocide juif par la même occasion : d'une pierre deux coups) qui est responsable du climat délétère qui empoisonne la société française.

A noter que cette instrumentalisation trouve sa source chez le PS et que l’on peut facilement la dater : 1983 ; année au cours de laquelle le PS fera volte-face et renoncera à peser sur le cours de l’Histoire avant de jeter en pâture son électorat à un libéralisme économique funeste.

 

***

 

 La France est passée en cinq ans, dans le classement de Reporters sans frontières, du 11e rang au 38e rang de la liberté d'informer. Finira-t-on alors derrière la Chine ?

25 condamnations pour violation de la liberté d'expression... la France au 3e rang des condamnations loin devant la Russie à la Cour Européenne des droits de l'homme.

Il semblerait qu'en France, on ne sache faire qu'une chose : rejeter, bâillonner, censurer, stigmatiser, traduire devant les tribunaux la moindre tentative d'exercice de liberté d'expression politique et artistique (rappeurs, auteurs, essayistes, pamphlétaires, artistes de scène, humoristes, syndicalistes, activistes)...

Tous les médias, leurs producteurs et leurs animateurs, chroniqueurs et journalistes y contribuent, chaque jour, chaque semaine... radios, télévisions, journaux ; médias qui ignorent sciemment d'innombrables réalités et expressions culturelles, politiques et sociales.

 Soutenir la liberté d'expression est un véritable engagement et un sacrifice (accepter ce qu'on n'aurait jamais osé ou bien désiré lire et entendre), car... il n'y a pas de liberté, il n'y a que des preuves de tolérance, et la liberté de parole de l'un est la garantie de la liberté de parole de tous.

Seule la liberté est capable de rendre compte de toutes les mémoires du monde ! Et moins on oublie, plus on se souvient... et plus on se souvient, plus difficile est le mensonge. En état de veille et d’alerte constant, oeuvre salubre, ce combat-là devrait être reconnu d'utilité publique car, depuis la déchéance de l’homme politique nous n’avons jamais eu autant besoin de cette liberté d'expression qui est l’exact opposé de tout ce qui est voué à l’amenuisement (les libéraux et ultra-libéraux le savent mieux que quiconque quand il s'agit du commerce). En effet, au contact de cette liberté, on reprend la main et le dessus sur l’abrutissement et le faible ressac de la désobéissance et de la dénonciation parcimonieuse et timorée des médias dominants aux ordres du moins-disant et du moins-pensant ; médias de masse du secteur public et para-public (réduits à la marge) ne remplissent plus leur mission. Quant au secteur privé qui contrôle 80% des programmes (temps de cerveau disponible), il n'a aucune obligation morale ou contractuelle d'ouvrir qui que ce soit à quoi que ce soit ni d'élever la conscience de quiconque.

 Qu'il soit ici permis de rappeler que la société, ce n'est pas simplement l'économie et la répartition de richesses. Loin s'en faut. Ce qui fait le lien, ce qui fait société relève aussi de notre capacité à tous de dire et d'entendre la vérité ; ce qui implique aussi et surtout la dénonciation des mensonges et des manipulations.

Nous tous devons accepter d’être remis en cause ne serait-ce que pour notre propre salut individuel et collectif, même s’il ne saurait être question de sauver qui que ce soit malgré lui mais bien plutôt d’exposer au grand jour les contradictions et les faux-semblants d'une caste politico-médiatique qui n’entend recevoir de leçons de personne : ce qui est déjà un signe inquiétant d’auto-exclusion du champ de la critique, champ démocratique ; contraintes et libertés, servitude et grandeur.

Cette remise en cause est le moyen le plus sûr de lutter contre toutes les tentatives d’instauration d’un régime dans laquelle un groupe de pression (religieux, politique ou économique) déciderait de l’état d’exception jusqu’à la suspension du droit dans son intérêt seul, - tentation toujours présente chez les êtres humains regroupés en communauté et quelle que soit cette communauté - , telle une véritable juridiction d’exception, là où précisément l’Etat de droit vacille et la cohésion sociale implose car aucune société n’est à l’abri des conséquences d’une telle remise en cause de ses équilibres toujours précaires.

Pour cette raison, on ne peut que dénoncer un tel danger à l’heure où toute une caste politique et intellectuelle a baissé les bras ; caste qui s’est ralliée à un nouvel ordre mondial du dumping moral et social, ainsi que du bannissement des Peuples qu'on affame et des Nations que l’on détruit sous des tonnes de bombes.


 

  Alors oui ! La censure... encore et toujours la censure ! Cette maladie bien française sous tous les régimes ! La censure et le bannissement à l’endroit de toutes les voix dissonantes et dissidentes… véritable chasse aux sorcières qui ferait passer, pour un peu, le maccarthysme  pour un jeu de société un peu pervers certes ! mais bon enfant, et les procès de Moscou pour des joutes oratoires dignes de l’agora grecque.

Ce qui confirme, jour après jour, le fait que les médias ont définitivement tourné le dos à la liberté d’expression sans doute dans le souci d'échapper à une mise en accusation redoutable, quasi mortelle professionnellement, commercialement et socialement... une fois discrédité, à savoir : l’accusation de conspirationnisme contre tous ceux qui auraient la malveillance de voir un tout petit peu plus loin que le bout de leur nez et leur fiche de paie.

 Et pourtant... souvenez-vous : il y a 40 ans, les "conspirationnistes" d'aujourd'hui portaient tout simplement le nom de "journalistes d'investigations".

 Mais alors, comment est-on passé en 20 ans d'un journalisme spécialisé et d'investigation à la parole d'experts carriéristes à la solde des multinationales et des chancelleries ?

 La question est posée.

_______________________________

Pour prolonger, cliquez  : Pour un journalisme de toutes les intelligences

 


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10 réactions à cet article    


  • pens4sy pens4sy 14 février 2014 12:47

    Merci à l’auteur.

    Je me pose la question : cet état qui devient totalitaire par petites touches, quoi qu’avec une certaine accélération ces derniers temps (Sarkozie-Hollandie période), ne rentre-t-il pas dans le rang qui lui a été assigné par ceux qui ne sont pas élus ?
    Les pantins qui se succèdent à la tête du pays pour l’offrir à celui qui, comme l’a si bien dit l’infâme, « n’a pas de nom ni de visage »,ne sont-ils pas les parfaits valets de l’Empire, comme Petain fut celui du III ème Reich ?

    Dangereuse époque.


    • imprécateur 14 février 2014 16:10

      Il est loin le temps où un penseur se levait en disant« Bonsoir Messieurs les censeurs ! »et provoquait la panique !!!
      La Parole comme le Pouvoir ou la Liberté, on ne vous la donne pas, il faut la prendre et par la force s’il le faut ; arrachons à Anastasie ses ciseaux et plantons les dans la gorge des parangons de la médiocratie, coupons leur le sifflet à ces perruches serviles !
      La parole comme les idées ce n’est pas une frontière qui l’arrête comme disait L.Ferré :
      -Transbahutez vos idées comme de la drogue... Tu risques rien à la frontière
      Rien dans les mains
      Rien dans les poches
      Tout dans la tronche !
      il ajoutait :
      -« Assois-toi sur des tonnes d’inconvenances et montre-toi à la fenêtre en gueulant des gueulantes de principe
      Si on reécoute »
      il n’a plus rien« de Ferré, on s’aperçoit que le »Vieux" nous avait prévenu,
      http://www.frmusique.ru/texts/f/ferre_leo/ilnyaplusrien.htm
      Ses mots me provoquent toujours la même rage, mais merci Serge Ulevski de faire entendre votre voix dans le silence de la pensée unique.


      • Baba Yaga Baba Yaga 14 février 2014 16:33

        Voilà le cadeau de la Saint Valentin que je vais m offrir pour cette année. Oui la France régresse sur tous les plans : la liberté d expression, démocratie, social avec plus de pauvres, de précaires, d inégalités. 


        Cela devient grave même sur le net ou les forums ou le droit de citer, ou parler est tout de suite cadré de force par des censeurs, et même pire par des gens qui se disent de gauche, antifa, libertaires, anars !. Il y a quelque chose qui m échappe là. 

        Comment expliquer ces faits ? Le forum d arrêt sur image devient aussi difficile et l abus d antisémitisme pour avoir parlé de dieudonné sans le lyncher, ou le maudire, avec le risques de se faire virer, si on va pas dans le sens de la direction et de quelques agitateurs de la mouvance sus cité. 

        Incroyable pourtant D. S. est libre mais pourquoi as t il céder aux sirènes de la presse mainstream ? 

        Mais voilà qu il s est pris à son propre piège et doit se défendre contre Patrick Cohen, malgré des articles bien méchants contre Dieudonné. A ce jour 3000 asinautes seraient partis. 

        Signe des temps ? 

        • claude-michel claude-michel 14 février 2014 16:52

          La censure c’est le bâillon pour empêcher les gens de s’exprimer qu’utilise la classe gouvernante actuelle...Seul l’idiot de Corrèze à le droit de parler.. !


          • Alain Qroviste Alain Qroviste 14 février 2014 23:35

            Merci à l’auteur pour cet article.

            Sus à la « loi Gayssot » de 1990 et la « loi Pleven » de 1972 pour commencer.

            Amicalement.



            • alinea Alinea 15 février 2014 00:18

              La démocratie est le contraire d’un consensus, c’est une dispute, au sens vrai :
              examiner une question point par point ; raisonner, discuter, disserter.
              La critique n’existe plus, reste « encenser » ou« attaquer ».
              La liberté d’expression n’est tolérée qu’en petits exemplaires.


              • bernard29 bernard29 15 février 2014 07:59

                Ce sont les attaques éhontées contre la liberté d’expression ( les libertés publiques en général), leurs accompagnements serviles par les médias, qui prouvent que notre démocratie électoraliste est une vaste fumisterie..

                « l’affaire Dieudonné » en est à cet égard la démonstration la plus forte, la plus exemplaire, et c’est bien pour cela que cette bataille et très importante sinon prioritaire. A quoi peut ’il servir de discuter des fausses réformes constitutionnelles ( vote blanc, référendum d’initiative citoyenne, cumul des mandats, réorganisation des pouvoirs,..) si la liberté d’expression est bafouée. 

                Et oui, il faut bien se rendre compte que ce sont des gouvernements de gauche qui musellent, qui contraignent la liberté d’expression. C’est le véritable drame de la gauche.


                • Qaspard Delanuit Qaspard Delanuit 15 février 2014 10:00

                  Que du bon sens dans l’article et l’entretien de la vidéo ! Je me demande comment il est possible de ne pas entendre un propos si clair. Les fausses élites de la société française sont devenus complètement démentes à force de vouloir échapper au réel. Mais échappe-t-on longtemps à la réalité ?


                  • Serge ULESKI Serge ULESKI 15 février 2014 15:54

                    Merci pour votre commentaire.

                    ***

                    « Il n’y a plus rien » dans sa version pour orchestre...

                    Ici : http://www.dailymotion.com/video/xfhbfe_leo-ferre-il-n-y-a-plus-rien_music

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