Uber, une machine de guerre contre le droit du travail
UBERISATION. Verbe conçu d’après le nom de la société Uber. Selon l’Obervatoire de l’uberisation, qui propose de l’accompagner, il s’agit d’un « changement rapide des rapports de force grâce au numérique. (...) Au carrefour de l’économie du partage, de l’innovation numérique, de la recherche de compétitivité et de la volonté d’indépendance des Français, ce phénomène est une lame de fond qui va petit à petit impacter tous les secteurs de l’économie traditionnelle des services. »
La logique UberPop
Le 11 février s’est ouvert à Paris le procès contre les patrons de la société Uber France pour son application UberPop de mise en contact d’utilisateurs avec des conducteurs. Sous les apparences de covoiturage, elle permettait l’exercice illégal de la profession de taxi.
Uberpop incarnait à merveille la quintessence de la logique Uber qui n’a pas de salariés, mais paye ses travailleurs à la tâche. Et qui dit zéro salaire, dit zéro cotisation sociale.
La société Uber a été fondée à San Francisco en 2009 par Garrett Camp, Travis Kalanuck et Oscar Salazar sous le nom de UberCab (« SuperTaxi »). Rapidement, elle a eu le soutien de financiers de Wall Street, de Goldman Sachs et de Google, à ce jour le plus grand actionnaire et qui siège au Conseil d’administration.
Machine de guerre
La première chose à souligner c’est qu’Uber n’est pas une simple entreprise, mais une forme radicale de guerre politique et idéologique au profit de ce qu’on a le droit de qualifier d’oligopole bancaire anglo-hollandais. Au lieu d’acheter des hommes politiques, cet oligopole se sert des jeunes entrepreneurs pour imposer des changements politiques.
Comme nous allons le voir, Uber est anglo-hollandaise dans la mesure où les Pays-Bas et les paradis fiscaux britanniques lui sont essentiels.
- D’abord, l’application d’Uber fait en sorte que lorsqu’on règle une course, disons de 20 euros, cet argent arrive directement sur les comptes d’Uber BV, la maison mère installée au Pays-Bas, permettant à « Uber France SAS » de ne payer aucun impôt sur ces bénéfices ;
- De cette somme, la société hollandaise reverse directement 16 euros au chauffeur en France ;
- Sur les 4 euros restants, la même société verse 2 euros (10 %) à Uber France pour des services relationnels « avec les partenaires [les chauffeurs...], de la promotion de la marque, et du support marketing ».
- Enfin, sur les 2 euros restants, la société hollandaise Uber BV verse 1,96 euros à Uber International CV, une holding basée aux Bermudes, paradis fiscal sous juridiction britannique. Dans les faits, Uber International CV, immatriculée à la fois aux Pays-Bas et aux Bermudes, n’est qu’une simple boîte aux lettres n’employant aucun salarié. Rappelons que l’impôt sur les bénéfices est nul aux Bermudes, et de 25 % aux Pays-Bas. Toujours trop élevé au goût d’Uber ! Pour y échapper, Uber BV paye, pour avoir le droit d’utiliser les brevets d’Uber, une gigantesque redevance qui lui permet de réduire à néant ses bénéfices. Du coup, grâce à une niche fiscale, l’impôt d’Uber BV ne dépasse pas 0,25 % du chiffre d’affaires. Bien joué !
- Pour conclure, Uber International CV, réglera à son tour 0,028 centimes de royalties à son associé en nom Leben LCC, enregistré au Delaware (USA), un autre paradis fiscal, mais dont le propriétaire final est Uber Technologies Inc. basé à San Francisco…
Désobéissance civile
- Barack Obama avec son conseiller David Plouffe, actuellement conseiller d’UBER.
Uber se fiche éperdument des lois, des amendes, des procès, des travailleurs et des États. Ça fait plutôt rire. Travis Kalanick, le PDG américain d’Uber, estime que « la désobéissance civile est nécessaire pour défendre les bonnes causes ». Sa mission ? Imposer dans le monde entier son modèle féodal d’emploi sans droit et du « tous indépendants », c’est-à-dire la fin du droit du travail et des Etats-nations modernes. Ses appuis sont multiples et mondiaux.
Et parmi ses conseillers, on peut compter David Plouffe, l’ancien directeur de campagne de Barack Obama, et en France, Emmanuel Macron, l’ancien protégé de Jacques Attali. Initié aux secrets des dieux du temple financier, pour ce dernier :
C’est à la façon dont un pays gère le problème de ses taxis que l’on peut mesurer sa capacité à réformer en profondeur.
Enfin, soulignons qu’Uber, qui ne produit aucune richesse réelle, n’est qu’une vaste bulle financière et qu’elle éclatera sans doute d’ici peu. Car, s’il y a cinq ans, il s’agissait d’une simple application de téléphonie mobile imaginée par deux Californiens lors d’une nuit de beuverie parisienne, aujourd’hui Uber, avec seulement quelques centaines d’employés, est supposé « peser » 40 milliards d’euros, c’est-à-dire autant que le groupe EADS-Airbus !
Êtes-vous prêt à vous faire uberiser ? S’il s’agit pour l’instant des chauffeurs de taxis, demain ce sera le tour aux professeurs, aux pompiers, aux médecins, aux avocats, aux restaurateurs et aux infirmières.
Uber, évidemment n’est que la caricature d’un monde qui s’imposera à nous lorsque nous laissons les nouvelles technologies, dans ce cas-ci le numérique, aux mains de requins de Wall Street et la City. Je crois savoir qu’un certain Jacques Cheminade vous avait mis en garde, non ?
Pour S&P :
- Il faut appliquer la loi Thévenoud qui interdit l’exercice illicite de la profession de taxi et encadre de façon stricte les VTC mis en concurrence depuis 2009 avec les taxi ;
- Il faut obliger Uber à payer des vrais salaires et donc des cotisations sociales ;
- Il faut que toute entreprise paie des impôts dans le pays où est produite la richesse ;
- Il faut que l’Etat investisse dans des transports en commun plus performants.
Pour en discuter : prochain #DALN avec Jacques Cheminade le 25 février à 19h
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