Alors que certains estiment que Le Pen n’a pratiquement rien dit, la première moitié de son interview m’a déjà fait découvrir un chef du Front national dont je ne soupçonnais pas l’existence.
Par son discours sur la Nation et sur le rôle de la Nation, JMLP se positionne comme un idéologue qui redimensionne, au format nains de jardin, tous les autres candidats à la présidence de la République.
En fait, Jean-Marie Le Pen a un projet pour la France, et pour l’avenir de la France, et, à partir de là, son vrai programme peut se résumer en deux objectifs :
1. - oeuvrer à tout ce qui renforce l’homogénéité et la cohésion du pays ;
2. - combattre tout ce qui nuit à l’homogénéité et à la cohésion du pays.
Y compris, bien sûr, combattre ceux des citoyens français, égarés (cosmopolites de gauche comme de droite), qui professent des doctrines négationnistes à l’égard du fait national, ou qui adoptent des attitudes favorisant l’affaiblissement du fait national.
A partir de là, le rôle de président de la République atteint à celui de gardien du Dogme, et des questions comme celles des OGM, de l’entreprise, de la politique énergétique, apparaissent comme marginales, technico-économiques et non plus politiques.
Dans cette optique, même la question du chômage s’avère secondaire. Ce qui ne choque pas si on considére le peu de cas qu’en ont fait Mitterrand et Chirac, après avoir défini la lutte contre le chômage comme la priorité des priorités...
Malheureusement, Le Pen idéologue se heurte à des difficultés de communication : on n’entraîne pas les masses électorales, avec des concepts aussi peu mobilisateurs, (parce que beaucoup trop longs à expliciter), que l’« homogénéité sociétale » et que la « cohésion nationale ».
En outre, faire une campagne sur un niveau aussi élevé alors que tous les autres candidats, de l’extrême gauche trotzkyste au sarkozyme, en passant par l’écologisme, se situent à ras de terre, serait le plus sûr moyen de paraître totalement décalé et incompréhensible.
D’où, chez Le Pen, un discours apparemment « anti-immigrés » et sécuritaire qui est beaucoup plus immédiatement compréhensibles pour l’opinion publique.
Il est, en fait, confronté au même problème que les nonistes de gauche, qui ont utilisé le « plombier polonais » pour faire rejeter un projet de constitution qui ancrait définitivement l’U.E. dans le libéralisme économique.
On pourra néanmoins regretter que JMLP n’ait pas davantage mis l’accent sur cet aspect doctrinal au cours du dernier quart de siècle, car son parti y aurait gagné en unité et en potentiel d’avenir.