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Accueil du site > Tribune Libre > Semaine de prévention du suicide - L’échec de la psychologie (...)

Semaine de prévention du suicide - L’échec de la psychologie moderne

Plusieurs pays tiennent une semaine de prévention du suicide en février. Hier, le Québec, la Belgique, la France... et même la Polynésie lançaient donc leur semaine de prévention du suicide. On retrouve toujours le même objectif de base : sensibiliser la population au fait que les indices de détresse et des comportements suicidaires peuvent être voilés, ambigus et pas toujours évidents à décoder. Bref, il faut être aux aguets afin de pouvoir détecter les personnes suicidaires dans son entourage, suivant certains indices et comportements. Pourquoi ? Parce que les études montrent que la plupart des gens sont pris par surprise lors du suicide d’un proche. Le constat est fort simple : les gens ne sont pas assez à l’écoute des autres pour déceler leur détresse, d’où cet effet de surprise. Autrement dit, le suicidaire est porté à cacher son mal de vivre aux autres, mais certains indices et comportements ne trompent pas. Il suffit d’être attentif.

Personnellement, je crois qu’il n’y a rien de plus naturel en notre société que de taire son mal de vivre. D’une part, rares sont les gens capables d’une réelle compassion. D’autre part, très peu de gens se connaissent suffisamment eux-mêmes pour connaître les autres, même un proche. Curieusement, en cette société où chacun semble concentré sur lui-même, la connaissance de soi fait tout de même défaut. Le « connais-toi toi même » du philosophe grec Socrate est exploité à toutes les sauces, parce qu’il cadre bien avec l’individualisme en vogue mais, en réalité, on constate que les gens sont vite à court de réponses profondes lorsqu’on les questionne sur eux-mêmes. Les échanges demeurent superficiels, parce que les gens le sont.

La psychologie moderne tente d’amener les gens à se découvrir, à creuser en eux-mêmes. Comme je l’ai souligné dans mon livre J’aime penser, au chapitre La pensée malheureuse, la psychologie est souvent partie prenante des problèmes qu’elle aborde. Par exemple, on observe une hausse du taux de suicides dans les villes où un centre de prévention du suicide vient d’ouvrir. En fait, il manque à la psychologie ce qui manque à nos gens : la profondeur que seule la philosophie peut apporter à la connaissance et à l’acte même de connaître. On trouve dans la philosophie les bases utiles pour approfondir nos réflexions, pour penser notre être en toute logique, dans tous ses aspects. Le meilleur moyen pour prévenir le suicide, c’est la correction des erreurs cognitives qui désoriente l’être dans ses pensées, jusqu’à le conduire à vouloir mourir.
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J’aime penser, témoignage et essai de gouvernance personnelle,
Serge-André Guay, Fondation littéraire Fleur de Lys.
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22 réactions à cet article    


  • Alain Laval (---.---.26.99) 10 février 2006 15:54

    Monsieur vous avez raison de vouloir sensibiliser tout un chacun au suicide qui représente - et a sans doute toujours représenté - une violence sociale qui interpelle la société par rapport à ce qu’elle fait et ne fait pas pour l’ engendrer. D’une manière romantique le suicide représente parfois un acte de courage désespéré qui expose le corps et l’esprit de celle ou celui qui n’est plus tel les restes d’un héros qui aurait su renoncer à toutes les tentations de la vie. Socrate se suicide mais il le fait dans un geste de défi, non pour quitter la vie, mais pour ne pas se démettre de ce qu’il considère juste par rapport au jugement inique de la cité. Bien sûr le « connais-toi toi même » représente une entreprise difficile et peu d’individus s’ avèrent réellement capable de cette plongée au plus profond de soi qui, très souvent oblige à se contredire, se rejeter. Au bout d’un soi authentique il faut admettre la clairvoyance. D’ailleurs notre cher Socrate le savait puisqu’ à sa maxime, plus personnelle qu’ universelle, il fondait également la maïeutique en exercice indispensable à la pratique de la philosophie. Accoucher le autres, si nous pratiquions cette méthode, à chaque instant de notre existence, nous adopterions une attitude qui engendrerait beaucoup de bienfaits. Néanmoins, vous le savez tout autant que moi, l’être se veut tout autant égoïste que généreux. Quelle stupéfiante complexité un être humain ! Le suicide est un drame puisqu’il reflète notre incompétence en regard de la fragilité d’ autrui. Certains dirons : incombe t-il à chacun de sauver chacun, d’autres que le suicide reste un chemin de liberté dans un univers carcéral, d’autres, enfin, que la vie est un passage initiatique dont il faut accepter tous les travers jusqu’aux plus amères. Le suicide fait appel à toutes les sensibilités de l’ humanité et, d’une certaine manière, il représente cette humanité. Le suicide lorsque nous sommes appelé à devoir y être confronté nous blesse toujours profondément en ce sens que celui ou celle qui est brutalement parti nous interpelle encore : « comment pouvez-vous continuer de cheminer alors que tout est triste, cruel, injuste. » Voilà pourquoi aussi, très souvent, nous choisissons de mêler le suicide à la déraison, la démence. Une personne âgée, seule, démunie qui choisit de rompre son traitement médical, de ne plus ou presque se nourrir attente t-elle à ses jours ou bien anticipe t-elle une coupure que la société a déjà signée et engendrée. La prévention du suicide passe, tel que vous l’ écrivez, par l’ approfondissement des relations inter-personnes. Vaste chantier mais il ne faut pas le délaisser pour autant. Nous sommes dans une société qui apprend les voix de la communication. Ecrire un article, réagir à un article, mettre en place un blog, un site, etc... voilà des possibles qui n’ existaient pas et qui, nous le mesurons de jour en jour, favorisent des expressions qui donnent et renvoient du sens. Bien sûr tout ceci prendra du temps, une, voire deux générations, mais des espoirs sont possibles de ce côté ci de la liaison d’ homme à homme. Internet se démontre telle une possible gigantesque thérapie de groupe à l’échelle planétaire. Qui, il y a cinq ans aurait pu prévoir cela. Il faut être vigilant et entreprenant et c’est bien ceci que votre article qui appelle et qui interroge nous envoie.


    • Serge-André Guay (---.---.149.166) 10 février 2006 16:47

      Merci pour votre commentaire. Il me fallait aller plus loin que la simple rédaction et publication de mon billet. J’ai donc créer un blogue sous le titre Le mal de vivre : http://suicidaire.blogspot.com/. Puis-je reprendre votre message ?


    • Martin (---.---.158.130) 10 février 2006 16:28

      Licenciement et suicide

      J’ai subi un licenciement abusif confirmé par les prud’hommes, mais je suis depuis 4 ans au chômage à 50 ans et en dépression. Je crois que mois aussi j’ai considéré le suicide....voici aussi une situation à esaminer !

      J’ai trouvé un nouveau site dédié à la prévention du licenciement.

      A visiter :http://www.tensions-sociales.com


      • Serge-André Guay (---.---.149.166) 10 février 2006 17:01

        Je vous comprends car un licenciement est toujours difficile à vivre à tout âge. Et apprendre que des milliers d’autres travailleurs subissent le même sort jour après jour n’est pas très encourageant. En revanche, il y a au moins une bonne nouvelle et non la moindre : la dépression qui suit souvent un licenciement peut être surmontée. J’ai récemment véçu une dépression suite à un accident professionnel provoqué par un client mal intentionné. La guérison se faisant attendre, je me suis tourné vers la philosophie plutôt que la psychologie. Y avez-vous pensé ? Je viens d’ouvrir un blogue sous le titre Le mal de vivre pour initier les intéressés à l’aide que nous apporter la philosophie lorsque la dépression se pointe : http://suicidaire.blogspot.com/


      • Rhéal (---.---.238.107) 10 février 2006 16:54

        J’aurais besoin de l’information au sujet du suicide :
        - Définition du suicide
        - Les causes ou raisons possibles(5)
        - Les cinq types d’appels à l’aide
        - Les effets sur l’entourage
        - Le modèle d’intervention préconisé(modèle assist)
        - les ressources diponible

        Merci pour votre aide, Sincèrement, Rhéal


        • Serge-André Guay (---.---.149.166) 10 février 2006 17:14

          Voilà toute une commande d’informations. En matière de suicide, nous sommes dans les sciences humaines, ce qui implique qu’il n’y a pas une seule réponse à chacune de vos questions. La psychologie, la philosophie, la sociologie,... ont chacune une approche différente du mal de vivre. Évidemment, la psychologie est davantage impliquée mais là encore on compte autant de réponses différentes à vos questions qu’il y a de psychologues et de psychiatres. Quoiqu’il en soit, il semble que non seulement la psychologie n’a pas trouvé des thérapies vraiement efficaces mais elle ferait elle-même partie du problème. Dans ce contexte, pour répondre à votre demande d’information, j’ai besoin d’en connaître l’objectif.


        • kerkdlac (---.---.117.249) 10 février 2006 17:10

          Je ne comprend pas très bien l’attribut ’moderne’ dont se pare la psychologie, y à t’il une psychologie ancienne et une autre plus actuelle, ou n’y à t’il pas simplement LA psychologie qui étudie des phénomènes psychologiques contemporains simplement différents de ceux que vivaient nos ancêtres ? mais bon qu’importe.

          Quelqu’un en phase de dépression ou de grand questionnement subit un mental désaccordé, perturbé, perturbant et perturbateur, il se dirige souvent vers les ’psy’, psychanalistes, psychologues, psychiatres, ou quelqu’un qui conjuge l’art d’exercer dans 2 ou 3 des ces disciplines. L’impression commune ressentie et vécue par ceux qui se trouvent dans cette situation, est de ’tourner en rond’ dans un cercle qualifié de vicieux et culpabilisateur.

          Mais au final le problème n’est il pas que l’on essaye de soigner, même si ce terme est un peu inadapté, un mental avec les mêmes schémas que ceux dont il se nourrit, ne faudrait t’il pas plus justement sortir du mental ? Car pour mettre un peu de cohérence à un système qui boucle, il faut d’abord en sortir, hors le questionnement sur soi-même, le connais toi, toi même et le fameux ’je pense donc je suis’ cogito ego sum, permettent t’ils vraiment cette sortie ou la rende t’elle justement impossible.

          Et puis ou et quand peut on apprendre se retour vers soi-même, rien n’est sérieusement enseigné à se sujet, et l’enseignement de la philosophie reste très souvent abstrait, déconnecté et surtout inapplicable - apprendre et connaitre les oeuvres de peintres c’est bien, mais de là à manier le pinceau et les couleurs... - Hors hormis dans les domaines qui touchent à la religion et à la spiritualité et encore, ça dépend lesquelles, il n’y à rien, quand encore, dans notre société, cette dimension de l’intériorisation n’est pas tout simplement niée ou suspecte.

          Pourtant cette connaissance - observatrice - de soi même, de ses propres pulsions, interrogations, questionnements, de ses propres conflits internes et de leur déroulement est un fondamental incontournable du façonnage de sa psychée, de l’être derrière l’ego, on y apprend à ne pas ’se faire avoir’ par soi même, à ne pas être le jouet de ses pulsions incontrôlées. On peut apprendre le Chinois, les équations différentielles, le pilotage d’un avion, mais ou peut on apprendre comment connaitre le soi ?

          Malheureusement nous passons notre temps à echapper à tout prix à notre nature profonde (appelons ça ainsi), le jeux, les mondanités et autres occasions de fuites diverses, combien d’opportunitées sont présentent dans notre société moderne, distractions qui étaient bien moins accessibles auparavent. Résultat de celà, lorsque les difficultés frappent, ou lors d’une lourdre perte, pire lorsque l’on atteint le 4eme âge et qu’il ne reste plus rien d’autre que soit même, nu, non préparé, désarmé, désemparé et son ’mental’ 24h su 24, la confrontation devient terrible, insupportable, et l’on ne peut l’atténuer qu’à coups de médications, parce que rien ne nous y à jamais préparé, que la plongée dans cette dimension de l’être n’à jamais été vécue auparavant sereinement.

          L’echec de la psychologie, désolé mais je parlerai aussi psy-chanalyse-chiatrie ne viendrait t’il pas de ce que l’on cherche à guérir le mental plutôt que de guérir du mental ?


          • Serge-André Guay (---.---.149.166) 10 février 2006 20:34

            Merci pour votre commentaire. Quand on parle de la psychologie moderne, on fait référence à la période des années 60 à nos jours qui a vu naître la psychologie « bonbon », populaire. Jusqu’à la fin des années 50, la psychologie avait une approche globale de l’Être incluant plusieurs disciplines de la philosophie à la sociologie en passant par la médecine, la spiritualité,... Au début des années 60, la psychologie, sans doute sous l’influence de sa reconnaissance comme discipline universitaire à part entière, a délaissé cette approche globale au profit de son seul champ d’expertise. Aussi, dans un sens encore plus large, on se réfère à la psychologie moderne à partir du moment de sa constitution en science dont la date varie suivant le sujet abordé. Par exemple, dans le cas de psychanalise « inventée » par Freud, il faut remonter au début du 19è siècle. Avant que la psychologie devienne une science à part entière, isolée des autres, tous les champs de connaissances concernés par l’Homme y étaient impliquées, à commencer par la philosophie. Cette dernière fut évacuée lorsque la psychologie est devenue une spécialité scientifique.

            Quant à savoir si le problème ne viendrait pas « de ce que l’on cherche à guérir le mental plutôt que de guérir du mental », je vous dirai que c’est d’abord de la psychologie qu’il faut guérir. En fait, le « mental » ou ce « qui se fait dans l’esprit seulement, sans expression orale ou écrite » est loin d’être la grande spécialité de la psychologie. Cette dernière travaille, tout comme la psychanalise, avec l’expression orale principalement. Autrement dit, la psychologie imagine ce qui se passe dans la tête des gens à partir de ce qu’ils disent. Bref, ce n’est pas le mental lui-même que la psychologie étudie mais ce que les gens verbalisent. On cherche ensuite à interpréter le dit pour comprendre le non-dit. La marge d’erreur est donc très grande, d’où que l’on parle aujourd’hui de l’échec de la psychologie moderne compte tenu que plus cette science s’est développée, plus les problèmes ont augmenté. En termes imagés, on se demande si les psychologues ne sont pas en train de jeter de l’huile sur le feu et la réponse est positive en plusieurs cas.

            Aussi, vous avez raison de souligner que plusieurs psychologues et patients tournent en rond dans leurs thérapies. C’est ce qui se passe quand on tente de régler un problème sans en avoir les moyens. La psychologie, c’est « l’étude scientifique des phénomènes de l’esprit, de la pensée, caractéristiques de certains êtres vivants chez qui existe une connaissance de leur propre existence ». Or, la psychologie travaille souvent dans le vide parce que très peu de gens ont une connaissance suffisamment développée de leur propre existence pour donner prise à un traitement psychologique. Très peu de gens se connaissent lorsqu’ils entrent dans le cabinet d’un psychologue ou d’un psychiatre. Et plutôt que de s’avouer vaincu d’avance, le spécialiste se lance alors dans un domaine qu’il ne connaît pas : la philosohie. Car c’est bien à la philosophie que revient le développement de la conscience, de la « faculté qu’a l’homme de connaître sa propre réalité et de la juger ».

            Aujourd’hui, la philosophie est si loin des gens que rares sont ceux et celles qui se demandent s’ils se connaissent suffisamment pour affronter les aléas de la vie. La psychologie populaire soutient que la connaissance de soi est déjà là, en chacun de nous, et qu’il suffit de creuser pour la trouver. Il n’y a rien de plus faux en philosophie. Avoir la faculté de se connaître n’implique pas une connaissance automatique de soi, même inconsciente.

            Enfin, à votre question « Où et quand peut-on apprendre ce retour vers soi-même ? », je vous dirai d’abord qu’il est toujours temps de se lancer dans l’aventure. Aussi, je préfère répondre au comment cela est possible. Car pour ce qui est du « où », il faut trouver un philosophe qui soit praticien et qui tienne ainsi un cabinet de consultation. Ils sont très rares mais le nombre augmente d’une année à l’autre, surtout depuis la publication d’un livre sur le sujet par le philosophe Lou Marinoff. Le titre de ce livre varie d’un continent à l’autre. Au Canada, l’édition française est connue sous le titre « Platon, pas Prozac - La philosophie comme remède ». En France, le livre porte différents titres selon l’édition : « Platon au lieu de prozac », « Plus de Platon moins de prozac ». Malheureusement, tous les tirages sont épuisés. Il faut donc se tourner vers les bibliothèques. Je ne sais si le plus récent livre de Lou Marinoff, toujours disponible, « La philosophie c’est la vie », est une reprise de la version originale publiée en l’an 2000. Depuis, l’idée que des philosophes tiennent des cabinets de consultation semble être tombée dans l’oubli en raison du manque d’intérêt des médias. La philosophie ne fait que très rarement la une des médias.

            Pour le moment, celui ou celle qui souhaite mieux se connaître en vue de vaincre la dépression, le mal de vivre ou autres aléas de la vie, doit lui-même prendre en main son étude. Il faut lire. S’enquérir des bases même de la philosophie comme tout bon « consommateur », face à un nouveau produit. Il ne s’agit pas ici de devenir un expert en philosophie mais uniquement son propre philosophe personnel. Pour ce faire, un tour d’horizon de la philosophie suffit. Il faut éviter de tomber dans l’étude « des philosophies » en se limitant à « la philosophie », comme science qui permet d’approfondir un sujet. Il faut chercher à apprendre comment approfondir un sujet, la mécanique même de la pensée philosophique et, plus spécialement, comment ça marche quand on veut se penser soi-même. On trouve d’excellents ouvrages de vulgarisation pour faire un tour d’horizon de la philosophie dans la collection Mémo des Éditions du Seuil et dans la collection Dominos de Flammarion, des livres de moins d’une centaine de pages de lecture aisée.

            Mais attention, il faut bien lire. Toute acquisition de connaissances sera vaine si le lecteur est biaisé par sa pensée, s’il est victime de ce qu’il est convenu d’appeler « distorsions cognitives ». J’en donne la liste la plus connue dans mon livre J’aime penser dont la version numérique (fichier PDF) est gratuite. Il suffit de m’écrire à cette adresse pour en faire la demande : [email protected]. On peut aussi lire le passage de mon livre où cette liste est publiée à cette adresse : http://www.manuscritdepot.com/n.serge-andre-guay.111.pdf.

            C’est cela l’approche philosophique d’un sujet : il faut toujours trouver le point de départ qui permettra vraiment d’approfondir. Dans le cas présent, si l’on veut se penser soi-même, il faut partir de sa propre pensée, vérifier si tout va bien, si l’on peut s’en servir sans être biaisé.

            Permettez-moi, en terminant, de vous mentionner l’origine de cette liste de distorsions cognitives. Elle est au centre d’un « Traitement de la dépression sans aucun produit pharmaceutique mis au point et éprouvé cliniquement par la faculté de médecine de Pennsylvanie » (USA). Et elle est l’oeuvre d’un... psychiatre, comme quoi il y a de l’espoir chez les psy. Il faut dire que les récentes percées des sciences cognitives (de la connaissance et ses processus) ont permis de réunir à nouveau certaines sciences à une même table. Certains psychiatres redécouvrent la philosophie voire en acquièrent une au profit de leur thérapie, mais ce n’est pas encore la norme. Heureuse exception : David D. Burns, psychiatre, auteur de la liste et du traitement en question ici. On peut lire son livre intitulé « Être bien dans sa peau ».

            Personnellement, j’ai limité ma lecture de ce livre aux chapitres présentant cette liste de distorsions cognitives et aux exercices pour reconnaître ces dernières. Car, pour le reste, psychiatrie oblige, on tombe à nouveau dans le travail sur soi caractéristique où le moi devient une montagne, que dis-je, une chaîne de montagnes, à traverser sans plus d’outils. La psychologie et la psychiatrie ont le défaut d’inviter les gens à se concentrer sur soi plutôt que de prendre du recul face à soi-même. Seul le recul permet d’être observateur attentif et de se connaître. Dans l’approche du docteur Burns, le lecteur reconnaît qu’il est victime de distorsions cognitives et il doit se livrer à une lutte de tous les instants pour les corriger, comme de mauvais réflexes. C’est bien mais on reste tout de même en surface du problème ; la cause première est mise de côté. Rien n’empêche l’émergence d’autres distorsions cognitives. Bref, je conseille de lire cette liste de distorsions cognitives pour en prendre « conscience » et d’aller plus avant pour cerner les mécanismes qui les permettent.

            Personnellement, le meilleur moyen que j’ai trouvé pour approfondir à me connaître, outre quelques connaissances de base en philosophie, a été de faire le point sur l’ensemble de mes connnaissances à mon sujet. Le résultat date de l’an 2000 et c’est l’objet de mon livre J’aime penser. Je vous rappelle que la version numérique est gratuite en format PDF en la demandant à cette adresse : info@manuscritdepot,com. Je ne souhaite pas que ce livre vous serve de modèle de mise au point personnel car il revient à chacun de cerner les sujets de la connaissance de soi sur lesquels faire le point.


          • Serge-André Guay (---.---.149.166) 10 février 2006 20:42

            Monsieur, puis-je reprendre votre commentaire sur mon blogue ?


          • Serge-André Guay (---.---.149.166) 11 février 2006 04:18

            J’ai oublié de vous demander si je pouvais reprendre votre message dans notre blogue : http://suicidaire.blogspot.com/

            Serge-André Guay


          • Martin (---.---.158.130) 10 février 2006 17:17

            Pour Mr : « Serge-André Guay Puis-je reprendre votre message ? » Oui !

            Et merci pour vos conseils.....

            Martin


            • Talion (---.---.25.33) 11 février 2006 00:38

              Sujet très intéressant...

              J’ai moi même connu quelques suicidés dans mon entourage et ma famille et il est vrai que ce genre d’évènement fait souvent l’effet d’un « coup de tonnerre dans un ciel bleu » quand il se produit (enfin ça bien sûr c’est le point de vue de l’entourage parce qu’il arrive hélas que l’acte soit prévu de longue date par le suicidé).

              Mon expérience (enfin je parle d’expérience... Je m’en serai volontié passé, mais bon...) me pousse à croire qu’il est vain de chercher des raisons génériques pour lesquelles une personne serait succeptible de mettre fin à ses jours.

              Tout d’abord parce que chaque suicide est différent dans les raisons qui l’ont provoqué... Ensuite parce qu’on ne peut pas visualiser dans leurs totalité toutes les circonstances et évènements ayant conduit au suicide (le premier acteur n’est par ailleurs plus là pour les décrire selon son point de vue)... Et enfin parce que le suicidé garde souvent pour lui les raisons véritables de son suicide si tant est qu’elles soient conscientes (est-ce un acte rationnel ?... La question reste en suspens...)

              Ceci dit, je suis persuadé que la solitude aussi bien sociale qu’affective est un facteur important, de même que l’incapacité à communiquer ses sentiments profonds.

              Pour ce que j’en ai compris, dans certains cas de suicides, un échec ou un problème vécu et analysé par le suicidé de son seul point de vue peut à terme être considéré comme un obstacle insurmontable et dont la mort peut être vue comme la seule porte de sortie encore disponible. Celà doit être d’autant plus vrai que la personne est incapable de communiquer à propos de son problème et qu’elle n’a donc accès à aucun autre point de vue que le sien et qu’il ne peut se sortir seul de cette spirale de l’échec.

              Voilà... C’était le modeste point de vue de quelqu’un qui a vu quelques uns de ses amis et proches mettre fin à leurs jours et qui a chaque fois en est resté les bras balants parce qu’ils ne les auraient jamais imaginé candidats au suicide.

              Je vous garanti qu’après ça on se pose beaucoup de questions...


              • Serge-André Guay (---.---.149.166) 11 février 2006 05:13

                Cher Monsieur Talion,

                Je crois que nous devons tirer leçon de votre commentaire en apprenant à considérer que personne n’est à l’abris d’un problème de santé mentale et qu’il ne faut surtout pas se fier aux apparences. Les personnes les plus souriantes et les plus enjouées peuvent vivre une détesse profonde sans le laisser paraître. IL faut dire qu’il n’est pas de bon usage en notre société d’afficher sa détresse car elle est souvent perçue comme un signe de faiblesse. À mon humble avis, c’est donc moins l’incapacité à communiquer ses sentiments profonds mais la réception négatives des proches qui est en cause. Les gens ont souvent très peur de la confidence, tant chez celui qui souhaite se confier que chez celui qui la recoit. Bref, les conventions sociales, souvent truffées de préjugés, sont rarement propices à la confidence. Toute la question est de savoir à qui je peux me confier sans être jugé, sans qu’on vienne me le remettre sur le nez demain.

                Aussi, la perception des proches se trouve souvent biaisée chez la personne en mal de vivre. On se confiera difficilement, même à son meilleur ami.

                Dans ce contexte, ma stratégie préférée, depuis mon adolescence, est de n’accepter aucune intimité ou jardin secret tant pour moi-même que chez les autres. Il faut être prêt à discuter de tout. Il ne s’agit pas ici de manquer de pudeur et de respect envers l’autre mais plutôt de prouver le bénéfice de la communication ouverte. Ce faisant, seuls des commentaires objectifs peuvent être faits à l’autre. On évite donc ainsi les jugements personnels si redoutés par son interlocuteur.

                Évidemment, tout le monde ne parvient pas à s’ouvrir ainsi, même avec la meilleure volonté. Car j’ai constaté qu’au-delà de la confidence du mal de vivre, souvent émotive et sentimentale, les gens ont bien peu de choses à dire sur eux-mêmes. Ils ne se connaissent pas. Ils ressentent que quelque chose ne va pas mais ils n’en connaissent pas la cause première en eux-mêmes. Ils peuvent souvent identifier l’événement extérieur qui a tout déclenché. Mais ils éprouvent souvent une souffrance additionnelle en constatant qu’ils n’ont pas de prise sur cet événement. En revanche, ils connaissent peu ce sur quoi ils ont prise, c’est-à-dire eux-mêmes, y compris leurs réactions internes.

                Tant et aussi longtemps que tout va bien, ce manque de connaissance de soi ne cause pas de problème. On s’oublie ou on s’apprécie superficiellement et cela suffit à garder le moral. Mais lorsque le mal de vivre frappe, cette fuite de soi-même devient pratiquement impossible. On se sent pris au piège. On cherche une porte de sortie sans la trouver. On finit par envisager la mort comme la solution ultime.

                Bref, je crois qu’en se privant d’une solide connaissance de soi au sens large de l’Être, on se prive d’un outil essentiel pour affronter le mal de vivre tout comme pour aider les autres.

                Serge-André Guay

                P.S. : Puis-je reproduire votre commentaire sur mon blogue Le mal de vivre (http://suicidaire.blogspot.com/) ?


              • Méric de Saint-Cyr Méric de Saint-Cyr 11 février 2006 02:20

                Votre article ne porte son regard que sur la détresse humaine qui aboutit à un suicide en tant qu’acte de désespoir. N’est-ce pas une vision réductrice. Il existe pourtant deux autres aspect visibles et connus du suicide, c’est le suicide social et le suicide collectif. J’exclus -pour des raisons culturelles- le suicide d’honneur qui est surtout propre à la tradition japonaise (entre autres).

                Le suicide social, c’est le fait que la société toute entière se comporte comme un individu mettant tout en œuvre pour aller au casse-pipe. La société écrase l’individu et partant s’écrase elle-même puisque ce sont ces individus qui constitue ladite société. Ne cherchez pas dans la psychologie ou la philosophie les réponses. Elles sont là, devant vos yeux.

                La télévision, la consommation, les supermarchés, la publicité, voilà les principales (il y en a beaucoup d’autres) causes suicidogènes...

                Quand au suicide collectif, on peut l’observer et probablement (en le voulant ou sans le vouloir) y participer QUOTIDIENNEMENT : la pollution des villes provoquée par l’usage egoïste et abusif de la voiture, la consommation effroyable de la cigarette, de l’alcool, l’autodestruction par les mutilations corporelles (piercings, tatouages, colorants chimiques) la « chimiomanie » ou « chimiofolie » (drogue, chimie alimentaire, abus de médicaments). Voilà où sont les racines du suicide, un suicide qui est en train de s’étendre à la planètaire entière (mondialisation ça s’appelle), un venin.

                Tout ça pour dire que si vous voulez lutter contre le suicide, bonne idée, mais c’est une lutte vaine si elle ne se fonde pas d’abord et avant tout sur une remise en cause profonde des valeurs de la société moderne qui à force de privilégier le culte de l’argent, a coupé l’homme de ses racines fondamentale : la nature, l’amour du beau et de la vie.

                Comment peut-on déprimer lorsqu’on « perd » son boulot. C’est tout faux. L’homme n’est pas fait pour travailler. Les chômeurs devraient faire des bons de joie et se moquer de ceux qui bossent... Le travail est un esclavage. Oui je sais, pas de boulot, pas de fric, mais que faites-vous de la liberté reconquise ? Quand on a du temps il y a tant de choses à faire. Moi qui suis sans travail (je ne travaille que deux jours par semaine, je gagne peu et ça me suffit) je trouve que 24 h dans une journée c’est trop court...

                Le travail est un crime contre l’humanité. L’argent est un crime contre l’humanité. Le pire ennemi de l’homme, c’est l’homme. Alors si l’homme veut ne pas se suicider, il faut arrêter le massacre ; Que dis-je, LES massacres : massacre des animaux, massacre de la nature, massacre de nos oreilles, de nos cerveaux (avec les conneries télévisuelles), massacre de nos libertés, de l’air que nous respirons, des arbres, des montagnes et du ciel...


                • Serge-André Guay (---.---.149.166) 11 février 2006 06:43

                  Votre propos est juste si l’on demeure à la surface du problème. Je tenais le même avant de creuser la question. Il y une foule de problèmes que l’on peut aisément pointer du doigt en notre société. Mais le fait est que la « société » n’est pas une personne, pas plus qu’un regrouppement d’individus. En toute logique, on ne peut donc pas inviter la « société » à remettre en cause ses valeurs, à moins de demeurer dans le monde des images. En réalité, la société est un type de « relations » entre des personne ; on recherche la « société » des autres, comme on recherche une relation avec les autres. Ainsi, être en société est un état partagé entre des gens. « La société est l’union des hommes et non les hommes » (Montesquieu).

                  Quand vous écrivez que « La société écrase l’individu et partant s’écrase elle-même puisque ce sont ces individus qui constitue ladite société », vous confondez l’individu avec la relation entre les individus. Il sera plus juste de dire que le problème concerne la détérioration de la relation sociale entre les hommes ou de l’état social lui-même des hommes. Notez ici qu’il est question « de personnes » et « d’hommes », non pas « d’individus ». Car le mot contraire de « individu » est « collectivité ». On ne peut pas définir une collectivité comme un regrouppement d’individus, pas plus que la société d’ailleurs.

                  Tout cela pour vous dire que tout commence par chaque homme et chaque femme. Que ce sont les valeurs communes partagées par les hommes et les femmes en société qui sont en cause.

                  Qu’est-ce qui fait que les choses que vous dénoncez comme néfastes trouvent preneurs parmis les hommes de notre société ? La réponse ne se trouve pas dans la société elle-même mais dans chaque homme et chaque femme impliqués. La solution est dans une prise de conscience de soi et du type de société entretenu avec les autres. On peut toujours accuser la société de tous les maux mais cela ne changera rien. Il faut s’adresser aux êtres impliqués. L’homme ne retrouvera pas ses racines fondamentales en examinant la société sous tous ses angles mais en apprenant à se connaître lui-même, en tant qu’être. C’est ici que la philosophie est utile.

                  Quant à la liberté reconquise à la perte d’un emploi parce que « le travail est un esclavage », sachez que la plupart des cris de liberté individuelle en notre société expriment une attitude antisociale, généralement inconsciente. Dans le cas du travail, par exemple, on veut s’en libérer pour profiter davantage de ce qu’offre la collectivité. Si tous les membres de la collectivité se libéraient du travail, de quelle nourriture profirait l’homme libre ? Au nombre où nous sommes actuellement sur terre, la nature ne saurait suffir à la tâche, ce qu’elle ne fait plus depuis des siècles d’ailleurs, à commencer par la Chine. Votre thèse sur le travail est individualiste et peut être applicable à vous personnellemement mais elle ne tient pas la route dans le contexte social. Il y a là un manque de conscience sociale, de responsabilité envers les autres, qui ne se poserait pas si vous viviez seul sur île. Mais ce n’est pas le cas.

                  Quand les hommes se laissent entraînés à leur perte par la société dans laquelle ils vivent, c’est par manque de conscience face à eux-même et à leur société. Or, de toute l’histoire de l’humanité, seule la philosophie a su éveiller la conscience de l’homme. Tout manque de sagesse doit inspirer un retour à la philosophie.

                  Serge-André Guay


                • Serge-André Guay (---.---.149.166) 11 février 2006 06:44

                  J’ai oublié de vous demandez si vous me donnez la permission de reproduire votre commentaire dans mon blogue Le mal de vivre : http://suicidaire.blogspot.com/

                  Serge-André Guay


                • steph (---.---.207.241) 11 février 2006 15:31

                  Merci pour cette réflexion qui met le doigt sur un problème à mon sens crucial : quelles erreurs cognitives peuvent conduire une personne à désirer la mort et quelle réforme de la pensée devrait-on opérer pour changer la pensée que « mon mal diminuera une fois mort » ? Je ne peux m’empêcher de penser ici aux propos de Platon dans le Phédon et à la manière dont il explique la raison pour laquelle le suicide ne lui semble pas être la meilleure façon de quitter la vie. Il me semble que les remèdes psychologiques ne peuvent suffire à soigner le mal de vivre. Il nous faut aussi nous interroger sur le sens qu’il y a à vivre. Car si le sens de la vie n’est plus que la recherche du plaisir, ce que nous propose massivement le modèle ambiant, pourquoi vivre en effet quand il n’y a plus de plaisir ? Et n’y a-t-il pas par ailleurs de souffrance plus aigue que celle de vivre sans savoir pourquoi ? Une autre question bien sûr qui devrait être abordé est celui du droit à disposer de son corps et de sa vie. Sommes-nous libres de faire ce que l’on veut de notre vie ? Ne sommes-nous pas responsables de ce corps comme nous le serions d’un animal innocent qu’un voisin nous aurait confié pour les vacances ? Il s’agit là mon sens de questions essentielles, dans la mesure où elles engagent bien une réforme de la pensée sur le suicide...


                  • Serge-André Guay (---.---.155.227) 11 février 2006 18:22

                    Merci pour votre commentaire. Vous n’êtes pas sans savoir que l’on trouve différentes opinions sur le suicide et la mort parmi les philosophes, y compris celle de Platon que vous mentionnez. Personnellement, je préfère à ces opinions l’étude de la philosophie elle-même qui permettra, par exemple, d’apprendre comment se faire une opinion de faits cohérente avec ses valeurs profondes, comment approfondir ces dernières,... Bref, en ces temps où tout un chacun a sa propre opinion, je crois qu’il faut prioriser le processus même qui conduit à l’opinion plutôt que de discuter des opinions elles-mêmes. Évidemment, il faut souvent un sujet concret pour rattacher la quête à la réalité mais l’important demeure de ne pas laisser croire que la philosophie se résume à des débats d’opinions. Car, aujourd’hui, l’opinion règne en roi et maître au détriment de la logique et des faits. Plusieurs personnes ne font pas la différence entre « Il est vrai que je pense » et « Ce que je pense est vrai » ; la tendance est à prendre pour vrai tout ce que l’on pense uniquement parce qu’on le pense.

                    Je crois qu’il faut aborder la philosophie comme un mécanicien aborde la mécanique, c’est-à-dire suivre les règles connues de la pensée elle-même. Comprendre comment on pense me semble le principal objectif à atteindre.

                    Appliqué à la recherche d’un sens à la vie, cet objectif concerne la recherche elle-même. Comment partir à la recherche d’un sens à sa vie ? Et la réponse ne saurait provenir des opinions des uns et des autres sur le sujet.

                    Les questions directes telles « Quelle est votre opinion sur le suicide ? » ou « Quel est le sens de la vie ? », accompagnées d’une flopée d’opinions de philosophes, font peur pour me pas dire répugnent les gens, moi le premier. C’est d’ailleurs pourquoi je n’ai pas porté attention à la philosophie à l’école. La philosophie m’intéresse depuis seulement une dizaine d’années et c’est l’étude la pensée scientifique qui m’y a conduit. À l’époque, je cherchais pourquoi, dans ma profession d’alors, le taux de succès ne dépassait pas les 10%. La réponse se trouvait dans les nombreuses erreurs de pensées commises en ma discipline où l’opinion prédominait sur les vérités de faits, même les plus scientifiques. Je voulais savoir comment on fait pour être certain et les limites à s’imposer pour s’en assurer. Il m’a fallut remonter dans le temps, à la naissance même de la pensée scientifique argumentée alors par les philosophes. Comme vous le savez, les premiers scientifiques étaient aussi très souvent des philosophes. J’ai ainsi acquis la certitude que la connaissance des mécanismes de la pensée et de sa propre pensée était l’élément de base de toute acquisation de connaissances. Forcé à prendre le recul nécessaire, j’ai compris l’importance de se connaître pour connaître. Autrement, on demeure souvent biaisé par soi-même. Je crois que c’est excatement ce qui se produit lorsque le mal de vivre frappe. Nous sommes manipulés par nous-mêmes, nos perceptions, nos pensées, les événements, voire la vie elle-même.

                    Personnellement, le seul sens que j’ai trouvé à ma vie est dans le don de soi à l’autre, sous l’inspiration de mes convictions et de mes valeurs les plus profondes.

                    Quant au droit de disposer de son corps et de sa vie, c’est la notion même de droit qui m’irrite le plus, surtout lorsqu’il y a confusion avec la notion de liberté. Je préfère et de loin la notion de « devoir », telle qu’elle se présentait jadis, avant l’arrivée des chartes des droits de toutes sortes. J’ai l’impression que la notion de droit est apparue par défaut, parce que l’Homme ne remplissait pas ses devoirs face à lui-même et aux autres. Il fallait lui donner des droits pour corriger un tant soit peu les problèmes mais l’opération ne fut pas sans distorsion, notamment, en associant ces droits à des libertés. Je préférerais que l’Homme agisse par devoir plutôt que par droits et libertés. Mais cela est impossible parce que la philosophie, lire la « sagesse », fait défaut plus que jamais actuellement.

                    J’aborde donc le soit disant droit de disposer de son corps et de sa vie suivant la logique personnelle suivante : la vie prédominant sur la mort, nous avons le devoir de vivre et, par conséquent, de soigner le mal de vivre. La vie n’est pas libre de mourir, l’Homme ne l’est pas non plus. Introduire la notion de liberté est à mon avis une grave erreur. Je ne crois pas que c’est en raison d’une telle liberté qu’on se donne la mort. C’est plutôt l’aveuglement causé par la souffrance du mal de vivre qui pousse au suicide. Le suicide n’est pas un choix libre mais une conséquence malheureuse d’un aveuglement, comme tant d’autres problèmes humains d’ailleurs.

                    Là où la notion de liberté me semble naturelle, c’est lorsqu’il est question de morale. On dit, par exemple, que l’Homme est libre de faire le bien ou le mal. Certains diront que l’Homme est aussi libre de définir le bien et le mal comme bon lui semble, mais c’est un autre problème, purement intellectuel d’ailleurs et dans lequel je ne souhaite pas m’impliquer parce que les bases de la logique sont souvent... libertaires.

                    Ce n’est que du point de vue moral que l’on se demander si le suicide relève d’une éventuelle liberté de choix entre le bien et le mal. Ici, il n’est plus question d’objectivité, de logique et de vérité de faits mais plutôt de croyances et de devoirs moraux. Et contrairement à la croyance populaire qui associe la liberté à des responsablités, je crois que la liberté de choix implique avant tout des conséquences, surtout en matière de croyances. Selon le choix fait et selon la croyance, il y a telle ou telle conséquence. Si notion de responsabilité il y a, c’est d’être conscient des conséquences de ses choix.

                    Somme toute, on revient toujours à la base en matière de suicide : la conscience d’être qu’implique la connaissance de soi et que procure la philosophie, avec une majuscule.

                    Serge-André Guay


                  • Steph (---.---.207.241) 13 février 2006 13:05

                    Je partage ce que vous dites concernant la nécessité d’aborder la connaissance de l’esprit et de ses mécanismes. C’est là à mon sens la question essentielle que la science se devrait d’élaborer pour permettre à l’homme d’y voir un peu plus clair à la fois sur le sens de sa vie et sur la nécessité ou non d’un engagement éthique. Je suis souvent confrontée à cette question de mes élèves (ils ont entre 17 et 19 ans)concernant la question du suicide. Comment suggérez vous de parler à ces jeunes d’un devoir de respecter la vie et surtout sur quoi fonder un tel respect ?


                    • Serge-André Guay Serge-André Guay 14 février 2006 03:02

                      Merci pour votre commentaire. Si j’avais à aborder la question du suicide sous l’angle du respect de la vie avec des jeunes lycéens, je me garderais tout d’abord d’avancer une opinion. Je situerai la démarche dans le cadre d’un simple exercice de logique. La question principale serait : « Croyez-vous que vos opinions soient objectives et logiques ? ».

                      Notez l’absence d’une allusion au suicide dès le départ. Le sujet principal doit demeurer l’objectivité et la logique. Le suicide sert uniquement de prétexte à l’étude de l’objectivité et de la logique en fondement des opinions. C’est qu’on appelle l’approche indirecte dont on trouve plusieurs exemples dans l’étude de l’inconscient. Elle sert à détourner l’attention de la conscience face au sujet (suicide) pour ainsi pénétrer l’inconscient. On peut alors amener une prise de conscience sans l’interférence des perceptions, des émotions et des sentiments qui éveillent le sujet à la conscience. Ici, le sujet prendra conscience que son opinion sur le suicide manque d’objectivité et de logique.

                      On vous demandera de définir l’objectivité et la logique. Tenez-vous-en aux définitions du dictionnaire, question d’aider l’étudiant à accepter les définitions reconnues plutôt que de réinventer les concepts suivant ses humeurs. Vous pouvez d’abord inviter vos étudiants à dire ce qu’ils croient être l’objectivité et la logique pour ensuite les confronter aux définitions du dictionnaire. Ils doivent comprendre que si chacun en notre société y va de sa propre définition personnelle des choses, on n’ira nulle part. À cet âge-là, on est souvent porté à se fier à ce que l’on pense plutôt que de s’en remettre aux références connues, question de protester.

                      Introduisez ensuite le sujet de l’opinion qui sera à l’étude : le suicide. Chacun devra écrire rapidement ce qu’il pense du suicide. Ne donnez pas plus de 5 à 10 minutes maximun à vos étudiants pour le faire. Une seule phrase peut suffira. Il faut que leurs textes soient spontannés, comme ils ont l’habitude de le faire entre eux lorsqu’ils partagent leurs opinions. Il faut éviter ici qu’ils perçoivent cette courte rédaction comme un exercice au cours duquel il faut impressionner le professeur et les collègues de classe. Pour ce faire, précisez que le texte demeurera personnel ; ils n’ont pas à vous le remettre ou à le partager avec les autres élèves.

                      Le temps est alors venu de définir le suicide objectivement : le suicide est un acte ( une action humaine dans son aspect objectif plutôt que subjectif ). Du point de vue biologique, cet acte consiste à s’enlever la vie. La conséquence bio« logique » est la mort (arrêt complet et irréversible des fonctions vitales entraînant sa destruction progressive (putréfaction)).

                      On amène ensuite les circonstances objectives possibles de la mort : naturelle, accidentelle, subite. Il est important de signaler aux étudiants qu’il n’y aucune autre circonstance possible du point de vue biologique ; une mort est soit naturelle, soit accidentelle, soit subite.

                      Question aux étudiants : « Où peut-on alors classer la mort par suicide (l’action de causer volontairement sa mort (ou de tenter de le faire) ? » Il faut procéder par élimination. La mort résultante d’un suicide n’est pas naturelle ; il y a acte volontaire. Elle n’est pas non plus subite (qui arrive, se produit en très peu de temps, de façon soudaine) ; il y a planification, parfois rapide mais le suicide n’est pas soudain. Reste la mort accidentelle, c’est-à-dire, « qui arrive par hasard » selon la définition populaire. Il faut ici retenir la définition philosophique du mot « accidentel » : non nécessaire. En philosophie, on dira que le suicide relève de l’accident. Cela concorde à l’image voulant que le suicide soit un « accident de parcours », un accident fatale dans ce cas.

                      Pourquoi parler d’accident ? D’abord, parce que tout comme lors d’un accident (de la route, par exemple), on ne contrôle pas les facteurs en cause, en soi et à l’extérieur de soi.

                      Ensuite, parce que la personne suicidaire est dite « malade ». En effet, du point de vue médical, le suicidaire est l’objet d’une modification de la chimie du cerveau et de troubles psychologiques. La personne suicidaire est donc ni plus ni moins que « malade ». Sa mort n’est pas nécessaire et demeure un accident comparée à la mort naturelle et à la mort subite.

                      Du point de vue de la science, la vie fait partie de la « nature », du monde physique. La vie est « naturelle ». Il est donc « naturel » de vivre lorsqu’on a la vie. Pour la science, la vie implique l’équilibre de la nature, d’où l’importance du respect de la vie sous toutes ses formes. Une personne qui lutte pour le respect de l’écologie, lutte pour le respect de la vie, y compris de la vie humaine. Les scientifiques espèrent que nous nous ferons un « devoir » de respecter la vie, la nôtre comme celle des autres, dans l’espoir que nous ne brisions pas l’équilibre naturelle entre la vie et la mort. Le fondement premier du respect de la vie relève de notre participation à l’équilibre de la nature.

                      Cette notion de « devoir » relève, non pas de la science elle-même, mais de la morale (qui concerne les moeurs, les habitudes et surtout les règles de conduite admises et pratiquées dans une société). On trouvera dans la morale plusieurs fondements au devoir de respect de la vie.

                      Cependant, du point de vue logique, la question morale « Est-ce bien ou mal de se donner la mort ? » ne se pose pas parce que le suicidaire n’est pas dans son état « naturel », la vie et la mort ne sont plus en équilibre en lui-même ; il est malade. Il n’a pas le recul utile pour juger de sa situation, pas plus que de la solution qu’il envisage. Il perçoit sa mort comme étant nécessaire alors qu’en réalité, elle sera accidentelle compte tenu de sa maladie. Pareillement, la question du droit à la mort ne se pose pas : « Une personne souffrant du mal de vivre a-t-elle le droit de se donner la mort ? ». Elle peut se donner la mort mais elle n’a pas pas pour autant le droit. On ne peut définir un désir comme un droit ; le désir de mourir n’est pas par définition un droit, pas même « naturel ». Il en va de même du désir de vivre ; c’est un désir et non pas un droit. Dans la « nature », il n’y a de droit du point de vue objectif et logique.

                      Reste maintenant aux élèves à savoir s’ils maintiennent ou non leurs opinions personnelles sur le suicide ( « J’ai écris... Maintenant je pense). Un bel exercice oral.

                      Serge-André Guay

                      http://suicidaire.blogspot.com/


                    • idrissa (---.---.197.226) 14 février 2006 06:14

                      essayer de voir les raisons qui pousse au suicide.voir si ces élements existe dans les pays ou le phenome est quasi nul.etudié leurs cultures,civilisations et leurs specifité.et un peu de courage... Et bravo pour le commentaire en rouge.vraiment et sincerement si ses ces idées avait cours partout l’humanité aurait avancé a pas de géant.merci


                      • Serge-André Guay (---.---.132.194) 16 février 2006 03:03

                        Du courage... ? Oh ! Oui et beaucoup car une telle étude mondiale du suicide demanderait beaucoup de temps. On peut tout de même commencer par le site internet de l’Organisation Mondiale de la Santé qui offre quelques statistiques internationales.

                        http://www.who.int/topics/suicide/fr/

                        Serge-André Guay

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