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Accueil du site > Actualités > Société > Quotas ou compétences ?

Quotas ou compétences ?

C’est reparti, la polémique dans le plus pur style médiatique sur l’imposition de quotas d’étudiants d’origine modeste dans les grandes écoles. Un quota fixé autoritairement à 30pct par notre Ministre de l’Enseignement Supérieur, Valérie Pécresse, également candidate tête de liste aux régionales d’Ile-de-France lors d’un entretien avec Richard Descoings, Directeur de Science Po et auteur à la demande de notre Président d’une étude sur l’enseignement en France. Pourquoi 30 pct plutôt que 35 ou 40 voire 50, mystère ?

Une déclaration qui rappelle celle de Laurent Fabius, alors Premier Ministre, pour fixer le pourcentage d’admis au baccalauréat à 80 pct à l’époque. Ceux qui ont l’occasion de côtoyer les étudiants des grandes et moyennes écoles peuvent témoigner de l’effet d’un tel quota sur la qualité d’expression écrite ou orale des étudiants d’aujourd’hui. Espérons que le "quota" de réussite aux examens du permis de conduire que l’on envisage de passer de 52 à 65 pct (+20 pct) dans le but d’en réduire le cout ne se traduira pas par une baisse équivalente de la qualité de la formation des candidats...

De la même manière que je m’étais interrogé sur la manière d’appliquer dans la pratique le fameux CV anonyme, je me demande comment appliquer en pratique les quotas d’étudiants boursiers puisque c’est ainsi que l’on distingue les étudiants d’origine modeste ?

Car pour entrer dans un école d’ingénieur ou de management, il faut réussir un concours difficile avec différentes épreuves dans différentes matières avec, en principe, une correction à l’aveugle qui interdit aux correcteurs d’être influencés par la connaissance de telle ou telle caractéristique de l’étudiant corrigé, dont le patronyme. L’équivalent du CV anonyme en quelque sorte, si prisé par ailleurs. En plus le concours comporte des épreuves écrites à l’issue desquelles on publie une liste "d’admissibles" suivies d’une épreuve orale à l’issue de laquelle on publie les "admis" définitifs avec une liste d’admis supplémentaires. Chaque candidat présentant plusieurs concours en même temps, ce sont en fin de compte les candidats admis qui décident d’aller dans telle ou telle école en fonction de leurs préférences personnelles, de la localisation de l’école, des possibilités de logement etc. 

Or si l’on veut atteindre les fameux quotas, il va falloir "influencer" la correction en fonction de la connaissance qu’il faudra bien donner au correcteur du fait que tel élève est boursier ou non. Lorsque l’on fera la moyenne des différentes épreuves, faudra-t-il également augmenter la note des boursiers par rapport aux non boursiers si on n’atteint pas le quota ? Même topo aux épreuves orales dans lesquelles la Ministre de l’Enseignement Supérieur, Valérie Pécresse, voit la voie la meilleure pour mesurer " l’intensité et la valeur du parcours" des étudiants de milieux défavorisés, faudra-t-il donner l’information boursier/non boursier aux examinateurs pour qu’ils adaptent leur notation à cette caractéristique ? Et si oui, comment être sur qu’il ne va pas au contraire sous noter la dite copie ?

Attention quand je parle d’adaptation de notation,il ne s’agit pas d’élucubration théorique de ma part. Demandez donc aux correcteurs des épreuves du bac, comment ils arrivent aux 80pct d’admis si ce n’est en rehaussant les notes autoritairement.

Bref, la gestion des concours d’admissions aux écoles risque de tourner très vite au cauchemar pour les organisateurs. Il serait d’ailleurs intéressant que Monsieur Richard Descoings, dise à ses collègues comment il arrive pour l’école qu’il dirige, Sciences Politiques, à respecter lui même le quota de 30 pct.

Bref tout ce ramdam me semble plus ressembler à une campagne médiatique pré-électorale qu’à un objectif pratique à atteindre sans dégrader la qualité des diplômés de nos grandes écoles. Si l’on veut développer à qualité égale, - et c’est tout à fait louable-, le pourcentage d’étudiants de classes modestes dans les écoles sans "magouillage", c’est en donnant à ces élèves en classes préparatoires mais probablement même avant en terminale les possibilités financières de poursuivre de telles études, en rétablissant éventuellement les possibilités d’accueil comme pensionnaire dans les établissements dans lesquels ces classes préparatoires sont localisées.

A signaler également l’existence comme au Lycée Henry IV de classes d’adaptation qui permettent aux élèves issus de terminales et ayant le potentiel d’entrer de plein droit en classes préparatoires, de combler l’écart avec les élèves des classes aisées, écart qui est essentiellement d’ordre culturel. Voila une autre forme d’action pour faciliter l’accès à nos grandes écoles qui me parait mieux à même d’y accroitre la présence d’étudiants de classes peu favorisées à compétences égales qu’un quota difficile à appliquer.

Le problème est sans doute plus compliqué qu’il n’y parait et il ne suffit vraisemblablement pas d’imposer un quota sorti d’un chapeau pour raison électorale pour que ca marche...A suivre.

NB : Dans le cas du permis de conduire, il est prévu pour parvenir à cette croissance du taux de réussite, comme dans le cas du baccalauréat, de " donner des consignes nouvelles aux inspecteurs".....La Conférence des Grandes Ecoles qui a exprimé ses doutes sur la quota de 30 pct d’élèves boursiers dans les grandes écoles n’a peut être pas tort de se méfier !  


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3 réactions à cet article    


  • french_car 18 janvier 2010 10:34

    Plutôt que de quota il faudrait parler d’objectif.
    Effectivement la sélection se fait plus par le milieu que par le porte-monnaie, même s’il peut y avoir corrélation.
    J’ai eu l’occasion ici de dire déjà que les instituteurs n’étaient pas des nababs mais que leurs enfants étaient surreprésentés dans les grandes écoles.
    Sans compter que les enfants de milieu culturellement défavorisés s’autocensurent, ils ne pensent pas que les grandes écoles soient faites pour eux.
    Le milieu est important pour les écoles dites de « management » les examinateurs portant attention à la personnalité autant qu’au niveau scolaire du postulant. C’est beaucoup moins vrai pour ce qui concerne les écoles d’ingénieurs heureusement.

    Les vrais enjeux se trouvent au niveau des collèges, tout se joue avant la fin des années collèges. Le rattrappage avec les « prépas de prépa » style H. IV ou le parrainage d’élèves de Saint Louis par des Mineurs constituent des caches-misères.

    Il faut réformer le collège - et le lycée - afin que chacun y ait sa chance et former les professeurs à la détection des talents et à l’orientation dans le système scolaire.


    • noop noop 18 janvier 2010 11:12

      Cet idée de quotas est absurde et faux-jetonne. C’est toujours la discrimination politique ethnique qui est visée sans le dire. Aujourd’hui en France on dit « quartier populaire » pour désigner les quartiers dont la population est majoritairment d’origine étrangère...

      Richard Descoings a fait une bonne chose, il a fait sauter la prépa à Science-Po, qui si on réfléchit n’a pas lieu d’être et qui creusait effectivement l’inégalité entre riches et pauvres.
      Mais dans le même temps il a fait une bien mauvaise action en réservant des places à un profil de candidat. Profil non explicité évidemment. C’est comme cela qu’il atteint son objectif, en rompant l’égalite des candidats. Une sorte de course du PMU avec handicap pour les « plus fort ».


      • citoyen 18 janvier 2010 11:37

        d’accord avec french car

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