Raoult un peu raide sur le string
Habitué aux grands moulinets verbaux, provocateurs et médiatisés, Eric Raoult s’est déniché un nouveau cheval de bataille : le string. Les apparents, les peu discrets, ceux sur qui l’œil inévitablement se perd : Raoult en a ras la raie. Les nombrils eux aussi sont invités à rentrer le ventre, et les jeans à rehausser leur taille.

« Lors d’une réunion récente au collège de ma ville, nous nous sommes arrêtés plus d’une demi-heure sur la question de savoir ce qu’était une tenue correcte. J’en ai appris plus à ce moment-là sur ce qu’étaient les tenues des jeunes filles de 12-14 ans aujourd’hui quand il fait chaud. Je suis allé devant l’entrée du collège. J’ai pu voir des adolescentes arriver les fesses apparentes et un string derrière leur jeans, d’autres avec un tout petit tee-shirt laissant voir le ventre et quasiment le pubis avec un piercing ! J’ai été choqué. On ne peut pas, dans les écoles de France, être partagé entre d’un côté le voile et, de l’autre, le string. Ces tenues ne seraient même pas permises dans une discothèque ! »
Diantre ! Il vit dangereusement ce Raoult ! Des fesses apparentes, des ventres, presque des pubis, le tout lors d’une réunion dans un collège, ça a de quoi vous tournebouler la tête du plus endurci des députés ! Le maire du Raincy en tout cas n’a pas goûté l’effeuillage et l’a fait savoir. Quand Raoult pense quelque chose, il le pense médiatiquement. Ca va plus loin. Dans les journaux télévisés de 20 heures, sur M6, on a pu voir ainsi quelques plans plongeants sur les décolletés fessiers ou poitrinaires de ces jeunes demoiselles. Les journalistes conviés à enregistrer ces images ont dû être plutôt contents de leur après-midi ! Mais du coup, on a un peu tout mélangé, mettant dans le même sac d’images des petits hauts peu soupçonneux avec des derrières effectivement très à l’air. Or, si Raoult a dénoncé les nombrils, le ventre les fesses, il n’a rien dit des seins, rien dit du balcon, où parfois il y a du monde. Il est comme tout le monde, Raoult, il a ses préférences. Et ses dégoûts.
« Il ne s’agit pas de retourner 30 ans en arrière à l’ordre moral mais, entre le Père "la pudeur" et le Père fouettard, je dis attention. L’attentat à la pudeur et l’incitation à la débauche, ce n’est ni Eric Raoult ni Ségolène Royal qui les ont inventés. C’est inscrit dans le Code pénal, et il faut éviter de les banaliser. Nous sommes une société où il y a une liberté de mœurs pour les majeurs. Pour les mineurs, elle doit être plus encadrée. Il ne faudrait pas que l’autorité parentale se résume à dire aux garçons : "Ne mets pas le feu aux voitures" et aux filles "Ne mets pas le feu ailleurs". Je ne trouve pas normal qu’un garçon accoste une jeune fille de seulement 12 ans pour aller prendre un café... »
Là, pour le coup il va plus loin, l’illuminé de Montfermeil. Ordre moral Père fouettard, attentat à la pudeur, incitation à la débauche, Code pénal... tout ça pour un peu de ficelle très visible et apparemment bien encombrante à un an des présidentielles. La référence à Ségolène Royal est, elle, plus significative, plus mordante, elle veut dire : « Je suis un conservateur et elle aussi ». La Ségolène, on l’imagine mal se désolidariser de l’Eric en proclamant qu’elle est pour le port du string au-dessus du jean, ou en dessous, voire les deux. On l’imagine mal expliquer que les jeunes filles ont le droit, même à douze ans, de s’habiller comme elles veulent, ou plutôt comme la mode le veut. Parce qu’elles le disaient bien sur M6, ces outrageantes gamines : « Nous on achète ce qu’on trouve dans les boutiques. » Et dans les boutiques pour jeunes, il n’y en a que pour les strings, les petits hauts ras-du-nombril, les jeans taille basse, etc. Raoult embarque Ségolène dans son envolée « de villieriste », et sert ainsi son ami Sarkozy. Rien n’est gratuit, rien n’est innocent. Derrière les strings, il y a la famille, les parents, ceux-là mêmes que Ségolène a mis en avant tout en les rappelant à l’ordre, et à leurs devoirs. Bien joué Eric.
Une de ses phrases, par contre, est troublante, quand il déclare qu’il trouve « pas normal qu’un garçon accoste une jeune fille de 12 ans pour aller prendre un café. » Il trouverait plus normal, peut-être, qu’il l’accoste pour aller prendre une chambre ? (Détends-toi, Eric, je plaisante)
« Je demande à ce que des directives soient données aux inspecteurs d’académie et aux chefs d’établissement pour que les règlements intérieurs précisent ce qu’est une tenue correcte. Je souhaite aussi que les parents puissent s’occuper de tous les problèmes de la société. Le CPE et les sans-papiers c’est bien, mais il faut aussi s’occuper des établissements scolaires. Dans une société libérale on ne doit pas avoir des risques de dérapage ou d’incitation. »
Voilà, il propose. Et il devrait proposer plus, même, passer directement à l’uniforme et aux écoles pour garçons d’un côté, et pour filles de l’autre. Non à la mixité ! La mixité, c’est aussi une « incitation » ! Vous noterez quand même que le libéralisme à la Raoult exclut tout risque de dérapage ou d’incitation. Un libéralisme aseptisé, plus blanc que blanc, nickel. Sans provocation, sans tentation, sans imprévisible. Une autoroute, droite, sans tournant, éclairée. Vivante ? On peut se le demander, mais si j’étais vous, je laisserais de côté les élans du cœur ou tout ce qui touche aux sentiments, au désir, aux pulsions. Trop risqué, tout ça, trop glissant.
« La violence en milieu scolaire, ce n’est pas seulement taper les professeurs, c’est aussi un certain nombre d’attouchements ou d’agressions. On n’en parle pas, mais malheureusement ils sont en hausse dans les établissements du Raincy et de façon plus générale, en Seine-Saint-Denis. Les viols et les tournantes ne se passent pas par moins 30° mais surtout quand il fait chaud, et quand un certain nombre de petites jeunes filles ont pu laisser croire des choses. »
La chaleur, un autre coupable, un autre facteur déclenchant. Si vous y ajoutez un bout de ficelle à la naissance d’une raie, alors là, vous aboutissez à la tournante. La délinquance selon Eric Raoult. Son Raincy devenu soudain un lieu de débauche où les professeurs ne peuvent pas résister très longtemps aux tentations offertes par ces jeunes filles aguicheuses. Selon le député, avec un réchauffement de la planète mieux maîtrisé, et des jeunes filles mieux éduquées, il y aurait moins de tournantes en France, enfin en tout cas en Seine-Saint-Denis.
Comme quoi, à la simple vue d’une chute de reins juvénile et sexy, un homme politique cravaté et bien nourri peut se laisser aller à exhiber son programme, sans retenue, sans calcul. Au risque de passer pour un farouche réactionnaire ou un vieux con.
Mais Raoult n’aura que faire de ces critiques, il a encore réussi... un beau raout.
(Citations extraites d’une interview disponible sur le blog d’Eric Raoult)
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