• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Quelques arguments de quelques élitistes contre quelque référendum

Quelques arguments de quelques élitistes contre quelque référendum

Dans la novlangue contemporaine, « populisme » est un synonyme de « fascisme », alors qu'étymologiquement et historiquement, il s'agit de la défense du peuple, à l'opposé de la défense des élites qu'est l'élitisme. Comme l'a rappelé plusieurs fois Michel Onfray face à Yann Moix qui n'entendait pas la définition, le peuple, « c'est ceux sur lesquels s'exerce le pouvoir et qui n'ont jamais la possibilité d'exercer du pouvoir » (sur France 2, dans l'émission On n'est pas couché du 19 septembre 2015, à 13mn54s et à 18mn25s) ; et donc l'élite est la partie de la population qui exerce ce pouvoir (oligarques, monarques, aristocrates, eugénocrates ou autres types de souverains).

 

Dans On n'est pas couché du 8 octobre 2016, l'avocat Richard Malka s'affiche comme un élitiste/antipopuliste cohérent : questionné par l'animateur Laurent Ruquier, il est « résolument » (15mn47s) contre le référendum, et « pour la démocratie représentative, parce que le référendum, c'est une espèce de populisme », dit-il, le peuple faisant n'importe quoi par des motivations « émotives », comme « le rétablissement de la peine de mort » (l'une des deux fameuses tartes à la crème antidémocrate que je conteste à la fin de mon article Pour une démocratie réelle) ; alors que les élus seraient plus sages, sur des questions « techniques ». Il emploie le mot deux fois, et donne comme exemple la sortie de l'Europe, comme si la souveraineté n'était qu'un problème technique (de moyens donc), et non pas fondamental.

 

Il est logiquement un défenseur du libéralisme dominant : « Je ne donne de leçon de morale à personne, parce que j'ai horreur d'en recevoir » (2h12mn04s), dit-il, selon la neutralité axiologique décrite par Jean-Claude Michéa, le droit ne devenant que procédural. Et aussi : « Il est rock 'n' roll, DSK. [...] Je défends la liberté quand je défends DSK. Je défends la liberté sexuelle, je défends la liberté de faire absolument ce qu'on veut dans sa sexualité à partir du moment où on est entre adultes et que c'est consenti. » (2h21mn53s-2h22mn08s) ; il est défenseur de l'oligarchie, de l’occulte banque Clearstream contre les révélations du journaliste d'investigation Denis Robert, du Premier Ministre Manuel Valls dans son procès intenté contre l'humoriste polémiste Dieudonné M'Bala M'Bala, de Carla Bruni épouse de l'ex-Président Nicolas Sarkozy contre Patrick Buisson lorsque celui-ci révèle au public les propos en coulisse de quelques oligarques, défenseur aussi de l'ex-directeur du FMI Dominique Strauss-Kahn après ses frasques sexuelles contre toute décence.

La journaliste Vanessa Burggraf est l'autre interlocuteur de Ruquier se disant aussi totalement opposée au référendum, argumentant : « car Moscovici a eu cette phrase qui est tout à fait juste : « Les référendums, ça blesse, ça divise, et ça n'apporte aucune solution. » ; je dirais même que ça apporte des emmerdes. » (17mn20s-17mn30s). Pourtant, par exemple, il y a eu beaucoup de manifestations et de polémiques, et des violences lors de l'autorisation par les politiciens du mariage homosexuel en France, alors que cela aurait pu être plus pacifique avec un référendum suivant une honnête iségorie (égalité d’accès à la médiatisation qui est une condition d’un référendum démocratique). L'Irlande a été le seul État de la planète à autoriser le mariage homosexuel par référendum, et cela s'est fait de façon plus pacifique qu'en France. Ainsi, on n'a pas pu avoir en France la même reconnaissance par les défaits d'une victoire de cette autorisation plus légitime qu’en France :

« Avant même la publication des résultats, un des principaux responsables de la campagne du non, David Quinn, avait concédé la défaite de son camp. "C'est une claire victoire pour le camp du oui", a-t-il déclaré, adressant ses "félicitations" aux partisans du mariage homosexuel. » (France Info, « L'Irlande a voté en faveur du mariage homosexuel à 62,1% selon les résultats définitifs »).

Devant lutter pour conquérir, conserver ou étendre leur pouvoir, les élites, dans leur hubris, sont plus belliqueuses que les peuples, envoyant pour leur profit la chair des autres aux canons : ce sont des élites états-uniennes qui ont voulu la guerre au Koweït en 1991, fabriquant les mensonges sur les bébés sortis des couveuses afin de rallier leur peuple opposé à cette guerre qu’elles avaient fomentée ; ce sont les élites espagnoles et britanniques qui ont voulu faire la guerre en Irak en 2003 (avec les mensonges sur les armes de destruction massives) contre leurs peuples qui manifestaient contre.

Quant à la peine de mort, qu’elle fut abolie ou non ensuite, elle a partout et toujours été d’abord établie par les élites, jamais par référendum, et c’est bien les lois de l’élite qui déterminaient qui devait être légalement tué.


Moyenne des avis sur cet article :  4.29/5   (7 votes)




Réagissez à l'article

15 réactions à cet article    


  • Gabriel Gabriel 11 octobre 2016 10:07

    Que les élites auto proclamés soient contre le référendum cela n’étonne guère. Il y a bien longtemps maintenant que nous sommes sous monarchie sélective avec un semblant de démocratie tous les cinq ans. Nos petits cancres de l’ENA ont confondu pouvoir et délégation de pouvoir. Ils se sont accaparés celui-ci et l’ont modelé pour servir leurs intérêts en se votant des lois pour se protéger de la justice et museler le peuple. C’est certain, la démocratie Française n’est pas la démocratie Suisse. Comme le signale très justement M.Onfray, dés que vous utilisez les mots « peuple ou citoyens » vous êtes un dangereux populiste.


    • Lucadeparis Lucadeparis 11 octobre 2016 12:11

      @Gabriel
      Il n’y a pas guère de démocratie française. Il y a une démocratie suisse partielle.
      Formellement, nous sommes dans une aristocratie élective.


    • Harry Stotte Harry Stotte 11 octobre 2016 10:33

      « Quant à la peine de mort, qu’elle fut abolie ou non ensuite, elle a partout et toujours été d’abord établie par les élites, jamais par référendum... »



      C’est faux. Aux Etats-Unis, quelques, ou plusieurs, Etats, l’ont réintroduite à la suite d’un vote populaire, après le moratoire de la période 1967-77.


      Et puis il y avait eu, bien avant, le cas de la Suisse, où la peine de mort a été abolie en 1874, puis rétablie par le peuple le 18 mai 1879, à une majorité de 52.5 % des votants..


      P.S. - C’est toujours une erreur de balancer au pif, ce qu’on croit vrai... Au bistrot, ça passe, mais sur le web, c’est déconseillé.

      • Lucadeparis Lucadeparis 11 octobre 2016 12:23

        @Harry Stotte
        Merci pour ces rectifications d’une publication trop rapide. La version corrigée, complétée de l’article est là.


      • Lucadeparis Lucadeparis 11 octobre 2016 12:32

        @Harry Stotte
        (En l’occurrence en remplaçant « toujours » par « le plus souvent » et « jamais » par « rarement »).

        J’ai aussi ajouté que 91% des Espagnols étaient opposés à la guerre en février 2003 et que

        « En avril 2003, [...] plus des deux tiers de l’opinion en France, en Allemagne et en Espagne pensaient que les opérations militaires en Irak étaient injustifiées » (Natalie La Balme, « Opinion publique transatlantique et politique étrangère : le cas de l’intervention en Irak », dans Raisons politiques, 2005/3, n° 19, https://www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2005-3-page-81.htm


      • Zolko Zolko 11 octobre 2016 12:40

        J’ai un GROS problème de vocabulaire là : l’élite, c’est l’ensemble des meilleurs. L’élite de l’athlétisme Français est par exemple assez facilement identifiable. Cela sous-entend une métrique capable de mesurer et de comparer les performances des humains, dire qu’un tel est meilleur qu’un autre, et dire que les 100 meilleurs forment l’élite. En sport ou dans un domaine dans lequel on a une telle métrique (*) la notion d’élite a un sens précis.
         
        Appliqué à la société dans sa globalité, ça ne veut rien dire. Ca veut encore moins dire dans le cas de cette émission car on a clairement affaire à des bouffons sans envergure.
         
        Par contre, l’autoflagellation de citoyens ordinaires qui acceptent ce langage « élitiste » me choque. En effet, rien que le fait d’utiliser ce vocabulaire et désigner certains comme l’élite sépare les humains en deux groupes, l’un supérieur à l’autre, les uns maîtres logiques des autres. « J’ai raison et tu fermes ta gueule car je suis l’élite (sous-entendu : et tu n’est qu’un sous-homme) » . Ce terme « élite » est un synonyme d’aristocrate (qui veut aussi dire « le meilleur » en Grec) et aussi du « Übermensch » (qui veut dire « homme supérieur » en Nazilangue).
         
         
        (*) une métrique est une fonction scalaire et transitive sur un ensemble qui ordonne les éléments de cet ensemble, de telle façon que si la métrique est nulle entre 2 éléments ces 2 éléments sont confondus. Par exemple, le temps de course d’athlètes est une métrique, car si 2 coureurs arrivent avec le même temps, on n’est pas capable de les départager et ils reçoivent tous les 2 la même médaille : du point de vue de la course ils sont confondus. Une telle métrique n’existe pas dans la société, on ne peut pas classe les hommes sur une échelle de valeurs : comment pourrait-on comparer un médecin et un musicien, un ingénieur et un cuisinier... La seule métrique qui existe est celui de l’argent, mais ceux qui sont le plus haut dans cette métrique ne sont pas l’élite mais les riches.
         
        Ou alors, implicitement, vous affirmez ici que les riches sont supérieurs aux pauvres. Donc siouplé, arrêtez d’utiliser ce terme d’élite, et chaque fois que quelqu’un l’utilise rabattez lui le claquet.


        • Lucadeparis Lucadeparis 11 octobre 2016 13:21

          @Zolko
          Vous soulevez un problème intéressant, mais je crois que vous faites une erreur sémantique (entretenue par l’oligarchie qui veut toujours faire croire qu’elle est meilleure et donc légitime), dont la résolution se trouve facilement sur https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89lite :
          L’article Wikipédia commence par :
          « L’élite est la minorité d’individus auxquels s’attache, dans une société, un prestige et en pratique le plus de pouvoir dû à des qualités naturelles ou acquises. Le terme d’élite superpose les notions de meilleurs et d’ élection. Un régime élitiste est une aristocratie. »
          Pour l’étymologie, il précise :
          "Le terme élite vient du participe passé electus du verbe latin eligere, signifiant extraire, choisir. L’élite est ainsi formée de ceux qui se choisissent ou sont choisis. D’où l’idée connexe de supériorité puisque ce qu’on choisit, c’est ce qu’il y a de meilleur. On retrouve ainsi la relation entre élitisme et aristocratie, terme venant du grec aristoï, les meilleurs."

          Il est aussi intéressant que vous vous appuyez sur la comparaison sportive qui est le symbole de notre société qui se fonde sur la compétition, la hiérarchie, le libéralisme, plutôt que sur une économie solidaire et un système polito-juridique égalitaire.

          En fait, littéralement, l’élite de l’athlétisme, ce sont les dirigeants des organisations d’athlétisme, pas les meilleurs sportifs (même si ceux-ci ont plus de chances que d’autres de rejoindre cette élite)..

          Les meilleurs sportifs, normalement, ne sont pas choisis, élus, cooptés comme tels. Ce sont leurs résultats sportifs qui en font les meilleurs. C’est une métaphore de parler d’élite sportive.


        • rogal 11 octobre 2016 13:34

          @Zolko
          « Élite », au départ, ne signifie pas meilleur mais choisi, sélectionné. Or le souverain, en effectuant un choix de serviteurs, prétend sélectionner les meilleurs, d’où la dérive de sens. Lorsque le souverain est l’Argent, on obtient l’élite ploutocratique qui est la nôtre. Par nature elle est franchement antipopuliste, c’est-à-dire ennemie du peuple.


        • rogal 11 octobre 2016 13:37

          (écrit pendant que Lucadeparis répondait)


        • Zolko Zolko 11 octobre 2016 13:44

          @ Lucadeparis & rogal : je ne savais pas, merci. Effectivement, dans ce cas, l’élite n’est pas le groupe des meilleurs mais des choisis (du latin eligere). Choisis par qui et pour quoi reste alors à déterminer.


        • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 11 octobre 2016 17:06

          Bon article, documenté.
           
          En parlant de peine de mort, je me demandais si on pourrait pas faire un retour aux sources grecques avec un référendum pour rétablir la peine de mort... pour les élites.
           
          L’idée serait que le politicien qui serait pris dans des malversations dans l’exercice du pouvoir serait mis à mort.
          Ou disons plutôt, pour rester dans un registre plus actuel et vegan, condamné à la perpétuité, la vraie.
           
          Je crois que Sarkozy a fait disparaître le crime de haute trahison. Il suffirait de le rétablir avec perpet à la clé. ça aurait peut-être empêché le soutien français aux terroristes d’Al Nosra...


          • Lucadeparis Lucadeparis 11 octobre 2016 17:46

            @Luc-Laurent Salvador
            Merci.
            Un des principes de la démocratie (et de l’anarchie), outre l’isocratie (égalité de souveraineté des citoyens), l’iségorie (égalité de l’accès à la parole publique), c’est l’isonomie (l’égalité face à la loi).
            Donc pour des méfaits identiques, les sanctions doivent être identiques, quel que soit le citoyen. Mais des mandats, surtout voulus (et non tirés au sort), impliquent des responsabilités, c’est-à-dire de répondre de ses actes en fonction des pouvoirs supérieurs qu’on a.
            Le soutien aux terroristes ne serait peut-être pas empêché, car il se fait de façon dissimulée et impunie (nous voyons de quelles hautes trahisons les cliques de Bush et Cheney sont coupables pour le 11 Septembre et autres manipulations pour déclencher leurs guerres).


          • Lucadeparis Lucadeparis 11 octobre 2016 18:24

            @Luc-Laurent Salvador
            A propos de la peine de mort, je m’y oppose car je pose comme principe de justice la réparation (ou la réparabilité) :
            - Que ce soit de la part du coupable, qui doit d’abord réparer, ou sinon dédommager ses victimes ; je suis donc partisan du travail forcé (mais rémunéré de la même façon que pour les autres travailleurs, même si cette rémunération va pour les victimes) ; un coupable mort ne peut guère dédommager.
            - Que ce soit de la part du faillible système judiciaire, ce qui est impossible lorsque le condamné a été tué. Je prends pour exemple l’affaire Patrick Dils en prison de ses 16 à 32 ans avant d’être innocenté. Non seulement il ne devait pas être tué, mais non plus le tueur en série Francis Heaulme pour les témoignages qu’il pouvait apporter dans ce crime.


          • Béo Ulaygues Béo Ulaygues 12 octobre 2016 09:07

            «  je suis donc partisan du travail forcé » . . .  smiley

            Il me semble que ça, ça s’appelle de la torture .

            C’est bien vicieux et bien tordu comme concept.

            Ce n’est pas une « réparation » mais une vengeance froide, longue et malsaine bien dissimulée sous des faux-semblants de grandeur d’âme et de hauteur de vue.


            • Lucadeparis Lucadeparis 12 octobre 2016 10:27

              Je comprends les réticences, et moi aussi j’ai des doutes.
              A vrai dire, la plupart des gens sont forcés de travailler.
              L’emprisonnement est aussi une contrainte, un placement forcé, et je suis plutôt contre ce genre de peine dans sa généralisation. Je préfère, lorsque les personnes sont contrôlables, aillent travailler pour dédommager leurs victimes.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON



Publicité



Les thématiques de l'article


Palmarès



Publicité