Survivalisme : interpellations chez les Preppers
Mardi 12 décembre 2023, Igor G. (35 ans), Marc D. (49 ans) et Paul O. (74 ans), trois Preppers belges sont condamnés à cinq années d'emprisonnement assorties d'un sursis partiel par le Tribunal correctionnel d’Anvers. Chef d'inculpation : « ils sont soupçonnés de vouloir créer une forme de rébellion armée contre les autorités, sans qu’un but concret ou un délai n’aient été déterminés ». Le troisième inculpé est condamné à 18 mois de prison avec sursis pour infraction à la loi sur les armes. Le tribunal correctionnel d’Anvers a estimé que les prévenus faisaient partie d’un groupe terroriste visant à opposer une résistance armée à l’autorité, ce que les mis en examen ont toujours nié. Le tribunal a rendu son jugement sur la base d'écoutes téléphoniques et estimé qu’Igor G et Yannick V, décédé lors de son interpellation dans son appartement à Merksem, étaient déterminés à mener une rébellion armée contre l’autorité. Marc D était au courant de ces plans et devait fournir l’appui logistique,
L’enquête avait débuté au mois de juillet 2022 suite au signalement d'un informateur auprès de la Sûreté de l’État. Yannick V, un militant d’extrême droite âgé de 36 ans fomentait une attaque armée contre l’autorité. Le jeune homme exerçant la profession de négociant en métaux précieux était passionné par les armes, le militaria et s'adonnait à la pratique du tir sportif... Le mercredi 28 septembre 2022 six personnes sont interpellées et dix perquisitions diligentées dans les communes de Merksem, Zandvliet, Anvers, Deurne, Berchem, Kasterlee et Gand. Yannick V atteint par plusieurs projectiles lors de l'assaut de l'unité spéciale de la police fédérale belge décède avant l'arrivée de l'ambulance. La zone est bouclée. Le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, déclare lors d'une conférence de presse : « D’après les informations dont je dispose, la police a été la cible de tirs à deux reprises. C’est pourquoi des coups de feu ont été tirés en réplique ».
Lors de leur perquisition à Merksem, les enquêteurs ont découvert une centaine d’armes, plusieurs lots de munitions, tenues de combat, kits de survie, brouilleurs, drones, gilets tactiques, lunettes de vision nocturne, des lunettes de vision thermique ». Le jeudi 29 trois des personnes interpellées sont remises en liberté après leur audition. En ce qui concerne les trois principaux suspects, ceux-ci figuraient sur la liste de l’Organe de Coordination pour l'Analyse de la Menace (OCAM) qui recense une soixantaine d'extrémistes potentiellement violents. « Ces personnes ont été suivies pendant des mois en toute discrétion. (...) En principe, une personne figurant sur la liste des terroristes ne peut pas avoir de permis de port d’arme. Il est possible de déroger à ce principe dans le cadre de l’enquête pour ne pas alarmer le suspect et donc ne pas faire échouer l’enquête » (M. Van Quickenborne).
Le prepparing est une branche du survivalisme apparue aux USA et au Canada pays de grands espaces peu peuplés. Preppare c'est se préparer à affronter n'importe quelle situation dans un environnement dégradé : catastrophes naturelles, polution, pandémie, pillage, agression, cambriolage, home jacking, effondrement de la civilisation, conflit armé, risques NRBC, etc. Pour les Preppers le danger (physique, psychologique, économique, financier) est partout et nulle-part et il faut l'anticiper. Les Preppers s'apprêtent à vivre en autarcie ce qui présuppose d'accumuler : aliments de longue conservation, lait en poudre, packs d'eau, produits d'hygiène, outils, trousse d'urgence, combustible, médicaments, groupe électrogène, carburant, bicyclette, capteurs solaires, élevage, lopin de terre cultivable, biens à troquer (valeur d'usage et valeur d'échange). Les Preppers ont projeté de rester sur place où à proximité de leur stock et craignent le pillage. Sils ont des armes, c'est pour protéger leur famille et leur stock qui pourrait en cas de pénuries susciter bien des convoitises. Certains se rendent à leur travail emportant avec eux un « paquetage d'alerte » dans le coffre de leur véhicule. Si un Prepper est contraint de quitter sa zone, un point de regroupement a été convenu avec les proches et une liste du matériel et documents indispensables à emporter avant de rejoindre un lieu plus sûr et y rester jusqu'au retour à la normale (cette phase peut concerner des expatriés).
Voici une liste des connaissances directes ou indirectes et du matériel à prévoir en circulation chez les Preppers : survie en milieu naturel, urbain, rural, industriel, la santé, préparer le sol, ensemencer, récolter, préparer des conserves, étudier la météorologie, le biotope, l'agriculture, permaculture, pisciculture, renforcement du bâti, élevage, santé, sécurité et sûreté (personnes biens, locaux, approvisionnements), rechargement des munitions, travaux manuels, travail du cuir, couture, entretien des armes, self-défense, petites réparations, conduite d'animaux de bât, rendement des sols, époque des semailles, poste radio, walky-talky, panneaux solaires, etc. Chacun de composer son « menu » selon son profil psychologique et ses craintes. Des années de préparation à la survenue d'un événement qui ne se produira peut-être jamais.
Le prepparing et de la collapsologie avec ses magasins et ses revues spécialisées sont devenus une économie à part entière. Il s'agit souvent d'individus appartenant à des milieux sociaux élevés et qui se laissent influencer par l'alarmisme et le catastrophisme médiatique. Des cadres « écolo-émotifs » fragilisés par un burn-out n'hésitent plus à quitter leur emploi pour une réappropriation fantasmée du retour à la nature en réaction à l'urbanisation, phénomène qui s'est accentué avec la COVID. Les nantis ou des collectifs achètent une fermette, voire un hameau, pour y vivre de leurs nouvelles activités. Si le travail de la terre, l'élevage et la transformation de leurs produits vendus en circuit court sont insuffisants pour assurer leur pitance, ils ou elles proposent des ateliers de « ressourcement » afin de s'assurer un complément de revenu.
Survivre c'est autre chose. C'est savoir se contenter d'une existence spartiate. Un survivaliste est un minimaliste qui entend rester mobile et qui stocke généralement très peu de matériel, seulement l'essentiel afin d'assurer la transition avec la nouvelle situation. Il compte plus sur ses connaissances, les ressources locales, sa préparation physique, psychologique et ses nombreux savoir-faire visant à : se nourrir, se vêtir, s'abriter, se chauffer, se soigner, s'orienter, se défendre, se déplacer pour bivouaquer, pêcher, poser des pièges, chasser, cueillir, glaner, marauder, braconner. Un spécialiste de la survie aura des armes pour la chasse, voire se défendre, mais il ne transportera pas un arsenal d’armes à feu sur le dos. Les survivalistes sont souvent des individus solitaires ou claniques débrouillards et autonomes afin de compenser le manque de matériel et de ressources locales pour affronter la situation et les événements avec confiance.
Yannick V et ses acolytes s'épanchaient sur les réseaux sociaux oubliant une règle essentielle, ne jamais attirer l’attention sur soi ni sur ses activités. L’homme s'y décrivait comme un souverainiste (Le citoyen est Souverain, pas l’État). Ces groupuscules de tous bords qui veulent sortir de la société et du système ont comme dénominateur commun, selon les autorités, le complotisme, ce qui ne signifie pas que tous soient disposés au passage à la lutte armée.
Passer du vagabondage mental à l'acte est « une autre paire de manches »... Ne soyons pas naïf, les réseaux sociaux, Internet, blogs, téléphones et certains magasins ou librairies spécialisés font l'objet d'une surveillance policière. Un simple commentaire ici ou là suffit à trahir l'idéologie d'appartenance de son auteur. Le jour ou il se décidera de passer à l'action sous l'influence, peut-être, d'un agent d'influence ou provocateur, il s'exposera à l'interpellation à la décarrade dans sa « planque ». Très peu d'individus sont formés à la clandestinité, c'est à dire vivre dans un endroit sans laisser trace de son passage et dont les voisins n'ont gardé aucun souvenir, ils sont encore moins nombreux à être familiarisés avec les « règles d'or » ;-)...
Il se disait dans les années soixante qu'il était impossible de monter une équipe sportive sans qu'elle soit infiltrée par les Renseignements Généraux ! Croyez-vous que les temps aient changé ? Les lois d'Orientation et de Programmation pour la Performance de la Sécurité Intérieure (la mouture LOPPSI 3 est en préparation) sont venues renforcer les moyens d'investigation et les pouvoirs policiers. Une correction, une précision, une remarque ?
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