Papy, continue de boomer
Le Papy boom pourrait encore avoir de beaux jours devant lui. Un peu de réflexion, et tout le monde pourrait se retrouver bien plus heureux.

La décennie que l’on appelle le Papy boom, nous y sommes, en plein. Ces travailleurs nés juste après guerre arrivent, ou sont déjà arrivés à une pension bien méritée après de bons et loyaux services. Est-ce pour autant qu’ils sont à mettre au rancard, à la poubelle de nos vies actives ?
Bon pied, bon œil, ces "jeunes-vieux" sont bel et bien prêts à vivre une autre vie. Moins stressante, peut-être, mais non moins passionnante. L’argent, lui, n’a pas disparu, bien au contraire. Il a été épargné (à cette époque, on le faisait encore de gaité de cœur) pour les vieux jours ou, comme diraient les optimistes, pour des jours meilleurs. Le nombre de retraités est en constante augmentation. Cette sénescence devrait en effet aboutir à un recul du taux d"épargne et à un ralentissement de l’économie, prédit UBS Wealth Management Research. Mais dans le même temps, cette dégradation devrait exercer une pression haussière sur les taux d’intérêts réels, conclut cette même société. De nouveaux biens de consommation et des services adaptés seront du nombre des desiderata de nos consommateurs boomeurs.
L’Echo du 14 avril titrait : "6 Belges sur 10 ont moins de 1000 euros de pension". C’est vrai, mais l’épargne personnelle a pris largement le pas sur cette pension légale pour se garantir un niveau de vie tout à fait décent à la retraite. L’épargne-pension, tout d’abord, avec deux travailleurs sur trois, avec de 15 à 20 % du salaire mensuel épargné de façon systématique, avec intérêts à la clé pendant toute une vie, ce n’est pas rien.
Parfois, mis à la retraite prématurément, par des pré-pensions, ils ont la chance de jouir plus tôt encore de la vie sans perdre beaucoup de potentiel financier. Cela va peut-être changer, tous les indicateurs sont au rouge pour la suite de ce côté. Le patronat, l’Etat se prêtent au jeu du passe-muraille dans le "Pacte de solidarité entre les générations" qui pourrait se traduire plus clairement par un compromis bien rétrograde pour le porte-monnaie.
Un rédacteur, sur AgoraVox, titrait un article : "Baby Boomers : les nouveaux boucs émissaires à la mode".
Tout en commençant assez "hard" pour dire que ces "gentils Papy"
avaient dilapidé les richesses de la Terre dans l’insouciance, il nous
rassure en fin de parcours et nous retire cette responsabilité. Mai 68,
le socialisme à outrance et la déroute actuelle dans nos pays ne
devraient donc pas faire partie de nos remords. Le statut de victime
générée et rationnelle suffit.
Ouf. Quelle clairvoyance.
Une pub que nous avons eue pour inciter à voyager "avant qu’il ne soit trop tard" nous contait de manière très humoristique les paroles de "gens d’un certain âge" qui répercutaient celles d’un guide "bien avisé", invitant à monter les 235 marches d’un édifice. La réaction d’aller acheter des cartes postales était dès lors de moins en moins caricaturale.
Ils en veulent, ces jeunes d’un autre âge. Fin novembre, le "Salon Zénith" à Bruxelles faisait salle comble. Ce salon est destiné tous les ans à tous ces jeunes-vieux de plus de cinquante ans. Le commerce battait tous les records.
Je suppose que vous voyez progressivement où je veux en venir.
Beaucoup de créneaux générateurs d’innovations
sont recherchés par les jeunes pour se créer une niche dans la vie. Les
idées généralement prodiguées sont dirigées vers les carrières de
bureau, de l’informatique (la mode a pris faussement un coup de vieux
de ce côté), de la science en général. Mais le côté social, la prise
en charge des gens qui ont, en définitive, moyens et temps, n’a pas
vraiment beaucoup de répondant.
"Time is money" n’a jamais été aussi vrai.
Car, du business, il y a moyen d’en faire, avec cette catégorie de citoyens. C’est sûr.
L’inactivité, l’oisiveté, ce n’est pas recommandé et n’est pas, non plus, souhaité. La télévision a son temps d’antenne qu’il ne faut éterniser. Des moments de la journée plus enrichissants sont à préparer, et une soif à épancher.
Qu’est-il proposé pour ces "gens qui se trouvent plus près du grand trou que du petit d’où ils sont sortis", comme répondait une perspicace vieille dame à un journaliste qui se voulait être positif sur son état de santé ?
Des homes existent, bien sûr. Mais à l’heure actuelle, il faudrait les assigner au quatrième âge plutôt qu’au troisième. La médecine a fait un progrès énorme et la longévité de l’homme n’a fait, et ne fera, que s’allonger. La gériatrie est un mot qu’il ne faudrait pas prononcer de manière trop précoce quand on déborde de santé.
Des peuplades anciennes en transhumance laissaient parfois auparavant leurs vieux en chemin pour ne pas pénaliser le groupe. Nous ne sommes plus au "cimetière des éléphants" dans la genèse de l’homme moderne.
Les
enfants sont là pour subvenir aux besoins et apporter leur soutien. Il
ne faudrait pas cependant considérer qu’ils sont redevables à 100%. Les
accuser d’être sans cœur n’est pas, ou plus, de rigueur quand on constate
le besoin d’apaisement dans une vie trépidante. Trop souvent, la
cassure qui survient lors du passage de la vie active à celle de
pensionné est tellement forte que certains ne lui survivent pas.
Les
sociétés, elles, n’en ont cure, de leur "après". Elles oublient
peut-être un peu vite que les retraités sont de parfaits citoyens
propagateurs de la publicité.
Mais le travail a été rémunéré. Point.
Alors quoi ? Quelles sont les solutions ?
Quelques
voyages en car d’une journée ou de plusieurs dans des endroits choisis
souvent dans un but commercial. De ce côté, on a déjà compris tout ce
qui pouvait en être retiré.
Des associations ou clubs qui se réunissent pour parler souvent des difficultés de ces personnes à "être". Des tables de discussions quand elles existent.
Se garder en forme, voilà une idée primordiale dans l’esprit de ces retraités en mal d’activité. Ils ont aimé s’amuser dans le passé.
Danser, pourquoi pas ? Le problème, c’est que beaucoup d’endroits pour danser sont réservés à la vraie jeunesse. Les musiques et les rythmes qu’on y trouve ne sont pas adaptés à nos papis et mamies.
Du mouvement, les balades s’organisent, c’est vrai, mais elles sont organisées dans les temps morts de gens toujours actifs pendant week-ends et jours fériés.
Des animateurs bénévoles, c’est bien, les autres moments plus creux, en semaine, à meubler aussi, c’est mieux.
L’université du troisième âge est aussi un débouché-débauché pour ceux qui ont encore un peu de répondant du côté chapeau.
Le "CyberPapy" est devenu diablement dynamique. Refaire du sport, visiter les musées et expositions, aller au cinéma et au théâtre, il en a de plus en plus envie. La culture, les voyages lui font déjà les yeux doux. Ces papys ne demandent qu’à être émerveillés par de nouvelles découvertes et aventures.
La Carte S et la SNCB (chemin de fer belge) avec ses tarifs privilégiés vont le leur permettre. L’âge est devenu un atout.
Plus de 50 000 visites mensuelles sur un site plein de dialogues questions-réponses entre jeunes et seniors sur des thématiques diverses comme l’histoire, la géographie et bien d’autres. SeniorPlanet consacre son temps à présenter des articles et dossiers consacrés à la santé, à la beauté, la famille, l’emploi, et bien sûr, aux voyages. La qualité de vie et les loisirs se trouvent sur les sites de vivat,de opladiset du Marché des seniors destinés aux "nouveaux jeunes" de quarante-cinq ans et plus.
Une remarque en passant : trop souvent, les papis et mamies se plaignent de ne pas avoir davantage de visites (quand ils en ont encore) de leurs petits-enfants. J’ai été témoin de la parfaite communion, du partage d’idées qui profitait aux deux types d’interlocuteurs aux antipodes de la vie ; il serait bien mal venu de sauter une occasion de rencontre.
Tout est bon, en fait, pour sortir la personne d’âge mûr de l’enceinte des quatre murs et de la télé envahissante.
Pour cela, il faut de l’offre, beaucoup d’offres et d’horizons divers.
On
prévoit une demande grandissante de nouveaux biens de consommation et
des services adaptés, influencés par les possibilités offertes par l’émergence
de la robotique.
Voilà quelques idées bien simples, bien rémunératrices si l’on veut y accorder le temps et l’investissement.
Tout le monde y gagne : les papis continueront à boomer et les jeunes auront fait le lien avec les aînés avec plus d’entrain que d’habitude, et avec un agent liant bien d’époque : l’argent.
A bon entendeur. Salut.
L’enfoiré,
Citations :
"Etre jeune et riche, c’est indécent. Vieux et riche, au contraire, c’est logique..." Jean-Luc Delarue
"Tout jeune, on pousse. Adulte, on se pousse. Vieux, les autres vous poussent." Jacques Sternberg
"Vieux, moi ? Je peux encore faire l’amour deux fois de suite. Une fois l’hiver, une fois l’été." Alfred Capus
"Il faut devenir vieux de bonne heure pour rester vieux longtemps." Caton l’Ancien
"Quand j’étais jeune, je plaignais les vieux. Maintenant que je suis vieux, ce sont les jeunes que je plains." Jean Rostand
"Avec
le vieillissement de la population et les problèmes d’incontinence qui
y sont liés, les couches troisième âge vont représenter un marché de
plus en plus juteux" Philippe Geluck
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